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24/01/2019 | FRANCE | N°16/11435

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 24 janvier 2019, 16/11435


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

(anciennement dénommée 3ème Chambre B)



ARRÊT AU FOND

DU 24 JANVIER 2019



N° 2019/032













Rôle N° 16/11435

N° Portalis DBVB-V-B7A-6Z2A







EPIC HABITAT MARSEILLE PROVENCE





C/



SA BANQUE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (BTP BAN QUE)





Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me X. CACHARD

Me J. MAGNAN


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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 10 Mai 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 2015F02516.





APPELANTE



EPIC HABITAT MARSEILLE PROVENCE,

prise en la personne de son représenta...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

(anciennement dénommée 3ème Chambre B)

ARRÊT AU FOND

DU 24 JANVIER 2019

N° 2019/032

Rôle N° 16/11435

N° Portalis DBVB-V-B7A-6Z2A

EPIC HABITAT MARSEILLE PROVENCE

C/

SA BANQUE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (BTP BAN QUE)

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me X. CACHARD

Me J. MAGNAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 10 Mai 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 2015F02516.

APPELANTE

EPIC HABITAT MARSEILLE PROVENCE,

prise en la personne de son représentant légal en exercice

siège social [Adresse 1]

représentée et assistée par Me Xavier CACHARD, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Mohamed EL YOUSFI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SA BANQUE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (BTP BANQUE)

représentée par le Président de son directoire domicilié en cette qualité au siège [Adresse 2]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Bertrand MAHL, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 31 Octobre 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Sophie LEYDIER, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Jean-François BANCAL, Président

Mme Patricia TOURNIER, Conseillère

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère (rédactrice)

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Décembre 2018.

Le 20 Décembre 2018, les parties ont été avisées que le délibéré était prorogé et que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Janvier 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Janvier 2019,

Signé par M. Jean-François BANCAL, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé du litige:

Le 08/04/2011, HABITAT MARSEILLE PROVENCE (HMP) a confié à la société GARREL CONSTRUCTION des travaux de réfection de l'étanchéité des toitures terrasses de plusieurs immeubles situés dans le 13ème arrondissement de MARSEILLE.

Ces travaux devaient être exécutés en deux tranches :

1/ une tranche ferme concernant trois résidences pour un montant de 422 280,10 euros TTC,

2/ une tranche conditionnelle concernant une quatrième résidence pour un montant de 282 057,94 euros TTC.

Au lieu de constituer une retenue de garantie de 5% du montant du marché, la société GARREL CONSTRUCTION a obtenu deux 'garanties à première demande', la première d'un montant de 21 144 euros TTC auprès de la BTP Banque pour les travaux correspondant à la tranche ferme et la deuxième auprès de la banque ATRADIUS pour les travaux de la tranche conditionnelle.

Par jugement du 02/04/2012, le Tribunal de Commerce de Salon de Provence a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société GARREL CONSTRUCTION et a désigné Maître [Z] en qualité d'administrateur judiciaire avec pour mission d'assister la débitrice dans tous les actes relatifs à la gestion de la société.

Un procès-verbal des opérations préalables à la réception (OPR) a été établi le 13/04/2012 et notifié à la société GARREL CONSTRUCTION par courrier recommandé avec accusé de réception reçu le 19/04/2012.

Par lettre recommandée du 30/05/2012 avec accusé de réception signé par sa destinataire, l'office HMP a mis en demeure la société GARREL CONSTRUCTION d'achever les travaux et de remédier sous 8 jours aux imperfections et malfaçons constatées lors des OPR, et lui a indiqué qu'à défaut, il se réservait la possibilité de mettre en oeuvre les sanctions prévues au marché, soit la poursuite des travaux par un tiers à ses frais et risques et/ou la résiliation du marché à ses torts exclusifs, copie de ce courrier ayant été adressée à Maître [W] [Z] en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société GARREL CONSTRUCTION.

Par lettre recommandée du 30/05/2012, dont l'accusé de réception n'est pas produit, l'office HMP a mis en demeure l'administrateur judiciaire de la société GARREL CONSTRUCTION d'avoir à se prononcer sur la poursuite ou non du marché dans un délai d'un mois, sous peine de résiliation de plein droit du marché.

Par lettre recommandée du 15/06/2012, dont l'accusé de réception n'est pas produit, l'office HMP a informé la société GARREL CONSTRUCTION et son administrateur judiciaire de la poursuite des travaux par une autre entreprise et a convoqué la société GARREL CONSTRUCTION et son administrateur judiciaire aux 'constatations contradictoires relatives aux ouvrages ou partie d'ouvrages exécutés, à l'inventaire des matériaux approvisionnés, ainsi qu'à l'inventaire descriptif du matériel et des installations de chantier' le 28/06/2012.

Un procès-verbal des constatations contradictoires visant l'article 47.1.1 du GGAG Travaux a été dressé le 28/06/2012 et signé par [Q] [A], conducteur d'opérations, pour le maître d'ouvrage.

Par lettre recommandée du 17/07/2012, dont l'accusé de réception n'est pas produit, l'office HMP a notifié à Maître [W] [Z], en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société GARREL CONSTRUCTION, d'une part la résiliation du marché à effet à compter de la date du jugement prononçant le redressement judiciaire de la société GARREL CONSTRUCTION, et, d'autre part, le procès-verbal des constatations contradictoires précité du 28/06/2012, en précisant qu'il emportait réception des ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, en application de l'article 41.1.1 du CCAG Travaux, avec effet à la date d'effet de la décision de résiliation.

Suivant mise en demeure du 02/08/2012, réitérée le 28/01/2013 et le 08/08/2013, l'office HMP a réclamé à la BTP Banque le règlement de la somme de 21 144 euros en exécution de la garantie délivrée.

La BTP Banque n'a pas réglé cette somme.

Par acte du 1er/09/2015, l'office HMP a assigné la BTP Banque devant le Tribunal de Commerce de MARSEILLE aux fins d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 21 114 euros à titre principal, avec intérêts et frais à compter de la mise en demeure du 02/08/2012, outre des dommages et intérêts pour résistance abusive et une indemnité au titre des frais irrépétibles.

Par jugement du 10/05/2016, le Tribunal de Commerce de MARSEILLE a :

- débouté l'office HMP de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamné l'office HMP à payer à la BTP Banque la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté pour le surplus toutes autres demandes,

- condamné l'office HMP aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 17/06/2016, l'EPIC HMP a interjeté appel.

Par dernières écritures notifiées par le RPVA le 03/08/2016, l'appelant demande à la cour:

Vu les articles 1134, 1147 et 2321 du code civil,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les dispositions du CCAG Travaux,

Vu les pièces versées,

Vu les jurisprudences citées,

- d'infirmer le jugement déféré en ce que le premier juge l'a débouté de ses demandes,

A titre principal,

- de dire et juger qu'il y a eu une réception expresse des ouvrages exécutés, par l'Office HABITAT MARSEILLE PROVENCE (HMP),

- de condamner la Banque du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP BANQUE) à payer à l'Office HABITAT MARSEILLE PROVENCE (HMP) :

* 21 114 € TTC, à titre principal avec intérêts à compter de la première mise en demeure en date du 2 août 2012,

* 18 297,90 € TTC, à titre subsidiaire, avec intérêts à compter de la première mise en demeure en date du 2 août 2012,

A titre subsidiaire,

- de dire et juger qu'il y a eu une réception tacite des ouvrages exécutés, par l'Office HABITAT MARSEILLE PROVENCE (HMP),

- de condamner la Banque du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP BANQUE) à payer à l'Office HABITAT MARSEILLE PROVENCE (HMP) :

* 21 114 € TTC, à titre principal avec intérêts à compter de la première mise en demeure en date du 2 août 2012,

* 18 297,90 € TTC, à titre subsidiaire, avec intérêts à compter de la première mise en demeure en date du 2 août 2012,

En toute hypothèse,

- de condamner la Banque du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP BANQUE) à payer à l'Office HABITAT MARSEILLE PROVENCE (HMP) :

* 5 000 €, à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

* 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- 'd'ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir',

- de condamner tout contestant aux entiers dépens.

Par dernières écritures notifiées par le RPVA le 28/09/2016, l'intimée demande à la cour:

Vu les faits de l'espèce, les pièces communiquées, les dispositions des articles 101 et suivants du code des marchés publics (CMP) applicables à la cause, les dispositions des articles 1134, 1147, 1153, 1792 et suivants et 2321 du code civil, et ensemble leur interprétation jurisprudentielle établie,

Statuant à nouveau,

- de dire qu'en application de l'article 101 du CMP, la retenue en nature au titre des situations visées dans les pièces en demande ne pouvait excéder la somme de 16 852,70 € TTC, soit, 13 549,58 € HT,

Dès lors, de dire qu'en application de l'article 102 du CMP, l'obligation de représentation ne pouvait excéder cette somme,

- de dire que les engagements autonomes sont d'interprétation stricte, et se referment exclusivement sur leur objet, et que toute prétention à les mettre en 'uvre sans un respect rigoureux de leurs conditions ou pour un objet différent de celui qui leur a été assigné est de plein droit irrecevable,

- de dire qu'en application des dispositions de l'article 102 du CMP la réception régulière des travaux constitue le terme suspensif de prise d'effet exécutoire de l'engagement autonome comme la condition de recevabilité de cet appel,

- de dire que l'appel de la garantie en cause ne pouvait notamment intervenir régulièrement que sur le fondement du certificat administratif reprenant rigoureusement les termes et conditions énoncés dans le corps de l'acte en conformité avec le dispositif réglementaire,

- de dire que la première de ces conditions n'a pas été régulièrement observée, alors qu'en tout état de cause la seconde a été ignorée,

En conséquence, à considérer même que la première condition de réception des travaux soit retenue comme remplie, de dire que faute d'avoir fait l'objet d'un appel régulier dans le délai libératoire d'un an ayant suivi l'événement revendiqué comme constituant l'acte assimilable à cette réception des travaux, l'engagement en cause s'est trouvé frappé d'une caducité libératoire irrévocable,

- 'de dire dès lors que les demandes formées à l'encontre de la BTP TP sont irrecevables comme tardives, et, sans même qu'il ait été besoin de relever en quoi les prétentions accessoires formées par le demandeur étaient par principe vouées à l'échec au regard des faits, des pièces, et des règles de droit leur étant applicables, le débouter purement et simplement de ses prétentions',

- de condamner l'appelant à lui payer une somme de 5 000 € au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel, dont distraction pour ceux le concernant en application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP MAGNAN, Maître MAGNAN, Avocat aux offres de droit.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 16/10/2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la garantie à première demande

La recevabilité de l'action

Selon l'article 122 du code de procédure civile 'constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.'

En l'espèce, si l'intimée conclut principalement à l'irrecevabilité des demandes relatives à la garantie à première demande formées à son encontre au motif qu'elles seraient tardives, la cour constate que l'acte d'engagement signé le 12/07/2011 ne prévoit aucun délai préfix pour réclamer l'application de la garantie à peine d'irrecevabilité, pas plus que les dispositions des articles 101 et 102 du code des marchés publics qui définissent les conditions d'application de la retenue de garantie et de la garantie à première demande.

Au surplus, la cour constate d'une part, que HMP a sollicité le versement de la somme de 21 114 euros garantie à première demande par un courrier du 02/08/2012, puis par deux courriers du 28/01/2013 et du 08/08/2013, adressés à la BTP Banque, avant de l'assigner devant le tribunal de commerce par acte du 1er/09/2015, et, d'autre part que les moyens exposés par l'intimée quant à l'absence de réception des travaux et d'un certificat administratif indiquant le montant estimé du fait des réserves formulées, du surcoût d'achèvement des travaux ou services ou des livraisons de fournitures, concernent le fond du litige.

En conséquence, l'action engagée par HMP doit être déclarée recevable et il sera ajouté au jugement déféré, les premiers juges n'ayant pas statué sur ce point.

Les conditions de la garantie

Le cahier des clauses administratives particulières (CCAP) annexé au marché de travaux N°11014 signé par HMP et la société GARREL CONSTRUCTION stipule notamment :

- en son article 5.1 'retenue de garantie ou cautionnement : l'entrepreneur est tenu de constituer pour tout marché d'un montant supérieur à 10 000 euros HT une retenue de garantie dont le montant est égal à 5% du montant initial du marché (...) La retenue de garantie peut être remplacée, au choix du titulaire du marché, par une garantie à première demande établie conformément aux conditions fixées par l'article 102 du code des marchés publics (....)

La garantie à première demande est libérée dans le délai d'un mois suivant l'expiration du délai de garantie visé à l'article 44-1 du CCAG Travaux, pour autant que le titulaire du marché ait rempli ses obligations, à la suite d'une main-levée délivrée par le maître d'ouvrage.

A l'expiration du délai d'un mois susvisé, la caution cesse d'avoir effet, même en l'absence de main-levée, sauf si la personne responsable du marché a notifié, par lettre recommandée, avant l'expiration du délai de garantie, à l'entrepreneur ou à l'établissement ayant accordé sa garantie à première demande, selon le cas, que l'entrepreneur n'a pas rempli toutes ses obligations',

- en son article 8.2 'réception : le présent article déroge aux articles 41.1 à 41.3 inclus du CCAG Travaux.

La réception des ouvrages a lieu à l'achèvement de l'ensemble des prestations afférentes à l'exécution de l'opération visée à l'article 1er.

La date d'effet de la réception est celle de l'achèvement de l'ensemble des prestations afférentes à la réalisation de l'opération ou de la tranche concernée.

Toute réception (partielle ou globale) des travaux sera réalisée dans un délai de 15 jours à compter de la date de réception par le maître d'ouvrage de la lettre recommandée de l'entrepreneur l'avisant, 8 jours à l'avance, de la date retenue par lui comme celle de l'achèvement des travaux.

Dans le cas d'opération réalisée par des entreprises non groupées, il appartient au titulaire du marché de chaque lot d'adresser au maître d'ouvrage la lettre recommandée mentionnée au 41-1 du CCAG Travaux.

Lorsque la réception est assortie de réserves, l'entrepreneur doit remédier aux imperfections et malfaçons correspondantes dans un délai fixé à 30 jours après la date de réception',

L'article 46.1.2 du code des marchés publics dispose qu'en cas de redressement judiciaire, le marché est résilié, si après une mise en demeure de l'administrateur judiciaire, dans les conditions prévues à l'article L 622-13 du code de commerce, ce dernier indique ne pas reprendre les obligations du titulaire'.

En vertu de l'article L 622-13 III 1° du code de commerce : 'le contrat en cours est résilié de plein droit après une mise en demeure de prendre parti sur la poursuite du contrat adressée par le cocontractant à l'administrateur et restée plus d'un mois sans réponse.

Avant l'expiration de ce délai, le juge-commissaire peut impartir à l'administrateur un délai plus court ou lui accorder une prolongation, qui ne peut excéder deux mois, pour se prononcer'.

Et l'article 47.1.1 du code des marchés publics dispose 'en cas de résiliation, il est procédé (....) aux constatations relatives aux ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, à l'inventaire des matériaux provisionnés ainsi qu'à l'inventaire descriptif du matériel et des installations de chantier. Il est dressé procès-verbal de ces opérations dans les conditions prévues à l'article 12. Ce procès-verbal comporte l'avis du maître d'oeuvre sur la conformité aux dispositions du marché des ouvrages ou parties d'ouvrages exécutés. Ce procès-verbal est signé par le maître d'ouvrage. Il emporte réception des ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, avec effet de la date d'effet de la résiliation, tant pour le point de départ du délai de garantie défini à l'article 44 que pour le point de départ du délai prévu pour le règlement final du marché à l'article 13.3.2.'.

En l'espèce, il résulte des pièces régulièrement produites et des explications des parties :

- que selon acte du 12/07/2011 intitulé 'garantie à première demande N°31138111 remplaçant la retenue de garantie en application de l'article 102 du code des marchés publics', la BTP Banque a apporté sa garantie à la société GARREL CONSTRUCTION dans les termes suivants:

'pour un montant de 21 114 euros TTC qui ne peut être supérieur à celui de la retenue de garantie que la présente garantie remplace',

'le garant s'engage à payer à première demande, dans la limite du montant garanti, les sommes que la personne publique pourrait demander afin de couvrir les réserves à la réception des travaux, fournitures ou services ainsi que celles formulées pendant le délai de garantie du marché.

Le paiement interviendra dans un délai de 15 jours à compter de la réception d'un dossier comportant la photocopie des pièces suivantes :

1/ si l'entreprise est en redressement ou en liquidation judiciaire

jugement le ou la prononçant et ne permettant pas à l'entreprise de couvrir les réserves à la réception des travaux, fournitures ou services ainsi que celles formulées pendant le délai de garantie du marché,

2/ autres cas (....)

3/ Pièce à fournir dans les cas 1 et 2 : certificat administratif indiquant le montant estimé, du fait des réserves formulées, du surcoût d'achèvement des travaux ou services ou des livraisons de fournitures

Le montant qui nous sera réclamé ne pourra être supérieur au montant indiqué dans le certificat administratif sans pouvoir dépasser le montant garanti. Le garant procédera au paiement dès lors qu'elle aura reçu l'ensemble des pièces énumérées ci-dessus sans soulever aucune contestation quant à leur contenu (....)',

- que par jugement du 02/04/2012, le Tribunal de Commerce de Salon de Provence a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société GARREL CONSTRUCTION et a désigné Maître [Z] en qualité d'administrateur judiciaire avec pour mission d'assister la débitrice dans tous les actes relatifs à la gestion de la société,

- que le procès-verbal des opérations préalables à la réception (OPR) établi le 13/04/2012 comportant une annexe 1 de trois pages mentionnant des travaux non exécutés ou à reprendre n'est pas signé par le maître d'ouvrage et par le représentant de la société GARREL CONSTRUCTION, et précise en première page 'identification du maître d'oeuvre : sans objet' (pièce 4 de l'appelant),

- que par courrier du 30/05/2012 adressé au gérant de la société GARREL CONSTRUCTION, dont l'intimée admet dans ses écritures qu'il est réputé avoir été reçu par son destinataire le 06/06/2012, faisant référence aux OPR tenues les 6 et 13/04/2012, HMP indiquait notamment 'dans ces conditions, les ouvrages ne peuvent être réceptionnés (...) Compte tenu de votre absence du chantier depuis ces constatations, nous vous mettons en demeure d'achever les travaux et de procéder aux reprises des imperfections et malfaçons sous 8 jours' (pièce 9a de l'appelant),

- que le courrier de HMP du 30/05/2012 adressé à Maître [Z] en qualité d'administrateur judiciaire de la société GARREL CONSTRUCTION, dont l'accusé de réception n'est pas produit mais dont l'intimée admet dans ses écritures qu'il a été reçu par son destinataire le 05/06/2012, précise 'les travaux n'étant pas ce jour ni achevés, ni réceptionnés, le marché est toujours en cours d'exécution. Nous souhaiterions connaître votre position sur l'éventuelle poursuite de ce contrat en cours d'exécution, cette lettre valant mise en demeure au sens de l'article L 622-13 du code de commerce',

- que sans attendre l'expiration du délai d'un mois prévu à l'article L 622-13 III 1° du code de commerce, HMP a adressé à la société GARREL CONSTRUCTION et à son administrateur judiciaire Maître [Z] un courrier daté du 15/06/2012 lui notifiant sa décision d'ordonner la poursuite des prestations par une entreprise tierce à ses frais et risques et une convocation aux constatations contradictoires relatives aux ouvrages ou parties d'ouvrages exécutés, à l'inventaire des matériaux approvisionnés, ainsi qu'à l'inventaire descriptif du matériel et des installations de chantier (pièce 11a de l'appelant),

- que le procès-verbal des constatations contradictoires comporte une liste des travaux non exécutés ou à reprendre allant des pages 2 à 5 (reprenant l'annexe 1 du procès-verbal des OPR), puis in fine les mentions suivantes :

'dressé le vendredi 28 juin 2012 en deux exemplaires dont un remis ce jour en main propre au titulaire

Signature Maître d'ouvrage Encart laissé en blanc

Accepté le Signature Encarts laissés en blanc

j'atteste que le titulaire est absent au rendez-vous fixé pour l'établissement du présent procès-verbal

dressé le 28 juin 2012 à 9H45

Signature Maître d'ouvrage '[Q] [A] Conducteur d'Opérations'

(pièce 12 de l'appelant),

- qu'un document intitulé 'opération de réfection de l'étanchéité des toitures terrasses (....) Détermination du surcoût de la tranche ferme induit par la carence de l'entreprise GARREL CONSTRUCTION' à en-tête 'Habitat Marseille Provence', produit en pièce 10 par l'appelant, présente plusieurs tableaux indiquant :

1/ le détail des montants réglés à la société GARREL CONSTRUCTION pour chaque prestation, avec correspondance des prestations réglées à l'entreprise SMED,

2/ les travaux de la tranche ferme non prévus dans le marché initial de GARREL CONSTRUCTION et chiffrés par l'entreprise SMED,

3/ le coût des travaux d'urgence réalisés pour pallier à la carence de GARREL CONSTRUCTION sur la tranche ferme,

4/ le surcoût total TTC sur la tranche ferme induit par la carence de GARREL CONSTRUCTION,

et ne comporte aucune date, ni signature.

Sur la réception des travaux

Alors que 'le procès-verbal des constatations des travaux du 28/06/2012" signé au lieu et place du maître d'ouvrage par [Q] [A] est intervenu d'une part, sans attendre l'expiration du délai d'un mois prévu à l'article L 622-13 III 1° du code de commerce, et sans que le maître d'ouvrage ait reçu une réponse de la société et de Maître [Z], en sa qualité d'administrateur judiciaire avec mission d'assister la société GARREL CONSTRUCTION, sur la poursuite du marché, et, d'autre part, antérieurement au prononcé de la résiliation du marché par courrier du 17/07/2012, l'appelant n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article 47.1.1 du CCAG Travaux stipulant que ce procès-verbal de constatations relatives aux travaux exécutés emporte réception des ouvrages et parties d'ouvrages exécutés.

Contrairement à ce que soutient l'appelant, il n'est nullement établi qu'il a respecté les dispositions de l'article 12.4 du CCAG Travaux stipulant que 'si le titulaire, dûment convoqué en temps utile, n'est pas présent ou représenté aux constatations, il est réputé accepter sans réserve le constat qui en résulte', puisqu'il se contente de produire en pièces 11a et 11b les copies des courriers du 15/06/2012 adressés à GARREL CONSTRUCTION et à Maître [W] [Z], en sa qualité d'administrateur judiciaire de cette société, sans y joindre les accusés de réception des courriers envoyés en recommandé, de sorte que la preuve de ce qu'ils ont été reçus par leurs destinataires n'est pas rapportée.

En conséquence, la demande principale de l'appelant tendant à voir dire et juger qu'il y a eu une réception expresse des ouvrages exécutés par le maître d'ouvrage doit être rejetée.

En revanche, alors qu'il résulte des pièces susvisées, particulièrement du courrier du 17/07/2012 précité (pièce 12 de l'appelant), d'une part, que la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage d'accepter les travaux exécutés par la société GARREL CONSTRUCTION est établie, et, d'autre part, que le maître d'ouvrage a réglé l'essentiel du prix du marché, l'intimée admettant en page 11 de ses écritures qu'il avait réglé la somme de 337 053,98 euros TTC, soit plus des 3/4 du montant total du marché, il y a lieu de constater que les ouvrages exécutés par la société GARREL CONSTRUCTION ont été tacitement réceptionnés, avec les réserves mentionnées au procès-verbal des constatations du 28/06/2012 précité.

Sur le certificat administratif

L'acte d'engagement stipule notamment :

- que doit être fourni 'un certificat administratif indiquant le montant estimé, du fait des réserves formulées, du surcoût d'achèvement des travaux ou services ou des livraisons de fournitures'

- que 'le montant qui sera réclamé au garant ne pourra être supérieur au montant indiqué dans le certificat administratif sans pouvoir dépasser le montant garanti, le garant devant procéder au paiement dès lors qu'il aura reçu l'ensemble des pièces énumérées sans soulever aucune contestation quant à leur contenu.

Alors que par courrier du 03/10/2012, la BTP Banque a sollicité des pièces complémentaires à celles versées par HMP à l'appui de sa demande de mise en oeuvre de la garantie telles que la copie du marché de travaux, la copie du CCG, la copie du CCAP, la copie du DGD de l'opération, la copie des justificatifs de paiements au bénéfice de la société GARREL CONSTRUCTION et la copie du procès-verbal de réception dûment régularisé par toutes les parties ainsi que la copie de la liste des réserves correspondantes, sans solliciter la production 'd'un certificat administratif reprenant rigoureusement les termes et conditions énoncés dans le corps de l'acte en conformité avec le dispositif réglementaire' dont elle soutient aujourd'hui qu'il devait être fourni, et qu'elle n'a pas répondu au courrier du 28/01/2013 qui lui a été adressé par HMP avec les pièces sollicitées qu'elle ne conteste pas avoir reçues, l'appelant est fondé à soutenir qu'elle doit procéder au paiement puisqu'elle n'a soulevé en temps utile aucune contestation sur le contenu ou la forme des pièces qui lui ont été transmises.

Sur le montant de la garantie

Si l'article 102 du CMP dispose en son premier alinéa que le montant de la garantie à première demande ne peut être supérieur à celui de la retenue de garantie qu'elle remplace et que leur objet est identique, le dernier alinéa de ce texte précise 'toutefois, cette garantie à première demande est constituée pour le montant total du marché y compris les avenants', de sorte que HMP est fondée à obtenir l'intégralité du montant garanti, soit 21 114 euros, contrairement à ce que soutient l'intimée, et ce avec intérêts légaux à compter du 02/08/2012, date de la première mise en demeure.

Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive

Alors que l'appelant ne démontre pas avoir subi un préjudice distinct de celui lié au retard de paiement de la BTP Banque, compensé par les intérêts, elle doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.

En conséquence, le jugement déféré doit être ici confirmé.

Sur l'exécution provisoire

Dans le cadre de l'instance d'appel, il n'appartient pas à la cour, statuant au fond et en dernier ressort, 'd'ordonner l'exécution provisoire'.

Cette demande formulée en appel par l'appelant est donc irrecevable.

Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile

Succombant principalement, la BTP Banque supportera les dépens de première instance et d'appel et devra régler une indemnité de 3 000 euros à l'EPIC HMP au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR :

Statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement déféré, excepté en ce que les premiers juges ont débouté l'EPIC HABITAT MARSEILLE PROVENCE de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,

STATUANT À NOUVEAU du seul chef infirmé et Y AJOUTANT,

DECLARE recevables les demandes formées par l'EPIC HABITAT MARSEILLE PROVENCE au titre de la garantie à première demande,

DECLARE irrecevable la demande formée par l'EPIC HABITAT MARSEILLE PROVENCE tendant à ordonner l'exécution provisoire,

REJETTE la demande formée par l'EPIC HABITAT MARSEILLE PROVENCE tendant à voir dire et juger qu'il y a eu une réception expresse des ouvrages exécutés,

CONSTATE que les ouvrages réalisés par la société GARREL CONSTRUCTION ont été tacitement réceptionnés le 17/07/2012, avec les réserves mentionnées au procès-verbal des constatations du 28/06/2012 établi par HABITAT MARSEILLE PROVENCE,

DIT que les conditions d'application de la garantie à première demande, consentie par la Banque du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP Banque) au profit d'HABITAT MARSEILLE PROVENCE, sont réunies,

En conséquence,

CONDAMNE la Banque du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP Banque) à payer à l'EPIC HABITAT MARSEILLE PROVENCE la somme de 21 114 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 02/08/2012,

DEBOUTE la Banque du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP Banque) de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la Banque du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP Banque) à régler à l'EPIC HABITAT MARSEILLE PROVENCE une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la Banque du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP Banque) aux dépens de première instance et d'appel,

EN ORDONNE la distraction en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 16/11435
Date de la décision : 24/01/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3B, arrêt n°16/11435 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-24;16.11435 ?
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