La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/02/2019 | FRANCE | N°17/06044

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-1, 19 février 2019, 17/06044


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE


Chambre 1-1





ARRÊT AU FOND


DU 19 FEVRIER 2019


A.V


N° 2019/




















Rôle N° RG 17/06044 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAI2S











J... D...








C/





SCP W... L... T... M... X...
































Copie exécutoire délivr

ée


le :


à :Me Badie


Me Guedj


























Décision déférée à la Cour :





Jugement du Tribunal de Grande Instance de Marseille en date du 16 Mars 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 14/11779.








APPELANT





Monsieur J... D...


né le [...] à MARSEILLE (13000), demeurant [...]





représenté par Me Roselyne...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1

ARRÊT AU FOND

DU 19 FEVRIER 2019

A.V

N° 2019/

Rôle N° RG 17/06044 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAI2S

J... D...

C/

SCP W... L... T... M... X...

Copie exécutoire délivrée

le :

à :Me Badie

Me Guedj

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Marseille en date du 16 Mars 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 14/11779.

APPELANT

Monsieur J... D...

né le [...] à MARSEILLE (13000), demeurant [...]

représenté par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté par Me Valérie PICARD, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

INTIMEE

SCP W... L... T... M... X...

poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié [...]

représentée par Me Paul Guedj de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Thomas D'JOURNO, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Cyrille BARAN, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 08 Janvier 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame VIDAL, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Anne VIDAL, Présidente

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Février 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Février 2019,

Signé par Madame Anne VIDAL, Présidente et Madame Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Suivant acte d'huissier en date du 1er octobre 2014, M. J... D... a fait assigner la SCP W... L... T... M... X... devant le tribunal de grande instance de Marseille pour voir engager sa responsabilité civile professionnelle, reprochant à Me T... un manquement à son devoir de conseil lors du changement de régime matrimonial intervenu le 10 septembre 2008 pour transformer le régime de séparation des biens adopté en 1989 avant son mariage, en un régime de communauté universelle, sans lui avoir proposé une clause de reprise des apports, Mme A... Q..., son épouse, ayant déposé une requête en divorce en décembre 2012 et le divorce des époux ayant été prononcé le 19 mai 2014. Il réclamait la condamnation de la SCP de notaires et de Me T... solidairement à lui payer, en réparation du préjudice subi, une somme de 2 millions d'euros.

Par jugement contradictoire rendu le 16 mars 2017, le tribunal de grande instance de Marseille a déclaré les demandes formées par M. J... D... contre Me T... irrecevables à défaut de l'avoir attrait en justice et a débouté le demandeur de toutes ses prétentions contre la SCP W... L... T... M... X..., le condamnant aux dépens et au paiement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a retenu que le notaire qui n'avait connaissance que du patrimoine immobilier des époux, ceux-ci ayant déclaré ne détenir aucun autre bien, notamment s'agissant de M. J... D... la participation à titre majoritaire au capital d'une clinique psychiatrique, n'avait aucun motif de proposer aux époux une clause de reprise des apports, ceux-ci étant équilibrés de part et d'autre, et chacun des époux ayant déclaré n'avoir aucune créance à l'égard de l'autre. Il a observé que le changement de régime matrimonial avait été homologué par le tribunal avec le concours d'un avocat et qu'il n'avait pas été relevé la nécessité de prévoir une clause de reprise des apports.

Il a ajouté à titre surabondant que M. J... D... ne démontre pas que, si cette clause avait été proposée par le notaire et acceptée par Mme A... Q..., il aurait conservé son patrimoine et notamment les liquidités dont il disposait, en dépit d'une prestation compensatoire nécessairement conséquente.

M. J... D... a interjeté appel de cette décision suivant déclaration en date du 29 mars 2017.

¿¿¿¿¿¿¿¿¿¿¿¿¿¿¿

M. J... D..., suivant ses dernières conclusions notifiées le 26 septembre 2017, demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de :

- débouter Me T... de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- dire que Me T... instrumentant en qualité de notaire associé de la SCP W... L... T... M... X... a commis une faute délictuelle dans l'exercice de ses fonctions, lors du changement de régime matrimonial du 10 septembre 2008 portant sur l'adoption du régime de la communauté universelle entre M. J... D... et Mme A... Q... son épouse, aux lieu et place de 'la séparation de corps et de biens',

- dire que la faute a causé un préjudice direct, certain et réparable à l'égard de M. J... D... que l'on qualifie de perte de chance évaluée à la somme de 2 000 000 euros,

- dire la SCP W... L... T... M... X... solidairement responsable des conséquences dommageables de la faute commise par son associé, Me T...,

- condamner solidairement Me T... et la SCP W... L... T... M... X... à payer à titre de dommages et intérêts à M. J... D... la somme de 2000000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- condamner solidairement Me T... et la SCP W... L... T... M... X... à payer à titre de dommages et intérêts à M. J... D... la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

- dire que, dans l'hypothèse où, à défaut de règlement spontané, l'exécution forcée devrait être réalisée par l'office d'un huissier, le montant des sommes retenues par l'huissier en application de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 (tarif des huissiers) sera supporté par tout succcombant en sus des frais irrépétibles et des dépens.

Il explique qu'il était actionnaire majoritaire d'une clinique psychiatrique qui a été rachetée en 2008, ce qui lui a permis de recevoir une somme de 8 977 428 euros sur son compte, déduction faite des frais fiscaux ; que Mme A... Q..., son épouse, a souhaité juste après procéder à la modification du régime matrimonial pour passer de la séparation de biens adoptée avant le mariage à la communauté universelle et que quatre ans seulement après, elle a souhaité divorcer ; qu'elle a alors perçu près de 5 000 000 euros lors du partage tout en conservant son appartement de Paris qui n'avait pas été apporté lors du changement de régime matrimonial.

Il soutient que Me T... a manqué à son devoir de conseil en ne prévoyant pas d'inclure une clause permettant aux époux, conformément à l'article 265 du code civil, de reprendre les biens apportés à la communauté ; que le notaire ne peut se retrancher derrière le fait qu'il n'a pas participé à la cession des parts de la clinique dès lors qu'il pouvait aisément s'informer sur le patrimoine des époux ; que la quasi intégralité du patrimoine appartenait à M. J... D... et que Me T... ne l'a pas averti de la possibilité de réintégrer ses biens propres dans l'hypothèse d'une dissolution du régime matrimonial pour une cause autre que le décès ; que Me T... ne peut prouver avoir rempli son obligation d'information par écrit alors que son client, M. J... D..., médecin psychiatre aurait dû tout savoir ; que le fait que Mme A... Q... ait été informée qu'elle pouvait exclure certains biens propres ne permet pas de considérer que M. J... D... était informé qu'il pouvait également exclure ses liquidités.

Il ajoute que compte tenu de l'âge des époux (55 ans pour lui et 46 ans pour elle), il n'y avait pas lieu de protéger le conjoint survivant, les enfants étant encore mineurs et chacun détenant des biens suffisants ; que l'équilibrage du patrimoine prétendument recherché était inutile ; que l'âge des époux devait permettre d'évoquer l'hypothèse d'un divorce. Il prétend qu'il n'avait en réalité aucun besoin ni aucun intérêt de changer de régime matrimonial et qu'en tout état de cause, s'il avait connu la possiblité d'insérer la clause de reprise, il aurait demandé à ce qu'elle soit insérée.

Il fait valoir, concernant le préjudice, que Mme A... Q... a conservé ses biens propres (alors que lui-même n'a plus de bien immobilier) et qu'elle a reçu une somme de 4684506 euros, alors même qu'elle n'avait rien apporté à la communauté ; qu'il souhaitait protéger son épouse en cas de décès mais pas en cas de divorce ; qu'il est conscient que, de toute façon, il aurait dû verser une prestation compensatoire à son épouse, ce qui fait qu'il réclame, non pas 4 600 000 euros mais seulement 2 000 000 euros ; qu'il y a une perte de chance réparable.

La SCP W... L... T... M... X..., en l'état de ses conclusions notifiées le 27 juillet 2017, demande à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et en conséquence de :

- déclarer irrecevables les demandes de M. J... D... dirigées à l'encontre de Me T... qui n'est pas partie à la procédure,

- dire que l'objectif poursuivi par les époux D... était un partage du patrimoine entre les époux et la transmission dans les meilleures conditions possibles du patrimoine aux enfants,

- dire qu'à la date de l'établissement de l'acte, le patrimoine des époux tel qu'il a été décrit au notaire n'était pas déséquilibré,

- en conséquence, dire que Me T... n'a pas failli à son obligation de conseil,

- dire qu'en tout état de cause, M. J... D... n'établit pas subir un préjudice né, certain et actuel résultant de la perte de chance raisonnable de se prévaloir d'une clause de reprise des apports,

- en conséquence, débouter M. J... D... de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions comme totalement infondées et injustifiées,

Ajoutant au jugement,

- condamner M. J... D... au paiement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel.

Elle présente l'argumentation suivante :

1- sur la faute :

¿ les époux D... voulaient changer de régime matrimonial, la séparation de biens ne s'imposant plus puisque M. J... D... arrêtait toute activité professionnelle à la suite de la cession des parts détenues dans la clinique ;

¿ Me T... n'avait pas participé aux actes de cession des parts sociales, l'acte de changement de régime matrimonial n'en fait aucun état et M. J... D... n'a pas déclaré de patrimoine propre immobilier, ni des liquidités ou placements importants qu'il aurait pu exclure, comme l'a fait son épouse pour deux biens immobiliers ; au regard des déclarations faites par les époux au notaire, leurs patrimoines n'étaient pas déséquilibrés, en l'état de l'apport d'une villa à Marseille appartenant pour moitié en indivision aux deux époux, revendue en 2011 pour un bien à Neuilly ; Mme a conservé un appartement propre à Megève, lequel a été vendu ensuite pour acquérir un terrain sur lequel a été édifiée une construction, devenue bien commun à défaut de clause de remploi de l'épouse ; si ce bien de Megève avait été acheté avec les fonds propres de M.(ce qui n'est pas démontré), cela ferait ressortir de sa part une intention libérale puisque l'acte a été passé au nom de sa seule épouse pendant la séparation de biens et M. n'était plus en mesure de contester cette qualité de bien propre, ayant déclaré n'avoir aucune créance contre son épouse; Mme a également conservé un appartement à Paris car il lui venait d'une donation de ses parents qui auraient alors dû intervenir à l'acte ;

¿ s'il n'a pas été fait mention dans l'acte des dispositions de l'article 265 alinéa 3 du code civil, c'est que cette clause (dite 'clause alsacienne' avant l'entrée en vigueur de la loi du 23 juin 2006) ne s'imposait pas au regard de l'équilibre des apports respectifs et des objectifs poursuivis par les époux qui étaient de procéder à un partage de leur patrimoine et d'assurer une meilleure transmission à leurs enfants, le régime de la séparation adopté avant le mariage au regard des professions respectives des époux, ne s'imposant plus ; en outre, M. avait bien la volonté d'équilibrer le patrimoine des époux puisqu'il dit avoir financé des acquisitions faites au nom de son épouse qui s'était arrêtée de travailler pour s'occuper des deux enfants ;

¿ au moment du changement de régime matrimonial, rien ne laissait supposer qu'un évènement pourrait se produire à bref délai ; les époux avaient plusieurs projets immobiliers et ils voulaient mettre en commun leurs biens, sans léser leurs enfants, raison pour laquelle ils n'avaient pas non plus inséré de clause d'attribution intégrale de la communauté au survivant ; cette volonté d'équilibrer les patrimoines ressort également de l'absence de déclaration de remploi de Mme lors de la vente de l'appartement de Megève, après le changement de régime matrimonial ; le régime de la communauté universelle n'est pas destiné aux époux âgés puisque de toute façon la transmission successorale se fait, depuis la loi d'août 2007, en franchise de droits de succession, mais constitue un outil de mise en commun des biens pour remplir des objectifs patrimoniaux ;

¿ M. J... D..., médecin et chef d'entreprise, ne peut soutenir qu'il ne connaissait pas les tenants et aboutissants du régime adopté.

2- sur le préjudice :

¿ M. J... D... ne démontre pas, comme il l'affirme, qu'il aurait conservé la somme de 9000000 euros après la cession de ses parts de la clinique, les assurances-vie acquises après la cession ne se retrouvant pas telles quelles dans l'acte de partage de la communauté, ni le compte BNP sur lequel les fonds auraient été versés ;

¿ en tout état de cause, si la clause alsacienne avait été appliquée, M. J... D... n'aurait pas pu récupérer l'intégralité des liquidités apportées à la communauté dès lors qu'elles n'ont pas été investies en immobilier, à défaut de clause de remploi lors de l'édification de la construction sur le terrain de Megève, et qu'elles ne se retrouvent pas en nature ; la communauté partagée n'est pas composée des seuls biens de M. J... D... ;

¿ enfin, Mme A... Q... aurait pu solliciter une prestation compensatoire conséquente et M. J... D... ne produit aucun élément permettant d'en apprécier le montant ; Mme A... Q... aurait pu obtenir une somme supérieure à celle de 2 600 000 euros estimée par M. J... D... si elle n'avait pas reçu la moitié des placements financiers existant au jour de la liquidation du régime matrimonial.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 27 novembre 2018.

MOTIFS DE LA DECISION :

Attendu que M. J... D... a fait assigner la SCP W... L... T... M... X... seule, à l'exclusion de Me T..., de sorte que ses demandes en paiement à l'encontre de ce dernier sont irrecevables ; que le jugement sera donc confirmé sur ce point ;

Attendu que M. J... D... agit en responsabilité contre l'étude notariale en reprochant à Me T... de n'avoir pas rempli son devoir d'information et de conseil en omettant, d'une part de l'informer pleinement sur les avantages et les risques de l'adoption du régime de la communauté universelle, d'autre part de lui conseiller d'insérer dans l'acte de changement de régime une clause de reprise des apports en cas de dissolution du mariage pour une cause autre que le décès ;

Attendu, s'agissant du conseil et de l'information donnés à M. et Mme D... quant à l'adoption du régime de la communauté universelle, qu'il convient d'observer que les époux sont venus trouver Me T... pour procéder au changement de leur régime matrimonial en raison de la survenance d'un évènement de nature à justifier qu'il soit mis un terme au régime de séparation adopté lors de leur mariage, en 1989, puisque M. J... D..., qui exerçait des fonctions dans une clinique psychiatrique avait cédé ses parts et que le risque à l'égard des créanciers qui avait justifié l'adoption de la séparation de biens n'existait plus ;

Que M. J... D... avait manifestement l'intention d'équilibrer les droits patrimoniaux des deux époux puisqu'il avait déjà, pendant la période de séparation de biens, financé l'acquisition d'un appartement à Megève au nom de son épouse, estimant ainsi que cette acquisition contribuerait à compenser le fait que celle-ci avait cessé d'exercer sa profession de kinésithérapeute pour se consacrer à sa famille ; que Me T... n'avait aucune raison de déconseiller le choix du régime de communauté universelle, compte tenu de la situation des époux et de l'objectif recherché ; que, comme le fait observer justement le notaire, le choix de ce régime n'est pas réservé aux époux en fin de vie à des fins fiscales puisque, depuis la loi TEPA de 2007, le conjoint survivant est exonéré de droits de succession, mais répond au voeu des époux, quel que soit leur âge, de partager l'ensemble de leurs biens en vue de la réalisation de projets communs, or, les époux D... ont, dans les années qui ont suivi immédiatement ce changement de régime, vendu l'appartement de Megève pour acheter un terrain et y construire un chalet et vendu la maison de Marseille où ils demeuraient pour déménager à Neuilly où ils ont acheté un appartement ;

Que la lecture même de l'acte permet de comprendre que les deux époux ont été informés de la signification de l'adoption d'un régime de communauté universelle puisqu'il y est fait état, en page 2, de l'avertissement suivant concernant les biens communs :

'La communauté comprendra tous les biens meubles et immeubles que les époux posséderont au jour du jugement d'homologation du changement de régime matrimonial, à l'exception des biens et droits immobiliers ci-après désignés et appartenant en propre à Madame D..., ou qu'ils acquerront par la suite ensemble ou séparément, ou qui leur adviendront à quelque titre que ce soit, notamment par suite de donation, succession, legs ou autrement, y compris les biens que l'article 1404 du code civil déclare propres par leur nature, sans exception ni réserve. ';

Que, même si Me T... n'a pas fait signer à M. J... D... un formulaire de reconnaissance d'information donnée, les termes mêmes de l'acte notarié et l'information que celui-ci n'a pas manqué de solliciter s'il ne comprenait pas ces termes permettent de considérer qu'il était, comme son épouse, renseigné sur la signification de la mise en communauté des biens, meubles et immeubles, et sur la possibilité, offerte à chacun des deux époux, d'en exclure certains biens destinés à rester propres, comme l'a fait Mme A... Q... pour deux biens immobiliers ;

Que c'est donc en vain que M. J... D... soutient que Me T... ne l'aurait pas suffisamment informé sur les risques et inconvénients de l'adoption d'une communauté universelle et sur le fait qu'il aurait pu en exclure certains biens propres, notamment les fonds qu'il venait de percevoir de la cession de ses parts dans la clinique Mon Repos et la société Immobilière LEAU ;

Qu'il convient à cet égard de relever que Me T... n'avait pas concouru à l'acte de cession des parts sociales et qu'il n'est pas démontré qu'il en avait connaissance ni qu'il était informé du montant des fonds encaissés par M. J... D... ; que l'acte de cahngement de régime matrimonial fait état des déclarations des parties quant à leur patrimoine propre, M. J... D... n'ayant alors déclaré que la moitié indivise de la maison de Marseille, à l'exclusion de tout autre bien, et que le notaire n'avait pas à exiger des informations supplémentaires que ses clients ne lui ont pas révélées spontanément, ni à mener une enquête sur la teneur effective des éléments du patrimoine au-delà de ce qui lui était déclaré ;

Attendu, s'agissant du conseil portant sur la clause de reprise des apports en cas de divorce, que le tribunal a justement retenu que le notaire n'avait, au regard de l'équilibre des éléments d'actif apportés à la communauté par chacun des époux, selon leurs propres déclarations, aucune raison de proposer une telle clause ;

Qu'en effet, il résulte des déclarations des parties reprises dans l'acte que chacun des époux a apporté à la communauté sa moitié indivise de la maison acquise à Marseille le 14 octobre 1999, Mme A... Q... apportant en plus un bien immobilier propre consistant en un emplacement de parking à Paris, [...], acquis alors qu'elle était encore célibataire ; que, dès lors que chacun apportait des éléments d'actif équivalents, il n'existait aucun intérêt pour les époux de prévoir une clause de reprise des apports en cas de divorce puisque le partage devait leur permettre de retrouver la moitié des biens apportés ;

Que là aussi, l'absence de déclaration expresse par M. J... D... de la perception de fonds importants déposés sur son compte bancaire ou placés en assurance-vie, ne permettait pas au notaire de soupçonner que celui-ci apportait en réalité un actif bien supérieur à celui apporté par son épouse et qu'il pouvait avoir intérêt à retrouver en cas de divorce ;

Attendu dès lors qu'il sera retenu que la preuve d'un manquement de Me T... à son obligation d'information et de conseil lors de la rédaction de l'acte de changement de régime matrimonial n'est pas rapportée et que le jugement qui a débouté M. J... D... de ses demandes sera confirmé ;

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

Par ces motifs,

La cour, statuant publiquement, contradictoirement

et en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Marseille déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne M. J... D... à payer à Me T... et à la SCP W... L... T... M... X... ensemble une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Le condamne aux dépens d'appel qui seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-1
Numéro d'arrêt : 17/06044
Date de la décision : 19/02/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°17/06044 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-02-19;17.06044 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award