COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-4
ARRÊT AU FOND
DU 04 AVRIL2019
N° 2019/114
Rôle N° 16/05532
N° Portalis DBVB-V-B7A-6KUY
[M] [N]
C/
[C] [D]
Compagnie d'assurances MAAF ASSURANCES
Société SMA SA
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me L. LAZZARINI
Me J. REINA
Me F. FICI
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 08 Mars 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 13/12503.
APPELANT
Monsieur [M] [N]
né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 7]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 2]
représenté et assisté par Me Laurent LAZZARINI de la SELARL CONVERGENCES AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Renaud RICHARD de la SELARL CONVERGENCES AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
Monsieur [C] [D]
assigné le 21/06/2016 par PVRI article 659 du cpc à la requête de M. [N] [M]
demeurant [Adresse 3]
défaillant
Compagnie d'assurances MAAF ASSURANCES
prise en sa qualité d'assureur de Monsieur [C] [D],
prise en la personne de son représentant légal en exercice
siège social [Adresse 5]
représentée et assistée par Me Joanne REINA, avocate au barreau de MARSEILLE, substituée par Me Laura LOUSSARARIAN, avocate au barreau de MARSEILLE
SMA SA anciennement dénommée GENERALE D'ASSURANCES SAGENA,
prise en la personne de son représentant légal en exercice
siège social [Adresse 6]
représentée Me Isabelle FICI, avocate au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assistée par Me Fabien BOUSQUET de l'ASSOCIATION BOUSQUET-SOULAS, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Damien NOTO, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 06 Février 2019 en audience publique devant la Cour composée de :
M. Jean-François BANCAL, Président
Mme Patricia TOURNIER, Conseillère
Mme Sophie LEYDIER, Conseillère (rédactrice)
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2019.
ARRÊT
Défaut,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2019,
Signé par M. Jean-François BANCAL, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Exposé du litige :
[M] [N] a confié à [C] [D] la réalisation de travaux d'extension et de rénovation de sa maison située à [Localité 4], comprenant notamment une réfection complète de la toiture.
Se plaignant de divers désordres et plus particulièrement d'infiltrations par la toiture, [M] [N] a déclaré son sinistre à la société SAGENA, assureur décennal de Monsieur [D].
Par courrier du 22/12/2010, la société SAGENA a informé [M] [N] de son refus de couvrir ce sinistre, faisant valoir qu'il n'y avait pas eu de réception, que le chantier avait été abandonné, le maître d'ouvrage en ayant refusé l'accès à l'entreprise.
Par actes du 28 juillet 2011 et du 5 août 2011, [M] [N] a fait assigner en référé [C] [D] et la société SAGENA devant le Président du Tribunal de grande instance de MARSEILLE en référé expertise.
Par ordonnance du 30 septembre 2011, le Président du Tribunal de grande instance de MARSEILLE a ordonné une expertise confiée à [T] [F].
Par ordonnance du 6 septembre 2013, les opérations d'expertise ont été déclarées communes et opposables à la compagnie d'assurances MAAF, dernier assureur de [C] [D].
Par actes des 4 et 9 octobre 2013, [M] [N] a fait assigner [C] [D], la SAGENA et la SA MAAF ASSURANCES devant le Tribunal de grande instance de MARSEILLE aux fins d'obtenir principalement leur condamnation in solidum à lui verser des dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance et au titre des travaux de reprise à effectuer, sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil.
Le 30 juin 2014, l'expert a clôturé son rapport.
Par jugement réputé contradictoire du 8 mars 2016, le Tribunal de grande instance de MARSEILLE a :
- débouté [M] [N] de l'ensemble de ses prétentions, motifs pris de l'absence de réception tacite des travaux et de demande fondée sur la responsabilité contractuelle de droit commun,
- rejeté les demandes des parties présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné [M] [N] aux entiers dépens et autorisé Maître [O] à recouvrer directement contre lui ceux des dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision.
Par déclaration au greffe reçue le 25 mars 2016, [M] [N] a interjeté appel, en intimant :
1/ [C] [D],
2/ la SA MAAF ASSURANCES,
3/ la SA SAGENA.
Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 11 octobre 2017, [M] [N] demande à la cour :
Vu les pièces dont il est fait état,
Vu l'ordonnance de référé du 30 septembre 2011,
Vu l'ordonnance de référé du 6 septembre 2013,
Vu le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [F] du 25 juillet 2014,
Vu les articles 1792 et suivants du code civil,
Vu les articles 1137 et suivants du code civil,
Vu les articles 1147 et suivants du code civil,
Vu les articles 2241 et suivants du même code en tant que de besoin,
- d'INFIRMER en toutes ses dispositions le jugement déféré,
ET STATUANT A NOUVEAU, A TITRE PRINCIPAL,
- de CONSTATER que les conditions de la responsabilité de plein droit des articles 1792 et suivants du code civil sont réunies,
A TITRE SUBSIDIAIRE,
- de CONSTATER que les conditions de la responsabilité contractuelle de droit commun sont réunies,
EN TOUT ETAT DE CAUSE,
- de CONDAMNER Monsieur [D], in solidum avec la SAGENA, ou seulement Monsieur [D], à lui payer la somme de 39 682,50 euros pour les travaux de réfection à effectuer, montant à actualiser au jour du jugement en fonction de l'indice BT 01,
- de CONDAMNER Monsieur [D], in solidum avec la MAAF, ou seulement Monsieur [D], à lui payer la somme de 25 591,50 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance, à parfaire au jour du paiement à intervenir,
- de CONDAMNER Monsieur [D] et tout contestant à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- de CONDAMNER Monsieur [D], et tout succombant, aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise et de référé, ensemble à distraire au profit de Maitre Laurent LAZZARINI, avocat, sur son offre de droit, en vertu des articles 696 et suivants du code de procédure civile.
Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 1er juin 2017, la SA MAAF ASSURANCES demande à la cour :
A titre principal,
Vu les lettres RAR adressées par Monsieur [N] à Monsieur [D] les 17 septembre et 4 novembre 2003,
- de DIRE ET JUGER que des désaccords sont nés en cours de chantier entre Messieurs [N] et [D] et n'ont pas été résolus, concernant l'avancement, la qualité et le prix des travaux,
- de DIRE ET JUGER que l'intégralité des travaux effectués par Monsieur [D] n'a pas été réglée par Monsieur [N],
- de DIRE ET JUGER que les conditions d'existence d'une réception tacite des travaux de Monsieur [D] ne sont pas remplies,
- de DIRE ET JUGER qu'aucune réception, ni expresse, ni tacite, n'est intervenue,
- de DIRE ET JUGER que les demandes de Monsieur [N], fondées sur l'article 1792 du code civil, ne peuvent prospérer en l'absence de réception,
Par conséquent,
- de CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu le 8 mars 2016 par le Tribunal de grande instance de MARSEILLE,
- de CONDAMNER Monsieur [M] [N] à régler à MAAF ASSURANCES la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la présente procédure d'appel,
- de CONDAMNER Monsieur [M] [N] aux entiers dépens distraits au profit de Maître Joanne REINA de la SELARL PLANTAVIN-REINA, avocat au Barreau de MARSEILLE, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
En tout état de cause, si la cour devait infirmer le jugement et statuer à nouveau,
Vu la police d'assurance souscrite auprès de MAAF ASSURANCES en 2006,
Vu l'article L 124-5 du code des assurances,
- de DIRE ET JUGER qu'aucune garantie subséquente n'a vocation à s'appliquer en présence d'un sinistre survenu avant la souscription du contrat d'assurance de Monsieur [D] auprès de MAAF ASSURANCES, ayant fait l'objet d'une réclamation pendant la période de validité du contrat,
Vu les articles L 241-1 et A 243-1 du code des assurances,
- de DIRE ET JUGER que l'ouverture du chantier litigieux en 2003 n'a pas eu lieu pendant la période de validité du contrat d'assurance souscrit en 2006,
- de DIRE ET JUGER en conséquence que la garantie de responsabilité décennale souscrite auprès de MAAF ASSURANCES est inapplicable,
En outre,
- de DIRE ET JUGER que le volet du contrat relatif à l'assurance de responsabilité civile ne s'applique qu'aux dommages causés aux tiers et non à l'ouvrage lui-même,
- de DIRE ET JUGER que les désordres affectant l'ouvrage réalisé par Monsieur [D] ainsi que les préjudices en découlant sont donc exclus de la garantie responsabilité civile, inapplicable en l'espèce,
Au surplus,
- de DIRE ET JUGER que les dommages immatériels ne sont garantis par MAAF ASSURANCES que s'ils sont consécutifs à un dommage matériel lui-même garanti,
- de DIRE ET JUGER que le préjudice de jouissance invoqué par Monsieur [N] est la conséquence de désordres d'infiltrations affectant sa maison, qui ne sont couverts par aucune garantie souscrite auprès de MAAF ASSURANCES,
- de DIRE ET JUGER que la garantie des dommages immatériels consécutifs à un dommage matériel garanti n'est donc pas mobilisable en l'espèce,
En tout état de cause,
Vu l'article L 124-5 du code des assurances,
Vu l'article 4 du chapitre « Responsabilité Civile professionnelle et défense recours » des conditions générales du contrat d'assurance,
Vu l'article L 112-6 du code des assurances,
- de DIRE ET JUGER qu'en application de l'article 4 du chapitre « Responsabilité Civile professionnelle et défense recours » des conditions générales du contrat d'assurance prévoit bien un fonctionnement en base réclamation et de l'article L 124-5 alinéa 4 du code des assurances, MAAF ASSURANCES n'est pas tenue de prendre en charge les sinistres s'il est démontré que l'assuré avait connaissance du fait dommageable à la date de la souscription de la garantie,
- de DIRE ET JUGER que les désordres affectant l'ouvrage réalisé par Monsieur [D] ainsi que les préjudices en découlant étaient connus tant de Monsieur [N] que de Monsieur [D] au cours de l'année 2003-2004, période de leur survenance, et ce au regard des nombreux échanges intervenus entre eux,
- de DIRE ET JUGER que MAAF ASSURANCES est fondée à opposer un refus de garantie à Monsieur [N] et le rejet de l'appel en garantie de la SMA SA dans la mesure où Monsieur [D], au moment de la souscription de la garantie en 2006, avait parfaitement connaissance des faits dommageables dont se prévaut aujourd'hui Monsieur [N].
En conséquence,
- de DIRE ET JUGER qu'aucune des garanties souscrites auprès de MAAF ASSURANCES n'est susceptible de couvrir le préjudice de jouissance invoqué par Monsieur [N],
- de DEBOUTER Monsieur [N] ainsi que la SMA SA de l'ensemble de leurs demandes dirigées à l'encontre de MAAF ASSURANCES,
En toute hypothèse,
- de DIRE ET JUGER que la somme de 25 591,50 euros réclamée par Monsieur [N] au titre d'un préjudice de jouissance devra être ramenée à 6 979,50 euros,
- de DIRE ET JUGER que MAAF ASSURANCES est fondée à opposer une franchise contractuelle égale à 10 % du montant des dommages, avec un minimum de 1 058 euros et un maximum de 2 124 euros,
En tout état de cause,
- de CONDAMNER [M] [N] ou tout succombant à lui régler la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la présente procédure d'appel,
- de CONDAMNER [M] [N] ou tout succombant aux entiers dépens distraits au profit de Maître Joanne REINA de la SELARL PLANTAVIN-REINA, avocat au Barreau de MARSEILLE, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 6 septembre 2016, la SMA SA, anciennement dénommée GENERALE D'ASSURANCES SAGENA, demande à la cour:
Vu l'article 1792 du code civil, l'article L 124-5 du code des assurances,
A TITRE PRINCIPAL :
- de confirmer le jugement du Tribunal de grande instance de MARSEILLE en date du 8 mars 2016 ayant débouté Monsieur [N] de ses entières demandes,
A TITRE SUBSIDIAIRE :
- de constater que Monsieur [N] ne formule aucune demande à l'encontre de la SMA SA anciennement dénommée SAGENA au titre de son préjudice de jouissance,
En cas de condamnation, condamner la MAAF à relever et garantir la SMA SA anciennement dénommée SAGENA de toute condamnation mise à sa charge,
EN TOUT ETAT DE CAUSE :
- de condamner tout succombant au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Me Pierre LIBERAS de la SELARL LIBERAS & FICI ASSOCIES.
[C] [D] a été assigné par acte du 21/06/2016, transformé en procès-verbal de recherches infructueuses, conformément aux dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, l'huissier précisant que 'le RCS indique que l'établissement [C] [D] a fermé le 03/05/2012". Il n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 janvier 2019.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
A titre liminaire, la cour constate que [C] [D], défaillant, n'a pas été cité à sa personne.
En conséquence, il sera statué par défaut en application de l'article 474 dernier alinéa du code de procédure civile.
Par ailleurs, la cour rappelle qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions des parties.
Il s'ensuit que les prétentions énoncées par la SA MAAF ASSURANCES relatives à la prescription de l'appel en garantie de la SMA SA formulées dans les motifs de ses conclusions (pages 19 et 20) et non reprises dans le dispositif de celles-ci, ne seront pas examinées.
Sur le principe du contradictoire et le rejet des conclusions tardives :
En application de l'article 15 du code de procédure civile :
« Les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.»
En outre, en application de l'article 16 du même code :
« Le juge, doit en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.
Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ».
En l'espèce, l'affaire a été fixée à l'audience du 06/02/2019 par avis de fixation du 03/10/2018 avertissant les parties que l'ordonnance de clôture serait rendue le 22/01/2019.
Cependant, la veille de l'ordonnance de clôture, soit le 21/01/2019, la SA. MAAF ASSURANCES a fait signifier par le RPVA de nouvelles conclusions.
Par conclusions de procédure notifiées au RPVA le 31/01/2019, [M] [N] a demandé à la Cour de déclarer irrecevables les dernières écritures notifiées le 21/01/2019 par la SA MAAF ASSURANCES.
Par conclusions de procédure notifiées au RPVA le 04/02/2019, la SA MAAF ASSURANCES a indiqué s'en rapporter sur cette dernière demande.
Alors qu'il appartient à la cour de veiller au respect du principe du contradictoire, que les parties ont pu formuler leurs observations, qu'elles sont avisées des dates de fixation et de clôture depuis le 03/10/2018, les dernières conclusions de la SA MAAF ASSURANCES signifiées la veille de l'ordonnance de clôture, soit le 21/01/2019, n'ayant pas été communiquées en temps utile et donc pas permis aux autres parties d'en prendre connaissance utilement et de déterminer si elles entendaient éventuellement y répondre, à l'audience du 06/02/2019, la cour a décidé d'écarter des débats ces conclusions tardives.
Sur la réception
En application de l'article 1792-6 du code civil : « la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement ».
La réception peut être tacite à condition que soit établie la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage d'accepter l'ouvrage. L'achèvement de l'ouvrage n'est pas une condition de la réception tacite.
La prise de possession des lieux par le maître de l'ouvrage et le paiement du prix, ou de la quasi-totalité du prix, permettent de caractériser la réception tacite, à moins que des réserves expresses et importantes aient été formulées.
Il appartient à celui qui invoque une réception tacite de l'ouvrage de la démontrer.
À défaut de réception, seule la responsabilité contractuelle de droit commun des constructeurs est susceptible d'être engagée.
En l'espèce, alors qu'aucun procès-verbal de réception n'a été établi, le maître de l'ouvrage demande à titre principal de constater que les conditions de la responsabilité de plein droit des articles 1792 et suivants du code civil sont réunies en invoquant l'existence d'une réception tacite résultant selon lui du règlement de la facture du 10/10/2003 établie par [C] [D] concernant les travaux de couverture qui se sont avérés ultérieurement atteints de désordres et des conclusions de l'expert [F].
Cependant, il ressort des explications des parties et des pièces produites :
- que comme l'a exactement relevé le premier juge, la mission confiée à l'expert judiciaire ne comportait aucune question relative à la réception des travaux,
- que le premier devis signé par les deux parties daté du 06/03/2003 comporte des travaux de démolition (dont couverture et charpente) la pose de nouvelles fondations et d'isolants, des travaux de charpente et de couverture, des travaux de menuiseries, de cloisons et d'enduits des façades et de l'intérieur de la maison pour certaines pièces, pour un montant total de 52 026 euros TTC, avec versement d'un premier acompte de 9 500 euros à la signature,
- que par la suite un avenant non daté et non signé, d'autres devis non signés et différents courriers échangés entre le maître d'ouvrage et [C] [D] établissent l'existence d'évolutions sur la nature exacte des travaux et sur les sommes dûes,
- que les factures suivantes ont été émises :
facture du 03/04/2003 'première situation' d'un montant de 9 500 euros TTC avec la mention 'ACQUITTER règlement en 3 chèques 1 000 euros, 3 000 euros et 5 500 euros',
facture du 24/06/2003 'remplacement de fenêtres début couverture' d'un montant de 7 500 euros TTC avec la mention 'ACQUITTER',
facture du 03/07/2003 'toiture charpente couverture' d'un montant de 7 400 euros TTC avec la mention 'ACQUITTER',
facture du 25/07/2003 'réalisation d'un pièce attenante à la maison principale' d'un montant de 10 000 euros TTC avec la mention 'ACQUITTER',
facture du 04/08/2003 'fin réalisation toiture' d'un montant de 8 500 euros TTC avec la mention 'ACQUITTER en 2 chèques 4000 euros + 4500 euros),
soit au total 42 900 euros,
- que par courrier recommandé du 04/09/2003 reçu le 08/09/2003 par [C] [D], [M] [N] se plaignait de la non réalisation d'une grande partie des travaux rendant la maison inhabitable et lui posant de graves problèmes professionnels et familiaux, et l'informait de sa décision de confier l'achèvement des travaux à une autre entreprise, sauf en cas de signature dans un délai très bref d'un devis récapitulatif comportant une date d'achèvement des travaux à très court terme,
- que plusieurs échanges de courriers entre les parties mettent en évidence des désaccords sur la qualité des travaux, sur l'existence de travaux supplémentaires et sur le solde restant dû et une tentative de rapprochement sur le coût global des travaux réalisés et à terminer (annexes 7 à 9 du rapport d'expertise),
- que par courrier recommandé du 17/09/2003, [M] [N] revenait sur les conditions de paiement des travaux et indiquait notamment à [C] [D] 'je tiens également, avant de vous régler, à avoir le temps matériel de vérifier qu'aucune malfaçon supplémentaire n'existe, notamment au niveau de l'étanchéité des façades et du toit' (annexe 10 du rapport d'expertise),
- qu'une facture datée du 10/10/2003 émise par [C] [D] était adressée à [M] [N] concernant les postes de travaux suivants
1)'lot démolition, fondations 2 chambres ext'
2)'dallage isolant pour chambres ext'
3)'élévation Syporex de 15'
4)'charpente et couverture 2 chambres ext'
5)'démolition couverture habitation principale
6)'charpente + panneaux isolants + polyane + tuiles DC10 vieillies'
7)'réalisation d'un habillage d'étanchéité au plomb entre les 2 bâtiments'
8) 'remplacement menuiserie (...)'
pour un montant total de 33 494,14 euros TTC suivi de la mention 'réglé par chèques n° 6025182, 6025184 et 6025185 (Crédit Mutuel), 6322855 et 6325185 (Caisse d'Epargne), 2653007 et 2653019 (La Poste),
- que par courrier du 04/11/2003, [M] [N] indiquait notamment à [C] [D] 'non seulement les travaux n'ont pas été terminés à la date promise puisque le 07/10/2003, plusieurs personnes en visite à mon domicile ont pu constater que votre ouvrier travaillait toujours sur les lieux, mais au surplus aucun travail n'a été effectué depuis le 10/10/2003. Or à ce jour, il reste plusieurs travaux non réalisés
les vélux que vous avez déposés n'ont toujours pas été reposés,
le solin n'a toujours pas été terminé et s'écoule toujours côté Est chez le voisin,
la finition de l'espace entre les 2 poutres maîtresses superposées n'est pas terminée,
aucun joint d'étanchéité sur les menuiseries n'a été réalisé,
les fermetures des volets bois n'ont pas été posées,
les poignées des fenêtres n'ont pas été posées,
l'entrée de la baie vitrée n'est pas terminée (....)
un grand nombre de tuiles n'a pas été collé,
de plus un grand nombre de malfaçons est apparu ces derniers jours:
le poteau que vous avez réalisé est fissuré en plusieurs endroits (....)
la tuile surplombant le solin côté Est est descellé,
fuite d'eau par le toit dans la petite chambre,
tuiles du grand faîtage fendues,
tuiles le long du chéneau non maçonnées et descellées,
fuite d'eau par le toit de la grande chambre,
pignon de la petite chambre fendu et tuiles descellées,
(......)
Je tiens également à préciser que je vous ai toujours payé en temps voulu tout au long du chantier. Je vous ai versé à ce jour 42 900 euros, ce qui somme toute, est très bien payé pour des travaux que vous avez réalisés à temps perdu et qui comportent autant de malfaçons dues à votre négligence (.....)
Lorsque je vous ai fait remarquer qu'il pleuvait dans toutes les chambres, vous m'avez rétorqué qu'il était possible de faire fonctionner la garantie décennale. Cette réaction est inadmissible et dénote une absence totale de conscience professionnelle puisque ces malfaçons sont très récentes et vous incombent totalement (....)
En conséquence, je vous demande de ne plus vous présenter à mon domicile sous quelque prétexte que ce soit (annexe 12 du rapport d'expertise),
- que par courrier du 15/02/2010, [M] [N] indiquait notamment à [C] [D] 'début octobre 2003, je vous ai informé par lettre recommandée AR de plusieurs malfaçons majeures ; notamment de problèmes d'infiltrations d'eau à travers les panneaux sous toit que vous aviez installés. Il n'y a eu aucune réaction de votre part.
Courant octobre, vous m'avez délivré une facture pour l'ensemble des travaux que vous avez réalisés pour un montant TTC de 33 494,14 euros (....)' (annexe 13A du rapport d'expertise).
Il s'ensuit que si le maître de l'ouvrage a réglé une grande partie des travaux, et en tout cas l'intégralité des travaux de couverture et de toiture, il n'est nullement démontré que lors de l'émission de la facture du 10 octobre 2003 il avait la volonté non équivoque d'accepter les travaux réalisés par [C] [D], étant précisé qu'avant et pendant les travaux M. [N] demeurait dans la maison.
Contrairement à ce que soutient M. [N], le courrier du 04/11/2003 précité concerne plusieurs postes de travaux, dont ceux concernant la toiture, les termes employés par le maître d'ouvrage démontrant sans équivoque son désaccord pour accepter les travaux réalisés et mobiliser la garantie décennale.
Alors qu'il est constant que le règlement de la facture délivrée le 10/10/2003 pour les travaux réalisés est intervenu en plusieurs fois à des dates qui ne sont pas justifiées (les chèques dont les numéros sont visés sur la facture n'ayant pas été produits), que le maître d'ouvrage a fait part à [C] [D] des malfaçons graves affectant la toiture et des infiltrations en résultant à plusieurs reprises, notamment en octobre et début novembre 2003, il est manifeste qu'au 10/10/2003, [M] [N] n'avait pas accepté tacitement de recevoir l'ouvrage.
En conséquence, le jugement déféré doit être ici confirmé.
Sur les désordres et les responsabilités :
Comme indiqué précédemment, à défaut de réception, seule la responsabilité contractuelle de droit commun de [C] [D], résultant des articles 1147 et suivants dans leur version antérieure à l'ordonnance du 10/02/2016 applicable au litige, est susceptible d'être engagée, dès lors que le maître de l'ouvrage établit l'existence d'une faute commise par lui ayant directement été à l'origine du dommage qu'il subit.
En l'espèce, il résulte des recherches de l'expert judiciaire, dont le sérieux, la compétence et l'impartialité ne font l'objet d'aucune contestation et des autres pièces produites par les parties:
- que les désordres concernent des infiltrations en provenance de la toiture du bâtiment principal, l'expert ayant constaté des traces d'infiltration en sous face de la toiture dans le salon et des traces de coulure sur des poutres récentes, en sous face du plafond de la chambre,
- que la pose d'un écran étanche sur isolant sous toiture doit respecter un certain nombre de règles,
- que le fait d'avoir placé un film étanche, à même la partie supérieure des panneaux TRILATTE, sans laisser l'espace requis pour assurer la ventilation nécessaire, a perturbé, sinon annihilé complètement le système de ventilation supérieure des panneaux, empêchant toute évacuation de vapeur d'eau depuis l'intérieur des locaux ; cette vapeur d'eau se stockant alors dans l'isolant du panneau pour être rejetée ensuite sous forme d'eau de condensation à l'intérieur des locaux,
- que les désordres constatés sont causés par un manque de ventilation de l'écran sous toiture avec absence de pare vapeur, créant un phénomène de condensation depuis la sous-face du plafond haut du rez-de-chaussée, consécutive à une erreur de mise en oeuvre imputable à [C] [D].
Il s'ensuit que la responsabilité contractuelle de [C] [D] est engagée.
Sur l'indemnisation :
Préjudice matériel :
Il résulte des investigations de l'expert que le coût des travaux nécessaires pour remédier aux désordres s'élève à 39 682,50 € TTC.
Il y a lieu de fixer l'indemnisation de ce préjudice à cette somme qui sera réévaluée selon l'évolution de l'indice BT01 entre le 30 juin 2014, date du dépôt du rapport d'expertise, et le prononcé du présent arrêt.
Préjudice de jouissance :
Selon l'expert:
- il est indéniable que M. [N] a subi des gênes et nuisances importantes depuis la réfection de sa toiture dues à des retombées d'eau de condensation dans les pièces exposées au sud de son habitation principale (séjour et chambre),
- si M. [N] a toujours pu rester dans les lieux, il a subi une impropriété partielle à destination dans une partie de son habitation, de l'ordre de 47% de la valeur locative estimée à 990 euros, durant les périodes d'hiver, soit sur 55 mois un préjudice estimé à 25 591,50 euros arrêté à juin 2014.
Au jour où la cour statue, il est établi que M. [N] a subi un préjudice de jouissance directement lié aux désordres entre octobre 2003 et juin 2014, soit sur 55 mois correspondant à 11 périodes de 5 mois de pluies par an.
Alors que M. [N] ne fournit aucune explication sur la mise en oeuvre de travaux de réparation postérieurement au dépôt du rapport de l'expert et ne produit aucune pièce établissant que les désordres constatés par l'expert ont perduré après le dépôt de son rapport le 30/06/2014, [C] [D] doit être condamné à lui payer la somme de 25 591,50 euros en réparation de son préjudice de jouissance.
En conséquence, M. [N] doit être débouté de sa demande tendant ' à parfaire cette condamnation au jour du paiement à intervenir'.
Sur les garanties des assureurs :
La SMA SA venant aux droits de la SAGENA :
La responsabilité décennale de [C] [D] n'étant pas engagée, faute de réception, la SMA SA est fondée à dénier sa garantie et aucune condamnation ne peut donc être prononcée à son encontre.
C'est donc avec raison que le premier juge a débouté le maître de l'ouvrage de ses demandes de condamnation de cet assureur.
La SA MAAF :
M. [N] recherche la garantie de la MAAF au seul titre de la réparation de son préjudice de jouissance, faisant valoir que la garantie 'responsabilité civile professionnelle' a vocation à s'appliquer dès lors que s'il a été d'abord assuré auprès de la SAGENA du 17/04/2001 au 20/09/2005, il a ensuite été assuré auprès de la MAAF du 16/01/2006 au 12/03/2012, qu'il a déclaré le sinistre le 15/02/2010 et qu'il a assigné la MAAF au fond par actes des 4 et 9/10/2013, de sorte qu'il se situe dans le délai de la garantie subséquente de 5 ans due selon lui par l'assureur conformément aux conditions générales de la police.
Toutefois, comme le soulève avec raison la MAAF, les conditions générales de la police, dont il n'est pas contesté que celles produites sont bien celles applicables au contrat souscrit par M. [N], stipulent notamment en page 26 'l'assureur ne couvre pas l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres s'il établit que l'assuré avait connaissance du fait dommageable à la date de la souscription de la garantie'.
Or tel est bien le cas en l'espèce puisqu'il se déduit des échanges de courriers entre [M] [N] et [C] [D] en 2003 et du courrier du 30/04/2004 dans lequel [M] [N] a fait état de l'aggravation des infiltrations d'eau précédemment constatées et demandé à [C] [D] 'de faire le nécessaire auprès de sa compagnie d'assurance' que ce dernier avait parfaitement connaissance du fait dommageable subi par M. [N] antérieurement à la date de souscription du contrat auprès de la MAAF intervenue en janvier 2006 (page 12 des écritures de l'appelant).
En conséquence, la garantie de la MAAF n'est pas mobilisable et le maître de l'ouvrage doit être débouté des demandes de condamnation formées contre cet assureur.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :
Si en première instance, le premier juge a condamné [M] [N] aux dépens en raison de sa succombance, il convient de relever que [M] [N] a été victime des désordres dont la réalité a été constatée par l'expert, et que ses prétentions formées à titre subsidiaire en appel, fondées sur la responsabilité contractuelle de [C] [D], sont accueillies.
Compte tenu de la solution du litige, [C] [D] qui succombe, supportera les dépens de première instance et d'appel, lesquels comprendront notamment les frais de l'expertise judiciaire et de référé.
Alors qu'en première instance, [M] [N] a agi exclusivement sur un fondement décennal, aucune considération d'équité ne justifiait de lui allouer une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En revanche, il y a lieu d'allouer à [M] [N], pour les frais exposés en appel, une indemnité de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, qui sera réglée par [C] [D].
Par contre, l'équité ne commande nullement d'allouer aux autres parties la moindre somme sur le même fondement.
En conséquence, le jugement déféré doit être ici partiellement infirmé.
PAR CES MOTIFS
LA COUR :
Statuant publiquement et par défaut,
REFORME partiellement le jugement déféré en ce que le premier juge a condamné [M] [N] aux entiers dépens,
STATUANT À NOUVEAU ET Y AJOUTANT,
DEBOUTE [M] [N] de sa demande de constat d'une réception tacite au 10/10/2003,
DECLARE [C] [D] responsable sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun des désordres affectant la toiture de la maison de [M] [N],
CONDAMNE [C] [D] à payer à [M] [N]:
- la somme de 39 682,50 € au titre du préjudice matériel, somme qui sera réévaluée selon l'évolution de l'indice BT01 entre le 30 juin 2014 et le prononcé du présent arrêt,
- la somme de 25 591,50 € au titre du préjudice de jouissance,
DEBOUTE [M] [N] de sa demande tendant 'à parfaire cette condamnation au jour du paiement à intervenir',
CONDAMNE [C] [D] à payer à [M] [N] 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais exposés en appel,
DÉBOUTE la SMA SA et la SA MAAF ASSURANCES de leurs demandes d'indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
DIT que le greffe communiquera à l'expert [T] [F] une copie du présent arrêt,
CONDAMNE [C] [D] aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront notamment les frais de l'expertise judiciaire et les dépens du référé, et en ordonne la distraction en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT