COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-4
ARRÊT AU FOND
DU 28 [X] 2019
N° 2019/ 106
Rôle N° RG 17/00866 - N° Portalis DBVB-V-B7B-73Q5
[X] [I]
SARL [J]- PARIS
C/
[U] [W]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me GALLO
Me MALY
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 05 Décembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 15/04721.
APPELANTS
Monsieur [X] [I]
né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 4],
demeurant [Adresse 5]
[Adresse 5]
représenté par Me Stéphane GALLO de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE et assisté de Me Berangère DALLOZ, avocat au barreau de Paris substituant Me Patricia LE TOUARIN LAILLET, avocat au barreau de PARIS
SARL [J]- PARIS,
Dont le siège est [Adresse 5]
[Adresse 5]
représentée par Me Stéphane GALLO de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE et assistée de Me Berangère DALLOZ, avocat au barreau de Paris substituant Me Patricia LE TOUARIN LAILLET, avocat au barreau de PARIS
INTIME
Monsieur [U] [W]
né le [Date naissance 2] 1942 à [Localité 4],
demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Edouard BAFFERT, avocat au barreau de MARSEILLE substituant Me Alexandra MALY, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 12 Février 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Anne FARSSAC, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Dominique PONSOT, Président
Mme Anne FARSSAC, Conseiller
Madame Isabelle DEMARBAIX, Vice-président placé auprès du Premier Président
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Rime GHORZI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 [X] 2019.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 [X] 2019,
Signé par Monsieur Dominique PONSOT, Président et Mme Rime GHORZI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
******
Vu le jugement du tribunal de grande instance de Marseille du 5 décembre 2016, qui a :
- rejeté la demande de révocation de l'ordonnance de clôture formée par la SARL [J]-Paris et M. [X] [I],
- déclaré irrecevables les écritures notifiées par voie électronique postérieurement à l'ordonnance de clôture,
- condamné in solidum M. [X] [I] et la SARL [J]-Paris à payer à M. [U] [W] la somme de 107 710 euros, avec intérêts au taux légal et avec capitalisation annuelle des intérêts,
- débouté [U] [W] de sa demande de dommages et intérêts,
- condamné in solidum [X] [I] et la SARL [J]-Paris au paiement des entiers dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- condamné in solidum [X] [I] et la SARL [J]-Paris à payer à [U] [W] la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;
Vu la déclaration du 13 janvier 2017 par laquelle M. [X] [I] et la SARL [J]-Paris ont relevé appel de cette décision ;
Vu les dernières conclusions notifiées le 29 mars 2018 aux termes desquelles M. [X] [I] et la SARL [J]-Paris demandent à la cour de :
- dire et juger leur appel interjeté recevable et bien fondé,
Y faisant droit,
- infirmer les dispositions du jugement du tribunal de grande instance de Marseille en date du 5 décembre 2016 qui les ont condamnés in solidum à payer à M. [U] [W] la somme de 107 710 euros avec intérêt au taux légal et capitalisation annuelle des intérêts, outre la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
- confirmer les dispositions du jugement ayant débouté M. [U] [W] de sa demande de dommages et intérêts,
- dire et juger M. [W] mal fondé en son appel incident,
- débouter M. [W] de toutes ses demandes fins et conclusions,
- prononcer leur mise hors de cause,
A titre reconventionnel,
- condamner M. [W] à leur payer la somme de 5 000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [W] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Stéphane Gallo ;
Vu les dernières conclusions notifiées le 31 août 2017, aux termes desquelles M. [U] [W] demande à la cour de :
- confirmer la décision de première instance en ce qu'elle a condamné in solidum M. [X] [I] et la société [J]-Paris au paiement de la somme de 107 710 euros à titre de dommages et intérêts en raison des sommes dues au titre du redressement fiscal, outre 2 000 euros au titre de l'article 700, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir et capitalisation annuelle des intérêts,
- réformer la décision du tribunal sur les préjudices accessoires qu'il a subis,
- condamner M. [X] [I] et la société [J]-Paris au paiement de 10 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir et capitalisation annuelle des intérêts,
- condamner M. [X] [I] et la société [J]-Paris au paiement de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [X] [I] et la société [J]-Paris aux entiers dépens distraits au profit de Me Alexandra Maly, avocat au Barreau de Marseille ;
SUR CE, LA COUR
Attendu que M. [U] [W] était associé et dirigeant, d'une part, de la société HMG et, d'autre part, de la société Guymard ; que la comptabilité de ces sociétés était assurée par la SARL [J]-Paris (le Cabinet [J]), en la personne de M. [X] [I] ;
Que la société Guymard a fait, en 2005, l'objet d'une proposition de rectification faisant apparaître un rappel de TVA en droits à hauteur de 103 276 euros ; que la société HMG a ultérieurement absorbé la société Guymard, par voie de transmission universelle de patrimoine ; que la dette de TVA qui a été comptabilisée au passif de la société HMG a bénéficié, au 31 décembre 2009, de la prescription ;
Que dans le cadre d'une vérification par un inspecteur des finances publiques de la comptabilité de la société HMG, en 2012, il a été décelé une écriture 'extourne TVA à payer' inscrite, le 31 décembre 2009, au crédit du compte courant d'associés de M. [W], pour un montant de 108 225 euros ;
Que l'administration fiscale, qui a considéré cette somme comme un revenu distribué, a adressé à M. [W], le 30 mai 2012, une proposition de rectification portant sur un montant de 98 191 euros ; que M. [W] n'ayant pas réglé cette somme, son montant s'est établi, au 1er octobre 2014, compte tenu des intérêts, à la somme de 107 701 euros ;
Que par courrier recommandé en date du 18 février 2015, M. [W] a alerté le cabinet [J] sur cette erreur commise et de l'importance du préjudice subi, l'invitant à déclarer le sinistre auprès de son assurance responsabilité civile professionnelle ;
Que par acte du 13 avril 2015, M. [U] [W] a fait assigner la SARL [J]-Paris et M. [X] [I] devant le tribunal de grande instance de Marseille, en paiement des sommes de 107 710 euros et 10 000 euros à titre de dommages et intérêts, ainsi que d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Que par le jugement entrepris il a été fait droit à la demande de M. [W] en paiement de la somme de 107 710 euros à l'exclusion des dommages et intérêts complémentaires sollicités ;
Attendu que le Cabinet [J]-Paris rappelle qu'il était chargé d'une mission de tenue de la comptabilité des sociétés HMG et Guymard, mais qu'il n'a jamais eu pour mission les déclarations personnelles de M. [W] ;
Qu'il fait valoir qu'il n'est tenu que d'une obligation de moyens et que sa responsabilité ne peut être engagée qu'au regard de la mission qu'il a acceptée ;
Qu'il précise que la somme de 108 225 euros enregistrée dans les comptes de la société HMG au profit de M. [W] correspondait à un profit exceptionnel réalisé par la société sur la TVA, due par la société Guymard, qu'elle aurait dû reverser au Trésor Public, et qui,du fait de la prescription,lui a profité définitivement ;
Qu'il conteste toute faute dans la comptabilisation du profit réalisé grâce à la prescription de cette dette au compte courant de M. [W] ; qu'il fait valoir que cette écriture était justifiée par le remboursement de créances que M. [W] avait en 2006 et 2007 abandonnées sur son compte courant d'associé, au profit de la société HMG, avec une clause de retour à meilleure fortune ; qu'il indique que M. [W] n'avait apporté aucune pièce justificative pour des dépenses passées au débit de son compte courant (poker, Porsche, voyage à Marrakech, Canal plus) atteignant un montant cumulé de près de 200 000 euros, et que la somme de 170 000 euros passée au crédit de son compte courant a été considérée comme compensant l'essentiel de ces dépenses ;
Qu'il soutient que M. [W] a souhaité s'attribuer le bénéfice du profit réalisé au détriment du Trésor Public par le société HMG sans payer d'impôts sur cette somme ; qu'il rappelle que les compte de la société HMG ont été arrêtés sous la responsabilité de son dirigeant, M. [W], qui a nécessairement validé cette opération ;
Qu'il fait valoir que l'interprétation, par le tribunal, du courrier du 4 juillet 2012 adressé par M. [I] à l'avocat conseil de M. [W] dans le cadre de la contestation du contrôle fiscal, est erronée, le terme 'confusion' devant s'entendre de la réunion des droits opérés au travers des écritures enregistrées sur le compte courant de M. [W] et non comme une erreur ;
Qu'il expose que c'est uniquement parce que l'abandon de créance, avec clause de retour à meilleure fortune, a été ensuite remis en cause dans le cadre du contrôle fiscal qu'une discussion a été tentée avec l'administration pour réintégrer la somme attribuée à M. [W] au profit de la société HMG, mais que le fait que l'inspecteur n'ait, finalement, pas retenu cette solution, compte tenu des antécédents fiscaux de M. [W], ne doit pas éluder le choix initial de ce dernier ;
Qu'il souligne qu'il a été écarté des suites données au contrôle de la société HMG après avoir fourni au conseil fiscal de M. [W] les explications souhaitées, qu'aucune défense fiscale n'a été présentée par M. [W] qui a finalement accepté le redressement alors qu'il lui appartenait de justifier des abandons de créances avec clause de retour à meilleure fortune le liant à la société HMG, lesquels avaient été déclarés sur les exercices concernés ;
Qu'il rappelle que M. [W], qui avait déjà précédemment fait l'objet d'un redressement au titre des sommes portées au crédit de son compte courant, n'ignorait pas qu'à défaut de justification, les sommes devaient être considérées comme un revenu distribué ;
Que le Cabinet [J] critique également le jugement en ce qu'il a indemnisé M. [W] de la totalité des sommes mises à sa charge par l'administration fiscale, alors que le redressement en droits à hauteur de 65 812 euros correspond à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux appliqués à la somme de 108 225 euros, portée au crédit de son compte courant ;
Qu'il soutient que M. [W] ne peut être indemnisé d'une imposition sur une somme qui est demeurée à son profit puisqu'elle est restée inscrite au crédit de son compte courant et qu'il a pu en disposer ; qu'il expose que M. [W] aurait pu ne pas avoir d'impôt à payer sur cette somme si le profit réalisé sur la TVA avait été enregistré au profit de la société mais uniquement à la condition qu'il n'en bénéficie pas ; qu'elle souligne qu'il a fait le choix de la laisser au profit de la société pour une nouvelle période, prenant à terme un risque de non-remboursement, mais que le non-remboursement trouve sa seule cause dans la liquidation judiciaire de la société intervenue le 26 juillet 2016 avec une date de cessation des paiements retenue au 18 mai 2015 ;
Qu'il fait valoir que les intérêts de retard, qui se limitaient à 6 055 euros le 30 mai 2012, et ont été réclamés à hauteur de 15 574 euros le 17 décembre 2015, ne sont que la contrepartie de l'impôt que M. [W] aurait dû payer plus tôt et ne peuvent être mis à sa charge, l'impôt dû sur une somme mise à disposition sur son compte courant d'associé ne présentant pas un caractère
inattendu comme a cru pouvoir le retenir le tribunal ;
Qu'il indique que la majoration à hauteur de 40 % représentant une somme de 26 324 euros ne peut davantage lui être imputée dès lors que l'administration fiscale a appliqué une majoration pour manquement délibéré du contribuable : qu'il soutient que l'action de M. [W], dont la mauvaise foi a été consacrée par l'administration fiscale doit être rejetée, son manquement délibéré étant la cause exclusive de la majoration appliquée, ce d'autant qu'il avait déjà fait l'objet de redressements sur son compte courant ;
Qu'il conteste l'existence du préjudice complémentaire de 10 000 euros dont M. [W] poursuit réparation et qui n'est pas étayé ;
Qu'en réponse, M. [W] soutient que c'est au mépris des règles comptables et fiscales que le Cabinet [J] a inscrit la contrepartie de l'extinction de la dette de TVA au crédit de son compte courant alors que l'extinction de cette dette fait apparaître un profit imposable chez le débiteur, la société HMG, rattaché à l'exercice au cours duquel la prescription est acquise ;
Qu'il indique que l'expert comptable engage sa responsabilité pour faute quand il omet une déclaration fiscale obligatoire, dont est résulté un redressement fiscal, ou lorsqu'il ne respecte pas les règles fiscales courantes ;
Qu'il soutient que par courrier du 4 juillet 2012 le Cabinet [J] a reconnu avoir inscrit 'par confusion' la somme au crédit du compte courant de M. [W] reconnaissant ainsi avoir lui-même porté cette écriture dans la comptabilité de la société HMG et l'avoir portée par erreur ;
Qu'il conteste avoir donné une directive au Cabinet [J] relativement au remboursement des abandons de créances antérieurs et estime que les explications données par ce dernier sont aberrantes sur un plan comptable ; qu'il expose que le profit TVA inscrit par erreur au crédit de son compte est venu aggraver les sommes dues par la société HMG à son égard et ne pouvait venir compenser les créances figurant déjà au compte courant, alors qu'il présentait un solde créditeur de 289 667,41 euros au 31 décembre 2010;
Qu'il rappelle que, par les abandons de créances de 30 000 euros au 31 décembre 2007 et de 140 000 euros au 31 décembre 2008, la société HMG a vu sa dette diminuer d'autant à son égard ; qu'il précise que ces abandons de créances ont été consentis avec clause de retour à meilleure fortune, mais que la société s'étant améliorée, la dette a été réinscrite au crédit du compte courant à hauteur de 170 000 euros le 31 décembre 2010 et qu'ensuite, à la même date, son compte courant a été crédité de la somme de 108 225 euros au titre de la TVA ;
Qu'il souligne que le Cabinet [J] ne fournit pas les comptes détaillés de la société HMG au titre des exercices clos du 31 décembre 2007 à 2013 pour justifier du détail des écritures prétendument opérées ;
Qu'il conteste l'interprétation donnée par le Cabinet [J] des termes du courrier en date du 4 juillet 2012, soulignant que la solution qu'il avait proposée dans le cadre du redressement n'était pas de plaider une compensation entre le profit de TVA et les abandons de créances mais que ce point avait fait l'objet d'un accord avec l'inspecteur consistant à réintégrer cette somme dans les résultats taxables de HMG sans bien évidemment la taxer entre les mains de M. [W] qui n'a pas appréhendé ces sommes ; qu'il précise qu'un tel accord avec l'administration fiscale n'a jamais existé ;
Qu'il soutient que le profit résultant de la prescription de la dette de TVA aurait dû être inscrit exclusivement dans les résultats de la société HMG et qu'il n'aurait, sans la faute du Cabinet [J], dégagé aucun revenu personnel imposable de cette opération ;
Qu'il indique n'avoir jamais perçu les 108 225 euros placés sur son compte courant, lesquels ne correspondaient à aucune créance régulière sur la société, en l'absence de mouvement de trésorerie ou flux financier, et n'aurait pu être remboursés ; qu'il précise qu'en tout état de cause son compte courant n'a pas été remboursé et ne le sera jamais compte tenu de la mise en liquidation judiciaire de la société ;
Qu'il soutient que son préjudice correspond au montant recouvré par le Trésor Public soit 107 710 euros ; qu'il précise qu'en l'absence d'inscription de cette somme à son compte il n'aurait dû ni l'impôt, ni les intérêts de retard et souligne que la majoration de 40 % due pour manquement délibéré n'a été retenue qu'en raison de l'écriture passée par le Cabinet [J] ;
Qu'il fait valoir qu'il a subi des préjudices accessoires puisqu'il a fait l'objet d'un avis à tiers détenteur au mois d'août 2014 bloquant le fonctionnement de son compte au Crédit Agricole qui a généré des frais et perturbé sa vie quotidienne ;
Attendu qu'il est établi aux débats que le cabinet [J] n'a jamais eu pour mission l'établissement des déclarations fiscales personnelles de M. [W] ;
Que cependant, le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement à une obligation contractuelle dès lors que ce manquement lui a causé un dommage direct ;
Que M. [W], gérant de la société HMG, peut donc rechercher la responsabilité délictuelle de du cabinet [J] à la double condition qu'il justifie d'un manquement de l'expert-comptable à ses obligations contractuelles à l'égard de la cette société et du préjudice direct et personnel résultant pour lui de ce manquement ;
Qu'en l'espèce, aucune lettre de mission liant la société HMG au cabinet d'expertise comptable n'est produite ; que cependant le cabinet [J] précise avoir été l'expert-comptable des sociétés de M. [W] à compter de l'année 2003 et reconnaît avoir poursuivi pour ces sociétés une mission de tenue de la comptabilité, de présentation des comptes annuels et d'établissement de la liasse fiscale y afférent ;
Que l'expert-comptable doit apporter dans l'exécution de sa mission toute la diligence qu'elle requiert, il est tenu à ce titre à une obligation de moyen ;
Qu'il n'est pas contestable que la prescription de la dette de TVA, d'un montant de 108 225 euros, au 31 décembre 2009 constituait, pour la société HMG, un profit exceptionnel ;
Qu'il est établi aux débats qu'une écriture a été passée à la même date, au crédit du compte courant de M. [W] pour ce montant sous l'intitulé 'extourne TVA à payer' ;
Que dans un courrier adressé au conseil de M. [W], le 4 juillet 2012 M. [I], expert-comptable du Cabinet [J], écrivait :
Les 108 225 euros correspondent à la TVA à payer ressortant de la déclaration de TVA de Guymard du 4ème trimestre 2005 (copie jointe) qui n'ayant jamais été mise en recouvrement malgré les différents contrôles fiscaux à fait l'objet d'une écriture visant à solder le compte TVA à payer.
La contrepartie de cette écriture a été mise par la collaboratrice de notre cabinet au compte courant de M. [W], une confusion ayant été effectuée considérant les redressements opérés précédemment sur le compte courant de M. [W] et compte tenu de l'abandon de créance avec retour à meilleure fortune octroyé par M. [W] à HMG ;
Qu'il ne peut être déduit de l'emploi du terme 'confusion' dans ce courrier, la reconnaissance expresse, par le Cabinet [J], qu'il ait commis une erreur, ce mot pouvant également être compris comme 'compensation' ;
Que le cabinet [J] justifie que M. [W] avait abandonné des créances pour un montant total de 170 000 euros, tant par la production des écritures passées à son compte courant que par les comptes de résultat de la société HMG pour les exercices 2006 et 2007, dont il résulte en 2006 un produit exceptionnel 140 000 euros ' abandon de créance à meilleure fortune' en 2007 également en produit exceptionnel 30 000 euros 'abandon de créance' ;
Qu'il n'établit pas, en revanche, que M. [W], qui le conteste, lui ait donné des directives pour rembourser cet abandon, à l'occasion de l'extinction de la dette de TVA ; qu'il ressort du courrier du 4 juillet 2012 précité que cette écriture a été passée par une collaboratrice du cabinet, sans qu'il y soit fait référence à une demande du gérant ;
Qu'il ressort, par ailleurs, du relevé des opérations passées au compte courant de M. [W] que le remboursement de cet abandon de créance a fait l'objet d'une autre écriture au crédit de ce compte, le 30 décembre 2010, soit antérieurement au contrôle de la fiscalité de la société HMG, sous le libellé 'Recup abandon compte courant' d'un montant de 170 000 euros ; que compte tenu de son intitulé, particulièrement clair, le cabinet [J] n'est pas fondé à soutenir que cette écriture passée en 2010 correspondait, en réalité, à la compensation de dépenses passée au compte courant de M. [W] pour lesquelles il n'aurait apporté aucune pièce justificative ;
Qu'en ne comptabilisant pas la contrepartie de l'extinction de la dette de TVA en profit exceptionnel de la société, mais en crédit au compte courant de M. [W], le Cabinet [J] a commis une faute dans le cadre de sa mission d'établissement de la comptabilité de HMG ;
Qu'il incombe cependant à M. [W] d'établir l'existence d'un lien de causalité direct entre cette faute, contractuelle à l'égard de la société HMG, et le préjudice dont il demande réparation ;
Que c'est à juste titre que le Cabinet [J] fait valoir que les comptes de la société HMG ont été arrêtés sous la responsabilité de son dirigeant, M. [W], lequel, de ce fait, a validé l'opération consistant à créditer son compte courant d'un montant de 108 225 euros ; qu'à tout le moins il n'a pu l'ignorer ; que l'administration fiscale, dans la proposition de rectification, notifiée à l'intimé le 30 mai 2012, a d'ailleurs rappelé que M. [W], dirigeant de droit et maître de l'affaire de la SARL HMG dont il est associé à hauteur de 90 % , détient au niveau de la société tous les leviers d'action, et que, dirigeant et bénéficiaire du crédit sur la société, il ne pouvait en ignorer l'existence ;
Que M. [W] a, en conséquence de l'écriture en litige, bénéficié d'une créance de 108 225 euros sur la société HMG, dont il pouvait demander le remboursement à tout moment ; que c'est vainement qu'il fait valoir qu'il n'a jamais perçu cette somme, qui ne lui sera jamais remboursée, compte tenu de la liquidation judiciaire de la société HMG ; qu'il apparaît, en effet, que cette procédure collective n'a été ouverte que le 26 juillet 2016 soit plus de 6 ans après l'inscription de cette somme au crédit de son compte courant, le 31 décembre 2009 ;
Qu'il résulte de la pièce 3 des appelants que la société HMG avait antérieurement fait, le 2 octobre 2009 l'objet d'une proposition de rectification, à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008, dans laquelle avaient été mises en évidence, en pages 3 et 4, des sommes portées au crédit du compte courant de M. [W] non justifiées, pour des montants de 23 622 euros en 2006, 71 666 euros en 2007 et 36 500 euros en 2008 ; qu'il y était indiqué que l'administration fiscale, en application de l'article 109-1-2° du code général des impôts , considère comme des revenus distribués tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital et que cet article établit une présomption légale de distribution à l'égard de tous les bénéfices qui ne sont pas demeurés investis dans l'entreprise quelque soit la forme de distribution ;
Que la contestation de M. [W] sur cette proposition avait été rejetée (pièce 4 des appelants) au motif qu'il apportait pour seuls justificatifs les écritures comptables passées par la société lesquelles n'étaient pas en elle-même un justificatif mais permettaient de retranscrire en comptabilité des pièces commerciales (facture, etc) ou juridiques (contrat, décision prise en assemblée générale, etc) ;
Que M. [W] ne pouvait donc ignorer en l'état de cette première vérification de la comptabilité de la société HMG et de la proposition de rectification qui en était résultée, intervenue moins de trois mois avant l'écriture en litige, que les sommes inscrites au crédit de son compte courant seraient, en l'absence de justification, considérées comme des revenus distribués ; qu'il ne pouvait qu'en tirer la conséquence de la nécessité de les déclarer, lors de l'établissement de sa propre déclaration de revenus, dont le Cabinet [J] n'était, en revanche, pas chargé ;
Que l'erreur d'écriture du Cabinet [J], dans la comptabilité de la société HMG, qui est à l'origine du redressement fiscal subi par M. [W], n'en est pas, cependant, la cause déterminante ;
Que M. [W], à la fois dirigeant et bénéficiaire du crédit sur la société, s'est sciemment abstenu de déclarer à l'impôt sur le revenu les disponibilités correspondantes ; que le redressement fiscal subi est ainsi le résultat de son choix délibéré de ne pas déclarer à l'administration fiscale la somme de 108 225 euros et non la conséquence directe de l'erreur commise par l'expert-comptable ; qu'il ne peut dès lors demander réparation au Cabinet [J] et à M. [I] des préjudices résultant de ses propres agissements, qu'il s'agisse du principal de l'impôt à acquitter sur cette somme, des intérêts de retard, de la pénalité de 40 % appliquée par l'administration pour manquement délibéré du contribuable ou des préjudices accessoires invoqués ;
Que le jugement sera en conséquence infirmé en toutes ses dispositions ;
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Attendu que M. [W], qui succombe, sera condamné aux dépens ; que ses prétentions sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile seront pour ce motif rejetées ;
Qu'il serait inéquitable que le Cabinet [J] et M. [I] conservent la charge des frais non compris dans les dépens, exposés pour se défendre en justice ; que M. [W] sera condamné à leur payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement
Infirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Marseille le 5 décembre 2016 en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Déboute M. [U] [W] de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la SARL [J]-Paris et de M. [X] [I] ;
Condamne M. [U] [W] à payer à la SARL [J]-Paris et de M. [X] [I] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [U] [W] aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Me Stéphane Gallo ;
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT