La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/03/2019 | FRANCE | N°17/04475

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-5, 07 mars 2019, 17/04475


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE


Chambre 4-5





ARRÊT AU FOND


DU 07 MARS 2019





N° 2019/








MS











Rôle N° RG 17/04475 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAE6W











O... P... Y...








C/





SA Les rapides du Littoral








Copie exécutoire délivrée


le :07 MARS 2019


à :


Me Marion LEONARD-


PALAZ

ON, avocat au barreau de GRASSE





Me Roy SPITZ, avocat au barreau de NICE



































Décision déférée à la Cour :





Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 06 Février 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 14/367.








APPELANT





Mons...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-5

ARRÊT AU FOND

DU 07 MARS 2019

N° 2019/

MS

Rôle N° RG 17/04475 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAE6W

O... P... Y...

C/

SA Les rapides du Littoral

Copie exécutoire délivrée

le :07 MARS 2019

à :

Me Marion LEONARD-

PALAZON, avocat au barreau de GRASSE

Me Roy SPITZ, avocat au barreau de NICE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 06 Février 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 14/367.

APPELANT

Monsieur O... P... Y..., demeurant [...]

représenté par Me Marion LEONARD-PALAZON, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEE

SA Les rapides du Littoral, demeurant [...]

représentée par Me Roy SPITZ, avocat au barreau de NICE substitué par Me Roman GUICHARD, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 08 Janvier 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre

Monsieur Thierry LAURENT, Conseiller

Madame Mariane ALVARADE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Caroline LOGIEST.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Mars 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Mars 2019,

Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Madame Caroline LOGIEST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur O... Y... a été embauché par la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral, en qualité de conducteur-receveur, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 14 mai 2007, avec reprise d'ancienneté à compter du 20 mars 2000, moyennant en dernier lieu un salaire de 2.829 euros.

Revendiquant l'application de la convention collective nationale des réseaux de transports urbains de voyageurs, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Nice le 6 mars 2014 afin de voir condamner l'employeur à lui payer diverses sommes à titre de rappel de salaire et diverses indemnités.

Par jugement rendu le 6 février 2017,le conseil de prud'hommes de Nice :

-s'est déclaré compétent,

-a dit que le contrat de travail liant M. Y... et la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral se trouvait régi par la loi monégasque,

-a débouté M. Y... de sa demande d'application de la convention collective nationale (française) des transports publics urbains de voyageurs à sa relation de travail avec la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral ,

-a débouté M. Y... de ses demandes,

-a débouté la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- a condamné M. Y... aux dépens.

A la suite d'arrêts de travail pour maladie professionnelle et de la visite de reprise du 2 février 2018 ayant donné lieu à un avis d'inaptitude du médecin du travail, M. Y... a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 21 mars 2018 après avis favorable de la commission instituée par l'article 6 de la loi n° 1348 du 25 juin 2008.

Aux termes de ses dernières écritures transmises par voie électronique le 15 mai 2018 M. Y... demande à la cour, de dire que le droit applicable est le droit français, de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison de l'irrégularité de la procédure de licenciement d'inaptitude et de l'absence de reclassement et de condamner la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral à lui payer les sommes de :

- 20.000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-application de la législation française et des dispositions de la convention collective des transports urbains,

- 5.823,73 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires dont l'indemnité de congés payés,

- 10.146,11 euros à titre de rappel d'indemnités de repos compensateur dont l'indemnité de congés payés,

- 10 089,03 euros à titre de rappel de primes d'ancienneté dont l'indemnité de congés payés,

- 995,44 euros à titre de rappel de prime de treizième mois dont l'indemnité de congés payés,

- 1.134,67 euros à titre de rappel de jours fériés non pris dont l'indemnité de congés payés,

- 1.560 euros à titre de dommages-intérêts pour les heures de DIF non comptabilisées,

- 1.228,08 euros de dommages-intérêts pour absence de portabilité de la mutuelle,

- 56.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

- 15.588,29 euros à titre de rappel d'indemnité de licenciement,

- 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il demande en outre de condamner la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral à une astreinte dans l'exécution de la condamnation.

Par conclusions transmises par voie électronique le 24 mai 2018 la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral a conclu à ce que le Tribunal du Travail de la Principauté de Monaco soit déclaré seul compétent pour connaître du litige, subsidiairement au débouté de M.Y... de ses prétentions, demandant de dire que le contrat de travail est régi par la loi monégasque, que les dispositions de la convention collective nationale des transports publics urbains de voyageurs sont inapplicables, et estimant que le licenciement est fondé, de le débouter de ses demandes indemnitaires et à titre subsidiaire plafonner l'indemnité allouée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en faisant application du barème légal issu de l'article L1235-3 nouveau du code du travail et de le condamner à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la compétence

Pour soutenir que les juridictions françaises seraient incompétentes pour connaître du litige au profit du tribunal du travail de la Principauté de Monaco, l'employeur fait valoir que le contrat de travail est soumis à la loi monégasque.

La société anonyme monégasque Les rapides du Littoral ne saurait se prévaloir des dispositions de l'article L 1411-1 du code du travail pour soutenir que la compétence des juridictions françaises serait limitée aux seuls contrats gouvernés par le code du travail français. Si ce texte dispose que le conseil de prud'hommes règle les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du code du travail entre les employeurs et les salariés qu'ils emploient, ces dispositions ne visent qu'à limiter la compétence du conseil de prud'hommes aux litiges nés entre les employeurs et les salariés à l'occasion de leur relation de travail et elles ne sauraient avoir pour effet de faire échec à la règle de compétence territoriale posée par l'article R 1412-1 du code du travail.

Le salarié fait valoir sans être contesté sur ces points qu'il exerce ses fonctions de conducteur receveur en dehors de tout établissement ou entreprise, que ses fonctions impliquent des prises et des fins de poste aux dépôts de bus situés à Menton et à Nice et qu'en outre, il est domicilié dans le ressort du conseil de prud'hommes de Nice.

S'agissant d'une difficulté relative à la compétence territoriale de la juridiction, la question doit être examinée à la lumière des dispositions de l'article R 1412-1 du code du travail aux termes duquel le conseil de prud'hommes territorialement compétent pour connaître des litiges entre l'employeur et le salarié est soit celui dans le ressort duquel est situé l'établissement où est accompli le travail, soit, lorsque le travail est accompli à domicile ou en dehors de toute entreprise ou établissement, celui dans le ressort duquel est situé le domicile du salarié.

Dès lors que le salarié a son domicile dans le ressort du conseil de prud'hommes de Nice et qu'il travaille en dehors de tout établissement ou entreprise, il est en droit de se prévaloir de l'article R 1412-1 du code du travail pour revendiquer la compétence de la juridiction française, sans qu'il y ait lieu de rechercher la loi applicable au litige.

La clause attributive de compétence aux juridictions monégasques incluse dans le contrat de travail ne peut valablement y déroger.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral tendant à voir déclarer le conseil de prud'hommes de Nice incompétent pour connaître du litige au profit du Tribunal du Travail de Monaco.

Sur la loi applicable

M. Y... fait valoir qu'il est de nationalité française vit en France et acquitte ses impôts en France que la loi française est applicable en vertu de la Convention de Rome du 19 juin 1980, dont l'article 3 pose le principe que le choix de la loi choisi par les parties doit résulter de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause; qu'en l'espèce en l'absence de contrat écrit il n'a été fait aucun choix exprès de la loi applicable mais que la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral a accepté d'appliquer une convention collective française, et la prestation de travail se déroulait en grande partie sur le territoire français, s'agissant d'une activité de transport au départ de Nice; qu'à défaut de choix exprès, les éléments suivants tendent en faveur de l'application de la loi française :

- le lieu habituel de travail du salarié est situé en France : seul le dépôt de Nice constitue le lieu effectif de travail, le siège social de la société situé au [...] à Monaco n'est qu'un bureau vide où aucun salarié n'exerce d'activité et la prestation de travail du salarié s'effectue quasi-exclusivement en France le salarié ne se rendant jamais dans les locaux monégasques lors de l'exécution de sa relation contractuelle (les prises et fin de service s'effectuent en France, les temps de pause sont pris en France, les têtes de ligne et terminus se situent en France( sauf la ligne 112), les véhicules conduits sont tous entreposés en France, les instructions pour l'exécution des missions sont données en France;

- le contrat de travail présente des liens étroits avec la France: l'implantation du siège social à Monaco est fictive, les locaux monégasques sont vides et la direction est implantée à Nice, le compte bancaire de la société est français, l'absence de coordonnées monégasques ne permet pas de joindre la société dont les coordonnées sont celles de la société RCA dont les locaux sont tous en France, le lieu et la monnaie de paiement sont en France aucun courrier n'est adressé aux salariés depuis Monaco;

- la SA Les rapides du Littoral applique une convention collective française et a donc accepté spontanément de se soumettre à la législation française ;

- en tout état de cause, il n'est pas possible de déroger aux dispositions impératives du droit du travail français, notamment au régime légal des heures supplémentaires qui est d'ordre public et aux dispositions relatives au respect de la procédure de licenciement et à la motivation de celui-ci.

La SA Les rapides du Littoral réplique que la loi applicable est la loi monégasque pour les motifs suivants :

-le Règlement Rome I n° 593/2008 du 17 juin 2008 est applicable aux contrats de travail signés à partir du 17 décembre 2009 et la Convention de Rome du 19 juin 1980 reste applicable aux contrats conclus postérieurement ;

-en l'absence de clause contractuelle expresse, les juges recherchent les indices résultant des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause (article 3.1 de la Convention de Rome), leur permettant de déterminer la volonté des parties sur le choix de la loi applicable ;

-ainsi, l'existence d'une clause attributive de juridiction, désignant la juridiction monégasque seule compétente pour connaître des litiges relatifs au contrat, constitue un indice explicite de la volonté des parties de soumettre le contrat à la loi monégasque;

- la présente cour d'appel en a jugé ainsi par arrêt du 8 juin 2017 n°15/04715;

-de nombreux autres indices s'ajoutent à ceux-ci : la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral est une société de droit monégasque, son siège social est situé à Monaco, elle a ses comptes bancaires à Monaco ; certaines prises de service du salarié ayant lieu sur la Principauté ; le contrat a été conclu à Monaco le salarié est affilié à une caisse d'assurance maladie monégasque les documents d'embauche de M.Y... le démontrent même en l'absence de contrat de travail ; l'embauche était subordonnée à l'autorisation préalable de la Direction de la Main-d'oeuvre monégasque; la caisse de retraite est une caisse monégasque et les charges sociales sont versées auprès des caisses sociales de Monaco (CCSSS) ; la société applique la majoration des 5 % monégasques sur l'ensemble des primes conventionnelles ; elle applique la durée du travail monégasque, soit 169 heures par mois ;

-la société applique le calendrier des jours fériés monégasque qui comporte un jour férié supplémentaire

-les éléments qui précèdent constituent tous des indices au sens de la Convention de Rome démontrant que les parties ont volontairement fait le choix de se soumettre à la loi monégasque.

-les allégations de la salariée relatives à la fictivité du siège social ne sont pas fondées et le centre d'exploitation de la société n'est nullement situé à Nice, les véhicules sont immatriculés à Monaco et le contrôle technique a lieu à Monaco, l'ensemble des lignes desservent à la fois la France et Monaco de sorte que les salariés travaillent à la fois en France et à Monaco.

La Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelle applicable au contrat de travail signé entre les parties, précise en son article 3 intitulé « Liberté de choix » que « 1 - Le contrat est régi par la loi choisie par les parties. Ce choix doit être exprès ou résulter de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause. Par ce choix, les parties peuvent désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat... ».

M. Y... a été embauché par la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral domiciliée à Monaco, en qualité d'ouvrier conducteur receveur pour un salaire de base mensuel de 1550 euros pour une durée de travail hebdomadaire de 39 heures soit 169 heures de travail qui est la durée du travail en vigueur à Monaco, que la Caisse de retraite est l'AMRR, qui est une caisse monégasque, que le salarié est affilié à la caisse d'assurance maladie monégasque.

Il est constant que les lignes de bus exploitées par la SA Les rapides du Littoral desservent des villes côtières entre Nice et Menton, via des arrêts sur Monaco. Les plans de ligne 100,101,102, 110,112 relient les communes de Nice, Menton, Beausolieil, Eze, Roquebrune, via Monaco avec plusieurs arrêts à Monaco pièces 4-1 à 9. Au surplus, il ressort du planning produit en pièce 24 que la prise de service et la fin de service pouvaient s'effectuer au dépôt de Monaco. Il est donc démontré que le salarié accomplissait son travail tant sur Monaco que sur le territoire français.

Il résulte ainsi, de façon certaine, des circonstances entourant la conclusion du contrat de travail et de celles de son application que les parties ont tacitement entendu se soumettre à la loi monégasque, peu important que la société Les rapides du Littoral ait décidé de faire une application de la convention collective française des transports routiers et activité auxiliaire du transport à défaut de tout autre convention collective applicable sur le territoire monégasque.

Il convient donc de dire juger que le contrat de travail liant M.Y... à la SA Les rapides du Littoral était régi par la loi monégasque choisie par les parties.

Ce choix peut ne concerner qu'une partie du contrat, en vertu de l'article 3.1 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 qui précise que : « par ce choix, les parties peuvent désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat ».

S'agissant de la rupture du contrat de travail, au cas de M.Y... , il ne résulte pas de la lettre de licenciement que l'employeur ait fait application de la loi française en lieu et place de la loi monégasque.

Cependant, aux termes de l'article 6.1 de la Convention de Rome du 19 juin 1980, « dans le contrat de travail, le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable, à défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 du présent article ».

Il n'est pas prétendu qu'une autre loi que la loi française serait applicable, à défaut du choix de la loi monégasque, et il n'est pas discuté que les dispositions impératives de la loi française doivent s'appliquer au contrat de travail liant les parties.

Sur la convention collective applicable

M. Y... ne prétend pas que l'application de la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs est une norme impérative du droit français.

Il discute de l'applicabilité de la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs, en fonction de l'activité économique principale de la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral , dans le cadre de l'application de la loi français au contrat de travail.

Or, il a été rappelé ci-dessus que c'était la loi monégasque qui était applicable à l'exécution du contrat de travail liant les parties.

Le salarié se bornant à demander l'application de la loi française, sans prétendre que la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs est une norme impérative, son argumentation est sans portée utile .

Au surplus, l'activité de transport de voyageurs exercée par la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral apparaît comme étant une activité de transport interurbain.

Il convient de dire et juger qu'en l'absence de convention collective des transports existant en droit monégasque, seule la convention collective des transports routiers et activités auxiliaires de transport, dont la société de droit monégasque Les rapides du Littoral a fait une application volontaire, est applicable à la relation salariale.

Sur les dommages-intérêts pour non-application de la législation nationale et des dispositions de la convention collective des transports urbains

Cette demande est subséquente à celles ci-dessus examinées et auxquelles la cour n'a pas fait droit. M. Y... en sera débouté.

Sur les demandes salariales

Sur le rappel d'heures supplémentaires dont l'indemnité de congés payés :

M.Y... revendique l'application des dispositions impératives de la loi française en matière de durée du travail et de rémunération des heures supplémentaires. Il sollicite en conséquence le paiement des majorations dues sur heures supplémentaires effectuées au-delà de 35 heures hebdomadaires, ainsi que les congés payés afférents.

La société anonyme monégasque Les rapides du Littoral réplique que la durée légale du travail en France (35 heures hebdomadaires) n'est pas considérée comme une règle impérative au sens de la Convention de Rome, la loi française permettant elle-même une dérogation par accord collectif, d'une part, à la durée hebdomadaire de travail et, d'autre part, au montant de la majoration pour heures supplémentaires et que, dès lors, M.Y... doit être débouté de sa demande de ce chef.

Le choix par les parties de la loi monégasque ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi française. Il résulte des dispositions de l'article 3.3 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que les dispositions impératives d'une loi sont celles auxquelles cette loi ne permet pas de déroger par contrat.

Alors que la loi monégasque prévoit une durée hebdomadaire de travail de 39 heures, sans paiement de majoration des heures effectuées entre la 36ème et la 39ème heure, la loi française fixe la durée légale de travail à 35 heures hebdomadaires. S'il peut être dérogé à cette durée de travail, des heures supplémentaires effectuées au-delà de la 35ème heure doivent cependant être rémunérées à un taux horaire majoré.

Ces dispositions impératives du droit français, qui protègent les salariés en matière de la rémunération des heures supplémentaires effectuées au-delà de 35 heures hebdomadaires de travail, sont donc plus favorables que le droit monégasque.

En conséquence, il sera fait droit à la réclamation du salarié en paiement des majorations sur heures supplémentaires exécutées au-delà de 35 heures hebdomadaires. Il convient de se réfèrer pour le calcul détaillé de la créance à ses écritures de première instance p 33 dès lors que la saisine n'est pas du 28 janvier 2014 mais du 6 mars 2014 de sorte que la date de référence est celle du 6 mars 2009 et non celle du 28 janvier 2009.

Sur le rappel d'indemnités de repos compensateur dont indemnité de congés payés :

Cette demande est subséquente à la précédente.

Le salarié qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur en temps utile, a droit à l'indemnisation du préjudice subi ; celle-ci comporte à la fois le montant de l'indemnité de repos compensateur et le montant de l'indemnité de congés payés afférents.

En conséquence, il sera fait droit à la réclamation du salarié sous la réserve de date ci-après rappelée.

Sur le rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté :

M.Y... qui percevait une prime d'ancienneté correspondant à 12 % de son salaire de base brut, réclame le paiement d'un rappel de sa prime d'ancienneté calculé sur le rappel de salaire alloué au titre de la majoration sur heures supplémentaires.

Cette demande est subséquente à la demande en paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires.

En conséquence, il sera fait droit à la réclamation du salarié sous la réserve ci-dessus rappelée.

Sur le rappel de prime de 13ème mois :

En l'état du rappel de prime d'ancienneté alloué ci-dessus, M.Y... réclame le paiement d'un rappel de prime de 13ème mois selon le calcul détaillé et exact sous la réserve ci-dessus rappelée.

Il convient de faire droit à sa réclamation.

Sur le rappel de salaire sur jours fériés :

M. Y... réclame le paiement de jours fériés en France (8 mai, 14 juillet, 11 novembre), donnant lieu à majoration sur salaire, en application de l'article 32 de la convention collective.

M. Y... a cependant perçu le paiement majoré des jours fériés monégasques, tel que cela résulte de l'examen de ses bulletins de paie.

Alors que le droit monégasque concernant les jours fériés est plus favorable que le droit français M. Y... ne justifie pas d'une perte de salaire en jours fériés.

Au surplus, la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs, dont le salarié revendique l'application au titre de la majoration des jours fériés travaillés, n'est pas applicable à la relation salariale.

En conséquence, M. Y... sera débouté de ce chef de demande.

Sur les dommages-intérêts pour les heures de DIF non comptabilisées

La disposition légale du droit français dont le salarié revendique l'application n'est pas impérative.

En conséquence, M. Y... sera débouté de sa demande.

Sur les dommages-intérêts pour absence de portabilité de la mutuelle,

La disposition légale du droit français dont le salarié revendique l'application n'est pas impérative.

En conséquence, M.Y... sera déboutée de sa demande.

Sur le licenciement

A la suite d'arrêts de travail depuis octobre 2015 pour maladie professionnelle et de la visite de reprise du 2 février 2018 ayant donné lieu à un avis d'inaptitude du médecin du travail, M. Y... a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement après avis favorable de la commission instituée par l'article 6 de la loi n° 1348 du 25 juin 2008,par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 21 mars 2018.

M.Y... soutient que le licenciement a été prononcé aux termes d'un avis médical non précédé d'une étude de poste et des conditions de travail ni d'échanges avec le salarié, qu'il n'y a eu ni entretien préalable ni consultation des délégués du personnel.

Il soutient que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement en ne recherchant pas de reclassement au sein du groupe Transdev auquel il appartient ni au sein du GIE Atriv06 Services regroupant 18 sociétés.

L'employeur répond que c'est la loi monégasque qui est applicable au cas d'espèce, que M.Y... a été licencié après avis favorable de la commission statuant sur son licenciement, en présence notamment de l'Inspecteur du travail, du médecin du travail, de l'employeur, conformément a la législation monégasque.

Il précise que la recherche de reclassement n'avait pas à être effectuée au sein du groupe ni au sein du GIE auxquels il appartient et qu'il a été proposé quatre postes à M. Y... déclarés par le médecin du travail comme étant conformes à son état de santé, que le salarié a refusés en raison de leur localisation.

Les dispositions impératives de la loi française en matière de procédure de licenciement s'imposent.

Le licenciement prononcé en raison de l'état de santé d'un salarié dont l'inaptitude n'a pas été constatée conformément aux exigences du double examen médical est nul en application de l'article R.4624-31 du code du travail sus-visé.

Au cas de M. Y... le licenciement a été prononcé en une seule visite médicale de reprise, en violation des dispositions impératives de l'article R.4624-31 du code du travail selon lesquelles:

« Le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du salarié à son poste de travail que s'il a réalisé :

1° Une étude de ce poste ;

2° Une étude des conditions de travail dans l'entreprise ;

3° Deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés, le cas échéant, des examens complémentaires ;

Par ailleurs l'employeur n'a pas respecté les dispositions de l'article L1226-10 du code du travail en ne recherchant pas sérieusement un poste adapté aux capacités du salarié déclaré inapte à la conduite mais apte à un poste sédentaire en lui proposant des postes situés à Mulhouse, Nîmes et Carcassonne sans rechercher au sein de ses filiales un poste mieux adapté à son état.

Enfin, il n'est justifié d'aucune consultation des délégués du personnel ni de la tenue d'un entretien préalable au licenciement.

En conséquence, compte tenu des demandes des parties telles qu'elles résultent de leurs conclusions et de ces éléments et eu égard au préjudice subi par le salarié comptant une ancienneté de 18 années, il lui sera alloué la somme de 45.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (en réalité nul).

En outre M. Y... a droit en vertu de l'article L1226-14 du code du travail à une indemnité de licenciement doublée soit un rappel d'indemnité tel que fixé au dispositif ci-après.

Sur les autres demandes :

Il n'est pas nécessaire d'assortir l'exécution du présent arrêt d'une astreinte.

Sur les dépens et les frais non-répétibles :

La société anonyme monégasque Les rapides du Littoral qui succombe pour l'essentiel de ses prétentions, doit supporter les dépens et il y a lieu de la condamner à payer à M.Y... une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme de 3.000 euros, au titre des frais de première instance et d'appel; la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral doit être déboutée de cette même demande.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud'homale,

Confirme le jugement rendu le 6 février 2017 par le conseil de prud'hommes de Nice en ce qu'il s'est déclaré compétent, en ce qu'il a dit que le contrat de travail liant les parties était régi par la loi monégasque, en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande d'application de la convention collective nationale (française) des transports publics urbains de voyageurs à la relation de travail , en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes en paiement d'un rappel de salaire au titre des jours fériés, et en ce qu'il a débouté la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

L'infirmant et statuant à nouveau des seuls chefs infirmés,

Dit et juge que le contrat de travail liant les parties était régi par la loi monégasque, à l'exception des dispositions impératives de la loi française,

Condamne la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral à payer à M. Y... :

- 4.394,30 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires et congés payés y afférents,

- 7.878,86 euros bruts à titre de rappel d'indemnités de repos compensateur et congés payés y afférents,

- 747,02 euros bruts à titre de rappel de prime d'ancienneté et congés payés y afférents,

- 774,20 euros bruts à titre de rappel de prime de 13ème mois et congés payés y afférents,

- 45 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 15.588,29 euros à titre de rappel d'indemnité de licenciement.

Y ajoutant,

Déboute M. Y... de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour non-application de la législation française et de la convention collective des transports urbains,

Déboute M. Y... de sa demande en paiement de dommages-intérêts au titre des heures de DIF non comptabilisées,

Dit que les créances salariales sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation, avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 devenu 1343-2, du code civil,

Condamne la société anonyme monégasque Les rapides du Littoral aux dépens de première instance et d'appel, et à payer à M. Meriaux la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit qu'il n'y a pas lieu d'assortir l'exécution de la présente décision d'une astreinte,

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-5
Numéro d'arrêt : 17/04475
Date de la décision : 07/03/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°17/04475 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-07;17.04475 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award