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22/05/2019 | FRANCE | N°17/02035

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 2-4, 22 mai 2019, 17/02035


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4



ARRÊT AU FOND

DU 22 MAI 2019

J-B.C.

N° 2019/184











Rôle N° 17/02035 - N° Portalis DBVB-V-B7B-76UW







[P] [F]





C/



[I] [R]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Charles ABECASSIS



Me Sophie DEBETTE











Décision déférée

à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 12 Janvier 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 14/01292.





APPELANT



Monsieur [P] [F]

né le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 1] ([Localité 1])

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]



représenté et assisté par Me ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4

ARRÊT AU FOND

DU 22 MAI 2019

J-B.C.

N° 2019/184

Rôle N° 17/02035 - N° Portalis DBVB-V-B7B-76UW

[P] [F]

C/

[I] [R]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Charles ABECASSIS

Me Sophie DEBETTE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 12 Janvier 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 14/01292.

APPELANT

Monsieur [P] [F]

né le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 1] ([Localité 1])

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]

représenté et assisté par Me Charles ABECASSIS, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

Madame [I] [R]

née le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 2] ([Localité 2]),

demeurant [Adresse 2]

représentée et assistée par Me Sophie DEBETTE, avocat au barreau de GRASSE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 06 Mars 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, M. Jean-Baptiste COLOMBANI, Premier président de chambre , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Jean-Baptiste COLOMBANI, Premier président de chambre

Mme Annie RENOU, Conseiller

Mme Annaick LE GOFF, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Mai 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Mai 2019,

Signé par M. Jean-Baptiste COLOMBANI, Premier président de chambre et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par acte en date du 14 décembre 2009, Mme [R] a procédé à l'acquisition d'un bien immobilier en viager situé à GRAVESON.

M. [F] soutient avoir, dans le cadre de cette acquisition, avancé les fonds nécessaires à Mme [R] qui était alors sa compagne en finançant l'acompte, le bouquet, puis les rentes mensuelles jusqu'au mois de février 2013,

M. [F] souhaitant se voir restituer les sommes qu'il affirmait avoir prêtées à Mme [R] a, par acte d'huissier en date du 24 février 2014, donné assignation à celle-ci devant le Tribunal de grande instance de GRASSE.

Au terme de ses dernières écritures, il demandait, sous le régime de l'exécution provisoire :

-le débouté pur et simple de Mme [R] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- qu'il soit constaté, dit et jugé qu'il avait avancé pour le compte de Mme [R] la somme de 208.9806 afin de lui permettre l'acquisition d'une maison en viager,

- qu'il soit dit et jugé qu'à la libération de la maison par la crédirentière, Mme [R] avait violé la volonté des parties en ne l'avisant pas afin de lui rendre les fonds avancés pour l'acquisition de ce bien,

- qu'il soit dit et jugé que contrairement aux accords des parties et à son obligation de bonne foi, Mme [R] avait caché le décès de la crédirentière à M. [F] avec lequel elle avait cessé toute communication à compter de cette date,

- la condamnation en conséquence de Mme [R] à lui payer la somme de 208.980€ au titre du remboursement des sommes dont il s'était acquitté pour le compte de Mme [R] outre les intérêts au taux légal depuis la date de remise des fonds à la requise,

- la condamnation de Mme [R] à lui payer la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts outre la somme de 5.000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre les dépens avec bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Mme [R], au terme de ses dernières écritures, demandait :

-qu'il soit constaté que M. [F] ne rapportait pas la preuve de l'existence d'un prêt,

-qu'il soit constaté au contraire que les sommes versées sur le compte bancaire de Mme [R] l'avaient été à titre de don manuel,

-le débouté de M. [F] de sa demande en remboursement de la somme de 180,000€ et de sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 30.000€,

-sa condamnation à titre reconventionnel au paiement de la somme de 10.000€ à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

-sa condamnation au paiement de la somme de 5.000€sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile outre les dépens

Par jugement en date du 12 janvier 2017 le tribunal a :

Débouté M. [P] [F] de ses demandes dirigées à l'encontre de Mme [I] [R] ;

Débouté Mme [I] [R] de sa demande de dommages et intérêts dirigée pour procédure abusive ;

Condamné M. [P] [F] à verser à Mme [I] [R] une somme de 2.500€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Le tribunal a considéré :

Que M. [F] ne rapportait pas la preuve de ce que les sommes avaient été remises à mme [R] dans le cadre d'un prêt.

Que le possesseur qui soutient avoir reçu des fonds à titre de don manuel bénéficie d'une présomption d'intention libérale

Que dans mail adressé par M. [F] à M. [V] le 4 octobre 2009, il indiquait « j'ai aussi fait pour [B] le nécessaire pour qu 'elle soit tranquille pour l'avenir et tout doit se terminer début décembre», exprimant ainsi une intention de doter Mme [R], qui justifie d'une situation patrimoniale personnelle fragile,.

M. [F] a fait appel de cette décision.

Au terme de ses dernières écritures du 21 avril 2017 auxquelles il est renvoyé en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un complet exposé de ses moyens et prétentions, il demande à la cour de :

CONSTATER que Monsieur [P] [F] a avancé pour le compte de Madame [B] [R] la somme de 28.680 euros au titre des deux premières annuités de la rente viagère, d'acompte et de provision pour le Notaire ;

CONSTATER que Monsieur [P] [F] a avancé pour le compte de Madame [B] [R] la somme de 159.300 euros à la signature de l'acte réitéré pour lui permettre l'acquisition de la maison à GRAVESON ;

CONSTATER que Monsieur [P] [F] a avancé pour le compte de Madame [B] [R] la somme de 1.980 euros au titre des rentes viagères courant de janvier 2012 à février 2013 ;

CONSTATER que le versement de ces sommes par Monsieur [F], relatifs à l'acquisition de la propriété de GRAVESON par Madame [R], constitue une créance entre concubins;

CONSTATER que le versement de ces sommes par Monsieur [F] constitue une dépense excessive hors le champ normal des dépenses de la vie courante du couple ;

CONSTATER que le versement de ces sommes par Monsieur [F] constitue son appauvrissement et corrélativement l'enrichissement de Madame [F] en l'absence de cause du flux patrimonial ;

CONSTATER que Madame [R], aux termes des nombreux courriels échangés, a reconnu devoir les sommes susvisées à Monsieur [F] ;

En conséquence,

REFORMER purement et simplement le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Grasse le 12 janvier 2017 en toutes ses dispositions ;

DIRE ET JUGER que Monsieur [F] est bien fondé à solliciter le remboursement de l'intégralité des sommes qu'il a prêtées à Madame [R] ;

CONDAMNER Madame [R] à payer à Monsieur [F] la somme totale de 195.960 euros à titre de remboursement des sommes versées pour permettre l'acquisition de la maison à GRAVESON, outre intérêts au taux légal, depuis la date de remise des fonds à la requise ;

CONDAMNER Madame [B] [R] à verser à Monsieur [P] [F] une somme de 30.000 euros à titre de justes dommages et intérêts ;

CONDAMNER Madame [B] [R] à verser à Monsieur [P] [F] la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNER Madame [B] [R] aux entiers dépens, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Il soutient à l'appui de ses prétentions:

Qu'il s'était pu proposer par un ami agent immobilier l'achat d'un bien en viager qu'il envisageait d'acquérir comme pied à terre. Que Mme [R] qui s'était chargé de l'opération lui avait indiqué vouloir acquérir seule ce bien.

Qu'il lui avait avancé les fonds pour régler deux annuités puis le bouquet sans pouvoir moralement solliciter la rédaction d'un écrit.

Qu'ayant par la suite appris la mort de la crédirentière il avait sans succès sollicité le remboursement des sommes prêtées à Mme [R].

Il maintient qu'il a avancé les fonds à sa compagne pour lui permettre d'acquérir le bien immobilier en viager, à charge pour elle de rendre les fonds payés pour son compte par Monsieur [F], au moment où le bien en viager serait libéré par la crédirentière.

Qu'eu égard à la relation amoureuse entretenue par les parties, il se trouvait dans l'impossibilité morale de solliciter un écrit constatant le prêt à Madame [R],

Que conformément à l'article 1300 du Code Civil, le versement des sommes par Monsieur [F] à Madame [R] constitue un enrichissement injustifié.

Que l'enrichissement de Madame [R] est constitué par le bénéfice qu'elle a tiré du financement de l'acquisition qu'elle a faite en son nom propre pour une demeure à GRAVESON, estimée aujourd'hui à près de 400.000 euros.

Que corrélativement, l'appauvrissement de Monsieur [F] est constitué par les versements qu'il a effectués pour un total de 195.960 euros à Madame [R], finançant ainsi l'intégralité de son acquisition immobilière.

Qu'il est aisé de démontrer l'absence de cause de ce flux patrimonial dès lors qu'il participait normalement aux dépenses de la vie courante.

Il souligne que le premier juge a fait une mauvaise appréciation des faits de la cause évoquant une séparation en 2009 alors que la relation a perduré jusqu'en 2012.

Que plusieurs courriels de Mme [R] attestent de ce que les sommes versées devaient être remboursées :

Ainsi le 4 mars 2012 elle écrivait «Si tu ne payes pas le viager tu perds TOUT c'est à dire 210.000 euros une traite non payée ca revient complètement a Madame [U]. C'est 600 euros par mois, tous les 5 du mois»

Le 10 avril 2012 elle écrivait également «Et quand j'ai fini ça je pourrai te donner une partie du Viager je dis une partie parce que je pense que ca ne va pas durer longtemps, pour toi je suis en train de faire une enquête ca va très mal, sa santé... Moi je dis encore quelques mois. [P] tu peux me croire je te les donnerai je suis fier de te dire je deviens super raisonnable je fait très attention et je suis fier de te dire que je te les rendrai parce que je veux rester amie avec toi je veux même rester proche de toi.»

Au terme des ses écritures signifiées le 20 avril 2017 Mme [R] demande à la cour de :

Confirmer en toutes ses dispositions la décision dont appel,

Débouter Monsieur [F] de l'ensemble de ses demandes, qui ne sont justifiées ni au titre d'un prêt, d'une avance, d'une créance, ou d'un enrichissement sans cause,

Le condamner à titre reconventionnel au paiement d'une somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Le condamner en tous les dépens.

Elle fait valoir au soutien de ses prétentions :

Qu'elle a vécu maritalement pendant 15 ans avec Monsieur [F] .

Qu'en 2009 celui-ci lui a fait savoir qu'il ne souhaitait plus poursuivre leur relation.

Que Monsieur [F] ayant vendu la maison qu'il possédait à ST REMY DE PROVENCE, lui a viré la somme de 159.300 € afin qu'elle procède seule à l'achat d'une maison en viager pour assurer son avenir.

Qu'il n'a jamais été question d'un prêt entre Madame [R] et Monsieur [F], dès lors que ce dernier savait qu'il laissait Madame [R] sans emploi et sans argent, et qu'elle était dans l'incapacité totale de rembourser un quelconque prêt.

Que c'est avec une intention libérale que cette somme a été virée sur son compte .

Que la remise d'une somme ne suffit pas à établir l'existence d'un contrat de prêt.

Que le possesseur de fonds qui prétend les avoir reçus en don manuel bénéficie d'une présomption, et qu'il appartient à la partie adverse de rapporter la preuve de l'absence d'un tel don.

Que Monsieur [P] [F] écrivait le 4 octobre 2009 à Monsieur [O] [V], son associé, dans les termes suivants:

" Cher [O],

Vous êtes bientôt sur le retour, et j'espère que votre séjour s'est bien passé.

J'ai vendu la maison de ST REMY assez rapidement et au prix que je demandais.

J'ai aussi fait pour [B] le nécessaire pour qu 'elle soit tranquille pour l'avenir, et tout doit se terminer début décembre.»

Que le simple fait de vivre en concubinage ne plaçait pas M. [F] dans l'impossibilité morale de solliciter un écrit.

Que le courriel dont se prévaut M. [F] concerne une autre demande d'un prêt de 2.200 euros.

Que le demandeur qui n'apporte pas la preuve du contrat de prêt, qui constitue l'unique fondement de son action principale en remboursement, ne peut être admis à pallier sa carence dans l'administration d'une telle preuve par l'exercice d'une action fondée sur l'enrichissement sans cause.

Elle précise que M. [F] n'établit pas avoir versé en sus des 159.300 € qui correspondent aux frais d'achat, aux honoraires d'agence, au dépôt de garantie, et aux provisions sur frais la somme de 28.680 € dont il réclame le remboursement à Madame [R].

SUR QUOI

SUR LA DEMANDE PRINCIPALE :

M. [P] [F] indique a titre principal qu'il a fait l'avance à Mme [B] [R] des sommes nécessaires à l'acquisition du bien en viager en versant un acompte de 28.680 euros puis le paiement du bouquet et des frais à hauteur de 159.300 euros et enfin les rentes viagères annuelles courant de janvier 2012 à février 2013, soit près de 14 mois à 570 euros, soit 7.980 euros le tout représentant 195.960 euros

Cette remise de fonds n'est pas contestée par Mme [B] [R] pour la fraction de 159.300 euros et elle est d'ailleurs justifié par un relevé de compte.

Il n'en est pas de même de l'acompte de 28.680 euros dont Mme [B] [R] ne reconnaît pas formellement qu'il a été versé par M. [P] [F] . Celui-ci produit un échange de mail et un chèque de 30.000 dollars établi au nom de Mme [B] [R] mais la preuve de l'encaissement de ce chèque n'est pas rapportée. et qui n'est pas justifié par un document comptable.

S'agissant des rentes M. [P] [F] produit ses relevés de compte du 12 décembre 2010 au 15 janvier 2015 dont il résulte qu'il a régulièrement versé à Mme [R] des sommes plus importantes que les 7.980 euros qu'il réclame.

Il est donc justifié du versement des sommes de 159.300 euros et 7.980 euros.

La simple remise de fonds ne justifie cependant pas de l'obligation de restituer et c'est à M. [P] [F] de démontrer qu'il a remis ces fonds à Mme [B] [R] à charge pour elle de les lui rendre au décès de la crédit rentière.

Aux termes de l'article 1359 du code civil «L'acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un montant fixé par décret ( 1.500 euros) doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique.

M. [P] [F] invoque l'impossibilité morale dans laquelle il se serait trouvé de réclamer à Mme [B] [R] un écrit pour justifier du fait que les sommes qu'il lui versait constituaient un prêt qu'elle s'engageait à rembourser.

Le simple fait que les parties vivent en concubinage ne saurait à lui seul justifier de cet empêchement et M. [P] [F] ne précise pas quels éléments particuliers justifiaient qu'il accepte de verser à Mme [B] [R] des sommes très importantes sans avoir pris aucune garantie au moins par un acte sous seing privé alors que les mails qu'il échange avec divers interlocuteurs démontrent qu'il s'agit d'un homme avisé rompu aux affaires.

Même s'il était considéré effectivement que M. [P] [F] ne pouvait obtenir un écrit de Mme [B] [R] et si il était fondé à rapporter la preuve par tout moyen de l'engagement de Mme [R] de lui rembourser les sommes avancées il ne saurait être considéré qu'il apporte aux débats des éléments suffisamment probants.

Il se fonde en effet essentiellement sur les termes d'un courrier électronique que lui a adressé Mme [B] [R] en 2012 et qui est rédigé en ces termes :

"Pour m'aider donne moi ton adresse je veux écrire une reconnaissance de dette pour te montrer que je suis de bonne foi s'il te plaît je viens de faire mes comptes en faisant super attention il me manque un peu, je veux te montrer mon honnêteté: je te demande 400 € ce mois ci s'il te plaît je ne peux pas faire le chèque du loyer. En mai 400 et en juin ce qui fait 1200 euros ensuite juillet tout septembre octobre novembre : 1000 euros. Je te fais une lettre tu me la prépareras, je l'envoie en Floride comme ça tu as ma signature. Comme quoi tu me prêtes 2200 euros et en février 2013 je te les rends. Pourquoi je te les rends parce que aujourd'hui tu me sauves la vie. Je peux le faire parce que ce n'est pas une grosse somme. Et quand j'ai fini ça je pourrai te donner une partie du viager je dis une partie parce que je pense que ça ne va pas durer longtemps, pour toi je suis en train de faire une enquête ça va très mal sa santé' Moi je dis encore quelques mois. [P] tu peux me croire je te les donnerai je suis fier de te dire je deviens super raisonnable je fais très attention et je suis fier de te dire je te les rendrai parce que je veux rester amie avec toi je veux même rester proche de toi"

Il est certain que dans ce texte décousu Mme [B] [R] semble distinguer ce qui relève du prêt urgent qu'elle sollicite et ce qui relève du viager. Ce document n'est cependant pas dépourvu d'ambiguïté. Mme [B] [R] n'évoque en effet la notion de remboursement que pour les sommes dont elle sollicite l'avance et s'agissant du viager elle utilise le terme de «donner une partie» qui ne répond pas à la notion de remboursement. On comprend mal en outre pourquoi, s'il s'agissait de rembourser le prêt, Mme [B] [R] n'évoquerait qu'un paiement partiel alors que le terme qu'elle évoque à demi mot est celui du décès de la crédirentière. Il est également étonnant de constater qu'elle propose pour les 2.200 euros qu'elle sollicite d'établir une reconnaissance de dette et qu'elle ne fait pas la même proposition pour ce qu'elle a reçu précédemment et qui est autrement plus important.

Ce document à lui seul ne peut en conséquence constituer la preuve de l'engagement de remboursement de Mme [B] [R] et ce d'autant que dans un courrier contemporain de l'achat M. [P] [F] écrivait à un ami « Cher [O],Vous êtes bientôt sur le retour, et j'espère que votre séjour s'est bien passé. J'ai vendu la maison de ST REMY assez rapidement et au prix que je demandais.

J'ai aussi fait pour [B] le nécessaire pour qu' elle soit tranquille pour l'avenir, et tout doit se terminer début décembre.» Ce qui peut s'interpréter comme la volonté de M. [P] [F] de gratifier sa compagne au moment où lui-même vendait un bien immobilier personnel.

M. [P] [F] ne démontre en conséquence pas que les sommes qu'il a versées à Mme [B] [R] devaient lui être remboursées.

Il ne peut non plus, ayant à titre principal fondé son action sur l'existence d'un prêt et ayant échoué dans l'administration de la preuve d'un tel contrat, invoquer l'enrichissement sans cause à titre subsidiaire.

Il résulte de ce qui précède que la preuve de la créance de M. [P] [F] à l'égard de Mme [B] [R] n'est pas rapportée.

La décision entreprise doit en conséquence être confirmé

SUR LES DOMMAGES ET INTÉRÊTS :

M. [P] [F] succombant en sa demande la preuve d'une faute de Mme [B] [R] en relation avec un préjudice qu'il aurait subi n'est pas rapportée. C'est donc à bon droit que le premier juge a débouté M. [P] [F] de sa demande de ce chef.

Sur les demandes annexes

Le premier juge ayant fait une juste évaluation des sommes dues au titre de l'article 700 du code de procédure civile sa décision sera confirmé de ce chef.

M. [P] [F] sera condamné à lui payer en outre 1.500 euros pour la procédure d'appel.

M. [P] [F] succombant en ses prétentions sera condamné aux dépens .

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement contradictoirement et en dernier ressort

Confirme en toutes se dispositions le jugement entrepris.

Condamne M. [P] [F] à payer à Mme [B] [R] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

Condamne M. [P] [F] aux dépens et en ordonne la distraction au profit des avocats qui en ont fait l'avance sur leurs affirmations de droits.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 2-4
Numéro d'arrêt : 17/02035
Date de la décision : 22/05/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6D, arrêt n°17/02035 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-22;17.02035 ?
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