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21/03/2019 | FRANCE | N°18/08184

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-2, 21 mars 2019, 18/08184


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-2



ARRÊT AU FOND

DU 21 MARS 2019



N° 2019/141













Rôle N° RG 18/08184 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCN7C







[Q] [A]





C/



[F] [B]

DGFP

Association CARPA DE MARSEILLE

SARL SPC STONE POWER CONSULTING











Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Velen SOOBEN de la SELARL PIOS AVOCATS, avocat au barreau de M

ARSEILLE



Me Vincent CARADEC, avocat au barreau de MARSEILLE

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 18 Avril 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2018L00607.





APPELANT



Monsieu...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-2

ARRÊT AU FOND

DU 21 MARS 2019

N° 2019/141

Rôle N° RG 18/08184 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCN7C

[Q] [A]

C/

[F] [B]

DGFP

Association CARPA DE MARSEILLE

SARL SPC STONE POWER CONSULTING

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Velen SOOBEN de la SELARL PIOS AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Vincent CARADEC, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 18 Avril 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2018L00607.

APPELANT

Monsieur [Q] [A]

né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 1], de nationalité française,

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Velen SOOBEN de la SELARL PIOS AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Maître [F] [B]

ès qualités de liquidateur judiciaire de M. [Q] [A], désigné à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce de Marseille en date du 04/12/2013 confirmé par Arrêt de la Cour d'Aix en Provence du 22/10/2015 ayant étendu la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'encontre de la SARL HORS NORME (RCS 520.475.245) notamment à l'encontre de Monsieur [Q] [A],

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Vincent CARADEC, avocat au barreau de MARSEILLE

DGFP

dont le siège social est sis [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

non représenté

Association CARPA DE MARSEILLE

dont le siège social est [Adresse 4], prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

non représentée

SARL SPC STONE POWER CONSULTING

dont le siège social est sis [Adresse 5], prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

non représentée

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 06 Février 2019 en audience publique devant la cour composée de :

M. Bernard MESSIAS, Président de chambre

Madame Catherine DURAND, Conseiller rapporteur

Madame Anne CHALBOS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Mars 2019.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Mars 2019,

Signé par M. Bernard MESSIAS, Président de chambre et Madame Chantal DESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par jugement du tribunal de commerce de Marseille en date du 20 mars 2013 la société Hors Norme a été placée en redressement judiciaire, Me [F] [B] étant désigné en qualité de mandataire judiciaire.

Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire par décision en date du 5 août 2013, laquelle a été étendue le 4 décembre 2013 notamment à Monsieur [Q] [A] et Monsieur [V] [Q], associés égalitaires de la société Hors Norme.

Par arrêt définitif du 22 octobre 2015 la 8ème chambre C de la Cour d'appel d'Aix en Provence a confirmé en toutes ses dispositions le jugement attaqué par Monsieur [A].

Monsieur [A] avait été embauché le 1er avril 2013 par la société Mogador, holding du groupe des bijouteries Pellegrin, en qualité de directeur de marketing stratégie et développement, le contrat prévoyant un salaire fixe mensuel de 8.000 €et une clause de non-concurrence au profit de l'employeur en considération de laquelle une indemnité de 150.000 € était prévue en contrepartie financière à l'issue du contrat.

Monsieur [A] a été licencié pour faute grave le 28 janvier 2014.

A la suite d'un arrêt de la chambre sociale de la Cour d'appel d'Aix en Provence en date du 13 octobre 2017 la société Mogador a été condamnée à payer à Monsieur [A] :

150.000 € au titre de la contrepartie de la clause de non-concurrence,

4.000 € au titre de rappel de salaires sur la prime contractuelle du demi treizième mois,

400 € bruts au titre des congés payés y afférents,

761,80 € au titre des rappels de salaire sur la prime de fin d'année

76,18 € au titre des congés payés y afférents,

2.377,05 € bruts au titre de reliquat de congés payés.

Monsieur [A] à quant à lui été condamné à verser à son ex-employeur :

40.000 € à titre principal au titre d'un prêt personnel,

2.400 € au titre des intérêts prévus contractuellement,

3.133,33 € en remboursement d'un avis à tiers détenteur,

4.664 € au titre d'achat de bijoux.

La société Mogador suite à ces condamnations croisées, après compensation, a versé à l'avocat de son ex-salarié une somme de 89.832,65 €.

Par courriel du 11 décembre 2017 le conseil de Me [B], liquidateur judiciaire de Monsieur [A], a sommé Me Sooben, avocat de Monsieur [A], de ne pas se dessaisir des fonds détenus au profit de Monsieur [A], sollicitant qu'ils lui soient adressés, sous déduction des honoraires dus, faisant valoir que Monsieur [A] était dessaisi de ses droits pécuniaires au profit du liquidateur judiciaire en vertu de l'article L 641-9 du code de commerce.

Me Sooben s'est opposé à cette demande, soutenant que Monsieur [A] ayant agi en tant que salarié devant la juridiction prud'homale à l'encontre de son employeur au titre du contrat de travail, cette action était strictement personnelle, que l'article L 641-9 ne pouvait s'appliquer et que le liquidateur judiciaire ne pouvait appréhender la somme versée sur le compte CARPA.

Par requête en date du 12 décembre 2017 le mandataire judiciaire a demandé au juge-commissaire, en application de l'article L 641-9 du code de commerce, de constater que Monsieur [A] était dessaisi de ses droits pécuniaires, que la condamnation a des dommages et intérêts était appréhendée par l'effet réel de la procédure collective et d'ordonner à Me Sooben de verser l'intégralité des sommes détenues sur son compte CARPA dans le dossier [A]/Mogador, sous déduction de ses honoraires.

Monsieur [A] a soutenu l'incompétence du juge-commissaire au bénéfice du tribunal d'instance aux motifs que les sommes versées avaient le caractère de salaire.

Par ordonnance du 7 février 2018 le juge-commissaire s'est déclaré compétent et a ordonné que la somme consignée sur le compte CARPA de Me Sooben soit versée à Me [B] ès qualités en vertu de l'article L 641-9 du code de commerce, notant que les sommes consignées n'étaient pas des salaires futurs mais des sommes déjà consignées.

Sur l'opposition formée le 20 février 2018 par Monsieur [A] à l'encontre de cette décision, le tribunal de commerce de Marseille, par jugement réputé contradictoire du 18 avril 2018, a :

Vu les articles 73,74, 75 et 96 du code de procédure civile,

Vu l'article L 641-9 du code de commerce,

Vu l'article L 3521-1 et suivants du code du travail,

Vu l'article L 111-2 du code des procédures civiles d'exécution,

Déclaré recevable l'opposition de Monsieur [A],

Retenu la compétence du tribunal de commerce de Marseille pour examiner l'opposition de Monsieur [A],

Confirmé l'ordonnance attaquée en toutes ses dispositions,

En conséquence,

Débouté Monsieur [A] de son opposition,

Ordonné l'exécution provisoire du jugement,

Rejeté tous surplus de demandes comme non fondés et non justifiés,

Enjoint aux greffiers en chef de notifier la présente décision aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception,

Dit les dépens frais privilégiés de procédure collective.

Par acte du 15 mai 2018 Monsieur [Q] [A] a interjeté appel de ce jugement, notant comme intimé Me [F] [B] ès qualités, et comme 'parties intervenantes' la DGFP de Neuilly sur Seine, la sarl SPC Stone Power Consulting (contrôleur) et l'Association CARPA de Marseille.

Par conclusions déposées et notifiées le 15 juin 2018, tenues pour intégralement reprises, Monsieur [Q] [A] demande à la Cour de :

Vu les articles 73,74, 75 et 96 du code de procédure civile,

Vu l'article L 641-9 du code de commerce,

Vu l'article L 3521-1 et suivants du code du travail,

Vu l'article L 111-2 du code des procédures civiles d'exécution,

Confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a déclaré recevable l'opposition à l'ordonnance du juge-commissaire,

Infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a :

Retenu la compétence du tribunal de commerce de Marseille pour examiner l'opposition de Monsieur [A],

Confirmé l'ordonnance attaquée en toutes ses dispositions,

Débouté Monsieur [A] de son opposition,

In limine litis,

Dire que le juge-commissaire et plus généralement le tribunal de commerce sont incompétents pour ordonner le versement des sommes se trouvant sur le compte CARPA ouvert par Me Sooben dans la mesure où ces sommes ont un caractère de salaires selon les termes de l'arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour d'appel d'Aix en Provence le 13 octobre 2017,

Dire que le tribunal d'instance demeure exclusivement compétent en matière de saisie sur salaire,

En tout état de cause,

Dire que les sommes litigieuses échappent au principe du dessaisissement dans la mesure où celles-ci sont issues d'une action personnelle et extra patrimoniale intentée par Monsieur [A] pour faire reconnaître ses droits,

Dire qu'en l'absence de titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible Me [B] ne peut pas appréhender les fonds querellés,

Si par extraordinaire la Cour confirmait le jugement entrepris,

Dire que le versement des sommes sollicitées par Me [B] devrait être fait sous déduction de la somme de 27.071 € correspondant à la créance de l'avis à tiers détenteur du 13 décembre 2017,

Au surplus,

Débouter Me [B] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Par conclusions déposées et notifiées le 4 juillet 2018, tenues pour intégralement reprises, Me [F] [B], ès qualités de liquidateur judiciaire de Monsieur [Q] [A], demande à la Cour de :

Vu l'article L 641-9 du code de commerce,

A titre principal,

Confirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions,

Débouter Monsieur [Q] [A] de ses demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire,

Constater que Monsieur [A] doit répondre de l'intégralité du passif de la liquidation judiciaire,

Le condamner à payer à Me [B] la somme de 1.401.553,02 € correspondant au passif admis,

En tout état de cause,

Dire les dépens frais privilégiés de procédure collective.

Par conclusions communiquées le 24 janvier 2019 le Procureur général a déclaré demander l'application de la loi et la confirmation de la décision entreprise.

Par avis en date du 25 juin 2018 le greffe a informé les parties que l'affaire était fixée à l'audience du 6 février 2019 en application de l'article 905-1 du code de commerce.

Les parties intervenantes n'ayant pas constitué avocat l'arrêt sera rendu par défaut.

MOTIFS

Sur la compétence du tribunal d'instance :

Attendu que Monsieur [A] soutient que dès lors qu'il s'agit de créances de salaires la règle de saisie des rémunérations doit être impérativement respectée, cette procédure spécifique ressortant de la compétence exclusive du tribunal d'instance en vertu de l'article L 3252-6 du code du travail ;

Attendu qu'en exécution de l'arrêt de la Chambre sociale de la Cour d'appel d'Aix en Provence du 13 octobre 2017, la société Mogador a réglé le 5 décembre 2017, après compensation, la somme de 89.832,65 € au conseil de Monsieur [A] pour solder tous les comptes ayant existé entre les parties ;

Attendu que le liquidateur judiciaire, en exécution de l'article L 641-9 du code de commerce, a sollicité de l'avocat de Monsieur [A] détenteur de ces fonds déposés sur son compte CARPA, et non de l'ex-employeur de Monsieur [A] s'en étant départis, qu'il les lui fasse parvenir après règlement de ces honoraires ;

Attendu que cette demande, quelle que soit la nature desdits fonds, ne relève pas de la procédure de saisie des rémunérations supposant le versement de salaires futurs par un employeur ;

Attendu que par suite l'exception d'incompétence soulevée par Monsieur [A] au profit du tribunal d'instance est rejetée ;

Sur la règle du dessaisissement :

Attendu qu'en vertu de l'article L 641-9 du code de commerce 'I.-Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur.

Toutefois, le débiteur peut se constituer partie civile dans le but d'établir la culpabilité de l'auteur d'un crime ou d'un délit dont il serait victime.

Le débiteur accomplit également les actes et exerce les droits et actions qui ne sont pas compris dans la mission du liquidateur ou de l'administrateur lorsqu'il en a été désigné....' ;

Attendu que Monsieur [A] soutient que l'action prud'homale est strictement personnelle au salarié, échappe aux règles de dessaisissement posées par l'article L 641-9 du code de commerce, ainsi que ses éventuelles conséquences pécuniaires et que, dès lors, le liquidateur judiciaire ne peut appréhender les sommes reçues de son ex-employeur ;

Attendu toutefois que si l'action prud'homale à l'encontre de la société Mogador était exclusivement attachée à la personne de Monsieur [A] qui pouvait seul l'exercer, il n'en demeure pas moins que la somme acquittée par l'ex-employeur à la suite de l'arrêt intervenu le 13 octobre 2017 entre les mains du conseil de Monsieur [A] Me Sooben ne peut échapper au dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire de l'administration et de la disposition de ses biens ;

Attendu que cette somme est appréhendée par l'effet réel de la procédure collective ;

Attendu que le liquidateur judiciaire, pour obtenir le versement de la somme détenue par l'avocat de Monsieur [A] sur son compte CARPA, n'a pas besoin de titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, ne poursuivant pas l'exécution forcée d'une créance au sens de l'article L 111-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

Sur l'avis de tiers détenteur :

Attendu que Monsieur [A] soutient que le versement des fonds sollicités ne peut se faire que sous déduction de la somme de 27.071 € correspondant à la créance de l'avis à tiers détenteur du Centre des finances publiques SIP Neuilly adressé à la CARPA de Marseille le 13 décembre 2017 ;

Attendu que le liquidateur judiciaire fait justement valoir que l'avis à tiers détenteur a été reçu postérieurement à l'appréhension qu'il a exercée par voie amiable le 11 décembre 2017 et surtout que la DGFP, régulièrement convoquée à l'audience du juge-commissaire et qui a reçu notification de la décision du 7 février 2018 ayant ordonné à Me Sooben de verser l'intégralité des sommes détenues sur son compte CARPA dans le dossier [A]/Mogador, - sous déduction de ses honoraires à Me [F] [B], ès qualités -, ne l'a pas frappée d'opposition ni n'a comparu devant le tribunal sur le recours formé par Monsieur [A] ;

Attendu qu'il s'ensuit que le jugement du 18 avril 2018 sera confirmé en toutes ses dispositions et Monsieur [A] sera débouté de ses demandes ;

Attendu que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant par mise à disposition au greffe, publiquement et par défaut,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Marseille en date du 18 avril 2018,

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [Q] [A] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

Dit les dépens frais privilégiés de procédure collective.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-2
Numéro d'arrêt : 18/08184
Date de la décision : 21/03/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8A, arrêt n°18/08184 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-21;18.08184 ?
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