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14/03/2019 | FRANCE | N°16/13696

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 14 mars 2019, 16/13696


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2019



N° 2019/084













Rôle N° 16/13696

N° Portalis DBVB-V-B7A-67WB







SA ENEDIS





C/



[Q] [N]

[D] [N]

SA MMA IARD

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

SA GMF ASSURANCES







Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me R. SIMON-THIBAUD

Me P. KLEIN

Me O. DUFLOT

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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE en date du 07 Juillet 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 15/00153.





APPELANTE



SA ENEDIS anciennement dénommée ÉLECTRICITÉ RÉSEAU DISTRIBUTION DE FRANCE (ERDF)...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2019

N° 2019/084

Rôle N° 16/13696

N° Portalis DBVB-V-B7A-67WB

SA ENEDIS

C/

[Q] [N]

[D] [N]

SA MMA IARD

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

SA GMF ASSURANCES

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me R. SIMON-THIBAUD

Me P. KLEIN

Me O. DUFLOT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE en date du 07 Juillet 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 15/00153.

APPELANTE

SA ENEDIS anciennement dénommée ÉLECTRICITÉ RÉSEAU DISTRIBUTION DE FRANCE (ERDF),

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège [Adresse 1]

représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocate au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Martine RUBIN, avocate au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Madame [Q] [N],

demeurant [Adresse 2]

Monsieur [D] [N],

demeurant [Adresse 2]

SA MMA IARD venant aux droits de COVEA RISKS,

prise en la personne de son représentant légal en exercice

siège social [Adresse 3]

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits de COVEA RISKS,

prise en la personne de son représentant légal en exercice

siège social [Adresse 3]

Tous représentés et plaidant par Me Philippe KLEIN de la SCP RIBON KLEIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

SA GMF ASSURANCES

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège [Adresse 4]

représentée et plaidant par Me Olivia DUFLOT CAMPAGNOLI de la SCP FRANCOIS DUFLOT COURT MENIGOZ, avocate au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substituée par sa collaboratrice Me Audrey OLLIVRY-LECA, avocate au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Janvier 2019 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Jean-François BANCAL, Président, et Mme Sophie LEYDIER, Conseillère.

M. Jean-François BANCAL, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Jean-François BANCAL, Président (rédacteur)

Mme Patricia TOURNIER, Conseillère

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2019,

Signé par M. Jean-François BANCAL, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé du litige :

[D] [N] et [Q] [N] occupaient une villa située [Adresse 2], dont il est indiqué qu'elle est la propriété de la S.C.I. ORANE.

Par contrat du 19.2.2012, à effet au 1.1.2012, [D] [N] avait souscrit auprès de la société d'assurance mutuelle G.M.F. un contrat ' habitation/ DOMULTIS', garantissant cette villa.

Pour son activité d'expert judiciaire, [D] [N] avait adhéré à une assurance groupe responsabilité civile professionnelle, souscrite par le conseil national des compagnies d'experts de justice auprès de COVEA RISKS, actuellement S.A. MMA IARD et société d'assurance mutuelle MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES.

Le 26 février 2012, un incendie s'est produit dans cette villa, provoquant sa destruction et rendant toute occupation impossible.

Pour ce sinistre, la responsabilité de la société E.R.D.F, actuellement ENEDIS, a été évoquée en raison d'une 'rupture de neutre' ayant provoqué une surtension sur le réseau peu avant l'incendie.

ERDF n'a pas accepté de reconnaître sa responsabilité et d'indemniser les époux [N].

[D] [N] et [Q] [N] ont fait assigner en référé la société ERDF, devenue ENEDIS, devant le président du Tribunal de grande instance d'AIX-EN-PROVENCE afin qu'une expertise judiciaire soit ordonnée.

Par ordonnance du 31 juillet 2012, le président du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, statuant en référé, a ordonné une expertise et commis pour y procéder [X] [G].

L'expert a clôturé son rapport le 7 mai 2013.

Par acte du 31 décembre 2014, [D] [N], [Q] [N] et la société COVEA RISKS ont fait assigner la société ERDF devant le Tribunal de grande instance d'AIX-EN-PROVENCE, aux fins notamment de :

- dire qu'ERDF est responsable de l'incendie survenu le 26.2.2012,

- condamner ERDF à les indemniser,

- la condamner en conséquence à payer à la société COVEA RISKS 51 765,35 € au titre de la reconstitution des archives personnelles de [D] [N] et 24126,50€ au titre des frais d'expertise avancés par elle,

- condamner ERDF à payer aux époux [N] :

* 663 448€ au titre du préjudice mobilier,

* 50000€ pour chacun d'entre eux au titre du préjudice moral,

* 6850€ au titre du trouble de jouissance et 16840€ au titre des dégradations (route, piscine, bassin),

- condamner ERDF à payer à [D] [N] 23315,47€ au titre de son matériel professionnel,

- condamner ERDF à payer aux époux [N] 150000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire, ils demandaient une expertise aux fins de déterminer les caractéristiques techniques et l'incidence de la présence du réenclancheur SURTELEC sur les conséquences du sinistre.

La société GMF, assureur multirisque habitation de [D] [N], est intervenue volontairement.

**

Par jugement du 7 juillet 2016, le Tribunal de grande instance d'AIX-EN-PROVENCE a :

- rejeté les exceptions de nullité de l'assignation ;

- déclaré la société Garantie Mutuelle des Fonctionnaires recevable en son intervention,

- déclaré la société COVEA RISKS recevable à agir ;

- déclaré la société ERDF entièrement responsable des dommages causés le 26 février 2012 au préjudice de [D] [N] et [Q] [N];

- condamné ERDF à payer à la GMF la somme de 780 285,06 € avec intérêts au taux légal à compter du 4 septembre 2015, date des conclusions d'intervention volontaire, et capitalisation desdits intérêts dans les conditions prévues à l'article 1154 du code civil ;

- débouté la société COVEA RISKS de ses demandes ;

- débouté [D] [N] et [Q] [N] de leurs demandes au titre du matériel professionnel, du mobilier et du trouble de jouissance ;

- condamné ERDF à payer à [D] [N] et [Q] [N] la somme de 10 000 € chacun au titre de leur préjudice moral ;

- débouté ERDF de ses demandes ;

- condamné ERDF à payer à [D] [N] et [Q] [N] la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné ERDF à payer à la GMF la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- condamné ERDF aux dépens de l'instance comprenant les frais d'expertise judiciaire.

- accordé aux avocats constitués le droit de recouvrer les dépens selon les formes de l'article 699 du code de procédure civile.

**

Par déclaration reçue le 21 juillet 2016, la société ENEDIS a interjeté appel.

**

Par conclusions avec bordereau de communication de pièces notifiées par le RPVA le 20 février 2017, la société ENEDIS demande à la cour de :

REFORMER le jugement rendu par le Tribunal de grande instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 7 juillet 2016.

DECLARER irrecevable le recours formé par la GARANTIE MUTUELLE DES FONCTIONNAIRES, les conditions de la subrogation n'étant pas remplies.

REFORMER le jugement et dire et juger que la responsabilité de la société ENEDIS, anciennement ERDF, n'est pas établie, quant à l'origine et aux conséquences de l'incendie qui a détruit la maison appartenant à la SCI ORANE le 26 février 2012.

DIRE et JUGER que l'origine de l'incendie n'est pas déterminée au regard des pièces produites.

REFORMER le jugement en ce qu'il a condamné la société ERDF, devenue ENEDIS, à verser à la GARANTIE MUTUELLE DES FONCTIONNAIRES la somme de 780285,06€ avec intérêts au taux légal à compter du 4 septembre 2015, et capitalisation des intérêts.

REFORMER et DEBOUTER la compagnie d'assurances la GARANTIE MUTUELLE DES FONCTIONNAIRES de toutes ses demandes.

REFORMER le jugement rendu par le Tribunal de grande instance d'AIX-EN-PROVENCE le 7 juillet 2016 en ce qu'il a condamné la société ERDF, devenue ENEDIS, à verser aux époux [N] la somme de 10 000 € au titre du préjudice moral et 10 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de grande instance d'AIX-EN-PROVENCE le 7 juillet 2016, en ce qu'il :

a débouté la société COVEA RISKS de ses demandes

a débouté les époux [N] de leurs demandes au titre du matériel professionnel, du mobilier, du trouble de jouissance,

CONDAMNER solidairement les époux [N], la société COVEA RISKS et la GMF à payer à la société ENEDIS la somme de 10 000 € au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

DEBOUTER les intimés de leur demande d'expertise concernant le réenclencheur SURTELEC.

CONDAMNER les époux [N], la société COVEA RISKS et la GMF à payer à la société ENEDIS la somme de 8 000 € HT en application de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNER solidairement les époux [N], la société COVEA RISKS et la GMF aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise.

**

Par conclusions avec bordereau de communication de pièces notifiées par le RPVA le 7 mars 2018, la société Garantie Mutuelle des Fonctionnaires demande à la cour :

DEBOUTER la Société ENEDIS de son appel ;

CONFIRMER en tous points le jugement dont appel et plus particulièrement :

CONFIRMER le jugement en ce qu'il a reçu la Compagnie d'assurance la GMF en son intervention volontaire ;

CONFIRMER le jugement en ce qu'il a jugé la Société ENEDIS responsable de la destruction par incendie de la maison de Monsieur et Madame [N] ;

CONSTATER que la Compagnie d'assurance GMF a indemnisé Monsieur et Madame [N] ;

DIRE et JUGER que la Compagnie GMF est bien fondée à faire valoir son recours subrogatoire ;

En conséquence,

CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a CONDAMNE la Société ERDF à payer à la Compagnie GMF la somme de 780 285,06 € ;

DIRE que ces sommes porteront intérêts au taux légal et anatocisme à compter du dépôt des présentes conclusions, conformément aux articles 1153 et 1154 du code civil ;

Y AJOUTANT,

CONDAMNER la Société ENEDIS à payer à la Compagnie GMF la somme de 5 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

**

Par conclusions avec bordereau de pièces communiquées, notifiées par le RPVA le 21 décembre 2016, [D] [N], [Q] [N], la SA MMA IARD et la MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, venant toutes deux aux droits de la SA COVEA RISKS, demandent à la cour :

Vu les articles 1231 et suivants et 1245 et suivants du code civil ;

Confirmer la décision dont appel en ce qu'elle a déclaré responsable la Société ENEDIS de l'origine de l'incendie qui a ravagé la maison des époux [N] le 26 février 2012 ;

Condamner la Société ENEDIS à les indemniser de l'ensemble des conséquences de l'incendie et à les replacer dans l'état où ils se seraient trouvés si le sinistre n'avait pas eu lieu pour certaines sommes ;

L'infirmant pour le surplus ;

Condamner la Société ENEDIS à payer à la Société MMA IARD les sommes de :

- 51 765,35 € au titre de la reconstitution des archives professionnelles ;

- 27 126,50 € au titre des frais d'expertise avancés par ses soins ;

Condamner la Société ENEDIS à payer aux époux [N] :

- au titre de leur préjudice mobilier : la somme de 663 448 € ,

- au titre de leur préjudice moral : une somme de 50 000 €, chacun,

- au titre du trouble de jouissance et des dégradations (route, piscine, bassin) les sommes de 6 850 € et 16 840 € ;

- au titre du matériel professionnel de Monsieur [N] la somme de 23 315,47€

SUBSIDIAIREMENT,

- s'il n'était pas retenu les rapports non contradictoires [V] et [C], désigner tel expert qu'il plaira à la Cour avec mission de déterminer les caractéristiques techniques et l'incidence de la présente d'un réenclencheur SURTELEC sur les conséquences du sinistre ;

- au titre des frais irrépétibles : une somme de 150 000 €,

Condamner la Société ENEDIS aux entiers dépens de la présente instance.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 janvier 2019.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la responsabilité :

1°/ régime juridique applicable :

En vertu de l'article 1386-2, devenu l'article 1245 du code civil : « Le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime » .

L'article 1386 ' 3, devenu l'article 1245 ' 2 du Code civil, énonce notamment que «L'électricité est considérée comme un produit ».

Et, selon l'article 1386 ' 4 alinéa premier, devenu l'article 1245 ' 3 alinéa premier du code civil: « Un produit est défectueux au sens du présent chapitre lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre ».

Enfin, l'article 1386 ' 13, devenu l'article 1245 ' 12 du Code civil, énonce que : « La responsabilité du producteur peut être réduite ou supprimée, compte tenu de toutes les circonstances, lorsque le dommage est causé conjointement par un défaut du produit et par la faute de la victime ou d'une personne dont la victime est responsable ».

En l'espèce, en estimant que ERDF joue un rôle actif et déterminant dans la qualité de l'électricité fournie aux usagers au regard des besoins de ces derniers et de la sécurité à laquelle ils peuvent légitimement s'attendre, notamment par la transformation et le maintien de la tension appropriée, qu'elle doit donc être considérée comme producteur au sens des textes précités, et en faisant application au sinistre du régime de la responsabilité du fait des produits défectueux, le premier juge a fait une juste analyse des faits de la cause et appliqué à l'espèce les règles de droit qui s'imposaient.

Et, alors qu'en application de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions, il n'y a pas lieu d'examiner la question d'une éventuelle nullité du jugement déféré pour violation du principe du contradictoire au motif que le premier juge aurait d'office fait application de ce régime de responsabilité, soulevée par ENEDIS dans les motifs de ses conclusions, mais non reprise dans le dispositif de ses conclusions.

2°/ responsabilité :

Il résulte des explications des parties et des différentes pièces produites par elles par bordereaux de communication de pièces, et notamment, du rapport de l'expert judiciaire, dont le sérieux, la compétence et l'impartialité ne sont mis en cause par aucune des parties, comme du 'rapport technique suite (à) incident électrique' établi le 6.3.2012 par ERDF, suite au sinistre (pièce 54 des époux [N]) :

qu'il y eut le 26.2.2012, 'rupture du neutre' sur le réseau entraînant une surtension et des dommages chez plusieurs clients, qu'il s'agisse de dommages à des appareils électriques chez plusieurs personnes du secteur des Crottes à FOS sur MER ou de l'incendie survenu chez les époux [N],

qu'à la suite du sinistre, ERDF a d'ailleurs procédé à divers travaux de rénovation sur le réseau d'alimentation en électricité du quartier des Crottes,

qu'après avoir procédé par élimination des différentes causes possibles de l'incendie, le technicien commis a estimé que ' seule l'énergie électrique a contribué à initier l'incendie' et que ' c'est ... la surtension (inférieure à 400V ) générée à partir de la mise à mal de la ligne aérienne qui a du avoir des effets destructeurs sur les composants fragiles (condensateurs, varistances, cartes électroniques, etc ) des divers équipements en service dont disposaient les époux [N] ' (page 95 du rapport),

qu'il a néanmoins ajouté : « Il ne peut pas être passé sous silence le rôle aggravant qu'a été à même de jouer le réenclencheur Surtelec qui, à minima, à 3 reprises (voire peut-être plus, ce cycle se réinitialisant après 5 minutes sans disjonction), a dû autoriser la remise sous tension incidente de certains circuits du fait de potentiels réarmements automatiques du disjoncteur de branchement Gardy DB 90 suite à la «rupture du neutre». La mise en évidence de multiples lésions sur ces ensembles était nous le pensons révélatrice du processus qui a conduit à l'enchaînement dévastateur» (page 96 du rapport),

qu'il est en outre établi, qu'en vertu des normes applicables au moment de son installation, puis postérieurement, ce réenclencheur Surtelec installé en 1996, dont l'expert a relevé que son fonctionnement ' pouvait se révéler dangereux', ne devait pas être installé sur un réseau électrique concernant des locaux à usage d'habitation (pages 21 et 22 du rapport),

que si l'expert a relevé d'autres défauts affectant l'installation électrique (pages 20 et 21), il n'en a pas pour autant conclu qu'ils ont pu avoir un rôle direct dans la survenance de l'incendie.

Compte tenu des différentes pièces techniques produites qui permettent à la cour de statuer, et sans qu'il soit nécessaire de désigner un nouvel expert, il est donc établi que le produit 'électricité', livré par ENEDIS aux époux [N] le jour des faits, était 'défectueux', en raison de la surtension consécutive à la rupture du neutre et que cette défectuosité présentait une dangerosité puisque susceptible d'endommager les différentes installations et appareils électriques et qu'elle fut directement à l'origine de l'incendie de la villa des époux [N].

C'est donc avec raison que le premier juge a déclaré ERDF, devenu ENEDIS, responsable des dommages subis par les époux [N].

Pour autant, l'appelante est fondée à invoquer la faute de la victime qui fit installer un réenclencheur pourtant interdit sur une installation électrique destinée à des locaux d'habitation.

Et s'il n'est pas établi que ce réenclencheur a été à l'origine de l'incendie, il résulte cependant des recherches approfondies de l'expert judiciaire, confortées d'ailleurs par l'analyse précise et détaillée de [Y] [R], ingénieur en génie électrique, spécialiste de la conformité aux normes des installations électriques, notamment auprès de l'U.T.E. , consulté par ENEDIS (pièces 19 et 20 ), que sa présence a été un facteur 'aggravant' du sinistre.

Et, alors que l'élément déclencheur de l'incendie est bien la surtension survenue sur le réseau électrique imputable au fournisseur ENEDIS, cette faute de la victime qui a consisté à faire installer sur son réseau privatif un dispositif ne répondant pas au normes et considéré comme pouvant être dangereux, justifie, en application de l'article 1245-12 du code civil, de réduire la part de responsabilité d'ENEDIS en la fixant à 60% des conséquences dommageables du sinistre.

La décision déférée doit donc ici être partiellement réformée.

Sur les recours des assureurs :

1°/ recours de la GMF :

a) fondements du recours :

** En application de l'alinéa 1er de l'article L 121 ' 12 du code des assurances :

« L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur. »

Cette subrogation légale suppose donc que le paiement de l'indemnité d'assurance est intervenu en exécution du contrat. Elle ne peut intervenir si les conditions de la garantie n'étaient pas réunies.

Elle est également subordonnée à l'existence d'une action de l'assuré contre un tiers responsable.

Puisque l'assureur exerce les droits et actions de son assuré, le responsable peut lui opposer tous les moyens de défense qu'il aurait pu invoquer à l'encontre de la victime et notamment un partage de responsabilité avec l'assuré.

** La subrogation légale n'exclut pas l'éventualité d'une subrogation conventionnelle.

En effet, l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance peut agir contre les tiers, qui par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur, non seulement en vertu de la subrogation légale de l'article L 121 ' 12 du code des assurances, mais encore au titre de la subrogation conventionnelle dans les droits de son assuré.

Prévue par l'article 1250 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10.2.2016 applicable au litige, cette subrogation conventionnelle résulte de la volonté expresse de l'assuré, manifestée concomitamment ou antérieurement au paiement reçu de l'assureur.

Ici, l'assureur n'a pas à établir que le règlement a été fait par lui en exécution de son obligation contractuelle de garantie.

Mais il ne faut pas que l'assuré subroge son assureur après le paiement. En effet, après paiement, la subrogation est impossible en raison de l'effet extinctif de celui-ci.

La quittance subrogative ne fait pas preuve par elle-même de la concomitance de la subrogation et du paiement, laquelle doit être spécialement établie, aux termes de l'article 1250, 1° du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10.2.2016 applicable au litige.

Il incombe donc au subrogé d'établir la concomitance de la subrogation qu'il invoque et du paiement fait au prétendu subrogeant.

Tel est le cas pour l'assureur, qui après avoir indemnisé son assuré, a reçu de ce dernier en retour et dans des délais administratifs normaux, la quittance subrogative, ce dont il résulte que le paiement a été concomitant à la subrogation.

b) application à l'espèce :

En l'espèce, il est établi, notamment par un extrait du fichier immobilier, et il n'est pas contesté par les époux [N], que la villa incendiée n'était pas leur propriété, mais celle de la S.C.I. ORANE, dont [D] [N] ne justifie être ni le gérant, ni l'associé.

Pourtant, le contrat d'assurance HABITATION/ DOMULTIS souscrit pour cette maison à effet au 1.1.2012 le fut, non par cette SCI, mais par [D] [N], se déclarant ' propriétaire ou copropriétaire' de cette maison (pièce 2 de la G.M.F.).

En conséquence, c'est à juste titre qu'ENEDIS peut estimer que les sommes versées par GMF à ce dernier, au titre des dommages immobiliers, qu'il s'agisse notamment des frais de déblaiement et de reconstruction de la villa, ne le furent pas en exécution du contrat, puisque les conditions de la garantie n'étaient pas réunies à l'égard de la S.C.I. qui n'avait pas contracté avec G.M.F. et n'était donc pas l'assurée, et que [D] [N] n'était pas propriétaire de la maison incendiée.

Au surplus, il ne résulte nullement des pièces produites et notamment de la lecture des conditions particulières produites, datées du 19.2.2016, que [D] [N] aurait souscrit ce contrat d'assurance habitation pour le compte de la SCI ORANE.

C'est seulement après sinistre, lors de l'établissement des quittances, qu'il fut fait référence au 'sinistre survenu le 26 février 2012 ....ayant atteint le bien immobilier sis: [Adresse 5] appartenant à la SCI ORANE' , la majorité de ces quittances étant établies au seul nom de ' Monsieur [D] [N]', deux l'étant au nom de ' Monsieur [D] [N] agissant tant en mon nom propre qu'en ma qualité de gérant de la SCI ORANE' (quittances des 19.2.2014, 31.3.2014, correspondant à la pièce 1 de la G.M.F.) .

Ainsi, en tant qu'assureur subrogé dans les droits de son assuré : [D] [N], la GMF n'est fondée à agir sur le fondement de la subrogation légale que pour les seuls dommages concernant les biens mobiliers de l'assuré, garantis à concurrence d'un plafond de 73995 € pour 'les biens mobiliers du local principal d'habitation' et de 4047€ pour les 'biens mobiliers en séjour-Villégiature', ainsi que pour les préjudices immatériels consécutifs, dont la privation de jouissance et les frais de loyers.

Compte tenu des lettres chèques de règlement et des quittances produites (pièce 1 de la G.M.F.)., de son décompte récapitulatif du 20.5.2014 (pièce 68 des époux [N]), dont le libellé ne fait l'objet d'aucune contestation, la GMF justifie avoir ainsi réglé à son assuré, en application du contrat d'assurance, pour ces dommages mobiliers, les sommes suivantes :

- privation de jouissance et frais de relogement (notamment par lettres règlement des 26.6.2013, 4.9.2013, 8.11.2013, 20.12.2013, 3.1.2014).............................................................22462,22€

- 'solde de l'indemnité mobilière', selon quittance du 19.2.2014 et lettre chèque de paiement du 8.3.2014, la somme de .........................................................................................48833,00€

Ce qui correspond à un total de ..................................................................................71295,22€

Compte tenu du pourcentage de responsabilité laissé à la charge de son assuré, elle est donc fondée à exercer son recours subrogatoire à l'encontre de ENEDIS, au titre de la subrogation légale, pour la somme de 71295,22€ X 60% =...........................................................42777,13 €

Pour le surplus, comme indiqué précédemment, l'assureur GMF qui entend exercer l'action subrogatoire fondée sur les règles de la subrogation conventionnelle doit établir la volonté expresse de l'assuré de le subroger, manifestée concomitamment ou antérieurement au paiement reçu de l'assureur.

Il n'a cependant pas à prouver que ce règlement a été fait en exécution de son obligation contractuelle de garantie.

En l'espèce, l'examen des différentes quittances et lettres chèques de règlement produites par la G.M.F. révèle que les différents paiements (à l'exception de celui concernant l'indemnité mobilière précitée de 48833,00€) sont intervenus postérieurement aux différentes quittances établies.

En conséquence, l'assureur ne rapportant pas la preuve d'une volonté expresse de l'assuré de le subroger, manifestée concomitamment ou antérieurement au paiement, doit être débouté de ses demandes fondées sur la subrogation conventionnelle.

Ainsi, la décision déférée doit ici être réformée dans ses dispositions concernant l'assiette du recours.

2°/ recours des MMA :

Les sociétés MMA produisent :

- les conditions générales du contrat d'assurance groupe responsabilité civile n° 113 520 312, souscrit par le conseil national de compagnies d'experts de justice auprès de la SA COVEA RISKS aux droits de laquelle elles viennent, (pièce 71),

- une attestation d'assurance du 15.4.2016, établie 'pour les assureurs' par la SAS SOPHIASSUR, ainsi qu'un tableau des garanties et franchises du contrat n° 113 520 312, dont la lecture révèle que pour la période du 1.1.2012 au 31.12.2012, [D] [N] bénéficiait des garanties de ce contrat, notamment pour la reconstitution d'archives pour un plafond de 100000€.

Elles produisent également deux quittances des 29.4.2012 et 25.10.2012, portant sur les sommes de 13310€ et 20680€, en 'règlement de la reconstitution partielle d'archives professionnelles', signées par [D] [N], par lesquelles il subroge l'assureur dans ses droits (pièces 45 et 46).

Et s'il est exact que la copie de la 3ème quittance produite, portant sur la somme de 17775,37€ 'en règlement d'un support informatique de sauvegarde et de la reconstitution partielle de (ses) archives professionnelles' ne comporte ni date, ni signature, elle correspond néanmoins à un état de dépenses de reconstitution d'archives établi pour cette somme, le 6.6.2012, par [D] [N](pièce 48).

Enfin, l'expert commis a clairement indiqué que ' la reconstitution des archives professionnelles de M. [N] a été indemnisée par la compagnie Covea Risks à hauteur de 51765,35€ ', ce qui correspond au total de ces trois quittances sauf à avoir 'arrondi' à 51765,35€ la somme de 51765,37€ .

Il est donc clairement établi que cette somme a été réglée à l'assuré en application d'un contrat d'assurance et que l'assuré a entendu subroger l'assureur dans ses droits, ce qui permet à ce dernier d'invoquer le bénéfice de la subrogation légale.

Compte tenu du pourcentage de responsabilité laissé à la charge de leur assuré, les sociétés MMA sont donc fondées à exercer leur recours subrogatoire à l'encontre de ENEDIS, au titre de la subrogation légale, pour la somme de :

51765,35€ X 60% = ....................................................................................................31059,21€

Comme indiqué avec raison par le premier juge, le coût de l'expertise judiciaire étant inclus dans les dépens, leur charge déterminera la ou les personnes tenues de supporter cette dépense.

En conséquence, la décision déférée doit être partiellement réformée en ce que le premier juge a débouté l'assureur Covea Risks de son recours.

Sur les sommes réclamées par les époux [N] :

1°/ préjudice mobilier :

Les époux [N] demandent de condamner la Société ENEDIS à leur payer la somme de 663 448 € au titre de leur préjudice mobilier.

En se référant au rapport de la SARL RCIE concernant l'inventaire détaillé du mobilier de la villa, établi suite à un dire du conseil des époux [N], de façon contradictoire entre l'expert missionné par la GMF et celui missionné par ERDF devenu ENEDIS , en rappelant qu'il l'avait été, pour chaque pièce, au vu d'un plan de la maison remis par [D] [N] et suite à ses indications concernant les meubles présents dans chacune des pièces, aboutissant à une évaluation de 54495€, en estimant que les époux [N] avaient été indemnisés par leur assureur GMF à hauteur du plafond de garantie excédant donc cette somme, en conséquence, en déboutant ces derniers de leur demande d'indemnisation complémentaire concernant ce 'préjudice mobilier', le premier juge a fait une juste analyse des faits de la cause, appliqué à l'espèce les règles de droit qui s'imposaient et pertinemment répondu aux moyens des parties pour la plupart repris en appel.

À ces justes motifs que la cour adopte, il convient seulement d'ajouter :

qu'en application de l'article 9 du Code de procédure civile: ' Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.',

que les pièces 50 et 51 produites par les époux [N], fortement contestées par ENEDIS, ne suffisent pas à établir la réalité du préjudice qu'ils invoquent,

qu'en effet, si le premier document portant le titre ' état des pertes expertise' comporte 22 pages, seulement 8 émanent de l'expert 'antiquaire' qu'ils ont missionné qui reconnaît l'avoir établi d'après les dires et indications des époux [N] et quelques photographies remises par eux (pages 15 à 22),

que cependant, ce document ne comporte qu'une seule et unique photographie de l'intérieur de la villa avant sinistre concernant une vue partielle du salon (page 8),

qu'aucune autre photographie n'est donc versée relativement à la liste détaillée des différents meubles, objet de l'évaluation de ce technicien,

que le document 51, intitulé 'détail de l'état des pertes', établi par les époux [N], est essentiellement composé de pages d'écran de sites internet, donnant une valeur pour de très nombreux objets mobiliers,

que les attestations produites sont insuffisantes, en raison du caractère limité ou trop général des termes utilisées, pour établir que le préjudice mobilier subi par les époux [N], serait d'une telle ampleur et justifierait de faire droit à leur demande d'indemnisation portant sur la somme de 663 448 €.

2°/ matériel professionnel de Monsieur [N] :

Les époux [N] demandent de 'condamner la Société ENEDIS à payer aux époux [N] .... au titre du matériel professionnel de Monsieur [N] la somme de 23 315,47€ '.

S'agissant du ' matériel professionnel' de [D] [N], qui indique avoir exercé son activité d'expert judiciaire dans la villa incendiée, son épouse n'a aucune qualité pour réclamer une indemnisation à ce titre. Sa demande est donc irrecevable.

Sous l'intitulé 'matériel professionnel', [D] [N] demande à la fois une indemnisation pour :

- perte de meubles : bureau, table, fauteuils, chaises, armoires, commode, lampe, bibliothèque,

- perte de matériel technique et informatique : ordinateurs, appareils photographiques, caméra, écran et moniteur, imprimantes, sacoche, etc.

En produisant une liste de dossiers récapitulant ses missions expertales depuis 2005, établie le 28.5.2015, la copie partielle d'une décision l'ayant désigné en qualité d'expert, (pièces 60 et 61) il justifie avoir exercé cette activité d'expert depuis l'année 2006 et notamment pendant les années ayant précédé le sinistre, ainsi qu'en 2012.

Le rapport de la SARL RCIE concernant l'inventaire détaillé du mobilier de la villa, établi contradictoirement entre l'expert missionné par la GMF et celui missionné par ERDF devenu ENEDIS, révèle la présence d'un bureau dans la villa sinistrée, dont le mobilier est évalué à 2400€ (pièce 25 de ENEDIS).

Alors que la GMF a indemnisé les époux [N] au titre de leur préjudice mobilier, à la suite notamment de ce rapport, [D] [N] ne justifie pas du bien fondé de sa nouvelle d'indemnisation pour ce qu'il présente comme étant son mobilier professionnel pour une somme nettement supérieure à celle de 2400€.

Par contre, en produisant des copies de factures antérieures au sinistre, correspondant à des matériels techniques ou informatiques précis, il justifie de la perte de ce matériel pour une valeur totale de 5358,56€, les autres postes de réclamation n'étant pas justifiés par les seules pièces produites.

Compte tenu du pourcentage de responsabilité laissé à la charge des époux [N], [D] [N] est donc fondé à obtenir la condamnation de ENEDIS à lui payer au titre de la perte de son matériel professionnel la somme de :

5358,56€ X 60% =....................................................................................................... 3215,13€

3°/ dégradations (route, piscine, bassin)

Les époux [N] demandent de condamner la Société ENEDIS à leur payer 'au titre du trouble de jouissance et des dégradations (route, piscine, bassin) les sommes de 6 850 € et 16 840 € '.

Contrairement au libellé de cette demande, il ne s'agit nullement d'une demande d'indemnisation d'un 'trouble de jouissance', puisque les pièces produites à l'appui de cette réclamation sont des factures de travaux :

- facture du 28.3.2014 de la SARL MARCO MACONNERIE d'un montant de 6850€ TTC concernant l'enrobé extérieur au garage et l'allée (pièce 52),

- facture du 31.3.2014 de la SARL MARCO MACONNERIE d'un montant de 16840€ TTC concernant des travaux de réfection de la piscine et du bassin (pièce 53).

Alors qu'il a été indiqué précédemment que la SCI ORANE était propriétaire de la villa, c'est à juste titre que le premier juge a débouté les époux [N] de cette demande, étant précisé au surplus que ces postes de réclamation n'ont pas été soumis à l'appréciation de l'expert.

4°/ préjudice moral :

Alors que leur villa a été détruite dans sa quasi-totalité, que cet état de dégradation résulte clairement de l'examen des différentes photographies des lieux prises après le sinistre, que les époux [N] ont nécessairement perdu de très nombreux objets, dont certains ne peuvent être reconstitués comme les objets ou souvenirs personnels, qu'ils ont dû se reloger, faire de multiples démarches, qu'un tel sinistre les a mis dans une situation psychologique difficile au point qu'ils indiquent avoir dû consulter un médecin psychiatre, ce qui n'est pas contesté, ils justifient chacun avoir subi, en raison de ce sinistre, un important préjudice moral qui doit être indemnisé à hauteur de la somme de 30000€ pour chacun d'entre eux.

Compte tenu du pourcentage de responsabilité laissé à la charge des époux [N], chacun d'entre eux est donc fondé à obtenir la condamnation de ENEDIS à lui payer au titre de son préjudice moral la somme de :

30000€ X 60% =............................................................................................................... 18000€

Sur les dommages et intérêts pour procédure abusive demandés par ENEDIS :

Alors qu'elle ne démontre pas le caractère abusif de la procédure engagée contre elle, c'est avec raison que le premier juge a débouté ENEDIS de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile :

Compte tenu des circonstances de la cause, alors qu'elle est à l'origine du sinistre, la société ENEDIS supportera les dépens de première instance et d'appel, qui comprendront notamment le coût de l'expertise judiciaire.

Si, en première instance, l'équité commandait d'allouer aux époux [N] une indemnité de 10000€ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, il en est de même en appel et il convient de leur allouer une indemnité complémentaire du même montant, qui sera supportée par ENEDIS.

Par contre, l'équité ne commande nullement d'allouer à la GMF la moindre somme au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Enfin, il doit être relevé, qu'avec raison, le premier juge a débouté COVEA RISKS de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et que, dans ses écritures d'appel, prises concomitamment avec les époux [N], cet assureur, devenu les sociétés MMA, ne formule aucune demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile (pages 21 et 22 de ses conclusions).

PAR CES MOTIFS

LA COUR :

Statuant publiquement,

Contradictoirement,

REFORME partiellement le jugement déféré en ce que les premiers juges ont :

- déclaré la société ERDF, actuellement ENEDIS, entièrement responsable des dommages causés le 26 février 2012 au préjudice de [D] [N] et [Q] [N] ;

- condamné ERDF, actuellement ENEDIS, à payer à la GMF la somme de 780285,06€ avec intérêts au taux légal à compter du 4 septembre 2015, date des conclusions d'intervention volontaire, et capitalisation desdits intérêts dans les conditions prévues à l'article 1154 du code civil ;

- débouté la S.A. Covea Risks de son recours subrogatoire,

- débouté [D] [N] de sa demande d'indemnisation pour perte de son matériel professionnel,

- condamné ERDF, actuellement ENEDIS, à payer à [D] [N] et [Q] [N] la somme de 10 000 € chacun au titre de leur préjudice moral ;

- condamné ERDF, actuellement ENEDIS, à payer à la G.M.F. 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

STATUANT À NOUVEAU ET Y AJOUTANT,

DÉCLARE la S.A. ENEDIS, anciennement ERDF, responsable de l'incendie survenu le 26 février 2012 dans la villa située [Adresse 2] occupée par [D] [N] et [Q] [N],

DIT cependant qu'en application de l'article 1386 ' 13, devenu l'article 1245 ' 12 du Code civil, en raison de la faute des victimes ayant consisté à faire installer sur leur réseau privatif un réenclencheur Surtelec ne répondant pas au normes et considéré comme dangereux, la responsabilité de la S.A. ENEDIS doit être réduite et qu'elle doit en conséquence indemniser 60% des dommages subis,

DEBOUTE la GMF de son recours subrogatoire et de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la S.A. ENEDIS, anciennement ERDF, à payer à la SA MMA IARD et à la MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, venant toutes deux aux droits de la SA COVEA RISKS, la somme de 31059,21€ au titre de son recours,

CONDAMNE la S.A. ENEDIS, anciennement ERDF, à payer à [D] [N] et [Q] [N], pour chacun d'eux, 18000€ à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

DECLARE irrecevable la demande d'indemnisation pour perte du matériel professionnel de [D] [N] formée par [Q] [N],

CONDAMNE la S.A. ENEDIS, anciennement ERDF, à payer à [D] [N] la somme de 3215,13€ à titre de dommages et intérêts pour perte de son matériel professionnel,

CONDAMNE la S.A. ENEDIS, anciennement ERDF, à payer à [D] [N] et [Q] [N], la somme de 10000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes,

DIT que le greffe communiquera à l'expert [X] [G] une copie du présent arrêt,

CONDAMNE la S.A. ENEDIS, anciennement ERDF, aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 16/13696
Date de la décision : 14/03/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3B, arrêt n°16/13696 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-14;16.13696 ?
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