COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 2-4
ARRÊT MIXTE
DU 22 MAI 2019
A.R.
N° 2019/170
Rôle N° 16/21273 - N° Portalis DBVB-V-B7A-7T7A
et
Rôle N° 17/08131 -
N° Portalis DBVB-V-B7B-BAOB3
[R] [I] veuve [W]
[Y] [W]
C/
[G] [A] [W]
[V], [G], [M] [W]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY
SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON
Décisions déférées à la Cour :
Jugements du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 03 Novembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 15/02716 et du 27 Mars 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 16/09343.
APPELANTES
Madame [R] [I] veuve [W]
née le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 1] (MAROC),
demeurant [Adresse 1]
Mademoiselle [Y] [W]
née le [Date naissance 2] 1985 à [Localité 2], demeurant [Adresse 1]
représentées par Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX-ARNAUD- CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistées par Me Martine BLANCK-DAP, avocat au barreau de PARIS, substituée par Me Virginie MARTEL, avocat au barreau de PARIS, plaidant.
INTIMES
Monsieur [G] [A] [W]
né le [Date naissance 3] 1974 à [Localité 2],
demeurant [Adresse 2]
Monsieur [V], [G], [M] [W]
né le [Date naissance 4] 2016 à [Localité 3],
mineur représenté par sa mère administratrice légale Melle [I] [C], née le [Date naissance 5] 1986 à [Localité 2],
demeurant chez Melle [I] [C] - [Adresse 3]
intervenant volontaire venant aux droits de son père [F] [O] [W] né le [Date naissance 6] 1975 à [Localité 2] - décédé le [Date décès 1] 2017.
représentés par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON , avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, assistés par Me Odile GAGLIANO, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant.
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 27 Février 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile,Mme Annie RENOU, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
M. Jean-Baptiste COLOMBANI, Premier président de chambre
Mme Annie RENOU, Conseiller
Mme Annaick LE GOFF, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Mai 2019 et qu'à cette date le délibéré par mise à disposition était prorogé au 22 Mai 2019.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Mai 2019,
Signé par M. Jean-Baptiste COLOMBANI, Premier président de chambre et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
[A] [W] est décédé le [Date décès 2] 2014 à [Localité 4].
Il a laissé pour lui succéder ses deux enfants issus d'une première union , [G] et [F] [W] , et sa veuve d'une deuxième union , [R] [I] veuve [W] ainsi que leur fille [Y] [W].
Se plaignant que [R] [I] et [Y] [W] refusaient de faire établir une déclaration de succession et soutenaient que le défunt ne possédait rien , [G] et [F] [W] ont diligenté plusieurs procédures devant le juge des référés et sur requête afin de reconstituer l'actif successoral mobilier et financier de leur père , détenteur de son vivant d'une partie des parts sociales d'une SCI PLENTY , propriétaire de son domicile situé à [Localité 5] , et d'une SARL de GESTION IMMOBILIERE.
Par plusieurs ordonnances , le président du tribunal de grande instance de Draguignan a ordonné l'inventaire des biens meubles du défunt , l'interrogatoire de FICOBA sur ses comptes et ceux de la société de GESTION IMMOBILIERE et la production sous astreinte de trois feuillets d'un mémo manuscrit laissé par le défunt quant à ses dernières volontés.
A la demande de [R] [I] et de [Y] [W] , par ordonnance du 25 avril 2014 , le juge des référés a nommé maître [B] pour procéder aux opérations de liquidation et partage successoral.
Par acte du 24 mars 2015 , messieurs [G] et [F] [W] ont fait assigner madame [R] [I] et [Y] [W] devant le tribunal de grande instance de Draguignan et ont demandé aux tribunal de :
- condamner [R] [I] et [Y] [W] à restituer à la succession les meubles meublant le domicile du défunt sur le fondement des articles 534 , 948 , 2276 , 859 , 860 , 893 et 894 du code civil et désigner un expert pour leur évaluation ;
- de condamner les mêmes à rapporter à la succession sur le fondement des articles 843 , 893 et 894 du code civil :
* le quart des parts sociales de la SCI PLENTY ;
* l'intégralité des parts sociales de la SARL DE GESTION IMMOBILIERE et désigner un expert avec pour mission d'évaluer à la date du partage la valeur des parts sociales et de fournir les éléments sur les fruits perçus qui devront être rapportés à la succession ;
- de constater , au visa de l'article 778 du code civil que [R] [I] et [Y] [W] se sont rendues coupables de recel successoral et juger qu'elles sont exclues du droit de succéder pour les meubles meublants , le quart des parts sociales de la société PLENTY et les parts sociales de la SARL DE GESTION IMMOBILIERE ainsi que de leurs fruits ;
- de condamner [R] [I] et [Y] [W] à leur payer 200 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait du recel et de leur résistance abusive à l'établissement du de l'inventaire successoral ;
Les dames [W] et [I] ont conclu au débouté des demandes.
Par jugement du 3 novembre 2016 , le tribunal de grande instance de Draguignan a:
- dit que la moitié indivise des meubles se trouvant sur le procès-verbal de constat de maître [G] en date du 6 mars 2014 devra être intégrée à l'actif de la succession d'[A] [W] ;
- condamné [Y] [W] à rapporter à la succession :
* les 25 parts sociales de la SCI PLENTY cédées le 13 février 2004 par [A] [W] ;
* 250 parts sociales de la société de GESTION IMMOBILIERE cédées le 14 janvier 1994 et le 13 février 2004 par [A] [W] et [K] [I] ;
- ordonné une mesure d'expertise confiée à [M] [B] avec pour mission de procéder à l'évaluation à la date du partage des meubles meublants figurant sur l'inventaire du 6 mars 2014 et des parts sociales de la SCI PLENTY et de la SARL DE GESTION IMMOBILIERE et de fournir tous éléments sur les fruits de ces deux sociétés depuis 2004 ;
- dit que [R] [I] s'est rendue coupable de recel successoral ;
- jugé qu'elle ne pourra prétendre à aucune part sur les meubles meublants figurant sur le constat de maître [G] ;
- condamné madame [R] [I] veuve [W] à payer à [G] et [F] [W] une somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
- condamné [R] [I] et [Y] [W] à payer à [G] et [F] [W] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens y compris le coût des constats dressés par maître [G] , huissier de justice , des significations d'ordonnance sur requête , des notifications de constat et de la sommation d'assister à l'ouverture du coffre et des honoraires réglés à maître [B] ;
- ordonné l'exécution provisoire.
Il est constant que lors du décès , le défunt vivait avec sa seconde épouse et leur fille dans un hôtel particulier sis à [Localité 5] garni de meubles .
Les époux [W] étaient mariés sous le régime de la séparation de biens.
Sur les meubles , le tribunal a jugé que madame [I] ne rapportant pas la preuve de sa propriété exclusive sur les meubles se trouvant au domicile conjugal , ces meubles étaient réputés appartenir indivisément par moitié à chacun des époux.
Sur le rapport des parts sociales , le tribunal a jugé :
- concernant la SCI PLENTY : que celle-ci était propriétaire d'un bien immobilier constituant le logement familial d'une valeur de 1 219 592 acheté au moyen d'un prêt d'un montant de 1 296 000 euros remboursable in fine dans le délai de 180 mois avec des frais d'achat s'élevant à 60 000 euros ; que cet immeuble était constitué d'une première maison élevée d'un étage et d'une seconde maison contigue à la première élevée de deux étages sis [Adresse 4] ; que l'immeuble a fait l'objet d'un règlement de copropriété et de la vente de lots ayant permis de rembourser partiellement le prêt ; que le solde du prêt s'élevait à 991 200 euros ; qu'[A] [W] a vendu le 13 février 2004 les 25 parts qu'il détenait , au principal de 2 500 euros , à sa fille [Y] ; qu'en faisant le compte valeur du bien moins le solde du prêt divisé par le nombre de parts sociales , le solde était de 2 283 euros la part sociale ; qu'en vendant 25 parts pour 2 500 euros , monsieur [W] a voulu faire une donation déguisée à sa fille d'où le rapport ordonné par le tribunal .
Sur les parts de la SARL GENERALE IMMOBILIERE , le tribunal a jugé que :
- le 13 février 2004 , [A] [W] a cédé à sa fille 125 parts sociales au prix de 1 000 euros ; que cette SARL était propriétaire d'un lot 46 d'un ensemble immobilier dénommé les cottages des mûriers dont la valeur n'est pas précisée , et d'un box [Adresse 5] à [Localité 5] acquis 10 000 euros le 21 décembre 1997 dont la valeur n'est pas précisée ; que le bilan simplifié de l'exercice 2003 fait état d'un actif de 154 386 euros et d'un passif de 128 935 euros de sorte que la valeur d'une part sociale peut être évaluée à la fin de l'année 2003 à 25 451 euros divisés par 500 soit 51 euros . Le tribunal en a déduit que le prix de 1 000 euros versé en 2004 ne correspond pas à la valeur des 125 pars vendues qui peut être estimée au minimum à 6 375 euros ; que de plus le versement du prix de vente n'est pas établi ; qu'il s'agit donc d'une donation rapportable.
- le 14 janvier 1994 , la SOCIETE DE GESTION D'INVESTISSEMENTS , qui avait acquis des parts dans la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE, a vendu à [R] [I] 250 parts sociales ; qu'il ne s'agit pas d'une donation déguisée , la cession ne portant pas sur des parts du défunt ;
- le 14 janvier 1994 , [A] [W] a cédé 125 parts sociales de la SARL DE GESTION IMMOBILIERE à [K] [I] , soeur de son épouse pour 12 500 Frs ; que le passif et l'actif de la SARL n'est pas connu à cette date ; que toutefois , [R] [I] ne rapporte pas la preuve du paiement par sa soeur du prix de cession ; que celle-ci a revendu ses parts à [Y] en février 2004 au prix de 1 000 euros ; que le prix est inférieur au prix réel au vu de ce qui a été expliqué précédemment ; que le paiement du prix par [Y] n'est pas démontré ; qu'il s'agit d'une donation rapportable
d'où le rapport de 250 parts au titre de deux cessions.
Sur le recel , le tribunal n'a pas retenu le recel concernant [Y] : sur le mobilier , il a jugé qu'étant la fille du couple , elle ne pouvait savoir à qui les meubles appartenaient ; que , pour les donations déguisées , elle n'avait que 19 ans et il n'est pas établi qu'elle ait eu connaissance à l'époque des montages qui la favorisaient.
Il n'a retenu le recel pour [R] [I] que concernant les meubles puisqu'elle n'a pas été condamnée au rapport pour les donations déguisées.
Sur la demande indemnitaire , il ne l'a retenue que pour madame [R] [I] et pour les meubles estimant que , par sa réticence , elle a obligé notamment le recours à un huissier pour déterminer la consistance du mobilier , causant ainsi un préjudice à [F] et [G] [W].
Mesdames [R] [I] veuve [W] et [Y] [W] ont relevé appel le 28 novembre 2016.
Monsieur [F] [W] est décédé le [Date décès 1] 2017 et l'instance a été reprise par son fils [V] représenté par sa mère [I] [C].
Dans leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 27 juin 2017 , mesdames [I] et [W] demandent à la cour :
à titre principal :
- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté messieurs [G] et [F] [W] de leur demande de rapport concernant la cession de parts de la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE au profit de madame [R] [W] et de recel successoral sur ce point ;
- de le confirmer en ce qu'il les a déboutés de leur demande de recel successoral formulée contre [Y] [W] ;
y ajoutant
- d'ordonner l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage de la succession de monsieur [A] [W] et en tant que de besoin la liquidation du régime matrimonial ayant existé entre le défunt et sa première épouse ensuite du divorce prononcé le 13 septembre 2004 ;
- de désigner tel notaire qu'il plaira pour y procéder ;
d'infirmer pour le surplus le jugement entrepris et , statuant à nouveau :
- de dire madame [R] [I] bien fondée à rapporter la preuve de la propriété personnelle des meubles meublants et objets garnissant le domicile qu'elle occupait avec le de cujus ;
- de dire et juger qu'il incombera aux parties d'établir l'origine de propriété personnelle de ces meubles dans le cadre des opérations de compte , liquidation et partage ;
- de dire que'elle n'a commis aucun recel concernant ce mobilier ;
- de dire et juger que le prix des 25 parts de la SCI PLENTY cédées à [Y] [W].
n'est ni fictif ni inexistant et a été payé et que cette cession n'est constitutive d'aucune libéralité;
- de dire et juger que le prix des 125 parts de la SARL DE GESTION IMMOBILIERE cédées à [Y] par [A] [W] n'est ni fictif ni inexistant et a été payé et que cette cession n'est constitutive d'aucune libéralité
- de dire et juger que la cession des 125 parts de ladite SARL à [K] [I] qui n'est pas l'héritière d'[A] [W] ne peut constituer aucune libéralité rapportable à la succession;
- de dire et juger que le prix des 125 parts de la SARL DE GESTION IMMOBILIERE cédées à [Y] par [K] [I] n'est ni fictif ni inexistant et a été payé et que cette cession n'est constitutive d'aucune libéralité ;
en conséquence :
- de dire et juger qu'aucun rapport n'est dû ni en valeur ni en nature ;
de débouter [G] et [V] [W] de ce chef de leurs demandes ;
- de dire qu'aucune résistance abusive n'est imputable aux appelants et de débouter [G] et [V] de leur demande indemnitaire ;
- de condamner [G] et [V] aux entiers dépens de première instance incluant le coût de l'ensemble des procès-verbaux de constat dressés par maître [G] , des significations des ordonnances sur requête , des procès-verbaux de constat et sommations outre les honoraires de maître [B] , notaire.
Subsidiairement :
- si , par impossible , la cour devait confirmer la mission d'expertise portant sur les parts sociales , de dire et juger qu'elle ne peut intervenir qu'en valeur ;
en conséquence :
- de dire et juger qu'il n'existe aucune indivision sur lesdites parts ;
- de dire que l'expert devra procéder à l'évaluation des parts de la SCI à la date la plus proche du partage selon leur valeur à la date de la cession ;
- de même pour les parts de la SARL DE GESTION IMMOBILIERE ;
- de dire et juger qu'aucune recherche de fruits attachés aux parts sociales ne peut intervenir pour une période antérieure à l'ouverture de la succession ;
- de dire et juger qu'il appartiendra à l'expert de rechercher si les fruits proviennent de l'industrie exclusive de [R] [I] et [Y] [W] ;
en toute hypothèse :
- de débouter [G] et [V] [W] de toutes leurs demandes ;
- de les condamner au paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts ainsi que de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD et associés.
Sur le mobilier , madame [I] reprend les termes de son contrat de mariage ; 'chaque époux établira la propriété de ses biens par tous moyens de preuve prévus par la loi; Lors de la dissolution du mariage , les époux ou leurs héritiers et représentants reprendront tous les objets dont ils justifieront être propriétaires par titre , usage , marque ou facture. Tous objets sur lesquels aucun droit de propriété ne serait justifié seront réputés appartenir de plein droit indivisément à chacun pour moitié'.
Elle prétend justifier de la propriété des meubles meublant par la production de la liste du mobilier qui garnissait son domicile et établie à l'occasion du déménagement de la concluante en date du 22 novembre et 4 décembre 2000.
Elle en veut aussi pour preuve la requête conjointe de monsieur dans le cadre de son divorce en 1984 disant que les meubles garnissant le domicile de la première épouse lui appartenait et déclarant que lui-même ne détenait aucun meuble .
Sur le recel , elle fait valoir que c'est moins de deux mois après le décès de leur père que [G] et [F] l'ont accusée de faire obstruction et ont demandé sur requête la désignation d'un huissier pour faire l'inventaire de la succession ; que la difficulté par eux soulevée était inexistante ; qu' indépendamment du mobilier , elle a communiqué dès le 26 février 2014 la liste des sociétés dans lesquelles [A] [W] détenait des parts ; qu'aucun meuble n'a été dissimulé ; qu'il fallait du temps pour établir la propriété sur lesdits meubles ; que la déclaration selon laquelle monsieur [W] n'avait aucun meuble a été faite devant maître [B], notaire désigné par le président du tribunal pour procéder à une liquidation amiable de la succession. Elle en déduit qu'il y a eu des manoeuvres de [G] et d'[F] pour créer artificiellement une situation faisant croire à un recel.
Sur les parts sociales :
a) sur la société PLENTY
après les cessions évoquées par le tribunal , la SCI est demeurée propriétaire de
- la parcelle AC [Cadastre 1] sur laquelle est édifiée la maison à usage d'habitation élevée d'un premier étage et d'un sous-toit sur simple rez de chaussée ;
- la parcelle [Cadastre 2] correspondant au jardin attenant ;
- le rez de chaussée de la parcelle [Cadastre 3].
Dans son argumentation , pour reprendre le prix de départ dans son raisonnement , le tribunal n'a pas tenu compte de ces ventes qui ont fait diminuer la valeur de l'actif à 731 755 euros de sorte que le passif représenté par le solde du prêt après remboursement par les prix de vente , de 991 200 euros , était supérieur à l'actif.
Il n'y a donc pas eu de sous-évaluation du prix dans la cession incriminée. Par ailleurs la valeur d'acquisition n'a pas été inférieure à la valeur réelle. [Y] [W] justifie de ce qu'elle a payé le prix de la cession .et contrairement à ce que soutiennent messieurs [G] et [V] [W] , le compte , bien qu'ouvert à la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE, n'est pas fictif.
Il ne saurait davantage être soutenu que monsieur [A] [W] aurait effectué des apports en compte courant d'associé et que [Y] aurait acquis ce compte par le simple fait de la cession , car cela est contraire à la jurisprudence.
b) S'agissant de la SARL SGI (SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE) :
Au moment des cessions invoquées , la SARL n'était pas prospère : elle n'était propriétaire que de la place de parking acquise en 1998 ; elle n'était titulaire que d'un bail précaire d'une durée d'une année pour ses locaux sis [Adresse 6] ; ce n'est qu'en 2005 qu'elle est devenue titulaire au même endroit d'un bail commercial ; que le bilan de 2003 porte que la valeur nette comptable s'élève à 41 372 euros constitué par poste de report à nouveau nécessaire pour assurer pour trois mois les coûts de fonctionnement ; qu'il n'y a pas eu de sous-évaluation des parts ; que la valorisation de celles-ci par la suite est liée à l'industrie de madame [W] et de sa fille , alors même que monsieur [A] [W] avait cessé toute activité en raison de ses problèmes de santé ; qu'il s'occupait d'ailleurs essentiellement de son activité de marchand de biens sur [Localité 2] ; qu'enfin , [Y] [W] justifie du paiement des parts sociales ; qu'enfin , la cession de [A] [W] à [K] [I] puis de [K] [I] à [Y] [W] 10 ans après n'est pas rapportable , à supposer qu'on la considère comme une donation ; qu'il n'est pas possible d'envisager que la cession de 1994 ait été faite en vue de la cession , 10 ans plus tard , par sa tante à [Y] , dans le cadre d'une intention libérale de [A] [W] à sa fille dès 1994.
Enfin , la cession de la société d'Investissements à [R] [I] de ses parts sociales dans la SARL SOCIETE GENERALE IMMOBILIERE ne peut être considérée comme une donation déguisée d'[A] [W] qui n'en était pas propriétaire.
Sur l'absence de recel concernant les prétendues donations déguisées , elles demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a dit que [Y] était trop jeune pour apprécier le cas échéant les avantages que son père , selon l'argumentation des intimés , aurait souhaité lui faire; de plus , il n'y a pas eu de dissimulation car toutes les cessions ont été enregistrées.
Elles demandent l'infirmation sur les dommages-intérêts et la condamnation des intimés qui ont tout orchestré de manière malveillante à leur payer des dommages-intérêts ; outre des précisions de rappel des règles de droit sur la mission de l'expertise.
Dans leurs dernières conclusions du 27 avril 2017 , [G] et [V] [W] , ce dernier venant aux droits de son père [F] prédécédé , demandent à la cour :
- de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné les appelantes à restituer à la succession les meubles et tableaux meublant le domicile du défunt ;
- de le confirmer en ce qu'il a désigné un expert ;
- de réformer partiellement le jugement quant aux rapports à la succession des parts sociales et de condamner les appelantes à rapporter à la succession :
- le quart des parts sociales de la SCI PLENTY objet de la donation déguisée en date du 13 février 2004 au profit de [R] [I] et de [Y] [W] ;
- l'intégralité des parts sociales de la société SGI objet des donations déguisées en cessions des 14 janvier 1994 et 13 février 2004 , au profit de madame [R] [I] et de [Y] [W] (représentée par sa tante pour l'un des actes de 1994)
- sur le fondement des articles 856 et 860 , de confirmer le jugement sur l'expertise en étendant ou précisant la mission confiée , donner mission à l'expert de fournir les éléments permettant de procéder à l'évaluation à la date du partage des parts sociales à l'exclusion de toute autre date et de fournir les éléments sur les fruits mais aussi les revenus et bénéfices et de manière générale tous avantages de la SCI PLENTY et de la société SGI perçus par les appelantes à rapporter par elle en ce inclus , pour la société PLENTY , les loyers ou indemnités d'occupation ainsi que le remboursement des charges que les appelantes auraient dû régler à la SCI pour le logement dont elles bénéficient ;
- de réformer le jugement partiellement sur le recel , et de dire que les deux appelantes se sont rendues coupables de recel et qu'elles sont toutes deux exclues de droit à succéder pour les meubles meublants , le quart des parts sociales de la SCI PLENTY et l'intégralité des parts de la SGI , ainsi que les fruits ;
- de réformer partiellement le jugement et de condamner les appelantes à leur payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait du recel et de la résistance abusive qu'elles opposent à l'établissement de l'inventaire successoral après le décès d'[A] [W] ou à tout le moins les condamner à cette somme au titre de provision sur le partage ;
- de réformer partiellement le jugement et de les condamner à leur payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre 5 000 euros au titre des frais irrépétibles en cause d'appel ;
- de leur donner acte de leur réserve quant au droit d'étendre les demandes de rapport sans droit de succéder à tout bien mobilier ou immobilier dont ils pourraient découvrir l'existence ;
- de confirmer le jugement quant aux dépens de première instance dans lesquels seront inclus le coût des deux constats en date des 6 mars 2014 , du constat des 5 et 7 mars 2014 , du constat du 17 mars 2014 dressé par maître [G] , huissier de justice à [Localité 6] , des significations des ordonnances sur requête , des notifications de constats , de la sommation d'assister à l'ouverture du coffre et de la somme réglée à maître [B] , notaire désigné pour procéder à l'ouverture de la succession ;
- de condamner les appelantes aux dépens d'appel avec distraction au profit de la SCP BADIE SIMON THIBAUD et JUSTON qui y a pourvu.
Sur les meubles , ils contestent les factures du piano de 6 000 euros acquis semble-t-il par [Y] âgée de 6 ans , celle de l'achat d'un tableau qui présente un cartouche au nom d'une entreprise créée plusieurs années après , celle du déménagement qui n'est qu'une copie et ne porte pas l'adresse du couple [I] [W] comme point de chute , alors même que cette facture est susceptible de concerner un déménagement dans le cadre de la gestion locative dont monsieur s'occupait , ayant transféré son activité de [Localité 2] à [Localité 5].
Ils constatent donc l'absence de factures probantes des éléments individualisés des meubles.
Sur les donations déguisées , ils indiquent qu'a été prise en compte dans les actes de cession la valeur nominale des parts sociales et non la valeur en fonction de l'actif et du passif des sociétés.
Pour ce qui est de la société PLENTY , selon eux , la cession n'a pas été payée ; [Y] était sans revenus à l'époque , et son compte est bizarrement domicilié à l'adresse de la SOCIETE SGI ; le chèque est rédigé par [A] [W] ; il a été émis en même temps qu'un autre chèque de 1 000 euros et la somme de 3 500 euros a été immédiatement reversée par le de cujus à la société SGI.
La cession à [Y] n'a été précédée d'aucune demande d'agrément des associés par lettre recommandée avec accusé de réception ou exploit d'huissier ; de plus elle ne s'est accompagnée d'aucun remboursement par [Y] à son père du compte courant d'associé.
Selon eux le prix de 2 500 euros est un vil prix. Ils reprennent l'argumentation du tribunal sur le prix de la part sociale et ajoutent que la SGI loue depuis l'origine des locaux pour un établissement secondaire à la SCI PLENTY en rez de chaussée de l'immeuble acquis en 2002 pour 3 000 euros par mois au minimum.
Ils qualifient de simpliste l'argumentation des appelantes sur la valeur des immeubles diminuée par la vente de certains lots , la valeur des biens acquis en 2002 étant inférieure à la valeur de revente , le prêt étant partiellement remboursé , des travaux ayant été effectués entre 2002 et 2004 , ayant augmenté la valeur des biens dont le prix avait été sous-évalué en 2002.
Pour ce qui est des parts de la SGI , elle a été crée en 1987 , a un établissement principal [Adresse 6] à [Localité 7] et un établissement secondaire dans l'immeuble de la SCI PLENTY. Elle a été exploitée par le de cujus jusqu'en 2013.
En 1987 , cette SGI a été créée entre [A] [W] et la société GESTION D'INVESTISSEMENTS dont le défunt détenait 440 parts sur 1000 et sa mère et son frère le surplus.
La société GESTION D'INVESTISSEMENTS et [A] [W] détenaient chacun respectivement 50 % des parts de la société de GESTION IMMOBILIERE ;
La société GESTION D'INVESTISSEMENTS a cédé ses parts à [R] [I] pour 12 500 Frs en 1994 ; le même jour , [A] [W] a cédé la moitié de ses parts à [K], la soeur de [R] . Il était encore engagé dans le mariage avec sa première épouse car le divorce ne sera prononcé qu'en 2004. [Y] n'avait que 9 ans , d'où la cession à sa tante [K].
[A] [W] ne restait plus titulaire que de 125 parts bien qu'il reste gérant.
Le 19 juin 2004 , peu avant son divorce de septembre 2004 , il les a cédées à [Y] , devenue majeure. Le même jour , sa tante lui cède les parts acquises en 1994.
[R] et [Y] deviennent donc seules propriétaires des parts de la SGI.
Sur les cessions de 1994 , elles n'ont pas été payées .Rien ne prouve qu'elles soient entrées en compte dans les livres de la société d'investissements pas plus qu'il n'est prouvé que la cession ait été notifiée à ladite Société .
De plus , les cessions ont été opérées avec un, vil prix.
Quant à [K] , elle n'a reçu les parts que pour compte , sa nièce étant mineure et ne pouvant être donataire de parts de sociétés commerciales.
De la même manière , en 2004 , le prix de la cession a été fictif . Les consorts [W] font valoir la même argumentation que pour la SCI PLENTY quant au paiement du prix et la domiciliation du chèque de paiement.
Sur le recel , selon [G] et [V] [W] , il porte sur les meubles et les donations déguisées et concerne les deux appelantes.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 janvier 2019.
Parallèlement , par acte du 16 novembre 2016 , [G] et [F] [W] ont fait citer [R] [I] et [Y] [W] devant le président du tribunal de grande instance de Draguignan aux fins de désignation d'un notaire pour procéder aux opérations de partage de la succession d' [A] [W].
Par ordonnance du 14 décembre 2016 , le président du tribunal statuant en la forme des référés s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Draguignan et a renvoyé l'affaire à date fixe.
Les dames [I] et [W] ont soulevé la litispendance par rapport au litige pendant devant la cour d'appel.
Par jugement du 27 mars 2017 , le tribunal de grande instance de Draguignan a :
- dit que les conclusions de [R] [I] et de [Y] [W] sont recevables ;
- rejeté l'exception de litispendance ;
- ordonné l'ouverture des opérations de compte , liquidation , partage de l'indivision existant entre [G] et [F] [W] , [R] [I] et [Y] [W] ;
- désigné pour y procéder maître [T] [Y] , notaire à [Localité 8] ;
- désigné [P] [J] , ou à défaut tout autre magistrat de la première chambre , pour surveiller les opérations de partage ;
- dit qu'en cas de difficultés , le notaire en dressera procès-verbal auquel il annexera obligatoirement un projet d'état liquidatif ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- débouté les parties de leurs prétentions respectives sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.
Madame [R] [I] et mademoiselle [Y] [W] ont relevé appel le 26 avril 2017.
[F] [W] est décédé le [Date décès 1] 2017 et l'instance a été reprise par son fils [V] représenté par sa mère [I] [C].
Par dernières conclusions du 16 novembre 2017 , elles demandent à la cour :
- d'infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutées de l'exception de litispendance ;
- d'ordonner la jonction des deux procédures d'appel ;
- de débouter les intimés de l'ensemble de leurs demandes ;
- de condamner [G] et [V] [W] au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens traités en frais privilégiés de partage.
Dans leurs dernières conclusions du 18 septembre 2017 , [G] [W] et [V] représenté par sa mère demandent à la cour :
- de confirmer le jugement déféré ;
- de rejeter la demande de jonction ;
- de condamner les appelantes à leur payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait du caractère abusif de leurs prétentions et appel ;
- de les condamner au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 ainsi qu'aux dépens de première instance et appel avec distraction.
Le premier juge a estimé que l'objet des deux litiges n'était pas le même : reconstitution de l'actif d'un côté et demande en partage de l'autre. Nul n'étant contraint de rester en indivision il a par ailleurs prononcé le partage.
Les appelantes prétendent qu'il y a litispendance car les opérations de partage tendent également à déterminer la consistance du patrimoine à partager ; les deux demandes sont donc indissociables .
Subsidiairement , elles demandent la jonction car les opérations de compte liquidation partage de la succession d'[A] [W] ne sont pas susceptibles d'intervenir utilement avant que la masse dépendant de celle-ci ne soit déterminée , ce qui fait l'objet de l'appel du jugement du 3 novembre ;
La jonction n'est , selon elle , pas de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état.
Selon les intimés , les deux procédures n'ont pas le même objet ; reconstitution de l'actif de la succession d'un côté , nécessaire avant le partage puisque les appelantes ne reconnaissent pas cette consistance ; partage de l'autre.
La demande de jonction est selon eux irrecevable , faute d'avoir au préalable été présentée devant le conseiller de la mise en état . De plus , la jonction n'est que facultative. Un minimum d'actif est aujourd'hui reconstitué ; les opérations de partage peuvent commencer , et il y a lieu d'écarter la jonction qui tend seulement à contourner l'exécution provisoire.
L'ordonnance de clôture a été fixée au 30 janvier 2019.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que , contrairement à ce que soutiennent messieurs [G] et [V] [W] , la cour est compétente pour ordonner la jonction des deux affaires qui lui sont soumises , compétence qui ne relève pas du seul conseiller de la mise en état ;
Qu'il est de bonne justice d'ordonner la jonction de l'affaire enregistrée sous le numéro de rôle 17/08131 avec l'affaire enregistrée sous le numéro de rôle 16/21273 , et ce sous le numéro 16/21273 ;
Attendu que l'article 100 du code de procédure civile dispose que 'si le même litige est pendant devant deux juridictions de même degré également compétentes pour en connaître , la juridiction saisie en second lieu doit se dessaisir au profit de l'autre si l'une des parties le demande . A défaut , elle peut le faire d'office';
Que l'article 102 du même code dispose que 'lorsque les juridictions saisies ne sont pas de même degré , l'exception de litispendance ou de connexité ne peut être soulevée que devant la juridiction de degré inférieur' ;
Attendu que c'est à tort que le premier juge a dit que les deux litiges n'avaient pas le même objet , puisque le litige tendant à la détermination des actifs successoraux et au rapport des libéralités soumis à la cour présupposait implicitement que soit ordonnée l'ouverture des opérations de compte , liquidation , partage de la succession d'[A] [W] ;
Qu'il s'agit donc du même litige entre les mêmes parties ;
Qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement déféré et de dire qu'il y avait bien litispendance entre l'affaire soumise au tribunal de grande instance et l'affaire soumise à la cour ;
Que , sans statuer sur le fond du litige , le tribunal aurait dû renvoyer l'affaire à la cour d'appel; que c'est donc à tort qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de compte , liquidation , partage de la succession de monsieur [A] [W] , pour cette raison procédurale ;
Que le jugement du 27 mars 2017 sera donc infirmé dans toutes ses dispositions ;
Sur l'ouverture des opérations de compte , liquidation , partage
Attendu que monsieur [A] [W] est décédé le [Date décès 2] 2014 , laissant ses héritiers en l'état d'une indivision successorale ;
Attendu que l'article 815 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de demeurer dans l'indivision ;
Que , dès lors , il convient d'ouvrir les opérations de compte , liquidation , partage de la succession de monsieur [A] [W] , demande au demeurant implicite dans la première procédure soumise à la cour ;
Qu'il y a lieu également de désigner un notaire pour y procéder , en la personne de maître [T] [Y] , notaire à [Localité 8] ;
Qu'il y a lieu de désigner à défaut tout magistrat de la première chambre du tribunal de grande instance de Draguignan, pour surveiller les opérations de partage ;
Sur le mobilier
Attendu que'aux termes du contrat de mariage de séparation de biens liant madame [I] à monsieur [A] [W] , il était stipulé que 'chaque époux établira la propriété de ses biens par tous moyens de preuve prévus par la loi. Lors de la dissolution du mariage , les époux ou leurs héritiers et représentants reprendront tous les objets dont ils justifieront être propriétaires par titre , usage , marque ou facture. Tous objets sur lesquels aucun droit de propriété ne serait justifié seront réputés appartenir de plein droit indivisément à chacun pour moitié' ;
Attendu qu'il en résulte que c'est à madame [I] qu'incombe la charge de la preuve quant à la propriété du mobilier qu'elle revendique ;
Attendu qu'elle soutient qu'une grande partie des meubles et objets personnels décrits dans le procès-verbal de constat dressé le 6 mars 2014 à son domicile , dressé sur le fondement d'une ordonnance du président du tribunal de grande instance de Draguignan sur demande des intimés, figure dans la liste des biens dont elle était propriétaire avant son mariage et établie à l'occasion de son déménagement les 22 novembre et 6 décembre 2000 ; qu'elle ajoute que , lors de sa première procédure de divorce avec son ex-épouse , demeurée sans suite , de 1984 , monsieur [W] déclarait que tout le mobilier appartenait à son ex-épouse et qu'il ne possédait rien ;
Attendu que les déclarations faites par monsieur [W] en 1984 sont trop anciennes pour permettre de dire que , s'il ne possédait aucun mobilier en 1984 , il en allait de même en 2005 , lors de son mariage avec madame [I] ;
Attendu par ailleurs que la liste établie lors du déménagement de madame [I] en 2000 est trop imprécise aussi bien sur la marque des objets que sur leur description pour permettre une confrontation utile avec la description du mobilier faite par maître [N] [G] le 6 mars 2014 ;
Qu'enfin , les meubles figurant sur le bon de livraison du 4 août 1984 ne se retrouvent pas avec assez de précision sur le constat d'huissier , qui ne décrit pas les quatre chaises CARO ni la table haute Naima ;
Qu'en l'absence d'autres documents , notamment de factures ou de justificatif de paiement , il y a lieu de dire que madame [I] ne rapporte pas la preuve de sa propriété sur le mobilier situé dans l'ancien domicile conjugal , y compris en ce qui concerne le piano droit ;
Attendu qu'il en résulte que c'est à bon droit que le tribunal a décidé que ce mobilier appartenait à chacun des époux par moitié et que la moitié de sa valeur , à dire d'expert , devrait être intégrée à l'actif de la succession de monsieur [A] [W] ;
Sur les donations déguisées
Attendu que l'article 843 du code civil dispose que 'tout héritier , même ayant accepté à concurrence de l'actif , venant à une succession , doit rapporter à ses co-héritiers tout ce qu'il a reçu du défunt , par donations entre vifs , directement ou indirectement ;
Attendu que messieurs [G] et [V] [W] prétendent que les cessions de parts sociales de la SCI PLENTY et de la société de Gestion Immobilière réalisées par monsieur [A] [W] en faveur de madame [R] [I] et de mademoiselle [Y] [W] , directement ou par l'intermédiaire de sa tante [K] , en date des 13 février 2004 , pour la SCI PLENTY , et des 14 janvier 1994 et 13 février 2004 , pour la société SGI constituent des donations déguisées car réalisées à vil prix , à supposer que le prix ait été payé;
Attendu que le tribunal a :
- condamné [Y] [W] à rapporter à la succession :
* les 25 parts sociales de la SCI PLENTY cédées le 13 février 2004 par [A] [W] ;
* 250 parts sociales de la société de GESTION IMMOBILIERE cédées le 14 janvier 1994 et le 13 février 2004 par [A] [W] et [K] [I] ;
- ordonné une mesure d'expertise confiée à madame [M] [B] avec pour mission de procéder à l'évaluation à la date du partage des meubles meublants figurant sur l'inventaire du 6 mars 2014 et des parts sociales de la SCI PLENTY et de la SARL DE GESTION IMMOBILIERE et de fournir tous éléments sur les fruits de ces deux sociétés depuis 2004 ;
Que les parts visées correspondaient à celles de la SCI PLENTY cédées par monsieur [W] à sa fille le 13 février 2004 , et aux 125 parts de la SARL de Gestion Immobilières qu'il a cédées à sa fille le 13 février 2004 , directement , et aux 125 parts qu'il avait d'abord cédées à sa belle-soeur [K] le 14 janvier 1994 , laquelle les a cédées à sa nièce [Y] le 13 février 2004 ;
Attendu en revanche que le tribunal n'a pas considéré comme rapportables les parts cédées par la société DE GESTION D'INVESTISSEMENT qui détenait des parts dans la société de GESTION IMMOBILIERE , au motif que ces parts ne faisait pas partie du patrimoine du défunt;
Attendu qu'avant de juger qu'il y a eu vil prix et donations déguisées , la cour estime nécessaire de prononcer une expertise , confiée à madame [M] [B] , expert nommée par le tribunal , qui devra :
- donner son avis sur le point de savoir si l'ensemble des cessions ont effectivement donné lieu à paiement ;
- donner son avis sur le point de savoir si les prix de cession correspondent à la juste valeur des parts sociales évaluées à la date de la donation ; pour ce faire , fixer leur valeur à cette date ;
- dans la négative ,
* donner son avis sur la valeur des parts sociales à la date la plus proche du partage , c'est-à-dire , en l'état , à la date de l'établissement de son rapport ;
* dire sur cette valeur à la date la plus proche du partage , quelle est la valorisation desdites parts qui est liée à l'activité des donataires , donc des dames [I] et [Y] [W] depuis la donation , l'activité des gratifiées éventuelles ne devant pas être prise en compte dans cette valorisation conformément à l'article 860 du code civil ;
* fixer la valorisation desdites part en fonction de leur état au jour de la donation et de leur valeur à la date du partage , indépendamment de l'activité des gratifiées ;
* dire si l'occupation gratuite du bien de la SCI PLENTY par madame [I] et [Y] [W] a eu une incidence sur la valeur des parts sociales ;
* tenir compte dans son calcul , des parts sociales qui ont pu être cédées depuis la donation , leur valeur devant être prise en compte au jours de la cession , à moins qu'elles n'aient été remployées ;
* évaluer la valeur des fruits des parts sociales (dividendes et autres) , depuis l'ouverture de la succession , soit le [Date décès 2] 2014 , puisqu'aux termes de l'article 856 du code civil , 'les fruits des choses sujettes à rapport sont dus à compter du jour de l'ouverture de la succession';
* dire si ces fruits sont exclusivement le résultat du travail de madame [I] et de [Y] [W] et sont susceptibles de se confondre avec la rémunération qu'elles ont perçue ;
Attendu que l'expertise portera sur l'ensemble des cessions , y compris celle faite par la société DE GESTION D'INVESTISSEMENTS le 14 janvier 1994 à madame [R] [I] , [A] [W] détenant des parts dans cette société et étant partie prenante des décisions la concernant ;
Qu'il en ira de même de la donation faite par monsieur [A] [W] à madame [K] [I] pour le cas où la cour déterminerait in fine , comme l'a fait le tribunal , que celle-ci n'a servi que d'intermédiaire dans la donation faite in fine en faveur de [Y] [W];
Attendu que le juge désigné par le tribunal qui a prononcé l'expertise dont le principe est confirmé même si elle a été complétée par la cour , restera en charge du contrôle de ladite expertise ;
Attendu que la cour est toutefois saisie , par l'effet dévolutif de l'appel , de l'entier litige ; qu'elle réservera donc à statuer sur l'ensemble des demandes , sauf pour celles pour lesquelles la décision a été confirmée ;
Qu'il appartiendra aux parties de revenir devant la cour par voie de conclusions une fois déposé le rapport d'expertise ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR , statuant publiquement , par jugement mixte et en dernier ressort ,
ORDONNE la jonction de l'affaire enregistrée sous le numéro de RG 17/08131 avec l'affaire enregistrée sous le numéro 16/21273 , et ce sous le numéro de RG 16/21273 ;
INFIRME le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Draguignan le 27 mars 2017 dans toutes ses dispositions et statuant à nouveau :
DIT qu'il y avait litispendance entre l'affaire soumise au tribunal de grande instance de Draguignan sur assignation du 16 novembre 2016 , et l'appel porté devant la cour sur le jugement du 3 novembre 2016 rendu par la même juridiction ;
ORDONNE l'ouverture des opérations de compte , liquidation , partage de l'indivision existant entre [G] et [F] [W] , [R] [I] et [Y] [W] ;
DESIGNE pour y procéder maître [T] [Y] , notaire à [Localité 8] ;
DESIGNE tout magistrat de la première chambre du tribunal de grande instance de Draguignan pour surveiller les opérations de partage ;
CONFIRME le jugement du 3 novembre 2017 en ce qu'il a dit que la moitié indivise des meubles meublants se trouvant sur le procès-verbal de constat de maître [G] en date du 6 mars 2014 devra être intégrée à l'actif de la succession d'[A] [W] ;
LE CONFIRME également en ce qu'il a ordonné une mesure d'expertise confiée à madame [M] [B] demeurant [Adresse 7] (tel XXXXXXXXXX , mel c.actisudaudit @gmail.com) avec faculté de s'adjoindre un sapiteur pour évaluer le mobilier ;
L'INFIRME sur la mission confiée à madame [M] et sur le surplus du jugement , et statuant à nouveau :
DIT qu'avant-dire-droit sur l'existence de donations déguisées et sur leur éventuel rapport , madame [B] [M] aura pour mission :
- d'examiner toutes les cessions de parts sociales de la cause , savoir :
* la cession de 25 parts sociales de la SCI PLENTY réalisée par monsieur [A] [W] en faveur de [Y] [W] le 13 février 2004 ;
* la cession de 125 parts de la société de GESTION IMMOBILIERE réalisée le 13 février 2004 par [A] [W] en faveur de sa fille [Y] [W] ;
* la cession de 250 parts de la société de GESTION IMMOBILIERE réalisée le 14 janvier 1994 par la SOCIETE DE GESTION D'INVESTISSEMENTS en faveur de madame [R] [I] ;
* la cession de 125 parts de la SARL DE GESTION IMMOBILIERE réalisée le 14 janvier 1994 par monsieur [A] [W] en faveur de [K] [I] , soeur de son épouse pour 12 500 Frs ; paiement du prix par [Y] n'est pas démontré ; qu'il s'agit d'une donation rapportable
* la cession des 125 parts de la SARL DE GESTION IMMOBILIERE qu'elle détenait en vertu de la donation du 14 janvier 1994 réalisée le 13 février 2004 par [K] [I] en faveur de [Y] [W] , sa nièce ;
- de se faire communiquer tout document utile à l'accomplissement de sa mission ;
- de donner son avis sur le point de savoir si les prix de cession correspondent à la juste valeur des parts sociales évaluées à la date de la donation ; pour ce faire , de fixer leur valeur à cette date ;
- dans la négative ;
* de donner son avis sur la valeur des parts sociales à la date la plus proche du partage, c'est-à-dire à la date de son rapport ;
* de dire sur cette valeur à la date la plus proche du partage , quelle est la valorisation desdites parts qui est liée à l'activité des donataires , donc des dames [I] et [Y] [W] depuis la donation , l'activité des gratifiées éventuelles ne devant pas être prise en compte dans cette valorisation conformément à l'article 860 du code civil ;
* de fixer la valorisation desdites part selon la règle de la dette de valeur en fonction de leur état au jour de la donation et de leur valeur à la date du partage , indépendamment de l'activité des gratifiées ;
* de dire si l'occupation gratuite du bien de la SCI PLENTY par madame [I] et [Y] [W] a eu une incidence sur la valeur des parts sociales et dans quelle proportion ;
* de tenir compte dans son calcul , des parts sociales qui ont pu être cédées depuis la donation , leur valeur devant être prise en compte au jours de la cession , à moins qu'elles n'aient été remployées ;
* de donner son avis sur la valeur des fruits des parts sociales (dividendes et autres) , depuis l'ouverture de la succession , soit le [Date décès 2] 2014 ;
* dire si ces fruits sont exclusivement le résultat du travail de madame [I] et de [Y] [W] et sont susceptibles de se confondre avec la rémunération qu'elles ont perçue ;
- RAPPELLE que l'expert a reçu mission , dès le jugement de première instance confirmé sur ce point , d'évaluer les meubles meublants figurant sur l'inventaire du 6 mars 2014 effectué par huissier , au besoin en s'adjoignant un sapiteur de son choix ;
DIT que, pour exécuter sa mission, l'expert sera saisi et procédera conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 du Code de procédure civile ;
DIT que l'expert devra convoquer toutes les parties par lettre recommandée avec accusé de réception et leur avocat par lettre simple ;
DIT que l'expert pourra recueillir des informations orales, ou écrites, de toutes personnes susceptibles de l'éclairer ;
DIT que l'expert devra :
- en concertation avec les parties, dès la première réunion, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations à l'issue de la première réunion d'expertise ; l'actualiser ensuite dans le meilleur délai, en fixant aux parties un délai pour procéder aux interventions forcées et en les informant de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ou son projet de rapport ;
- adresser dans le même temps au magistrat chargé du contrôle de l'expertise le montant prévisible de sa rémunération et solliciter le cas échéant le versement d'une consignation complémentaire ;
- adresser aux parties un pré-rapport et arrêter le calendrier de la phase conclusive de ses opérations en fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse, lesquelles disposeront pour ce faire d'un délai de 3 à 4 semaines à compter de la transmission du rapport, et en rappelant aux parties, au visa de l'article 276 alinéa 2 du Code de procédure civile, qu'il n'est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au-delà du terme qu'il fixe ;
DIT que l'expert répondra de manière précise et circonstanciée à ces dernières observations ou réclamations qui devront être annexées au rapport définitif ;
DIT que l'original du rapport définitif sera déposé au greffe du Tribunal de grande instance de Draguignan ;
DIT qu'au cas où les parties viendraient à se concilier, il devra constater que sa mission est devenue sans objet et en faire rapport ;
DIT que le magistrat désigné par le tribunal contrôlera les opérations d'expertise ;
DIT qu'en cas d'empêchement, refus ou négligence, l'expert commis pourra être remplacé par ordonnance rendue sur simple requête présentée par la partie la plus diligente au juge chargé de la surveillance des expertise au tribunal de grande instance de Draguignan , lequel demeure chargé du contrôle de la présente expertise ;
SURSOIT à statuer sur l'ensemble des demandes pour lesquelles le jugement n'a pas été confirmé , à savoir l'existence de donations déguisées , la nécessité et l'évaluation de leur rapport , le recel successoral , les dommages-intérêts , les frais irrépétibles et les dépens.
DIT qu'une fois l'expertise rendue , il appartiendra aux parties de revenir devant la cour par voie de conclusions pour qu'elle statue sur les points réservés.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT