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01/02/2019 | FRANCE | N°16/18289

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-1, 01 février 2019, 16/18289


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-1

(anciennement dénommée 9ème Chambre A)



ARRÊT AU FOND

DU 01 FÉVRIER 2019



N°2019/22





Rôle N° RG 16/18289 - N° Portalis DBVB-V-B7A-7L5U





Tariq X...



C/



SAS KISSAO

SAS KIMAR

SA POMONA



Copie exécutoire délivrée

le : 01 FEVRIER 2019



à :



Me Anne-laure M..., avocat au barreau de MARSEILLE



Me Y... N... de l'ASSOCIATION N... L... Y..., avocat a

u barreau d'AIX-EN-PROVENCE-avocat



Me Pierre-yves Z... de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS Z..., avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE



Me Pierre-yves Z... de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS Z..., avocat au barreau d'AI...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-1

(anciennement dénommée 9ème Chambre A)

ARRÊT AU FOND

DU 01 FÉVRIER 2019

N°2019/22

Rôle N° RG 16/18289 - N° Portalis DBVB-V-B7A-7L5U

Tariq X...

C/

SAS KISSAO

SAS KIMAR

SA POMONA

Copie exécutoire délivrée

le : 01 FEVRIER 2019

à :

Me Anne-laure M..., avocat au barreau de MARSEILLE

Me Y... N... de l'ASSOCIATION N... L... Y..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE-avocat

Me Pierre-yves Z... de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS Z..., avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Me Pierre-yves Z... de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS Z..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE-avocat

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 15 Septembre 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 14/00399.

APPELANT

Monsieur Tariq X...

né le [...] à ALGER, demeurant [...]

représenté par Me Anne-laure M..., avocat au barreau de MARSEILLE- avocat postulant- Me Jean-pierre A..., avocat au barreau de MARSEILLE - avocat plaidant

INTIMÉES

SAS KISSAO Importation et distribution de fruits exotiques et de contre saison, demeurant [...]

représentée par Me Y... N... de l'ASSOCIATION N... L... Y..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE-avocat postulant - Me Fanny B..., avocat au barreau de PARIS - avocat plaidant

SAS KIMAR prise en la personne de son représentant légal en exercice

domicilié [...]

représentée par Me Pierre-yves Z... de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS Z..., avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

SA POMONA prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié [...]

représentée par Me Pierre-yves Z... de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS Z..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE-avocat postulant- Me Christophe C..., avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE -avocat plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Novembre 2018 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président, et Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller, chargés du rapport.

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Mme Nathalie FRENOY, Conseiller

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Février 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Février 2019.

Signé par Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur Tariq X... a été embauché en qualité de cadre commercial le 13 septembre 1993 par la SA POMONA.

Il a été nommé directeur du site de Marseille de la succursale FRUIDOR OUTRE-MER (filiale de POMONA) à compter du 4 août 2001. A partir du 1er octobre 2002, il a été nommé directeur de la succursale d'importation de Marseille, toujours salarié de la société FRUIDOR, devenue en 2008 la société KISSAO (filiale de POMONA).

Le 1er juin 2014, la société KISSAO a cédé son fonds de commerce de vente en gros de fruits et légumes à la société ELH II (appartenant au groupe NOSIBE-ELH), devenue KISSAO, en vertu d'un acte de cession en date du 28 mai 2014.

Après cession du fonds de commerce, le cessionnaire, la société KISSAO (filiale de POMONA), est devenue la société KIMAR.

Le contrat de travail de Monsieur Tariq X... a donc été transféré à la SAS KISSAO, anciennement ELH II, à compter du 28 mai 2014.

Monsieur Tariq X... a été convoqué, par courrier du 6 juin 2014, à un entretien préalable pour le 23 juin à une mesure de licenciement économique.

Il a accepté le 11 juillet 2014 le contrat de sécurisation professionnelle. Son contrat de travail a pris fin le 15 juillet 2014.

Contestant le bien fondé de la rupture de son contrat de travail et réclamant des rappels de salaire et des indemnités de rupture, Monsieur Tariq X... a saisi la juridiction prud'homale de demandes dirigées contre la SA POMONA et la SAS KISSAO, anciennement ELH II. La SAS KIMAR est intervenue volontairement en la cause.

Par jugement du 15 septembre 2016, le conseil de prud'hommes de Marseille a dit que le transfert du contrat de travail de Monsieur Tariq X... de la société KIMAR auprès de la société KISSAO était régulier, a dit que la rupture du contrat de travail du salarié reposait sur un motif économique réel et sérieux, a débouté Monsieur Tariq X... de ses demandes, a débouté les sociétés KISSAO et POMONA de leurs demandes reconventionnelles et a condamné Monsieur Tariq X... aux entiers dépens.

Ayant relevé appel, Monsieur Tariq X... conclut, aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 13 décembre 2016, à la réformation du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Marseille le 15 septembre 2016, à ce que soit fixé le montant mensuel moyen brut de son salaire à 9699 €, à la condamnation solidairement des sociétés KISSAO, KIMAR et POMONA à lui payer les sommes suivantes :

-11666 € de complément de rémunération contractuel 2014 au prorata temporis,

-3094,61 € de complément sur intéressement,

-5962 € de complément d'indemnité de préavis,

-596 € d'incidence congés payés,

-232776 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-30000 € de dommages intérêts pour le préjudice moral subi,

-5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

avec intérêts de droit sur les sommes allouées à compter de la demande en justice avec capitalisation et à la condamnation des sociétés intimées aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, Monsieur Tariq X... fait valoir :

-que contrairement à ce qui est prétendu par la SA POMONA, il n'existe nulle part un quelconque engagement de porte fort de la société POMONA ; qu'il existe bien un lien de subordination entre D... et la société POMONA, dont la demande de mise hors de cause doit être rejetée ;

-qu'il a été convoqué le 6 janvier 2014 au siège à Paris, qu'il lui a été annoncé le projet de vente de KISSAO à NOSIBE-ELH avec reprise de l'ensemble du personnel, excepté lui; qu'il lui a été proposé une mutation comme "directeur des achats" au sein de la succursale PROVENCE LANGUEDOC, poste subordonné au directeur, entraînant une rétrogradation de son statut et une diminution de sa rémunération ; qu'il a décliné cette proposition ;

-que le 28 mai 2014, il a été informé que la cession était signée et qu'il faisait partie du personnel transféré ;

-que le lundi 2 juin, il a été mis dans l'impossibilité de travailler, n'ayant pas notamment reçu de poste informatique lui permettant de se connecter au nouveau système informatique, contrairement à la totalité des autres salariés ; que finalement il lui a été notifié une dispense d'activité le 3 juin ; qu'il a reçu le 6 juin une lettre de convocation à entretien préalable au licenciement économique et qu'il a été mis fin à son contrat le 15 juillet 2014 ;

-que le repreneur s'est donc opposé à l'exécution du contrat de travail, a tenté de convaincre le salarié de rester au sein de la société POMONA, par le biais de propositions de reclassement externe, ce qui démontre que le licenciement n'était qu'une fraude à l'application de l'article L.1224-1 du code du travail ;

-que de fait, le contrat de travail n'a en réalité jamais été transféré, ce qui engage la responsabilité de la société POMONA et de la société KIMAR, intervenante volontaire, ainsi que de la société cessionnaire KISSAO ;

-qu'il y a eu une fraude manifeste à l'application de l'article L.1224-1 du code du travail; que la rupture de son contrat de travail doit donc être déclarée dépourvue de cause réelle et sérieuse ;

-subsidiairement, que le motif économique n'est pas réel ; que l'entreprise était bénéficiaire à la date du licenciement ; qu'il n'a jamais été considéré par quiconque dans le passé que le poste de directeur était structurellement la cause des déficits temporaires enregistrés (sur 2 ans en 21 ans d'activité) et redressés ; que le licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

-que la SAS KISSAO n'a proposé que des solutions de reclassement au sein du groupe POMONA, qu'elle n'a pas effectué de recherches préalables de reclassement au sein du groupe ELH-NOSIBA ; que la précipitation du licenciement et la préméditation de la procédure excluent qu'il ait existé une recherche loyale de reclassement ; que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

-que la procédure antérieurement à son licenciement est vexatoire ; que la société POMONA a fait preuve d'un véritable mépris à l'égard de son salarié ; que le licenciement est intervenu dans des conditions vexatoires ; qu'il est bien fondé à solliciter la réparation de son préjudice moral.

La SA POMONA et la SAS KIMAR concluent, aux termes de leurs conclusions notifiées par voie électronique le 13 février 2017, à ce que l'appel de Monsieur Tariq X... soit déclaré mal fondé, à ce que l'appel de la société POMONA soit déclaré bien fondé, à l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il n'a pas mis hors de cause la société POMONA et à la confirmation pour le surplus, en conséquence, à ce qu'il soit dit que le transfert du contrat de travail de Monsieur Tariq X... de la société KIMAR auprès de la société KISSAO est parfaitement régulier, à ce que soit mis hors de cause la société POMONA, au débouté de Monsieur Tariq X... de l'ensemble de ses chefs de demandes à l'égard des sociétés POMONA et KIMAR, à la condamnation de Monsieur Tariq X... à verser à chacune des sociétés POMONA et KIMAR la somme de 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à la condamnation de Monsieur Tariq X... aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SELARL LEXAVOUE AIX EN PROVENCE, représentée par Maître Pierre-Yves Z..., avocat aux offres de droit.

Les sociétés POMONA et KIMAR soutiennent :

-que la société POMONA n'a jamais été l'employeur de Monsieur Tariq X...; que c'est la société KIMAR, anciennement KISSAO, filiale de la société POMONA, qui était son employeur ; que la société POMONA s'était simplement portée fort que Monsieur Tariq X... serait recruté par sa filiale KIMAR, anciennement KISSAO, comme directeur de sa succursale à Marseille et qu'elle a loyalement exécuté sa promesse de porte fort car cette filiale a bien embauché D... en qualité de directeur ; qu'il convient donc de mettre hors de cause la société POMONA, laquelle est allée au-delà de la promesse de porte fort qu'elle avait souscrite en proposant, avant la cession, le 19 février 2014, un poste de directeur des achats à Monsieur Tariq X... au sein de la succursale Provence Languedoc, et après la cession, en permettant au cessionnaire du fonds de commerce, la société KISSAO anciennement ELH II, de proposer le 6 juin 2014 à Monsieur Tariq X... deux postes qui étaient disponibles au sein du groupe POMONA ;

-qu'il est constant que le transfert du contrat de travail de Monsieur Tariq X... de la société KIMAR anciennement KISSAO auprès de la société KISSAO anciennement ELH II, en application de l'article L.1224-1 du code du travail, s'est effectué de façon parfaitement régulière et sans fraude de ses droits ; qu'il n'y a eu aucune collusion frauduleuse entre les sociétés KIMAR et KISSAO anciennement ELH II ; que Monsieur Tariq X... apparaît bel et bien sur la liste officielle et définitive des salariés transférés en annexe 5 de l'acte de cession du fond ; dès lors qu'aucune faute ne peut être reprochée à la société KIMAR anciennement KISSAO, que Monsieur Tariq X... doit être débouté de toutes demandes à l'encontre de celle-ci ;

-que Monsieur Tariq X..., qui a perçu au moment de son licenciement la somme totale de 156048,78 € à titre d'indemnité conventionnelle, ne saurait faire état du moindre préjudice et ce, d'autant qu'il a refusé trois postes qui lui auraient permis de se reclasser dans le groupe PROMONA ; qu'il doit être débouté de ses réclamations.

La SAS KISSAO conclut, aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 12 février 2017, à la confirmation du jugement du conseil de prud'hommes de Marseille en date du 15 septembre 2016 en ce qu'il a dit qu'aucune fraude à l'article L.1224-1 du code du travail n'entachait le transfert du contrat de travail de Monsieur Tariq X..., à la confirmation du jugement du conseil de prud'hommes de Marseille en date du 15 septembre 2016 en ce qu'il a dit que la rupture du contrat de travail de Monsieur Tariq X... reposait sur un motif économique réel et sérieux, à la confirmation du jugement du conseil de prud'hommes de Marseille en date du 15 septembre 2016 en ce qu'il a dit que la société KISSAO avait satisfait à son obligation de reclassement, en conséquence, au débouté de Monsieur Tariq X... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et à la condamnation de Monsieur Tariq X... à lui verser la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance.

La SAS KISSAO fait valoir :

-que le contrat de travail de Monsieur Tariq X... a bien été transféré en son sein; qu'il résulte de l'acte de cession en date du 28 mai 2014 que l'intégralité des salariés concernés par l'activité du fonds de commerce cédé ont vu leur contrat de travail transféré au repreneur, y compris celui de Monsieur Tariq X..., contrairement aux affirmations de ce dernier, puisqu'il apparaît bel et bien sur la liste des personnes en annexe 5 de l'acte de cession ; que la "liste des contrats des personnels au 15 janvier 2014" produite par le demandeur est dépourvue de toute valeur probante (document non daté, non signé, dont l'origine est inconnue) et ne peut caractériser une volonté de frauder les dispositions de l'article L.1224-1 du code du travail ;

-que les comptes du cédant justifient des résultats déficitaires des trois derniers exercices; que dans ces conditions, Monsieur Éric E..., dirigeant de la société KISSAO, a exercé directement les fonctions de direction de la société dévolues à Monsieur Tariq X... ; qu'il y a bien eu une suppression du poste de Monsieur X...; que la rupture du contrat de travail de D... est fondée sur un motif économique réel et sérieux ;

-que la société KISSAO a parfaitement respecté l'obligation préalable de recherche de reclassement ; qu'aucun poste de directeur n'était disponible au sein de la société KISSAO ou de la société NOSIBE ; que c'est dans ce contexte que deux offres de reclassement au sein du groupe PROMONA, son ancien employeur, ont été formulées à Monsieur Tariq X... par courrier en date du 6 juin 2014, le salarié n'ayant pas souhaité y donner une suite favorable ; que la rupture du contrat de travail de D... est donc parfaitement justifiée et fondée sur un motif économique réel et sérieux ;

-qu'au vu du strict respect de la procédure ayant abouti à la rupture du contrat de D..., la Cour ne pourra que rejeter la demande au titre d'une rupture qui serait intervenue dans des circonstances vexatoires.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 8 novembre 2018.

SUR CE :

Sur la mise en cause de la SA POMONA :

Monsieur Tariq X... soutient qu'au vu de l'avenant au contrat de directeur signé le 1er octobre 2002 entre les représentants de la société POMONA et le salarié, l'existence d'un lien de subordination entre POMONA et D... est établie, en ce que :

-c'est la société POMONA qui confie à D... la direction d'une succursale (articles 1 et 2),

-c'est POMONA qui met à la disposition du salarié les éléments nécessaires au fonctionnement de la succursale (article 4),

-Monsieur X... reçoit les appointements bruts de directeur fixés par le directoire de POMONA (article 5),

-en fin de contrat, il est prévu que Monsieur Tariq X... doit rendre compte à la société POMONA (article 9),

-la société POMONA peut nommer D... à la direction d'une autre succursale ou lui confier d'autres postes dans le groupe POMONA (article 12),

-l'article 13 prévoit la nature et le montant des indemnités de licenciement à la charge de la société POMONA,

-la résiliation de plein droit est prévue en cas de dissolution ou suspension d'activité de la société POMONA (articles 14 et 15),

ce qui démontre selon le demandeur que la société POMONA a bien un pouvoir total de direction sur le salarié.

Il fait valoir par ailleurs que c'est la société POMONA qui lui a payé la participation (pièces 127 et 128 - courriers du 12 novembre 2014 en provenance du groupe POMONA lui adressant le décompte de sa participation de directeur au titre de l'exercice 2013/2014); il verse également un avis de virement effectué le 28 novembre 2014 par "POMONA" avec pour motif "complément paie mai 2014" d'un montant de 4747,31 € (pièce 165).

Monsieur Tariq X... soutient en dernier lieu qu'il n'existe nulle part un quelconque engagement de porte fort de la société POMONA envers sa future filiale.

La SA POMONA réplique qu'elle n'a jamais été l'employeur de Monsieur Tariq X..., que c'est la sociétés KIMAR (dont l'extrait K bis est versé en pièce 2) qui était son employeur, que la société POMONA a simplement consenti à Monsieur Tariq X... un engagement de faire consistant à lui permettre d'obtenir un engagement de sa filiale KIMAR, anciennement KISSAO, à son profit, qu'elle s'est ainsi portée fort que D... serait recruté par la société KIMAR, anciennement KISSAO, et a loyalement exécuté sa promesse de porte fort puisque sa filiale à bien embauché D... en qualité de directeur et qu'elle doit être mise hors de cause.

Il ressort de l' "avenant au contrat de travail de M. X..." en date du 4 juillet 2001 conclu entre la SA POMONA et Monsieur Tariq X..., employé de la société POMONA IMPORT depuis le 13 septembre 1993 selon contrat de travail du 30 août 1993 et avenant du 1er janvier 1999 conclus avec la SA POMONA, que :

« 1°) La société POMONA confie à D... qui accepte, la direction du site de Marseille de la succursale dénommée "FRUIDOR OUTRE-MER" exploitée par les sociétés POMONA-IMPORT et FRUIDOR'

En sa qualité de Directeur du site de Marseille, D... bénéficie d'une délégation de pouvoirs pour organiser les services de la succursale, assumer la direction commerciale, la direction administrative et financière, la direction du personnel et la responsabilité des biens meubles et immeubles affectés à ladite succursale.

En conséquence de ses fonctions et de la délégation consentie, D... a l'obligation de veiller à l'application des lois et règlements : les moyens nécessaires sont mis à sa disposition par le Siège social pour satisfaire à cette obligation'

2°) D... est nommé Directeur du site de Marseille à compter du 4 août 2001'

5°) D... reçoit les appointements bruts de Directeur de succursales de sa catégorie, dont le montant est fixé par le Directoire - Annexe 1 au présent contrat...

14°) Le présent contrat est à durée indéterminée. Chaque partie peut y mettre fin à tout moment, à charge pour elle de signifier sa volonté à l'autre en respectant un préavis de six mois.

Au cas ou la société POMONA licencierait D... pour un motif autre qu'une faute grave ou une faute lourde, la société POMONA lui verserait à titre d'indemnité de licenciement'

15° ) Le présent contrat sera résilié de plein droit en cas de dissolution de la société POMONA, sauf application des dispositions de l'article L122-12 du code du travail.

[...] ».

Sont également prévues dans ledit avenant du 4 juillet 2001 des dispositions relatives à l'intéressement du salarié sur les bénéfices de la succursale FRUIDOR OUTRE-MER et à un complément de rémunération fixé par le Directoire de la SA POMONA en fonction du bilan de Monsieur Tariq X..., étant précisé que des pénalités peuvent être décidées par le Directoire "pour infraction aux ordres donnés en matière de crédit clientèle" (article 9), des dispositions relatives au maintien de sa rémunération en cas de suspension du contrat par suite de maladie ou d'accident (article 17) et des dispositions applicables en cas de décès ou d'invalidité absolue ou définitive du salarié.

Un nouvel "avenant au contrat de directeur de Monsieur Tariq X..." a été signé le 1er octobre 2002 entre la SA POMONA et Monsieur Tariq X... pour lui confier "la direction de la succursale d'importation de Marseille exploitée par les sociétés Pomona-Import et Fruidor, filiales de Pomona SA'", avec une délégation de pouvoirs et mandat confié de Directeur Général de la Société de droit Ivoirien Inter-agri. On y retrouve, comme dans l'avenant du 4 juillet 2001, des dispositions identiques relatives aux appointements du Directeur de succursale, fixés par le Directoire, à l'intéressement sur les bénéfices de la succursale d'importation de Marseille, au complément de rémunération fixé par le Directoire de la SA POMONA, au calcul de l'indemnité de licenciement "au cas où la société POMONA licencierait Monsieur Tariq X...'", à la résiliation de plein droit du contrat en cas de dissolution de la société POMONA "sauf application des dispositions de l'article L122-12 du code du travail", au maintien de la rémunération en cas de suspension du contrat par suite de maladie ou d'accident et aux droits en cas de décès ou d'invalidité du salarié.

Il est par ailleurs annexé au contrat de travail du 1er octobre 2002 un document "Annexe n° 1" fixant les appointements bruts annuels de Monsieur Tariq X... à "76225 euros à compter du 1er octobre 2002".

Si Monsieur Tariq X... s'est vu établir des bulletins de paie par la société KISSAO, filiale de la SA POMONA (ex FRUIDOR OUTRE-MER), il ressort cependant des dispositions contractuelles que la société mère POMONA ne s'est pas portée fort pour sa filiale FRUIDOR OUTRE-MER, devenue KISSAO, en promettant l'engagement par cette dernière de Monsieur Tariq X... en qualité de directeur, engagement dont POMONA n'a pas été déchargée dès l'embauche de D... par sa filiale. La SA POMONA s'est engagée directement pour elle-même dans la conclusion et l'exécution du contrat de travail signé avec le salarié, disposant du droit disciplinaire ultime de licenciement du salarié, en sorte qu'elle était bien l'employeur de Monsieur Tariq X....

Il convient, en conséquence, d'écarter le moyen soutenu par la SA POMONA selon lequel elle ne serait engagée envers Monsieur Tariq X... que par une promesse de porte fort et de rejeter sa demande de mise hors de cause.

Sur le transfert du contrat de travail :

Monsieur Tariq X... invoque une fraude aux dispositions de l'article L.1224-1 du code du travail et une collusion des sociétés POMONA et KISSAO (anciennement NOSIBE-ELH2), faisant valoir que la vente du fonds de commerce lui a été annoncée avec reprise de l'ensemble du personnel excepté lui, qu'il lui a été proposé par POMONA une mutation comme directeur des achats, poste constituant une rétrogradation de son statut et entraînant une diminution de sa rémunération et qu'il a donc refusé, qu'il a été informé le 28 mai que la cession était signée et qu'il faisait partie du personnel transféré, qu'il a immédiatement été mis dans l'impossibilité de travailler et dispensé d'activité le 3 juin 2014 pour être finalement licencié pour motif économique.

Les sociétés POMONA et KIMAR soutiennent que le contrat de travail de Monsieur Tariq X... a été transféré de façon parfaitement régulière, l'application de l'article L.1224-1 du code du travail s'imposant, et qu'il ne peut être reproché aux sociétés concluantes une fraude alors que c'est la société KISSAO anciennement ELH II qui a décidé de licencier pour motif économique le salarié.

La SAS KIMAR souligne que le contrat de travail de Monsieur Tariq X... a bien été transféré, comme cela était prévu expressément selon la liste des salariés annexée à l'acte de cession.

Monsieur Tariq X... produit un message du 23 janvier 2014 du Responsable administratif et financier de KISSAO (filiale de POMONA devenue KIMAR) transmettant à Monsieur Tariq X... des "documents demandés pour cession kissao", avec des fichiers joints dont un fichier en annexe 5 intitulé "trame Liste des personnels" (pièce 10) et un document intitulé "Annexe 5 Liste des personnels au 15/01/2014" (pièce 84), D... n'apparaissant pas sur cette liste.

Si les sociétés intimées contestent la valeur probante de ce tableau versé en pièce 84, qui selon elles correspond à un tableau tronqué des effectifs de la société cédante, les sociétés POMONA et KIMAR ne proposent pas pour autant de verser aux débats les "documents demandés pour cession kissao" qui ont été envoyés par mail à Monsieur Tariq X... le 23 janvier 2014.

Monsieur Tariq X... verse d'autres pièces aux fins de justifier que la cession du fonds de commerce de la société KISSAO (devenue KIMAR) à la société ELH II (devenue KISSAO, appartenant au groupe NOSIBE) avait été prévue en excluant le transfert de son contrat de travail, dont notamment les pièces suivantes :

-un courriel d'Éric F..., Directeur de Branche du groupe POMONA, adressé le 9 janvier 2014 à Tariq X... afin de de lui fournir des indications sur les annonces à faire aux délégués du personnel et au personnel pour leur présenter le projet du rachat de KISSAO par NOSIBE "au 1er février 2014" et précisant que Monsieur E... O... "a prévu de reprendre l'ensemble du personnel sauf le Directeur", lequel est "en train de voir quelles opportunités il peut y avoir au sein du Groupe Pomona" (pièce 6) ;

-le courriel du 19 février 2014 de "proposition d'évolution" adressé par Éric F... à Tariq X... en ces termes : « suite à nos récents entretiens, je vous confirme notre proposition de rejoindre la succursale Provence Languedoc pour prendre le poste de Directeur des Achats aux conditions suivantes :

Statut : Cadre Supérieur

RAB 70K€ annuel

Variable (selon les règles en vigueur chez TerreAzur)'

Après cette longue période chez Kissao, avec en particulier 3 derniers exercices très difficiles, nous pensons que cette opportunité est une superbe occasion pour vous permettre de rebondir au sein de Pomona' » (pièce 8) ;

-le courriel du 10 mars 2014 en réponse de Tariq X... à Éric F... suite à la proposition de mutation sur le poste de directeur des achats à la succursale Provence Languedoc, le salarié rappelant qu'il avait été contacté le 2 janvier 2014 pour venir le plus rapidement possible au siège le 6 janvier, qu'il avait appris "avec surprise qu'une lettre d'intention d'achat avait été faite par la société Nosibe pour le rachat de la société Kissao' Que le projet était très avancé et que la cession allait se faire le 1er février 2014. Le repreneur garderait l'ensemble du personnel, sauf le Directeur' », étant observé que cette version donnée par le salarié n'a pas été contestée par l'employeur dans les jours ou les semaines qui ont suivi ; Monsieur Tariq X... informait par ailleurs son employeur qu'il n'acceptait pas la proposition de mutation, ne pouvant «accepter une modification à la baisse de (sa) rémunération. Je ne considère pas que la proposition que vous me faites soit une "évolution", ni une "opportunité" et encore moins "une superbe occasion"' » (pièce 73) ;

-un échange de courriels entre salariés du groupe POMONA du 13 janvier 2014 au sujet de l' "offre Kissao", Tiphaine G... demandant à Cyril H... : "et ils parlent de garder tout le monde j'espère '" et la réponse : "tous sauf Tariq mais qui sait pour la suite'" (pièce 65) ;

-la liste des questions posées par les délégués du personnel pour la réunion prévue le 28 janvier 2014, ceux-ci demandant notamment si "l'employé qui le souhaite pourra-t-il s'entretenir avec le nouveau directeur dans un délai de 15 jours afin de faire un point sur sa situation" (pièces 50) et la réponse apportée par Jean-Noël I..., dans son courriel du 27 janvier 2014 : "le repreneur nous a informé de son intention de rencontrer, individuellement, les salariés qui le souhaiteront, après la cession par Pomona" (pièce 51) ;

-le courriel du 24 janvier 2014 de Jean-Noël I... adressant à Tariq X... les horaires des entretiens des différents salariés repris (le 29 janvier de 8h à 17h30) avec Éric E..., Président de la SAS ELH II (pièce 41), D... n'étant pas sur cette liste ;

-le courriel du 24 janvier 2014 de Jean-Noël I... adressé à Cyrille J... ayant pour objet "documents demandés pour cession kissao", pour demander la préparation d'une copie des 12 derniers bulletins de paie et d'une copie des contrats de travail "de tous les salariés (hors Tariq)" (pièce 48) ;

-le planning des congés payés communiqué au repreneur le 26 mai 2014, sur lequel n'apparaît pas Tariq X... (pièces 44) ;

-le courriel du 22 janvier 2014 de Jean-Noël I... transmettant "la liste des immos Kissao transmise par E. K... '", de laquelle est expressément exclu "le véhicule Ford S max... Ce véhicule restera la propriété du Groupe Pomona", s'agissant du véhicule de fonction de Monsieur Tariq X... (pièce 42), qui sera finalement cédé à ce dernier le 22 septembre 2014 (pièces 42, 47 et 168).

Au vu des éléments versés par l'appelant, il est établi que la reprise du contrat de travail de Monsieur Tariq X... au sein du repreneur n'était pas prévue par les sociétés KISSAO (filiale de POMONA) et ELH II (filiale du groupe NOSIBE, devenue KISSAO). Si ces deux sociétés ont finalement organisé le transfert du contrat de travail de Monsieur Tariq X... (sans pour autant prévoir dans le cadre de l'acte de cession du 28 mai 2014 le transfert du véhicule de fonction du directeur, selon la liste des véhicules cédés et cartes grises annexées), ce transfert a manifestement été décidé quelques jours avant la cession en date du 28 mai ou, à tout le moins, n'a pas été annoncé au directeur avant cette date, puisque le calendrier des congés payés du personnel repris, ne faisant pas état de Tariq X..., a été communiqué à la société ELH II le 26 mai 2014.

Si comme rappelé par les sociétés POMONA et KIMAR, les conditions d'application de l'article L.1224-1 du code du travail étaient réunies en l'espèce et que le cédant et le cessionnaire d'une entité économique autonome ne pouvaient se soustraire à cette règle d'ordre public, ces sociétés ainsi que la société ELH II s'étaient malgré tout manifestement entendues, pendant plusieurs mois de janvier à mai 2014, pour se soustraire à l'obligation de transférer le contrat de travail de Monsieur Tariq X....

La société ELH II, devenue KISSAO, a finalement repris le contrat de travail de Monsieur Tariq X... à la date du 28 mai 2014. Par courrier du 3 juin 2014 remis en main propre au salarié, la société KISSAO a dispensé ce dernier d'activité et, par courrier du 5 juin 2014, elle annonçait au salarié être "contraint d'envisager très rapidement une réorganisation de l'entreprise pour sauvegarder la compétitivité. Cette réorganisation m'amène à envisager votre licenciement pour motif économique'".

Par courrier du 6 juin 2014, Monsieur Tariq X... a été convoqué à un entretien préalable pour le 23 juin à une mesure de licenciement pour motif économique.

Par courrier du 23 juin 2014 de proposition d'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle, la société KISSAO (anciennement ELH II) a énoncé "les circonstances économiques qui nous conduisent envisager votre licenciement. Vous n'êtes pas sans ignorer que le fonds de commerce KISSAO a été acquis auprès du Groupe POMONA par l'entreprise alors que ses résultats au titre des derniers exercices comptables sont largement déficitaires'

La restructuration qu'impose la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise nous amène à devoir réorganiser la structure de celle-ci, en supprimant le poste de Directeur que vous occupez. Les résultats déficitaires enregistrés ces dernières années commandent en effet une modification de l'organisation de l'effectif qui nous conduit à une réattribution de vos tâches en interne'".

Le salarié a accepté le 11 juillet 2014 le contrat de sécurisation professionnelle. Son contrat a pris fin le 15 juillet 2014.

La société ELH II, devenue KISSAO, qui a pendant plusieurs mois manifesté la volonté de ne pas reprendre le directeur, a très tardivement décidé de le reprendre le 28 mai 2014 et ce, alors même que le poste de directeur était déjà occupé par le Président de la société, Monsieur Éric E.... Ce dernier avait rencontré, dès le 29 janvier 2014, le personnel repris qui avait manifesté le souhait de rencontrer "le nouveau directeur" et a organisé la reprise du fonds de commerce de janvier jusqu'à fin mai 2014.

Alors que Monsieur Tariq X... avait déjà été remplacé sur son poste de directeur, raison pour laquelle le cessionnaire ne voulait pas reprendre le salarié, la société ELH II ne peut prétendre avoir découvert après l'acquisition du fonds de commerce, que les résultats déficitaires des derniers exercices comptables (résultats cités dans l'acte de cession pour les exercices 2010/2011, 2011/2012 et 2012/2013) nécessitaient une réorganisation de la structure et la suppression du poste de directeur aux fins de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise. Il s'ensuit que le licenciement pour motif économique de D..., remplacé sur son poste avant même le transfert, est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La société ELH II, devenue KISSAO, s'était manifestement entendue avec le cédant pour accepter le transfert du contrat de travail de D... et, très rapidement, dès le 3 juin 2014, le dispenser d'activité et engager à son encontre une procédure de licenciement pour motif économique. Cette collusion entre le cédant et le cessionnaire est confortée par la proposition immédiatement faite à Monsieur Tariq X..., dans le courrier de KISSAO (anciennement ELH II) du 5 juin 2014, de réexaminer la proposition du groupe POMONA qui lui avait été faite "avant la cession" d'une mutation, le dirigeant de KISSAO indiquant : « il m'a semblé qu'il m'incombait dès lors d'insister sur cette possibilité qui s'offre à vous de rester dans un Groupe important et reconnu comme Pomona compte tenu de la réorganisation hélas inévitable que KISSAO envisage de mettre en 'uvre. La dispense d'activité rémunérée qui vous a été notifiée est donc mise à profit actuellement dans ce but.

Je pense ainsi être en mesure demain de vous faire une proposition de transfert de votre contrat de travail au sein du Groupe Pomona, mais je serai également contraint en parallèle au délai de réflexion dont vous disposerez pour accepter ce ou ces postes d'engager une procédure de licenciement pour motif économique que j'espère ainsi ne pas devoir mener jusqu'à son terme' ».

Par courrier du 6 juin 2014, la société KISSAO proposait ainsi à Monsieur Tariq X... "deux postes actuellement disponibles" au sein du groupe POMONA.

Alors que le transfert du contrat de travail de Monsieur Tariq X... au sein de la société ELH II n'avait pas été prévu jusqu'à fin mai 2014, que le salarié n'avait pas accepté la proposition de mutation du 19 février 2014 de la société POMONA, entraînant pour lui une rétrogradation de son statut et une diminution de ses ressources, et qu'aucune autre proposition n'avait été présentée au salarié par la société POMONA, sa filiale KISSAO et la société ELH II ont manifestement agi en fraude des droits du salarié pour le transférer au sein de la société ELH II, bien que cette dernière avait déjà un directeur en place et qu'elle avait donc l'intention d'engager immédiatement la procédure de licenciement pour suppression du poste de D..., lequel a été fortement incité à accepter le "transfert de son contrat de travail au sein du groupe Pomona" par le biais de deux propositions de reclassement externe.

Au vu de la collusion entre les sociétés POMONA, KISSAO (devenue KIMAR) et ELH II (devenue KISSAO) aux fins de ne pas organiser dans un premier temps le transfert du contrat de travail de Monsieur Tariq X... et ensuite, sans information du salarié, de transférer son contrat de travail au sein de ELH II pour immédiatement engager une procédure de licenciement pour motif économique et l'inciter à accepter un nouveau transfert au sein du groupe POMONA, ces trois sociétés, qui par leur action commune ont contribué à l'entier préjudice subi par le salarié par suite de la perte de son emploi, seront condamnées in solidum au paiement des indemnités découlant du licenciement sans cause réelle et sérieuse de D....

Au vu des bulletins de paie versés par Monsieur Tariq X... sur les 12 mois précédant la rupture de son contrat de travail, soit de juillet 2013 à juin 2014, le salaire mensuel moyen brut du salarié s'élève à 9699 €.

Il convient d'accorder à Monsieur Tariq X..., sur la base du salaire moyen brut de 9699 €, un complément d'indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 5962€ brut (29097 € de préavis de trois mois, déduction faite de la somme de 23135 € versée), ainsi que 596 € de congés payés afférents.

Monsieur Tariq X... produit ses relevés de compte sur la période de septembre et octobre 2014, le tableau d'amortissement de son prêt bancaire, son jugement de divorce du 11 juillet 2011, un état des créances et des dettes au titre de l'exercice 2015 de la société TROPILINE qu'il a créée et une attestation fiscale délivrée par le Pôle emploi mentionnant un montant de 55764 € de ressources à déclarer au titre de l'année 2015. Il ne verse pas d'élément sur l'évolution de sa situation professionnelle postérieurement à décembre 2015, ni sur ses ressources.

En considération des éléments fournis sur son préjudice, de l'ancienneté du salarié de 20 ans dans l'entreprise occupant plus de 10 salariés et du montant de son salaire mensuel brut, la Cour accorde à Monsieur Tariq X... la somme de 145000 € à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Alors que le salarié a été laissé dans l'incertitude quant au transfert de son contrat de travail pendant plusieurs mois, puis a été informé tardivement de ce transfert pour voir immédiatement son contrat de travail rompu, en méconnaissance de ses droits et en violation de l'obligation contractuelle de loyauté dans l'exécution du contrat de travail, la Cour lui accorde la somme de 15000 € à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral résultant des circonstances brutales et vexatoires ayant entouré la rupture de son contrat de travail.

Sur les sommes dues au titre de l'exécution du contrat de travail :

Les sommes réclamées au titre de l'exécution du contrat de travail ayant lié le salarié à la société POMONA et à sa filiale la SAS KIMAR, anciennement KISSAO, sont dues conjointement par ces deux sociétés, ainsi que par le repreneur en application de l'article L.1224-2 du code du travail.

Monsieur Tariq X... réclame le complément de rémunération prévu par l'article 7 de l'avenant à son contrat de travail en date du 1er octobre 2002, qui avait été fixé à 20000 € pour l'année 2013 (pièce 170).

La SA POMONA et la SAS KISSAO sollicitent le débouté du salarié de cette demande au motif que l'appelant ne fournit aucune explication à l'appui de sa réclamation.

Ce complément de rémunération prévu contractuellement devait être versé au salarié et fixé par le Directoire en fonction de l'évaluation de l'action réalisée par Monsieur Tariq X.... La SA POMONA et la SAS KISSAO ne prétendent pas que le bilan de l'action de Monsieur Tariq X... sur l'année 2014 était négatif.

À défaut pour les employeurs de fournir les éléments d'appréciation du bilan de l'action de D... sur 2014, la Cour accorde à celui-ci, sur la base du complément de rémunération versé au titre de l'année 2013 et au prorata du temps de travail sur l'année 2014, la somme de 11666 € brut à titre de complément de rémunération.

Monsieur Tariq X... réclame le versement d'un complément sur intéressement prévu à l'article 6 de l'avenant à son contrat de travail, qui fixe l'intéressement à 5,5 % des bénéfices nets. Le salarié a perçu un intéressement à hauteur de 5799 € net au titre du résultat au 30 septembre 2014, mais soutient que le dernier résultat connu de lui au 30 avril 2014, juste avant la cession, était de 233000 €. Il réclame un complément d'intéressement calculé sur cette dernière somme à hauteur de 3094,61 €.

La SA POMONA et la SAS KISSAO sollicitent le débouté du salarié de cette demande au motif que l'appelant ne fournit aucune explication à l'appui de sa réclamation.

En l'absence de toute justification par les employeurs sur le le montant des résultats retenus pour le calcul de l'intéressement versé à D... (151849 € de résultats retenus, 8351,70 € brut d'intéressement et 5799 € net versés au salarié - pièces 127 et 128) et alors que l'appelant produit un courriel du 19 mai 2014 du responsable administratif et financier de KISSAO transmettant les résultats de la filiale fin avril 2014 s'élevant à 233000 € (pièces 129 et 130), il convient de faire droit à la réclamation du salarié au titre d'un complément sur intéressement d'un montant brut de 3094,61 €.

Sur le remboursement des indemnités de chômage :

Il convient d'ordonner d'office, en application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail, le remboursement par la SAS KISSAO (anciennement ELH II) au Pôle emploi PACA des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du présent arrêt, dans la limité de six mois d'indemnités.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Monsieur Tariq X..., tel que précisé au dispositif.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par décision prononcée par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale,

Reçoit les appels en la forme,

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau,

Constate que la SA POMONA était l'employeur de Monsieur Tariq X... au même titre que sa filiale la SAS KIMAR,

Constate la collusion frauduleuse entre la SA POMONA, la SAS KIMAR et la SAS KISSAO dans l'application de l'article L.1224-1 du code du travail,

Dit que la rupture du contrat de travail de Monsieur Tariq X... est dépourvue de cause réelle et sérieuse,

Condamne in solidum la SA POMONA, la SAS KIMAR et la SAS KISSAO à payer à Monsieur Tariq X... les sommes suivantes :

-11666 € brut de complément de rémunération contractuel sur 2014,

-3094,61 € brut de complément sur intéressement sur 2014,

-5962 € brut de complément d'indemnité de préavis,

-596 € brut de congés payés sur complément d'indemnité de préavis,

-145000 € brut d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-15000 € de dommages intérêts pour préjudice moral,

Dit que les sommes allouées de nature salariale produiront des intérêts au taux légal à compter de la citation devant le bureau de conciliation, soit à compter du 23 décembre 2014, avec capitalisation des intérêts échus et dus pour plus d'une année s'étant écoulée à partir du 23 décembre 2014,

Ordonne le remboursement par la SAS KISSAO au Pôle emploi PACA des indemnités de chômage versées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de 6 mois d'indemnités de chômage, en vertu de l'article L.1235-4 du code du travail,

Condamne in solidum la SA POMONA, la SAS KIMAR et la SAS KISSAO aux dépens et à payer à Monsieur Tariq X... 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonne la transmission du présent arrêt par le greffe de la Cour au Pôle emploi PACA.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Ghislaine POIRINE faisant fonction


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-1
Numéro d'arrêt : 16/18289
Date de la décision : 01/02/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9A, arrêt n°16/18289 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-02-01;16.18289 ?
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