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04/04/2019 | FRANCE | N°18/00061

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 04 avril 2019, 18/00061


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

(Anciennement dénommée 11ème chambre A)



ARRÊT AU FOND

DU 04 AVRIL 2019



N° 2019/ 163













Rôle N° RG 18/00061 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BBXCE







Société HOTEL PRINCE DE GALLES





C/



[Z] [J] épouse [C]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP BADIE SIMON-THIBAUD J

USTON





SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de Nice en date du 06 Décembre 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/00005.





APPELANTE



SOCIETE HOTEL PRINCE DE GALLES Pris en la personne de son r...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

(Anciennement dénommée 11ème chambre A)

ARRÊT AU FOND

DU 04 AVRIL 2019

N° 2019/ 163

Rôle N° RG 18/00061 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BBXCE

Société HOTEL PRINCE DE GALLES

C/

[Z] [J] épouse [C]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON

SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Nice en date du 06 Décembre 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/00005.

APPELANTE

SOCIETE HOTEL PRINCE DE GALLES Pris en la personne de son représentant légal en exercice do micilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Frédéric ROMETTI, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

Madame [Z] [J] épouse [C]

née le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 1], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Renaud GIULIERI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 30 Janvier 2019 en audience publique devant la cour composée de :

Monsieur Yves BENHAMOU, Président de Chambre,

Madame Frédérique BRUEL, Conseillère

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2019,

Signé par Monsieur Yves BENHAMOU, Président de Chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

- FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Selon acte sous seing privé en date du 27 juillet 1999, Mme [T] [T] épouse [J] et Mme [Z] [J] épouse [C] ont consenti à la Société HOTEL PRINCE DE GALLES un bail afférent à des locaux à usage commercial s'agissant d'un immeuble dans lequel est exploité un hôtel-bar-restaurant situé [Adresse 3] moyennant un loyer annuel de 456.240 Francs (69.553 euros).

Par acte extrajudiciaire en date du 28 septembre 2007, les consorts [T]-[J] ont adressé à la locataire un congé avec offre de renouvellement du bail à compter du 1er avril 2008, et ce pour un loyer déplafonné fixé à la somme de 135.000 euros.

A la suite du décès de Mme [T] [T] épouse [J], usufruitière et bailleresse de l'immeuble donné à bail, survenu le 10 novembre 2010, sa fille Mme [Z] [J] épouse [C] est devenue seule bailleresse des locaux commerciaux loués.

Saisi de la question du prix du bail renouvelé, le juge des loyers commerciaux de Nice, par jugement en date du 7 septembre 2007, a :

- constaté l'accord des parties sur le principe du renouvellement du bail commercial afférent aux locaux à usage d'hôtel-bar-restaurant en cause à compter du 1er avril 2008 pour une nouvelle durée de 9 ans,

- et avant dire droit ordonné une expertise sur le montant de la valeur locative afin notamment de fournir tous éléments permettant d'apprécier si les locaux litigieux constituent ou non des locaux monovalents au sens de l'article R 145-10 du code de commerce, et d'apprécier si au cours du bail est intervenue une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L 145-33 du même code.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 27 novembre 2012.

Par jugement en date du 1er octobre 2014, le juge des loyers commerciaux de Nice, a:

- dit que les locaux litigieux à usage d'hôtel-bar-restaurant ne sont pas monovalents et que par suite, le loyer sur renouvellement n'est pas soumis à l'article R 145-10 du code de commerce,

- dit n'y avoir lieu à déplafonnement du loyer sur renouvellement au 1er avril 2008,

- fixé le montant du loyer sur renouvellement à compter du 1er avril 2008 à la somme de 97.218,81 euros en principal correspondant au montant du loyer calculé en fonction de la variation de l'indice du coût de la construction.

Ce jugement a été en tous points confirmé par un arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence en date du 21 janvier 2016.

Par acte extrajudiciaire en date du 24 mai 2016, Mme [Z] [J] épouse [C], bailleresse, a adressé à la SARL HOTEL PRINCE DE GALLES un congé avec offre de renouvellement du bail, avec effet au 31 mars 2017, moyennant un nouveau loyer déplafonné à hauteur de 180.000 euros en principal, la société preneuse acceptant le principe du renouvellement du bail mais se prononçant quant au prix du bail pour sa fixation selon la seule variation indiciaire.

Saisi par Mme [Z] [J] épouse [C] qui souhaitait voir fixer le nouveau loyer sur renouvellement à la somme de 400.000 euros hors charges et hors taxes à compter du 1er avril 2017, la juridiction des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Nice, par jugement en date du 6 décembre 2017, a :

- constaté que le bail à usage d'hôtel-bar-restaurant liant les parties est renouvelé à compter du 1er avril 2017 pour une durée de 9 ans,

- ordonné le déplafonnement du bail à compter du 1er avril 2017,

- avant dire droit sur le montant du loyer su renouvellement, ordonné une expertise afin notamment de fournir tous éléments permettant de déterminer la valeur locative,

- réservé les dépens,

- ordonné l'exécution provisoire du dit jugement.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 3 janvier 2018, la SOCIETE HOTEL PRINCE DE GALLES, a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions en date du 3 avril 2018, la SOCIETE HOTEL PRINCE DE GALLES, demande à la cour de :

- infirmer le jugement querellé,

Statuant de nouveau:

- dire n'y avoir lieu à déplafonnement,

- débouter Mme [C] de toutes ses demandes,

- dire que le montant du loyer du bail renouvelé à compter du 1er avril 2017 devra être fixé selon les variations de l'indice du coût des loyers commerciaux à savoir la somme de 101.161,00 euros,

- condamner Mme [C] à payer à la SOCIETE HOTEL PRINCE DE GALLES la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle indique que :

' les travaux réalisés par le locataire n'ont pas consisté en des améliorations au sens de l'article R 145-8 du code de commerce,

' ainsi aucun fondement juridique ne justifie un déplafonnement,

' il n'y a donc pas lieu à déplafonnement,

' Mme [C] devra donc être déboutée de toutes ses demandes en ce compris la demande de déplafonnement du loyer, ' le montant du loyer du bail renouvelé à compter du 1er avril 2017 devra en conséquence être fixé selon les variations de l'indice du coût des loyers commerciaux à savoir la somme de 101.161,00 euros.

Dans ses dernières conclusions en date du 29 juin 2018, Mme [Z] [J] épouse [C] demande à la cour de :

- débouter la SOCIETE HOTEL PRINCE DE GALLES de toutes ses demandes,

- confirmer le jugement querellé en toutes ses dispositions,

- condamner la SOCIETE HOTEL PRINCE DE GALLES au paiement au à Mme [C] de la somme de 4.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

Elle indique notamment que :

' la locataire ne rapporte à aucun moment la preuve du fait que les travaux d'aménagement réalisés par ses soins dans l'hôtel et dans le restaurant constituaient des travaux de mise en conformité de ces parties des locaux avec les normes d'hygiène et de sécurité en vigueur,

' la locataire a reconnu elle même qu'il s'agissait de travaux d'amélioration des lieux loués,

' les arguments de la locataire pour tenter de s'opposer au déplafonnement du loyer devront donc être écartés,

' il y a donc lieu de fixer le nouveau loyer annuel sur renouvellement, au besoin après expertise, à la somme de 400.000 euros par an hors taxes et hors charges à compter du 1er avril 2017.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 16 janvier 2019.

************

****

- MOTIFS DE LA COUR :

- SUR LE PROBLÈME DU DÉPLAFONNEMENT DU LOYER COMMERCIAL A COMPTER DU 1er AVRIL 2017 :

L'article L 145-33 alinéas 1er et 2 du code de commerce dispose:

'Le montant des loyers des baux commerciaux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative.

A défaut d'accord , cette valeur est déterminée d'après:

1°/ Les caractéristiques du local considéré;

2°/ La destination des lieux;

3°/ Les obligations respectives des parties ;

4°/ Les facteurs locaux de commercialité;

5°/ Les prix couramment pratiqués dans le voisinage.'

L'article L 145-34 alinéas 1er et 4 du même code quant à lui dispose:

'A moins d'une modification notable des facteurs mentionnés aux 1° à 4° de l'article L 145-33, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler, si sa durée n'est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation , intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l'indice trimestriel des loyers des activités tertiaires mentionnés au premier et deuxième de l'article L 112-2 du code monétaire et financier, publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques. A défaut de clause contractuelle fixant le trimestre de référence de cet indice, il y a lieu de prendre en compte la variation de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l'indice trimestriel des loyers des activités tertiaires, calculé sur la période neuf ans antérieure au dernier indice publié.'[...]

'En cas de modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article 145-33 ou s'il est fait exception aux règles de plafonnement par suite d'une clause du contrat relative à la durée du bail , la variation du loyer qui en découle ne peut conduire à des augmentations supérieures pour une année, à 10% du loyer acquitté au cours de l'année précédente.'

Par ailleurs le principe de l'autorité de la chose jugée n'a vocation à s'appliquer que dans la mesure où dans le cadre d'une nouvelle saisine, doit être tranchée un litige dont l'objet est le même - ne serait ce qu'en partie que celui de la décision dûment revêtue de l' autorité de la chose jugée.

S'agissant de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence en date du 21 janvier 2016, il concernait le renouvellement du bail commercial à compter du 1er avril 2008 et la fixation du prix du bail pour cette période de neuf ans s'achevant le 31 mars 2017, alors que dans le cadre de la présente procédure d'appel il est question du renouvellement du bail à compter du 1er avril 2017 et donc pour la période subséquente de neuf années. Le principe de la relativité de l'autorité de la chose jugée interdit donc que s'agissant d'un litige dont l'objet est différent on puisse invoquer l'autorité de la chose jugée afférente au premier arrêt du 21 janvier 2016.

L'article R 145-10 du code de commerce prévoit que le prix du bail des locaux construits en vue d'une seule utilisation peut par dérogation aux articles L 145-33 et R 145-3 et suivants, être déterminée selon les usages observés dans la branche d'activité considérée.

Il convient de souligner que pour trancher la question du déplafonnement éventuel du loyer commercial, la cour doit se déterminer au regard de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis dans le cadre de la présente instance d'appel et notamment en prenant en considération les éléments figurant dans l'expertise judiciaire qui a été réalisée avec sérieux et objectivité et qui de manière pleine et entière ont été soumis au principe du contradictoire et parmi lesquels figurent la question primordiale de savoir si l'on se trouve ou non en présence de locaux commerciaux monovalents.

Il importe par ailleurs pour la bonne intelligence des faits de l'espèce de préciser qu'alors que la SARL HOTEL PRINCE DE GALLES exploite l'hôtel en question, elle a donné en location gérance par acte du 29 avril 2003 à la SARL PETIT PRINCE, l'activité de restauration exercée dans les locaux loués.

L'expert judiciaire relève notamment s'agissant de la question de la monovalence: 'On peut penser que l'exploitant de l'hôtel a délégué la gestion du restaurant dans un souci de rentabilité et, à notre avis, le restaurant n'est que l'accessoire indispensable de l'activité d'hôtellerie. - Selon nous l'établissement est monovalent.' (page 20 du rapport d'expertise de M. [I]).

Ainsi cette monovalence des locaux loués dont la réalité objective ne souffre aucune discussion, est de nature à légitimer en application des dispositions de l'article R 145-10 du code de commerce précité le déplafonnement du loyer commercial à l'occasion du renouvellement du bail à compter du 1er avril 2017.

Il convient en conséquence pour d'autres motifs de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a constaté que le bail liant les parties est renouvelé à compter du 1er avril 2017 pour une durée de 9 ans, et ordonné le déplafonnement du bail à compter du 1er avril 2017.

- SUR LA FIXATION DU PRIX DU BAIL RENOUVELÉ :

Dans le cas présent s'agissant de la fixation du prix du bail commercial renouvelé, la SARL HOTEL PRINCE DE GALLES sollicite dans le dispositif de ses conclusions (qui seul lie la cour s'agissant des chefs de demandes) la fixation du bail commercial renouvelé à compter du 1er avril 2017 à la somme de 101.161,00 euros par an.

Mme [Z] [J] épouse [C] en ce qui la concerne, dans le dispositif de ses conclusions sollicite la confirmation du jugement déféré (qui est une décision mixte comme évoquée ci-dessus) 'en toutes ses dispositions' (même si dans les motifs de ses écritures elle se prononce en faveur de la fixation du loyer renouvelé à hauteur de 400.000 euros moyennant au besoin préalable expertise).

Or, dans le cas présent il importe de ne pas priver sur ce point de la fixation du prix du bail renouvelé, les parties du double degré de juridiction. Par ailleurs le premier juge ayant ordonné une mesure d'expertise, il disposera d'éléments actualisés permettant utilement d'éclairer sa religion pour la détermination du montant du prix du bail commercial en cause.

Il convient dès lors de confirmer le jugement querellé en toutes ses autres dispositions et notamment en ce qu'il a ordonné une expertise judiciaire.

Il y a lieu par ailleurs de dire que le premier juge tranchera la question du prix du bail renouvelé à compter du 1er avril 2017 de telle manière que les parties disposeront de manière effective du principe du double degré de juridiction.

- SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE:

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- SUR LES DÉPENS :

Il convient de condamner la Société HOTEL PRINCE DE GALLES qui succombe s'agissant de la demande afférente au déplafonnement du loyer commercial, aux entiers dépens de l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, et par mise à disposition au greffe,

- CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement mixte querellé,

- DIT que le premier juge tranchera la question du prix du bail renouvelé à compter du 1er avril 2017 de telle manière que les parties ne seront pas privés du principe du double degré de juridiction,

Y ajoutant,

- DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- CONDAMNE la Société HOTEL PRINCE DE GALLES aux entiers dépens de l'instance d'appel.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-7
Numéro d'arrêt : 18/00061
Date de la décision : 04/04/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence A1, arrêt n°18/00061 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-04-04;18.00061 ?
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