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28/02/2019 | FRANCE | N°17/00528

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-5, 28 février 2019, 17/00528


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-5



ARRÊT AU FOND

DU 28 FEVRIER 2019



N° 2019/

MA











Rôle N° RG 17/00528 - N° Portalis DBVB-V-B7B-72XI







[S] [H]





C/



SAS TRANS SUD EXPRESS

























Copie exécutoire délivrée

le :28 FEVRIER 2019

à :



Me Christine CASABIANCA, avocat au barreau D'AIX-EN-

PROVENC

E



Me Philippe MAGNAN, avocat au barreau des ALPES DE HAUTE-

PROVENCE



































Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 19 Décembre 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F14/01085.




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COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-5

ARRÊT AU FOND

DU 28 FEVRIER 2019

N° 2019/

MA

Rôle N° RG 17/00528 - N° Portalis DBVB-V-B7B-72XI

[S] [H]

C/

SAS TRANS SUD EXPRESS

Copie exécutoire délivrée

le :28 FEVRIER 2019

à :

Me Christine CASABIANCA, avocat au barreau D'AIX-EN-

PROVENCE

Me Philippe MAGNAN, avocat au barreau des ALPES DE HAUTE-

PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 19 Décembre 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F14/01085.

APPELANT

Monsieur [S] [H], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Christine CASABIANCA, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

INTIMEE

SAS TRANS SUD EXPRESS

Dont le siège social est [Adresse 2]

représentée par Me Philippe MAGNAN, avocat au barreau des ALPES DE HAUTE-PROVENCE substitué par Me Auriel DUCHENAUD, avocat au barreau de LYON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Décembre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Mariane ALVARADE, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre

Monsieur Thierry LAURENT, Conseiller

Madame Mariane ALVARADE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Caroline LOGIEST.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Février 2019, prorogé au 28 février 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 février 2019

Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Madame Caroline LOGIEST, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

Mr [S] [H] a été engagé par la société à responsabilité limitée (SARL) TRANS SUD EXPRESS en qualité de conducteur super lourd, coefficient 150, à compter du 18 avril 2011, suivant contrat à durée indéterminée, moyennant un salaire brut moyen mensuel qui était en dernier lieu de 2 543,33 euros à raison de 151,67 heures par mois.

La SARL TRANS SUD EXPRESS a pour activité principale le transport routier de fret et de proximité. Elle est plus précisément spécialisée dans la location de véhicules industriels avec chauffeurs dans le domaine exclusif de la messagerie. Les chauffeurs ont pour mission de livrer les cargaisons d'une plateforme à une autre.

Mr [H] était affecté sur la ligne [Localité 1]/[Localité 2] -[Localité 2]/[Localité 1].

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des transports routiers et des activités annexes.

La SARL TRANS SUD EXPRESS employait habituellement au moins onze salariés au moment du licenciement.

Se prévalant de manquements de son employeur et en particulier dans le règlement de ses heures supplémentaires, Mr [H] a saisi la juridiction prud'homale le 8 août 2014 aux fins d'obtenir sa condamnation.

Le 7 janvier 2016, il était convoqué à un entretien préalable à une sanction disciplinaire.

Il faisait par suite l'objet d'une mise à pied disciplinaire de 3 jours, du 9 au 11 février 2016, sanction qu'il contesta.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, Mr [H] a été convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement fixé au 4 mai 2016 et par lettre du 9 mai 2016, adressée sous la même forme, il a été licencié pour faute grave.

Mr [H] a réactualisé ses demandes, contestant son licenciement.

Par jugement rendu le 19 décembre 2016, le conseil de prud'hommes de Nice l'a débouté de l'intégralité de ses demandes.

Mr [H] a interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas critiquées.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 6 avril 2017, Mr [H], appelant, demande à la cour de :

- constater le non paiement de l'intégralité des heures supplémentaires effectuées,

- constater que la société TRANS SUD EXPRESS s'est rendue coupable de l'infraction de travail dissimulé,

- faire droit à la demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société TRANS SUD EXPRESS en raison de ses manquements graves devant produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- constater que le licenciement pour faute grave prononcé par la société TRANS SUD EXPRESS est dénué de cause réelle et sérieuse et revêt en outre un caractère abusif,

En conséquence,

- réformer le jugement entrepris,

- condamner la société TRANS SUD EXPRESS à lui verser les sommes suivantes :

* 2 543,33 euros à titre de fixation du salaire brut moyen,

* 2 543,33 euros à titre d'indemnité de licenciement,

* 5 086,66 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 508,66 euros à titre de congés payés y afférents,

* 25 433,30 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 67 987,60 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires outre la somme de 6 798,76 euros à titre de congés payés y afférents,

* 15 259,98 euros au titre du travail dissimulé,

* 1633,44 euros à titre de rappel de salaire en application de la rémunération minimale conventionnelle outre la somme de 163,35 euros à titre de congés payés y afférents,

* 15 652,22 euros à titre de rappel de salaire au titre de la prime du travail de nuit outre la somme de 782,61 euros au titre du repos compensateur y afférents,

* 16 317,65 euros au titre des indemnités de repas impayées outre le paiement de la somme de 1 631,77 euros au titre des congés payés y afférents,

* 267,35 euros à titre de rappel de salaire découlant de la mise à pied disciplinaire injustifiée notifiée, outre la somme de 26,74 euros au titre des congés payés y afférents,

* 950,00 euros à titre de dommages-intérêts pour retard de la visite médicale d'embauche et absence de visites périodiques,

* 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

* 2000,00 euros à titre de dommages et intérêts exécution déloyale du contrat de travail,

- voir ordonner sous astreinte de 50 euros par jour la remise des bulletins de paie rectifiés sur l'ensemble de la relation contractuelle,

- condamner la société TRANS SUD EXPRESS à lui verser la somme de 3500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 29 mai 2017,la SARL TRANS SUD EXPRESS, intimée, demande à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et plus précisément, de constater la mauvaise manipulation volontaire et répétée de son chronotachygraphe par Mr [H], ce, nonobstant les sanctions disciplinaires prononcées, ce qu'il reconnaît en cause d'appel,

- constater que Mr [H] a été parfaitement rempli de ses droits en matière de rémunération des heures de travail,

- constater qu'aucun manquement ne peut être rapporté à son encontre,

- dire régulier et bien fondé le licenciement de Mr [H],

- débouter Mr [S] [H] de toutes ses demandes,

Statuant à nouveau :

- débouter Mr [S] [H] de sa demande indemnitaire au titre d'une rupture brutale et vexatoire du contrat de travail,

- condamner Mr [S] [H] à verser la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 25 octobre 2018.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au jugement déféré.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur

Mr [H] allègue un certain nombre de manquements qu'il considère suffisamment graves pour justifier le prononcé de la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur.

Il reproche à la SARL TRANS SUD EXPRESS :

- le non paiement de l'intégralité des heures supplémentaires effectuées,

- l'absence de remise des équipements de travail et l'état des camions mis à sa disposition,

- l'absence de remise de ses relevés d'heures après la lecture de sa carte conducteur,

- la déduction sur ses bulletins de paie de sommes en tant qu'acomptes.

Sur les heures supplémentaires

L'article L 3171-4 alinéa 1 du code du travail énonce : « En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. ».

Il résulte de ces dispositions que la preuve des heures supplémentaires n'incombe spécialement à aucune des parties et, si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires.

Mr [H] fait valoir qu'il effectuait de nombreuses heures supplémentaires demeurées impayées,

que par courrier du 7 mai 2014, il réclamait le paiement de 109 heures supplémentaires qu'il soutenait avoir effectuées en février 2014 et sollicitait par suite le paiement de 126 heures, accomplies de février à juillet 2014,

qu'il percevait une somme de 750 euros qu'il pensait être le paiement desdites heures, mais qui correspondait en réalité à un acompte sur salaire et percevait ainsi des acomptes jusqu'en août 2014 sans les avoir réclamés,

que la SARL TRANS SUD EXPRESS se contentait tous les mois de décompter sur ses bulletins de paie le même nombre d'heures supplémentaires, soit 38,33 heures, majorées à 25 %, lui appliquant un forfait mensuel de 211 heures jusqu'au mois de janvier 2012 à janvier 2014, puis de 190 heures à compter de cette date, alors qu'il n'y a jamais consenti,

que c'est ainsi que le conseil de prud'hommes de Nîmes a écarté le forfait de 190 heures mis en place par la Société France LIGNE EXPRESS, pour éviter d'avoir à appliquer la majoration de 50 %, les sociétés FRANCE LIGNE EXPRESS et TRANS SUD EXPRESS ayant depuis lors fusionné pour n'en former qu'une,

que l'employeur, pour se préserver de toute action prud'homale, demandait à ses salariés de positionner le sélecteur du chronotachygraphe sur la position « lit », dès lors que leur camion se trouvait à quai, alors qu'ils ne pouvaient librement vaquer à leurs occupations et restaient ainsi à sa disposition de façon permanente,

que l'employeur va se servir de « ces petits arrangements » pour prétendre qu'il aurait falsifié ses disques, le licencier pour faute grave et tenter d'échapper au paiement des sommes qui lui sont dues,

qu'alors qu'il était en poste sur la ligne [Localité 1] ' [Localité 2], il a été affecté sans motif valable sur la ligne [Localité 1] ' [Localité 3] ' [Localité 2], puis sur la ligne [Localité 1] ' [Localité 4] ' [Localité 4] ' [Localité 1], ce qui avait pour conséquence d'alourdir sa charge de travail,

Il indique qu'il ressort de la lecture de la carte conducteur qu'il a accompli :

- 3231,22 heures au titre de 2012 pour 2532 heures décomptées sur les bulletins de salaire,

- 2990,53 heures au titre de 2013 pour 2532 heures,

- 3010,48 heures au titre de 2014 pour 2301 heures,

- 3126,33 heures au titre de 2015 pour 760 heures.

Il sollicite la condamnation de l'employeur au paiement d'une somme totale de 67 987,60 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires outre les congés payés y afférents, calculée comme suit :

- 2012 : 3231,22 - 2532 = 699,22 x 9,58 = 6698,52 x 50 % = 10 047,78 euros

- 2013 : 2 990,53 - 2532 = 458,53 x 9,9858 = 4 578,79 x 50% = 6 868,18 euros

- 2014 : 3010,48 - 2301,00 = 709,48 x 9,9858 = 7 084,73 x 50% =10 627,09 euros

- 2015 : 3126,33 - 760,00 = 2 366,33 x 9,9858 = 23 629,70 x 50% = 35 444,55 euros.

Il soutient que la longueur des tournées et la charge de travail entraînaient inéluctablement l'accomplissement d'heures supplémentaires,

qu'il était par ailleurs à la disposition de l'ensemble des autres sociétés du groupe auquel appartient la société TRANS SUD EXPRESS, aux termes d'un avenant au contrat de travail du 1er novembre 2011,

que la société enfreignait les dispositions de l'article 7 du Décret n°83-40 du 26 janvier 1983, relatif aux modalités d'application des dispositions du code du travail concernant la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises, qui prévoient que la durée du travail effectif ne peut dépasser dix heures, le temps de service du personnel roulant, ne devant pas être supérieure à la durée quotidienne du travail effectif, dans la limite de 12 heures,

qu'il débutait sa journée de travail à 4h du matin pour la terminer à 19h/19h30, effectuant ainsi, environ 8 heures de conduite pour le compte de son employeur et restant à sa disposition pendant 7h30,

que la SARL TRANS SUD EXPRESS était encore en infraction avec les dispositions du règlement CE n° 561/2006 du 15 mars 2006, qui précise en son article 6 que la durée totale de conduite totale accumulée au cours de deux semaines consécutives ne doit pas dépasser 90 heures, alors qu'il a accumulé à plusieurs reprises, plus de 90 heures de conduite par quinzaine.

La SARL TRANS SUD EXPRESS précise à titre liminaire que Mr [H] était affecté en dernier lieu sur la ligne « [Localité 4]-[Localité 4]-[Localité 4]-[Localité 4] '', soit un trajet de 6 heures et non de 8 heures comme prétendu.

Elle rétorque que Mr [H] était payé sur une base de 211 heures, pour des raisons de commodités liées à l'impossibilité matérielle de lire les cartes de conducteur immédiatement après le dernier jour du mois et qu'elle procédait au règlement d'un salaire correspondant à 211 heures mensuelles, soit :

- 151, 67 heures au taux normal

- 38,33 heures au taux de 25 %

- 21 heures au taux de 50 %.

- 126 heures en majoration pour travail de nuit.

que cette manière de procéder n'a rien d'illégal dès lors que les heures réellement effectuées par le salarié ont toujours été inférieures à la rémunération forfaitaire qu'il percevait, ainsi que cela résulte des relevés d'activité,

qu'en définitive, Mr [H] se plaint d'avoir reçu une rémunération pour des heures de travail qu'il n'a pas réalisées,

que dans son premier courrier de réclamation, Mr [H] sollicitait uniquement le paiement de 109 heures supplémentaires à compter du mois de février 2014, puis réévalué à 126 heures devant la juridiction prud'homale, qu'il fixe aujourd'hui le nombre d'heures réalisées entre le 1er janvier 2012 et le 31 septembre 2014, à 1 615,20 heures,

que Mr [H] présente sa demande de façon globale, en additionnant les amplitudes de travail découlant de la lecture de la carte conducteur et en en soustrayant les heures figurant sur ses bulletins de salaire de l'année, alors que le calcul des heures supplémentaires doit s'effectuer, sauf dispositions dérogatoires, dans le cadre de la semaine civile conformément à l'article L3122-1 du code du travail, de sorte qu'il n'est pas permis d'identifier, semaine par semaine, les heures supplémentaires prétendument réalisées et le taux de majoration applicable,

que Mr [H] omet encore de soustraire les périodes de congés payés pris entre 2012 et 2014 ainsi que les temps de repos qu'il a nécessairement pris chaque jour, la législation des transports routiers imposant un temps de repos de 45mn minimum après 4h30 de conduite, et alors même qu'il formule une demande de rappel d'« indemnité de casse-croûte »,

que Mr [H] admet par ailleurs dans son courrier du 7 mars 2014 qu'il effectuait tous les jours les mêmes horaires, en dernier lieu sur la ligne [Localité 4]/[Localité 4]/[Localité 4]/[Localité 4] et ce, avec un départ à 4h45,

qu'en ce qui concerne la mission de Mr [H], elle s'arrêtait à la livraison des marchandises de plateforme en plateforme, qu'il ne participait pas aux opérations de chargement et déchargement, ces dernières étant effectuées par le personnel en place appartenant aux sociétés clientes.

Au vu des pièces produites par les parties et des observations formulées, la cour relève :

que s'il est exact que les bulletins de salaire mentionnent un total d'heures de 211, de janvier 2012 à janvier 2014, date à laquelle il est indiqué 190 heures, la comparaison desdits bulletins avec les relevés d'heures sur la période comprise de 2012 à 2016 permet de constater qu'aucun dépassement au delà de ce quota d'heures n'a pas été effectué, de sorte que le salarié a bénéficié, pour une part, d'une rémunération qui ne lui était pas due,

que le salarié ne peut sérieusement prétendre que l'employeur a reconnu lui devoir des sommes au titre des heures supplémentaires, en lui versant des acomptes à hauteur de 4250 euros de mai à août 2014, alors que les sommes en cause ne correspondent pas aux 109 heures qu'il réclamait à l'époque, représentant une somme de 1 333,88 euros,

qu'il réclame le paiement d'heures supplémentaires selon une méthode de calcul annuel global impropre à restituer la réalité des heures effectivement accomplies au-delà des 35 heures par semaine, les temps de pause et les congés payés n'étant pas déduits,

qu'il ne peut non plus prétendre que sa durée de travail était systématiquement de 8 heures, alors qu'il était affecté en dernier lieu sur un trajet de 6 heures,

qu'il indique avoir manipulé le chronotachygraphe à la demande de l'employeur, alors qu'il a fait l'objet d'une mise en demeure de cesser ses agissements, ainsi que d'un avertissement et qu'il a reconnu le caractère volontaire de ces manipulations,

que paradoxalement, l'employeur a constaté que le chronotachygraphe s'est trouvé en position « mise à disposition » entre le 31 décembre 2015 à 11H, à la fin de son service, et le 1er janvier 2016 à 17H.

qu'en dehors de ses heures de conduite, il soutient qu'il était mis à disposition de l'employeur pendant 7H30 par jour, expliquant notamment effectuer les chargements et déchargements entre deux livraisons, ce qui augmentait son temps de travail,

que cependant, il résulte du dossier et en particulier d'attestations de salariés qu'«  il n'y a ni déchargement, ni chargement du camion, encore moins de surveillance de la marchandise et de nettoyage de quai » et du contrat type plan de transport GLS, que les livraisons se font sur les plateformes logistiques appartenant à la société GLS qui possède ses propres employés en charge de la réception des marchandises et de leur déchargement, Mr [H] produisant lui-même un message téléphoné (sms) échangé avec l'employeur, lui indiquant « Bonsoir. Merci d'attendre que GLS ait 'ni de te vider ... '',

que Mr [H] ne démontre pas qu'il restait à disposition de l'employeur en dehors des temps de conduite,

qu'il apparaît ainsi à l'examen des relevés d'activité, que pendant plus de deux ans, du 1er janvier 2012 à février 2014, soit antérieurement au conflit, en dehors des temps de conduite, et entre deux livraisons, le sélecteur de carte était placé en mode « repos » et qu'à compter de mars 2014, le salarié alternait durant ses coupures le mode « repos '' et le mode « mise à disposition ''.

Il résulte de ce qui précède que Mr [H] ne fournit pas à la cour d'éléments fiables aux fins d'étayer sa demande de rappel de salaire, étant observé que ses bulletins de salaire mentionnent des heures supplémentaires majorées à 25 %, à 50 % et au titre du travail de nuit.

C'est donc justement que les premiers juges ont débouté Mr [H] de ses demandes au titre du rappel pour heures supplémentaires et des congés payés y afférents, du rappel de salaire au titre du travail de nuit et au titre du repos compensateur y afférent.

Comme l'ont relevé les premiers juges, compte tenu des manipulations irrégulières du chronotachygraphe, Mr [H] ne peut qu'être débouté de sa demande au titre des repas impayés à hauteur de 16 317,65 euros et des congés payés y afférents, en l'absence de justifications.

Mr [H] doit par ailleurs être débouté de sa demande subséquente pour travail dissimulé.

Sur la déduction d'acomptes sur les bulletins de paie

Mr [H] fait valoir que l'employeur a usé de stratagèmes pour éviter d'avoir à régulariser sa situation, lui proposant de lui verser à compter du mois de mai 2014, une somme correspondant au paiement des heures supplémentaires effectuées, que c'est ainsi qu'il percevait une somme de 750,00 euros, qu'il pensait être une régularisation intervenant au titre du paiement de ses heures supplémentaires, qu'en réalité, il s'agissait d'un acompte qu'il n'avait pas sollicité, que l'employeur fait en outre une confusion entre l'avance, non récupérable et l'acompte entièrement récupérable et correspondant en principe, en application de l'article L. 3242-1 du Code du travail, pour une quinzaine, à la moitié de la rémunération mensuelle du salarié, versé lorsque ce dernier en fait la demande, que l'employeur ne démontre pas qu'il ait effectué une telle demande.

Cependant, il a été constaté que l'employeur a opéré des versements à hauteur de 4250 euros de mai à août 2014, alors que les sommes revendiquées par Mr [H] se chiffraient à environ 1 333,88 euros pour 109 heures supplémentaires. En outre, Mr [H] n'aurait pas manqué de faire part de sa surprise à son employeur, après avoir constaté le versement d'acomptes s'il ne les avait pas réellement sollicités.

Au regard de ces éléments, il ne peut prétendre avoir cru à une régularisation au titre des heures supplémentaires à laquelle aurait procédé l'employeur.

Sur les conditions de travail - l'absence de remise des équipements de travail et l'état des camions mis à sa disposition,

Mr [H] explique que suite à ses réclamations, il a été affecté à la conduite de camions usés, aux fauteuils déchirés, ne répondant aucunement aux normes de confort et de sécurité qu'un chauffeur est en droit d'attendre, produisant les photographies de son véhicule.

La SARL TRANS SUD EXPRESS observe que ces photographies ne sont pas datées et ne prouvent pas que le véhicule en cause est celui qui était conduit par Mr [H], indiquant que les véhicules sont présentés aux contrôles techniques dans les conditions légales pour permettre leur circulation.

Elle rappelle en outre les obligations des salariés quant à l'entretien de leur véhicule.

Mr [H] ne démontre pas le non respect des normes essentielles de sécurité, par l'employeur de nature à entraîner de sa part une violation de ses propres obligations.

L'absence de confort du véhicule mis à disposition, dès lors que celui-ci remplit son office, apparaît en tout état de cause insuffisant à caractériser un manquement grave de l'employeur, susceptible de légitimer la résiliation du contrat de travail.

Sur l'absence de production des relevés de carte au titre de 2011 et 2016

Mr [H] fait valoir qu'en l'absence des relevés de carte 2011 et 2016, il a été dans l'impossibilité de démontrer la réalité des heures supplémentaires accomplies et par conséquent des sommes dues sur ces années. Il sollicite une indemnité forfaitaire à hauteur de 5 000,00 euros, somme au demeurant non reprise en son dispositif.

Il incombe encore à Mr [H] de fournir au préalable tous éléments permettant d'apprécier le bien fondé de sa demande. Tel n'est pas le cas en l'espèce, au vu des précédents développements.

Sa demande de dommages et intérêts pour non production des relevés d'activité au titre de 2011 et 2016, qui ne repose sur aucun fondement, sera en conséquence rejetée.

Sur l'application d'un taux horaire inférieur au taux minimal conventionnel

Mr [H] se prévaut des termes de l'accord relatif à la revalorisation des rémunérations, applicable au 1er avril 2011, qui prévoit l'application d'un taux horaire de 9,58 euros pour les conducteurs super poids lourd au coefficient 150M, porté à 9,9858, à compter du 1er janvier 2013, par l'accord du 19 décembre 2012 relatif aux rémunérations annuelles garanties, faisant valoir que son salaire a toujours été calculé en fonction du taux erroné de 9,58 euros, puis de 9,79 à compter du 1er janvier 2013.

Il sollicite un rappel de salaire pour les années 2012, 2013 et 2014 à hauteur de 1633,44 euros, outre la somme de 163,34 euros au titre des congés payés y afférents.

Les avenants invoqués n° 101 et 102 en date des 16 avril 2012 et 19 février 2013, qui concernent les transports routiers de voyageurs, sont toutefois inapplicables en l'espèce.

Sur le non respect des visites médicales périodiques

Conformément à l'article R. 4624-10 du code du travail, le salarié bénéficie d'un examen médical avant l'embauche ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai par le médecin du travail ;

Que les salariés soumis à une surveillance médicale renforcée en application de l'article R. 4624-18 ainsi que ceux qui exercent l'une des fonctions mentionnées à l'article L. 6511-1 du code des transports bénéficient de cet examen avant leur embauche ;

Mr [H] fait valoir que sa visite d'embauche a eu lieu le 4 juillet 2011, soit postérieurement à sa période d'essai, que le retard par l'employeur dans l'organisation d'une telle visite, constitue un manquement à son obligation de sécurité et cause inévitablement un préjudice au salarié, que l'employeur n'organisera pas non plus de visite périodiques conformément à ses obligations légales.

Il sollicite une somme de 950 euros à titre de réparation.

En l'espèce, l'employeur a tardivement organisé la visite médicale préalable à l'embauche et ne justifie pas avoir fait convoquer le salarié aux visites périodiques, conformément aux prescriptions légales.

La demande de dommages et intérêts est par conséquent fondée.

Le préjudice résultant de l'absence d'organisation de visites médicales sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 500 euros et le jugement infirmé de ce chef.

Il résulte toutefois de ce qui précède que les manquements subsistants ne permettent pas de justifier le prononcé de la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur, étant observé que certains des manquements allégués étaient bien antérieurs à la saisine du conseil de prud'hommes et n'ont pas empêché la poursuite du contrat de travail.

Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail :

La lettre de licenciement en date du 9 mai 2016 est ainsi motivée :

« Nous vous avons convoqué à un entretien en date du 4 mai dernier, entretien auquel vous vous êtes présenté assisté de M. [F] [G], délégué du personnel de la société RG TRANSPORTS.

Les faits qui vous étaient reprochés sont les suivants :

Sur le mois de mars 2016, vous avez commis 7 infractions au repos quotidien, ainsi que 4 infractions à la durée hebdomadaire de travail. Pour rappel, la liste de ces infractions a été présentée lors de notre entretien du 4 mai 2016, et une copie de cette liste est jointe à ce courrier.

Il apparaît que ces infractions sont générées non pas par l'organisation du travail au sein de la société RG TRANSPORTS ou le cahier des charges de la tournée sur laquelle vous êtes affecté, mais bien par une manipulation volontaire que vous effectuez sur le chronotachygraphe de votre véhicule.

Pour rappel, nous vous avons alerté à plusieurs reprises pour des faits similaires, en vous adressant les correspondances ci-dessous :

- Un rappel à l'ordre le l er juillet 2015,

- Un avertissement le 2 novembre 2015,

- Une mise à pied disciplinaire d'une durée de trois jours le 27 janvier 2016.

Pour autant, vous avez persisté dans un comportement fautif.

Nous vous reprochions également, en date du 17 mars 2016, d'avoir embourbé votre véhicule à [Localité 5], après un stationnement d'une durée d'1h40 avec le sélecteur de votre chronotachygraphe en position « travail ». Après vérification, la ligne sur laquelle vous êtes affecté n'implique aucun passage par [Localité 5], où nous n'avons ni site, ni client, ni obligation. Vous avez-vous-même reconnu que cet arrêt n'était pas lié à une activité professionnelle. Il s'agit donc d'un temps de pause que vous avez, une fois de plus, volontairement transformé en temps de travail déclaré.

Comme nous vous l'avons déjà signalé lors de nos précédents entretiens et échanges, ces manipulations délibérées génèrent des temps de travail indu, ainsi que des infractions au Code du Travail et à la Réglementation Sociale Européenne.

Vos explications ne sauraient en aucun cas justifier votre attitude, qui ne relève pas de l'erreur mais de la faute.

La récurrence de vos agissements nous conduit à vous signifier par la présente votre licenciement pour faute grave, sans indemnité ni préavis.

Vous cesserez donc de faire partie des effectifs de la société RG TRANSPORTS dès la première présentation de ce courrier.

... »

La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et justifie la cessation immédiate du contrat de travail .

Il résulte du dossier que le 1er juillet 2015, l'employeur adressait au salarié une lettre de mise en demeure libellée en ces termes « Nous constatons une nouvelle fois une dérive quant à l'utilisation du chronotachygraphe de votre véhicule.

En dépit de plusieurs rappels verbaux, vous persistez à utiliser votre chronotachygraphe sur la plage « travail '' ou la plage « mise à disposition '' délibérément et de manière injustifiée.

Il est évident que vous effectuez volontairement une mauvaise manipulation de ce chronotachygraphe pour créer des heures de travail effectif qui en réalité, correspondent à des plages de repos.

...

En conséquence, nous vous mettons en demeure de manipuler correctement vos chronotachygraphes et ce, sans délai. »

que par lettre du 2 novembre 2015, il lui était notifié un avertissement,

qu'au cours du premier trimestre 2016, il commettait pas moins de sept infractions au repos quotidien et quatre infractions à la durée hebdomadaire du travail,

que le 15 janvier 2016, lors de l'entretien préalable à une sanction disciplinaire qui s'est déroulé en présence du délégué du personnel, Mr [F] [G], lequel a indiqué que Mr [H] avait déclaré que « ces manipulations étaient faites volontairement et qu'il allait y remédier. ''.

qu'après avoir contesté les faits en première instance, puis les avoir reconnus en entretien, en cause d'appel, il implique son employeur, sans pour autant apporter le moindre commencement de preuve,

Au vu ce ce qui précède, la faute grave est caractérisée.

Le licenciement étant motivé par une faute grave, le salarié ne peut prétendre au préavis, à l'indemnité compensatrice de préavis, ni à l'indemnité de licenciement, et sera débouté du surplus de ses prétentions d'indemnisation mal fondées compte tenu de l'issue de l'appel.

Sur les dépens et les frais non-répétibles :

Mr [H] qui succombe pour l'essentiel de ses prétentions, doit supporter les dépens et il y a lieu de le condamner à payer à la SARL TRANS SUD EXPRESS une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme de 800 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud'homale,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a débouté Mr [S] [H] de sa demande de dommages et intérêts, du chef de l'absence d'organisation de visite médicale préalable à l'embauche dans les délais et de visites médicales périodiques,

Statuant à nouveau du chef infirmé,

Condamne la SARL TRANS SUD EXPRESS à payer à Mr [S] [H] une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'organisation des visites médicales à l'embauche dans les délais prescrits et de visites médicales périodiques,

Y ajoutant,

Condamne Mr [S] [H] à payer à la SARL TRANS SUD EXPRESS une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mr [S] [H] aux dépens d'appel,

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-5
Numéro d'arrêt : 17/00528
Date de la décision : 28/02/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°17/00528 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-02-28;17.00528 ?
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