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06/06/2019 | FRANCE | N°17/20579

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-2, 06 juin 2019, 17/20579


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-2



ARRÊT AU FOND

DU 06 JUIN 2019



N° 2019/291



Rôle N° RG 17/20579 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBPMB



SA GESTION IMMOBILIERE DE PROVENCE (GIMPRO)

[S] [S] [B]

[H] [Y]

SA ERILIA



C/

SA CREDIT FONCIER DE FRANCE

[G] [E]

[K] [G]



SCP BR & ASSOCIES

SCP [I]



Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX

-EN-PROVENCE



Me Françoise BOULAN de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORECHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



Me Laurent GAY de la SELARL GIRAUD-GAY ET ASSOCIES, avocat au barreau...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-2

ARRÊT AU FOND

DU 06 JUIN 2019

N° 2019/291

Rôle N° RG 17/20579 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBPMB

SA GESTION IMMOBILIERE DE PROVENCE (GIMPRO)

[S] [S] [B]

[H] [Y]

SA ERILIA

C/

SA CREDIT FONCIER DE FRANCE

[G] [E]

[K] [G]

SCP BR & ASSOCIES

SCP [I]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Me Françoise BOULAN de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORECHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Me Laurent GAY de la SELARL GIRAUD-GAY ET ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Layla TEBIEL de la SCP BUVAT-TEBIEL, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE date du 14 Janvier 1994 enregistré sous le numéro de rôle 9309254.

APPELANTS

SA GESTION IMMOBILIERE DE PROVENCE,,

dont le siège social est sis, [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Agnès MARTIN-SANTI, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

Monsieur [S] [S] [B]

né le [Date anniversaire 1] 1941 à [Localité 1]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Agnès MARTIN-SANTI, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

Monsieur [H] [Y]

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Françoise BOULAN de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORECHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté par Me Mathieu BAFFERT, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Pauline BOUGI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

SA ERILIA

anciennement dénomée PROVENCE LOGIS - SA D'HLM agrée par arrêté ministériel du 10 décembre 1958,

dont le siège social est sis, [Adresse 4], prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège

représentée par Me Laurent GAY de la SELARL GIRAUD-GAY et ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

INTIMES

SA CREDIT FONCIER DE FRANCE

immatriculée au R.C.S. de PARIS sous le N° 542 029 848, prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités au siège social sis, [Adresse 5], tenant ses locaux administratifs [Adresse 6],

venant aux droits de la SA ENTENIAL anciennement COMPTOIR DES ENTREPRENEURS, aux termes du traité de fusion conclu le 15 avril 2005 et approuvé par l'assemblée générale extraordinaire du CREDIT FONCIER DE FRANCE du 1er juin 2005 dans lequel ENTENIAL a transmis l'ensemble de son patrimoine.

représentée par Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX-ARNAUD- CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Henri ELALOUF, avocat au barreau de PARIS, plaidant

Maître [G] [K],

mandataire judiciaire, ès-qualités de mandataire liquidateur de la SEM DE L'ETOILE

né le [Date anniversaire 1] 1947 à [Localité 2],

demeurant [Adresse 7]

non représenté

INTERVENANTES FORCEES

La SCP DOUHAIRE-AVAZERI,

représentée par Me [G] [E]

venant aux droits de Me [D], ès-qualités de commissaire à l'exécution du plan de redressement judiciaire de la SEM DE L'ETOILE et de mandataire ad hoc de la SEM DE L'ETOILE

demeurant [Adresse 8]

représenté par Me Layla TEBIEL de la SCP BUVAT-TEBIEL, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

assisté par Me Gilbert ALLEMAND de la SELARL ALLEMAND & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

SCP BR & ASSOCIES

prise en la personne de Me [A] [U] ès qualités de mandataire judiciaire de la SARL GESTION IMMOBILIERE DE PROVENCE

demeurant [Adresse 9]

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Agnès MARTIN-SANTI, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

SCP [I] & ASSOCIES

représentée par Me [C] [I] venant aux droits de Me [K] [G] amené à faire ses droits à la retraite, agissant en sa qualité de liquidateur de la société SEM ETOILE

demeurant [Adresse 7]

non représentée

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Avril 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Anne CHALBOS, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Bernard MESSIAS, Président de chambre

Madame Catherine DURAND, Conseiller

Madame Anne CHALBOS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Juin 2019.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Juin 2019,

Signé par M. Bernard MESSIAS, Président de chambre et Madame Chantal DESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La société d'économie mixte l'Etoile (SEM) a réalisé en 1984 et 1985 des opérations immobilières portant sur la construction à Carnoux et [Localité 3] de logements sociaux commercialisés par lots dans le cadre de ventes à terme à des particuliers éligibles au régime de l'accession sociale à la propriété.

Ces opérations ont été en partie financées par des prêts PAP (prêts pour l'accession à la propriété) aidés par l'Etat, consentis par le Comptoir des entrepreneurs (CDE) et le Crédit foncier de France (CFFCFF).

Lors de chaque vente signée entre la SEM et un accédant, la fraction du prêt PAP correspondant à l'édification du lot vendu était soit transférée à l'accédant, qui devenait alors débiteur du remboursement du prêt à l'égard de la banque par l'effet d'une cession de dette, les échéances du prêt étant collectées par la SEM, soit maintenue à la charge de la SEM qui en restait débitrice auprès de l'organisme prêteur, l'accédant procédant jusqu'au terme du contrat au paiement mensuel d'une fraction du prix de vente entre les mains de la SEM.

La décision de transfert ou de maintien du prêt était prise par le préfet du département et relatée dans l'acte de vente.

Dans les deux cas, la SEM se réservait la propriété du bien vendu jusqu'à complet remboursement du prêt ou du paiement du prix, les droits de l'organisme prêteur étant garantis par une hypothèque sur le bien vendu.

La SEM a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Marseille du 23 octobre 1989, Maître Henri [D] étant désigné en qualité d'administrateur judiciaire avec mission complète et Maître [S] [L] en qualité de représentant des créanciers.

Par jugement du 4 mars 1991 le tribunal de la procédure collective a :

- dit que la SA CDE et la SA CFFCFF ont la qualité de créanciers de la SEM l'Etoile et non [de créanciers] des acquéreurs à terme,

- dit n'y avoir lieu au prononcé de la liquidation judiciaire,

- arrêté le plan de cession de la SEM l'Etoile,

- ordonné la cession de la totalité des actifs au profit de :

- Monsieur [S] [B] et Monsieur [V] [Y], tous deux agissant pour le compte de la SA Gestion immobilière de Provence (Gimpro) actuellement en cours d'immatriculation (sous réserve de solidarité dans les engagements),

- la SA d'HLM Provence logis,

moyennant le prix de 60 millions de francs affecté à hauteur de 27 millions pour les immeubles et 33 millions pour les autres actifs.

Le CDE et le CFFCFF ont relevé appel de ce jugement.

Par arrêt avant dire droit du 7 novembre 1991, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a jugé que les sommes dues par les acquéreurs à terme et représentatives du remboursement des PAP dont le transfert avait été constaté par les actes authentiques de vente faisant foi jusqu'à inscription de faux, constituaient des créances du CFFCFF et du CDE (aux droits duquel vient le CFFCFF) et que dans la mesure où elles avaient été payées à compter de l'ouverture du redressement judiciaire entre les mains de l'administrateur judiciaire ou de tout autre mandataire, y compris le cessionnaire retenu à compter de la location-gérance, ceux-ci auraient la charge de les rembourser au CFFCFF ou au CDE. La cour invitait en conséquence les repreneurs à déposer une nouvelle offre tenant compte de la réduction du périmètre des actifs cédés.

Par arrêt du 19 décembre 1991, la cour a réformé certaines dispositions du jugement du 4 mars 1991 et fixé les conditions de la cession en retenant notamment comme cessionnaire :

- Monsieur [B], Monsieur [Y] et la SA d'HLM Provence logis avec faculté de se substituer ladite SA d'HLM pour la reprise des appartements terminés, locatifs ou en stock, y compris les garages, et la SA Gimpro à créer conformément aux statuts annexés au rapport de l'administrateur, pour la reprise des actifs autres que ceux ci-avant énumérés et pour l'exécution de tout ou partie des contrats dont la cession est ordonnée, étant précisé que Messieurs [B] et [Y], la SA d'HLM Provence logis et la SA Gimpro seront solidairement tenus d'exécuter les obligations du plan, le prix de cession étant ramené à 31 millions de francs.

La société Gimpro ayant perçu des sommes versées par les accédants en vertu d'actes de ventes mentionnant un transfert du prêt PAP, le CDE aux droits duquel vient le CFFCFF a fait assigner les repreneurs devant le tribunal de commerce de Marseille aux fins d'obtenir leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 4 978 884,52 francs outre intérêts correspondant à la somme détenue par la société Gimpro en vertu des prêts PAP arrêtés à la date du 28 février 1992.

La société Gimpro s'opposait à la demande, faisant notamment valoir que certains des actes de vente à terme étaient entachés d'un vice, en ce qu'ils constataient une autorisation de transfert du prêt PAP au profit des acquéreurs alors que la décision du préfet était une décision de maintien au profit de la SEM.

Par jugement du 14 janvier 1994 le tribunal de commerce de Marseille a fait droit à la demande du CDE, retenant que les sommes encaissées au titre des prêts PAP revenaient au CDE en vertu des dispositions de l'arrêt du 7 novembre 1991, que la solidarité entre les 4 défendeurs découlait de l'arrêt du 19 décembre 1991 et qu'en l'absence d'inscription de faux la société Gimpro ne pouvait se prévaloir des vices affectant selon elle les actes de vente quant au transfert des prêts PAP aux acquéreurs.

La SA d'HLM Provence logis, Monsieur [B], Monsieur [Y] et la SA Gimpro ont interjeté appel de ce jugement.

La société Gimpro a formé devant la cour d'appel cinq inscriptions de faux contre des actes de vente à terme intervenus entre la SEM et des accédants, faisant valoir que ces actes constataient une autorisation de transfert de prêt PAP au profit des acquéreurs alors que le préfet avait au contraire autorisé le maintien du prêt au profit de la venderesse.

Par arrêt du 11 juin 1998, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a :

- déclaré recevables tant les appels que les inscriptions de faux et la demande reconventionnelle de la société Gimpro,

- dit que les cinq contrats argués de faux contiennent de fausses mentions en ce qu'ils constatent d'une part une autorisation de transfert de prêt PAP au profit des acquéreurs alors qu'il s'agit d'autorisation de maintien au profit de la venderesse, d'autre part que le prix de vente avait été soldé alors que celui-ci n'était destiné à être soldé qu'au terme du contrat,

- ordonné dans cette mesure la rectification des actes attaqués,

- sursis à statuer sur la demande du CDE, la demande reconventionnelle de la société Gimpro et les demandes annexes jusqu'à l'aboutissement d'une instance en révision de l'arrêt du 7 novembre 1991,

- enjoint à la société Gimpro de fournir le détail de la somme réclamée au titre des contrats résolus.

La cour a par ailleurs rejeté une demande en remboursement de frais et en dommages et intérêts formée par la société Provence logis contre la société Gimpro et Messieurs [B] et [Y], dont le tribunal de commerce de Marseille s'était dessaisi au profit de la cour par jugement du 15 février 1996.

Le pourvoi formé contre cet arrêt a été rejeté par la Cour de Cassation le 23 janvier 2001.

Le recours en révision contre l'arrêt du 7 novembre 1991 a donné lieu aux décisions suivantes :

- arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 14 mai 2002, cassé par arrêt de la Cour de Cassation du 12 décembre 2004 renvoyant la cause devant la cour d'appel de Lyon,

- arrêt mixte de la cour d'appel de Lyon du 17 décembre 2009, ayant :

- dit que les sommes dues par les acquéreurs à terme et représentatives du remboursement des prêts PAP dont le transfert a été à tort constaté par les cinq actes authentiques de vente rectifiés judiciairement constituent des créances de la SEM,

- dit que les sommes dues par les acquéreurs à terme et représentatives du remboursement des prêts PAP dont le transfert a été régulièrement constaté par 22 actes authentiques de vente constituent des créances du CFFCFF et que dans la mesure où elles ont été payées à compter de l'ouverture du redressement judiciaire entre les mains de l'administrateur judiciaire ou de tout autre mandataire, ceux-ci auront la charge de les rembourser au CFFCFF,

- dit que la reconnaissance par les parties que tous les autres actes authentiques litigieux sont affectés de la même erreur relative au transfert du PAP alors qu'il s'agissait d'un maintien du prêt au bénéfice de la SEM, vaut nécessairement reconnaissance que les sommes versées par les acquéreurs constituent des créances personnelles de la SEM,

- dit que les sommes correspondant au remboursement des prêts PAP afférents aux 5 actes de vente rectifiés judiciairement et aux autres actes de vente, considérés d'un commun accord par les parties comme ayant fait à tort l'objet d'un transfert, payées par les acquéreurs à terme après le 27 octobre 1989 et perçues tant par le CFFCFF que le cessionnaire doivent être versées entre les mains de Maître [E] ès qualités à charge pour lui de les répartir conformément aux dispositions de la loi du 25 janvier 1985,

- dit que le CFFCFF doit consentir à la radiation des inscriptions d'hypothèques afférentes à ces actes,

- avant dire droit sur le montant des demandes en paiement formées par Maître [E] ès qualités, invité les parties à établir le décompte des sommes devant lui revenir et renvoyé l'affaire à une audience ultérieure,

- sur leurs demandes en paiement réciproques, dit que le CFFCFF et la société Gimpro doivent reprendre l'instance engagée devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence suspendue par l'arrêt du 11 juin 1998 de sursis à statuer,

cet arrêt ayant fait l'objet d'une cassation partielle par arrêt du 8 mars 2011, uniquement en ce qu'il a dit que le Crédit foncier de France devra consentir à la radiation d'inscriptions d'hypothèques,

- arrêt de la cour d'appel de Lyon du 8 mars 2012 (instance n°11/02788) déclarant Gimpro irrecevable en ses demandes de radiation d'inscriptions d'hypothèques, le pourvoi formé contre cet arrêt a été déclaré irrecevable le 10 février 2015,

- arrêt de la cour d'appel de Lyon du 8 mars 2012 (instance n°05/02402), ayant fait l'objet d'une cassation partielle par arrêt du 10 février 2015,

- en dernier lieu, arrêt de la cour d'appel de Lyon du 13 septembre 2018 sur renvoi de l'arrêt de cassation du 10 février 2015, statuant principalement sur le compte à opérer entre la société Gimpro et la procédure collective de la SEM, ayant notamment :

- dit n'y avoir lieu à expertise,

- condamné la SA Gimpro à verser à la SCP [E] [H] en ses qualités de commissaire à l'exécution du plan et de mandataire ad'hoc de la SEM l'Etoile la somme de 5355847,65 € outre intérêts au taux légal à compter du 17 avril 2001 avec capitalisation annuelle.

Cet arrêt a fait l'objet d'un nouveau pourvoi formé par la société Gimpro.

Entre temps la présente instance a fait l'objet d'un arrêt de radiation du 17 janvier 2013 et d'un réenrôlement le 9 novembre 2017.

La société Gimpro a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce d'Aix-en-Provence du 8 novembre 2018 désignant la SCP BR associés en qualité de mandataire judiciaire.

Par conclusions déposées et notifiées le 20 mars 2019, Monsieur [S] [B] et la société Gimpro demandent à la cour, vu les dispositions de l'article 6 de la CEDH et celles des articles 15 et 16 du code de procédure civile de :

- écarter des débats les dernières conclusions du CFFCFF, de la SCP [E] [H], de [L] en raison de leur tardiveté,

- en tous cas, les débouter de toutes leurs demandes contre les concluants,

Sous réserve du pourvoi en cassation de Gimpro contre l'arrêt du 13 septembre 2018, vu les décisions de justice citées dans l'exposé des faits et notamment l'arrêt du 13 septembre 2018,

- recevoir les concluants en leur appel en le déclarant régulier,

- dire et juger qu'il est fondé, en conséquence réformer le jugement dont appel,

- constater que le CFFCFF n'est pas créancier de Gimpro mais que ses débiteurs étaient les acheteurs à terme, ayant acquis des logements auprès de la SEM l'Etoile, en vertu de 21 contrats de vente non entachés de faux, comme jugé par la cour de céans le 7 novembre 1991,

- dire et juger que la créance alléguée par le CFFCFF est inférieure aux sommes consignées en 1994 puis séquestrées judiciairement auprès de l'Etude [D] en 2000, conformément aux décisions du premier président de 1996 et 2000,

- dire et juger que le CFFCFF doit recouvrer ces sommes non pas auprès de Gimpro qui ne les détient plus mais auprès de la SCP Douhaire [H] conformément à l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 13 septembre 2018,

- dire et juger que tout excédent entre la créance du CFFCFF et le séquestre judiciaire, laquelle ne saurait porter intérêts contre Gimpro dès lors que celle-ci a consigné, dès 1994, plus que le montant des sommes échues, dues par les acheteurs à terme, doit être porté au crédit de Gimpro selon un décompte à établir contradictoirement entre les parties dans les trois mois du prononcé de l'arrêt,

- débouter le CFFCFF de toutes ses demandes, formées à tort contre Gimpro et le renvoyer à former celles-ci auprès de la SCP [E] [H], détentrice des sommes qu'il revendique, sauf à mettre en jeu la garantie de son assureur responsabilité civile si les fonds ont été dilapidés par H. [D],

- dire et juger que le plan de cession de l'entreprise SEM l'Etoile a été exécuté dès le 4 juillet 1992,

- dire et juger que la réalisation de la cession a mis fin au plan de cession,

- dire et juger en toutes hypothèses que la solidarité des repreneurs ne s'étendait pas aux contrats de vente à terme,

- en conséquence, statuant à nouveau, dire et juger que ni [S] [B], ni [H] [Y], ni [L], ne sont solidaires de Gimpro au-delà de la réalisation de la cession intervenue le 4 juillet 1992 par le paiement du prix de cession,

- débouter la SCP Douhaire [H] et le CFFCFF de leur demande de solidarité et [L] de sa demande de garantie,

- condamner la SCP [E] [H] et le CFF in solidumCFF in solidum à payer une indemnité de 10000 € à Gimpro en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions déposées et notifiées le 8 mars 2019, Monsieur [H] [Y] demande à la cour de :

- recevoir Monsieur [Y] en son appel, le déclarer bien fondé,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné solidairement Monsieur [H] [Y] au bénéfice du CFFCFF,

- dire et juger que les sommes aujourd'hui revendiquées par le CFFCFF n'étaient pas incluses dans le plan de cession homologué par la cour le 19 décembre 1991,

- dire et juger que la solidarité prévue par l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 19 décembre 1991 ne s'étend pas à l'exécution d'engagements résultant du mandat tacite ou tout autre contrat ou quasi contrat confié par le CFFCFF et Maître [D] à la société Gimpro postérieurement au prononcé de l'arrêt du 19 décembre 1991,

- débouter le CFFCFF de toutes ses demandes dirigées contre Monsieur [Y],

- condamner la CFFCFF à verser à Monsieur [Y] la somme de 50000 € à titre de dommages et intérêts et celle de 10000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de la SELARL Lexavoué Aix-en-Provence,

- à titre subsidiaire, dire et juger que Gimpro devra relever et garantir [H] [Y] de toute condamnation prononcée contre lui.

Par conclusions déposées et notifiées le 20 mars 2019, la société Erilia venant aux droits de la société Provence logis demande à la cour de :

- à titre principal,

- réformer le jugement du tribunal de commerce de Marseille du 14 janvier 1994 en ce qu'il a condamné solidairement la société d'HLM Provence logis aux côtés des autres repreneurs à verser au Comptoir des entrepreneurs (aujourd'hui Crédit foncier de France) la somme en principal de 4 978 834,52 francs outre intérêts, article 700 et dépens,

- dire qu'il ne saurait y avoir aucune solidarité entre la société Erilia, anciennement dénommée Provence logis, et la société Gimpro, Messieurs [B] et [Y] quant au remboursement des sommes correspondant aux remboursements des 21 prêts PAP transférés, visés par le Crédit foncier de France dans ses écritures,

- débouter le CFFCFF de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions, telles que dirigées à l'encontre de la société Erilia, anciennement dénommée Provence logis,

- à titre subsidiaire,

- constater que la société Erilia, anciennement dénommée Provence logis, n'a jamais perçu la moindre somme correspondant aux remboursements des 21 prêts PAP transférés visés par le CFFCFF dans ses écritures,

- constater que seule la société Gimpro a perçu des sommes correspondant aux remboursements des 21 prêts PAP transférés, visés par le CFFCFF dans ses écritures,

- condamner Gimpro à relever et garantir la SA Erilia de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge,

- à titre infiniment subsidiaire,

- constater que l'ensemble des contrats de prêts ayant été intégralement exécutés, aucune solidarité n'a plus lieu d'être entre la société Erilia et la société Gimpro,

- dire que la société Gimpro devra relever et garantir la société Erilia anciennement Provence logis de toute éventuelle condamnation prononcée contre elle,

- ordonner l'admission au passif de la société Gimpro de la créance déclarée par la SA Erilia pour la somme de 1 193 575,48 € avec intérêts légaux à compter du 11 juin 1993 et capitalisation des intérêts ou en toute hypothèse pour la somme à laquelle la SA Erilia se verrait condamnée,

- en tout état de cause,

- condamner le Crédit foncier de France ou tout succombant à verser à la société Erilia la somme de 20000 € au profit de Maître Laurent Gay qui y aura pourvu sur son affirmation de droit.

Par conclusions déposées et notifiées le 22 mars 2019, le Crédit foncier de France venant aux droits de la société Entenial anciennement dénommée Comptoir des entrepreneurs demande à la cour, vu les articles 122, 238, 480 et 500 du code de procédure civile, vu l'arrêt du 11 juin 1998 de la cour d'appel de céans, vu l'arrêt du 17 décembre 2009 de la cour d'appel de Lyon, vu l'arrêt du 8 mars 2012 de la cour d'appel de Lyon (RG 05/02402), vu les articles 1134, 1153-1, 1154, 1184, 1238, 1239, 1351, 1382 du code civil, vu l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 13 septembre 2018, de :

- révoquer l'ordonnance de clôture prononcée le 21 mars 2019 et admettre les présentes écritures,

- sur la demande du Crédit foncier à l'encontre de la société Gimpro, dire que la créance du Crédit foncier doit être admise au passif de la société Gimpro conformément à sa déclaration de créance du 10 janvier 2019,

- ordonner l'admission au passif de la société Gimpro de la créance déclarée par le Crédit foncier pour la somme de 1 178 692,35 € outre la capitalisation des intérêts au taux légal à compter du 11 juin 1993,

- s'agissant de Messieurs [B], [Y] et de la société Erilia, eu égard à la solidarité retenue par l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 19 décembre 1991 et de tous engagements visés, condamner solidairement Messieurs [B] et [Y] ainsi que la société Erilia au paiement d'une somme de 1 178 692,35 € avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance du 11 juin 1993 et capitalisation des intérêts,

- en tout état de cause, condamner solidairement la société Gimpro, Messieurs [B] et [Y] ainsi que la société Erilia au paiement au profit du Crédit foncier d'une somme de 10000 € pour procédure abusive ainsi que 10000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP Ermeneux Arnaud Cauchi & associés en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées et notifiées le 5 février 2019, la SCP [E] [H], intervenante forcée, représentée par Maître [G] [E], venant aux droits de Maître [D] pris en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SEM de l'Etoile et de mandataire ad hoc de la SEM de l'Etoile demande à la cour, vu l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 13 septembre 2018, vu les dispositions de l'article L621-63 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi de 1985,

- donner acte au concluant ès qualités de ce qu'aucune demande de condamnation n'est formulée à son encontre,

- confirmer le jugement dont appel avec solidarité des co-cessionnaires dans la condamnation,

- donner acte au concluant de ce qu'il s'en rapporte à justice sur le quantum des condamnations,

- condamner les parties succombantes aux dépens.

Par conclusions déposées et notifiées le 20 mars 2019, la SCP BR associés, prise en la personne de Maître [N], assignée en intervention forcée en qualité de mandataire judiciaire de la société Gimpro demande à la cour de lui donner acte de ce qu'elle n'a pas d'observation ni demande à formuler dans le présent litige soumis à la cour, de débouter tout concluant de toute demande formée contre la concluante et de condamner tout autre que la concluante aux dépens de l'appel, dont distraction au profit de la SCP Badie Simon-Thibaud Juston.

La SCP [I], mission conduite par Maître [C] [I], venant aux droits de Maître [K] [G] ayant fait valoir ses droits à la retraite, pris en qualité de liquidateur de la société SEM l'Etoile, a été citée le 13 novembre 2018 par dépôt de l'acte à l'étude et n'a pas constitué avocat.

Suivant avis communiqué le 27 mars 2019 le ministère public déclare demander l'application de la loi et s'en rapporter à la décision de la cour.

La clôture de la procédure, initialement fixée au 21 mars 2019, a été reportée au 3 avril 2019 avant les débats.

MOTIFS :

La clôture de la procédure ayant été reportée au 3 avril 2019, il n'y a pas lieu d'écarter des débats les dernières conclusions notifiées par le CFFCFF, la SCP [E] [H] et la société Erilia, comme le demandent Monsieur [B] et la société Gimpro, ces derniers ayant eux-mêmes conclu en dernier lieu le 20 mars 2019 et disposé du temps nécessaire pour répliquer aux écritures adverses.

Sur la créance du Crédit foncier de France :

Il a été définitivement jugé par l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 17 décembre 2009 que 'les sommes dues par les acquéreurs à terme et représentatives du remboursement des prêts PAP dont le transfert a été régulièrement constaté par 22 actes authentiques de vente (en réalité 21) constituent des créances du CFFCFF et que dans la mesure où elles ont été payées à compter de l'ouverture du redressement judiciaire entre les mains de l'administrateur judiciaire ou de tout autre mandataire, ceux-ci auront la charge de les rembourser au CFFCFF.'

La société Gimpro ne conteste pas avoir perçu des acquéreurs à terme les sommes correspondant au remboursement des prêts PAP qui leurs avaient été régulièrement transférés.

Elle confirme d'ailleurs dans ses écritures avoir reçu en 1992 de Maître [D] une somme globale de 4978884,52 € au titre de sommes encaissées par lui auprès d'acheteurs à terme (sans que soit faite à l'époque la distinction entre les prêts réellement transférés et ceux dont le transfert avait été constaté à tort par des actes comportant des mentions erronées sur ce point), affirmant également qu'elle devait encaisser les paiements effectués par les acheteurs à terme et les reverser au CDE, ce qui avait été, selon elle, suspendu par l'ordonnance de référé du 14 mars 1994 ordonnant consignation.

La reconnaissance, par la société Gimpro, de ce qu'elle percevait les versements mensuels des divers acquéreurs à terme au moyen d'un prêt PAP sans les reverser au CDE ressort également explicitement des termes d'une convention de séquestre signée le 24 avril 1995 entre Monsieur [B], la société Gimpro et Monsieur [H] [Y], produite par ce dernier.

La créance de remboursement du CFFCFF est donc fondée dans son principe.

Les sommes réclamées par le CFFCFF concernent 20 contrats de vente à terme, à l'exclusion d'un contrat Bracaloni ayant fait l'objet d'une résolution judiciaire.

S'agissant des 13 contrats parvenus à terme dont la liste est produite, la banque calcule ce que les accédants, qui ont été titrés par la société Gimpro, ont dû verser a minima à cette société, à partir du tableau d'amortissement initial et en tenant compte de la baisse de taux survenue en 1998, après avoir déduit, le cas échéant, toutes les sommes directement perçues par le CFFCFF au titre des versements effectués par la SEM, par la CAF (APL), ou par l'assurance de groupe souscrite par elle.

Le décompte ainsi établi fait apparaître une somme totale de 767491,29 €.

S'agissant des 7 contrats de vente à terme ayant fait l'objet d'un remboursement anticipé par les accédants, identifiés grâce à un courrier envoyé par le notaire de la société Gimpro, Maître [S], à la banque Worms le 14 décembre 1999, le CFFCFF sollicite en premier lieu la restitution de la somme totale de 209725,79 € correspondant au total des sommes versées par les accédants au titre du remboursement anticipé, montant résultant du relevé annexé du courrier précité.

Le CFFCFF souligne à juste titre que si ces fonds ont été versés à tort par la société Gimpro à la SEM l'Etoile le 14 décembre 1999, ce paiement n'est pas libératoire puisqu'en application de l'article 1239 ancien du code civil, 'le payement doit être fait au créancier ou à quelqu'un ayant pouvoir de lui ou qui soit autorisé par justice ou par la loi à recevoir pour lui', ce qui n'était pas le cas de la SEM l'Etoile.

La banque sollicite en outre au titre de ces 7 contrats les sommes perçues par la société Gimpro au titre des échéances antérieures au remboursement anticipé, calculées à partir des mêmes éléments que ceux retenus pour les 13 contrats parvenus à terme, pour un montant total de 201475,27 €.

Le CFFCFF a pu valablement établir le décompte des sommes dues en considérant que si la société Gimpro avait titré les accédants, c'est qu'ils s'étaient acquittés de la totalité des sommes qu'ils devaient.

La banque ayant tenu dès l'origine, pour chaque lot financé par un prêt PAP, un compte informatisé retraçant tout l'historique du prêt, faisant notamment apparaître toutes les sommes perçues directement par le CFFCFF, et versant aux débats un exemplaire de relevé détaillé pour chaque type de contrat, les décomptes établis apparaissent suffisamment probants et seront entérinés, les autres parties ne formulant au demeurant aucune contestation sur ces décomptes.

La créance ainsi déterminée pour un montant total de 1 178 692,35 € ne saurait toutefois porter intérêts à compter du 11 juin 1993, date de l'assignation introductive d'instance devant le tribunal de commerce de Marseille puisqu'elle résulte d'une actualisation opérée par le CFFCFF, la créance invoquée à ce jour étant majoritairement constituée de sommes qui n'étaient pas encore échues et pas encore perçues par la société Gimpro à cette date, les listings produits par la banque faisant apparaître des versements effectués au titre de contrats parvenus à terme entre 1997 et 2003 et au titre de remboursements anticipés intervenus entre 1995 et 1999.

La somme de 4 978 884,52 francs soit 759026,05 € réclamée en première instance était d'autre part majoritairement constituée de sommes perçues par la société Gimpro au titre de 116 contrats faisant mention à tort d'une décision de transfert de prêt PAP, qui ne sont plus réclamées par le CFFCFF dans le cadre de la présente instance.

Il n'est justifié par ailleurs d'aucun événement, antérieur à l'ouverture de la procédure collective de la société Gimpro, permettant de faire courir les intérêts sur la somme totale de 1178692,35 €.

Sur l'incidence de la consignation versée par la société Gimpro :

Le jugement dont appel, rendu le 14 janvier 1994 par le tribunal de commerce, ayant condamné solidairement la SA d'HLM Provence logis, Monsieur [B], Monsieur [Y] et la SA Gimpro à payer au CDE la somme de 4 978 834,52 francs outre 3125,09 francs de frais de commandement était assorti de l'exécution provisoire.

Par ordonnance de référé du 14 mars 1994 versée aux débats, le magistrat délégué par le premier président de la cour d'appel, saisi d'une demande d'arrêt de l'exécution provisoire, a ordonné la consignation par les appelants entre les mains du CFFCFF de la somme de 5 000 000 francs.

Suivant récépissé dressé par la Caisse des dépôts et consignations le 18 octobre 1996 et versé aux débats, le CFFCFF a reversé à ladite caisse la somme de 5 000 000 € ainsi consignée augmentée des intérêts au taux de 3%, soit une somme totale de 5 391 697,26 francs et ce en exécution d'une nouvelle ordonnance rendue le 2 septembre 1996 par le magistrat délégué par le premier président de la cour d'appel.

Par ordonnance de référé du 17 avril 2000, le magistrat délégué par le premier président a dit que la Caisse des dépôts et consignations devra remettre la somme de 5 000 000 francs avec intérêts courus depuis l'origine jusqu'au jour du virement à Maître [D], pris en sa qualité de séquestre judiciaire des prêts PAP et maintenu le taux de rémunération des fonds ainsi séquestrés à 3%.

Selon attestation établie par Maître [D] le 6 juillet 2000 et versée aux débats, ce dernier a reçu à ce titre de la Caisse des dépôts et consignations le 20 juin 2000 une somme de 5 888 107,83 francs (soit 897636,25 €).

Contrairement à ce que soutiennent Monsieur [B] et la société Gimpro, la consignation ainsi effectuée à titre conservatoire en exécution d'une ordonnance d'aménagement de l'exécution provisoire n'a pas d'autre effet que d'arrêter la poursuite de l'exécution et de constituer une garantie de paiement au profit du créancier. Elle n'équivaut pas à un paiement et n'emporte pas transfert de la propriété des fonds consignés au profit du créancier et encore moins au profit du séquestre.

La cour doit en conséquence statuer sur la demande du CFFCFF sans tenir compte de la consignation intervenue, qui n'est qu'une garantie d'exécution et permet seulement au créancier de se prévaloir de l'affectation spéciale et du droit de préférence prévus par les dispositions de l'article 2350 du code civil.

La créance du CFFCFF sera en conséquence fixée au passif de la procédure collective de la société Gimpro pour un montant de 1 178 692,35 €.

D'autre part, et contrairement à ce que soutient le CFFCFF, la somme consignée dans le cadre de l'appel du jugement du 14 janvier 1994 ne peut être affectée qu'à la garantie des condamnations intervenant dans le cadre de la présente instance, ainsi que précisé dans l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 13 septembre 2018 qui énonce :

'La consignation de 5 000 000 francs ordonnée en 1994 correspondait à la garantie offerte par la société Gimpro pour obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire d'une condamnation prononcée notamment à son encontre par le tribunal de commerce de Marseille le 14 janvier 1994 au bénéfice du CDE aux droits duquel vient le CFFCFF.

Cette somme comme les intérêts ayant couru sur cette consignation ne reviennent pas à la SEM, Maître [D] ne l'ayant reçu qu'en qualité de séquestre judiciaire, mais doivent garantir le CFFCFF dans le cadre d'un litige l'opposant encore à la société Gimpro, la cour d'appel d'Aix-en-Provence ayant sursis à statuer le 11 juin 1998 sur l'appel formé contre la décision du 14 janvier 1994.'

Les ordonnances de changement de séquestre intervenues en 1996 et 2000 n'ont pas eu pour effet de modifier la nature et la destination de cette consignation.

Les fonds consignés augmentés des intérêts au taux de 3% seront en conséquence déconsignés au profit du CFFCFF et affectés au paiement de sa créance selon un compte à établir entre les parties, l'excédent étant reversé à la société Gimpro.

Sur la demande de condamnation solidaire de Messieurs [B] et [Y] et de la SA Erilia :

Le jugement dont appel a retenu que la société Gimpro, Monsieur [B], Monsieur [Y] et la société Provence logis (devenue Erilia) étaient solidairement tenus au remboursement de la créance du CDE (aux droits duquel vient le CFFCFF) conformément aux dispositions de l'arrêt du 19 décembre 1991 statuant sur le plan de cession de la SEM.

C'est à tort que le CFFCFF soutient que la cour aurait déjà tranché sur ce point dans son arrêt du 11 juin 1998 en déclarant recevable mais mal fondée la demande de la société Provence logis.

La lecture de cet arrêt ne fait ressortir aucune discussion, dans les motifs, sur la solidarité pouvant exister entre la société Gimpro, Monsieur [B], Monsieur [Y] et la société Provence logis et aucun chef de dispositif s'y rapportant.

Il a été définitivement statué sur le plan de cession de la SEM l'Etoile par arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 19 décembre 1991.

Cette décision n'a pas été affectée par la procédure de révision de l'arrêt du 7 novembre 1991 puisque toutes les créances de remboursement de prêts PAP, considérées comme n'étant pas des créances de la SEM, sont exclues du périmètre du plan de cession.

L'arrêt du 19 décembre 1991 'fixe comme suit les conditions de la cession :

- biens cédés : la totalité des actifs corporels, incorporels, mobiliers et immobiliers, y compris les créances, stocks, travaux en cours, trésorerie et comptes clients de la SEM l'Etoile,

- cessionnaires : Monsieur [S] [B], Monsieur [V] [Y] et la SA d'HLM Provence logis, avec faculté de se substituer ladite SA d'HLM pour la reprise des appartements terminés, locatifs ou en stock, y compris les garages, et la SA Gimpro, à créer conformément aux statuts annexés au rapport de l'administrateur, pour la reprise des actifs autres que ceux ci-avant énumérés et pour l'exécution de tout ou partie des contrats dont la cession est ordonnée, étant précisé que Messieurs [B] et [Y], la SA d'HLM Provence logis et la SA Gimpro seront solidairement tenus d'exécuter les obligations du plan,

- contrats dont la cession est ordonnée : tous les contrats d'assurance, de vente à terme y compris celui de la SCI Les Blacassins du 29 mars 1985, de bail des immeubles du secteur locatif en cours au jour de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, lesquels seront exécutés aux conditions en vigueur audit jour,

- (...)'

L'acte de cession a été signé les 30 juin et 6 juillet 1992 entre Maître [D], d'une part, agissant en qualité d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la SEM l'Etoile, d'une part, la société Gimpro et la société Provence logis d'autre part.

Il ressort ainsi expressément de la décision arrêtant le plan que Messieurs [B] et [Y], la SA d'HLM Provence logis et la SA Gimpro sont solidairement tenus d'exécuter les obligations du plan.

La créance de restitution détenue par le CFFCFF contre la société Gimpro ne peut cependant s'analyser comme résultant d'une obligation du plan.

En effet, les créances directes du CDE, aux droits duquel vient le CFFCFF, contre les acquéreurs à terme ne sont pas incluses dans le périmètre du plan et il n'est justifié d'aucun mandat de gestion confié par le CDE à la SEM pour percevoir les remboursements des prêts PAP transférés.

Le plan de cession qui détaille les contrats cédés ne mentionne aucune cession de mandat de gestion liant la SEM au CDE.

Le CFFCFF mentionne dans ses écritures que la SEM, puis Gimpro, ont recouvré les échéances de remboursement des prêts PAP auprès des accédants en vertu d'un mandat de gestion rémunéré.

Il n'est produit aucune pièce justificative concernant ce contrat, qui en tout état de cause ne figure pas dans la liste des contrats cédés dans le cadre du plan.

En conséquence, l'encaissement et le reversement, par la société Gimpro, des sommes remboursées par les acquéreurs à terme au titre des prêts PAP transférés ne constituent pas des obligations du plan et la rétention indue, par Gimpro, de ces sommes au préjudice du CFFCFF ne saurait engager solidairement Messieurs [B] et [Y] ou la société Erilia anciennement Provence logis.

Le jugement entrepris sera réformé sur ce point.

Sur les demandes accessoires :

Le CFFCFF sera débouté de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive formée contre la société Gimpro, Messieurs [B] et [Y] et la société Erilia en l'absence de toute démonstration d'une faute et d'un préjudice en résultant, alors que les appels interjetés à l'encontre du jugement du 14 janvier 1994 se révèlent au moins partiellement fondés.

Monsieur [Y] sera également débouté de sa demande en dommages et intérêts dirigée contre le CFFCFF, faute de démontrer que l'exercice, par le CFFCFF, de son droit d'agir en justice aurait dégénéré en abus.

Le CFFCFF succombant en ses prétentions dirigées contre Messieurs [B] et [Y] et la société Erilia, il sera fait masse des dépens dont la charge sera partagée par moitié entre la société Gimpro et le CFFCFF.

Le CFFCFF sera également condamné à verser à Monsieur [Y] et à la société Erilia une somme de 3000 € chacun en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, tandis que la société Gimpro sera condamnée à payer au Crédit foncier de France une somme de 5000 € sur le même fondement, les autres demandes présentées à ce titre étant rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par défaut,

Vu l'ordonnance de révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 3 avril 2019 avant les débats,

Dit n'y avoir lieu d'écarter des débats les dernières conclusions notifiées par le CFFCFF, la SCP [E] [H] et la société Erilia,

Infirme le jugement rendu le 14 janvier 1994 par le tribunal de commerce de Marseille en ce qu'il a condamné solidairement la société d'HLM Provence logis, Monsieur [S] [B], Monsieur [V] [Y] et la SA Gimpro Gestion immobilière de Provence à payer au Comptoir des entrepreneurs à titre principal la somme de 4978834,52 francs arrêtée au 28 février 1992 outre les intérêts de droit sur cette somme à compter du 5 août 1992, la somme de 3125,09 francs représentant les frais de commandement de payer du 3 décembre 1992 et celle de 50000 francs au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens,

Statuant à nouveau :

Fixe la créance du Crédit foncier de France à l'encontre de la société Gestion immobilière de Provence (Gimpro) en redressement judiciaire à la somme de 1 178 692,35 €,

Déboute le Crédit foncier de France de sa demande au titre des intérêts capitalisés à compter du 11 juin 1993,

Dit que la somme de 5 000 000 francs consignée en exécution de l'ordonnance de référé rendue par le premier président de cette cour le 14 mars 1994 augmentée des intérêts courus au taux de 3% constitue la garantie de la créance du Crédit foncier de France à l'encontre de la société Gestion immobilière de Provence (Gimpro),

Dit que ces fonds seront en conséquence déconsignés au profit du Crédit foncier de France et affectés au paiement de sa créance selon un compte à établir entre les parties, l'excédent étant, le cas échéant, reversé à la société Gimpro,

Dit que la créance du Crédit foncier de France à l'encontre de la société Gimpro ne résulte pas d'une obligation du plan de cession de la SEM l'Etoile,

Déboute le Crédit foncier de France de ses demandes à l'encontre de Messieurs [B] et [Y] et de la société Erilia,

Déboute le Crédit foncier de France et Monsieur [Y] de leurs demandes respectives en dommages et intérêts,

Condamne le Crédit foncier de France à verser à Monsieur [Y] et à la société Erilia une somme de 3000 € chacun en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Gimpro à payer au Crédit foncier de France la somme de 5000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les autres demandes formées à ce titre,

Fait masse des dépens qui seront supportés pour une moitié par le Crédit foncier de France et pour l'autre moitié par la société Gimpro, ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-2
Numéro d'arrêt : 17/20579
Date de la décision : 06/06/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8A, arrêt n°17/20579 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-06;17.20579 ?
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