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10/01/2019 | FRANCE | N°16/14272

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-4, 10 janvier 2019, 16/14272


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3 - 4

(anciennement dénommée 8è chambre C)



ARRÊT AU FOND

DU 10 JANVIER 2019



N° 2019/0001













Rôle N° RG 16/14272 - N° Portalis DBVB-V-B7A-7BGS







SARL G.SERIS





C/



[V] [R]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me LEANDRI-CAMPANA

Me STUCKEY






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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 05 Juillet 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 14/10961.





APPELANTE



SARL G.SERIS,

Prise en la personne de son représentant légal

Dont le siège est sis [Adresse 1]

[Adresse 1]

repré...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3 - 4

(anciennement dénommée 8è chambre C)

ARRÊT AU FOND

DU 10 JANVIER 2019

N° 2019/0001

Rôle N° RG 16/14272 - N° Portalis DBVB-V-B7A-7BGS

SARL G.SERIS

C/

[V] [R]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me LEANDRI-CAMPANA

Me STUCKEY

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 05 Juillet 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 14/10961.

APPELANTE

SARL G.SERIS,

Prise en la personne de son représentant légal

Dont le siège est sis [Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Stéphanie LEANDRI-CAMPANA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

Monsieur [V] [R]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 1],

demeurant [Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Robin STUCKEY de la SELARL PRIEUR & STUCKEY, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 Novembre 2018 en audience publique devant la cour composée de :

Monsieur Dominique PONSOT, Président

Mme Valérie GAILLOT-MERCIER, Conseiller

Mme Anne FARSSAC, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Rime GHORZI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Janvier 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Janvier 2019.,

Signé par Monsieur Dominique PONSOT, Président et Mme Rime GHORZI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Marseille du 5 juillet 2016 ayant, notamment :

- dit que l'article 30 des statuts de la SARL G. Seris est applicable au présent litige en ce qu'il prévoit que le président de l'Ordre des experts-comptables doit être saisi pour arbitrage en cas de litige entre les associés,

- déclaré l'action engagée par la SARL G. Seris irrecevable en raison de la clause compromissoire,

- condamné la SARL G. Seris à payer à M. [V] [R] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SARL G. Seris aux dépens ;

Vu la déclaration du 29 juillet 2016, par laquelle la SARL G. Seris a relevé appel de cette décision ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 19 octobre 2018, aux termes desquelles la SARL G. Seris demande à la cour de :

- la recevoir en son appel, le déclarer recevable et bien fondé,

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

- dire et juger l'action qu'elle a engagée à l'encontre de M. [R] recevable,

- condamner M. [V] [R] à lui payer la somme de 220.142,07 euros (comptes arrêtés au 31.03.2014) avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

- débouter M. [V] [R] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [V] [R] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 15 octobre 2018, aux termes desquelles M. [V] [R] demande à la cour de :

A titre principal,

- constater qu'en application des stipulations de l'article 30 de ses statuts, la SARL G. Seris aurait dû s'efforcer de faire accepter l'arbitrage du président du conseil régional de l'Ordre des experts-comptables pour la résolution du litige survenu entre les parties,

- dire et juger que la SARL G. Seris en ne proposant pas l'arbitrage n'a pas respecté les stipulations contractuelles de ses propres statuts,

- dire et juger qu'en application de l'article 30 des statuts de la SARL G. Seris et du code de déontologie des professionnels de l'expertise comptable, les juridictions étatiques sont matériellement incompétentes pour statuer sur le présent litige,

- prendre acte de la saisine du conseil de l'Ordre des experts-comptables à laquelle il a procédé,

En conséquence,

- confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,

A titre subsidiaire,

- constater l'absence de production par la SARL G. Seris des pièces suivantes :

demandées par M. [R] :

1) L'extrait des comptes de « classe 4 » au 30 septembre 2008 et au 30 septembre 2009, concernant [V] [R] dans les comptes de la société SARL G. Seris, (comptes présentant l'encaissement des honoraires de commissariat aux comptes de [V] [R] détournés par la SARL G. Seris / M. Seris, la comptabilisation éventuelle des factures non acceptées de collaboration externe, les factures contestées au titre de la convention de moyens, les rémunérations.) (Les pièces des points 2 et 3 ayant été communiquées) (La SARL G. Seris justifié la non-communication du point 4),

5) La copie « recto verso » de tous les chèques de règlements d'honoraires relatifs aux honoraires de commissariat aux comptes, encaissés en 2013 au titre des factures de commissariat aux comptes 2012, (lesquelles figurent en pièce communiquée n° 2),

6) La copie « recto verso » de tous les chèques de règlements d'honoraires relatifs aux honoraires de Commissariat aux comptes, encaissés durant les années 2009, 2010, 2011, 2012, et 2014 par la Sarl G. Seris & Cie,

7) La copie papier et le dossier/fichier informatique du facturier utilisé par la SARL G. Seris/ M. Seris pour émettre des factures de commissariat aux comptes sur le papier en-tête de M. [V] [R] :

* Pièces 13 et 14 de la société G. Seris,

* Les grands livres des années 2007 et 2008 n'ont toujours pas été communiqués.

* Les extraits du compte 472000 (compte « d'attente » du plan comptable) du grand livre pour les exercices 09/2007 à 09/2015 et l'extrait dans les comptes à ce jour,

* Les extraits de tous les comptes de classe 7 ayant reçu des honoraires de travaux de collaboration en commissariat aux comptes, pour les exercices 09 2007 à 09 2015,

* Preuve de l'accusé de réception adressé à M. [V] [R] pour la convocation à l'AGO du 18 mars 2011,

8) la copie des journaux « EUROS '' du 30 septembre 2008 à ce jour avec précision claire de l'objet du journal baptisé « EUROS '',

9) les extraits des comptes crédités des grands livres communiqués avec précision des contreparties créditrices des débits aux comptes 4119xx,

10) l'écart arithmétique de 12 512 euros au 31 décembre 2009 entre l'extrait de comptabilité, à savoir le compte 411802 dans la comptabilité de la SARL G. Seris (égal à 80 617,54€), et l'état extra comptable annexé à l'assignation (93 130,24 euros),

11) la copie de tous les extraits de comptes bancaires de la SARL G. Seris présentant l'encaissement d'honoraires de Commissariat aux comptes reçus par virement depuis 2008,

- désigner un expert judiciaire de profession expert-comptable / commissaire aux comptes avec pour mission de faire les comptes entre les parties, et pour ce faire,

- prendre connaissance de toutes les pièces du dossier, entendre les parties, etc...

- se faire communiquer par les parties toutes pièces, document, information qui serait utile à l'accomplissement de sa mission, y compris auprès des établissements bancaires, financiers ou clients, notamment les pièces susmentionnées requises par M. [R],

- se faire communiquer au contradictoire de toutes les parties, si besoin accompagné d'un sapiteur informaticien, une copie de l'ensemble des documents et fichiers informatiques demeurés dans les locaux de la société G. Seris (documents et fichiers résultant du travail de collaborateur externe de la SARL G. Seris),

- obtenir communication des comptes de la Sarl G. Seris & Cie concernant M. [V] [R],

- vérifier l'existence d'un compte client à l'actif justifiant « arithmétiquement » la demande,

- vérifier si ce compte a enregistré les factures de collaboration externe indues, l'analyser, le détailler et relever les contestations,

- vérifier l'existence au passif de comptes courants ayant enregistré d'une part les honoraires détournés au préjudice de M. [V] [R] et d'autre part les rémunérations non versées de 2008 à mars 2011,

- préciser les écritures pratiquées dans les comptes par le gérant et dire si ces écritures sont légalement conformes,

- comprendre et décrire toutes les écritures comptables concernant les honoraires sur commissariat aux comptes et autres litiges,

- chiffrer le montant des honoraires détournés,

- apprécier si la SARL G. Seris se comportait et apparaissait comme commissaire aux comptes vis-à-vis des sociétés,

- analyser en détail les « Dossiers Annuels '' et les « Dossiers Permanents '', tant papier qu'électronique, dire s'il respectait les normes (NEP), la qualité et validité de ce travail,

- vérifier si G. Seris utilisait le logiciel « Auditsoft » exigé pour la bonne exécution des « NEP » et par M. [V] [R],

- valoriser ses travaux, s'ils ont une valeur, proportionnellement au budget annuel de chacun des mandats, dire s'il y a réellement une valeur ou des préjudices potentiels pour M. [V] [R] et les chiffrer,

- analyser les services réellement apportés au titre de la convention de moyens de janvier 2007 à mars 2014, avec le niveau professionnel requis par les métiers d'expert-comptable et de commissaires aux comptes, ceux non apporté ou sans le niveau requis. (Absence d'assistante qualifiée, présence de secrétaires non qualifiées ou absence totale durant des mois en période de bilans, services bureautique non apportés, aucun service depuis octobre 2013, etc...),

- chiffrer la valeur des apports réels,

- analyser les préjudices découlant de ces services non apportés ou avec un niveau professionnel insuffisant ou interdits aux secrétaires,

- chiffrer ces préjudices,

- analyser l'ensemble des préjudices créés à M. [V] [R] par la SARL G. Seris, personnellement et comme gérant, depuis septembre 2013 (Suppression logiciel de bilans, obligation de ré informatisation, etc... ,

- enjoindre la SARL G. Seris de le laisser récupérer les documents, papiers et électroniques, lui appartenant stockés dans les locaux de la SARL C. Seris, y compris sur le réseau et serveur informatique commun, au contradictoire de toutes les parties, par un huissier de justice, si besoin accompagné d'un sapiteur informaticien,

- autoriser la récupération des documents, papiers et électroniques, lui appartenant, stockés dans les locaux de la SARL G. Seris, y compris sur le réseau et serveur informatique commun au contradictoire de toutes les parties, par un huissier de justice, si besoin accompagné d'un sapiteur informaticien et assisté de la force publique,

A titre infiniment subsidiaire,

- constater l'absence de comptabilité concordante de la SARL G. Seris tel que cela a pu être constaté par Mme [U],

- débouter la SARL G. Seris de l'ensemble de ses demandes en paiement,

- condamner la SARL G. Seris à lui payer la somme de 232.021,59 euros au titre des comptes et détournements d'honoraires réalisés par la SARL G. Seris à ses dépens pour les exercices de 2010 à 2015,

En tout état de cause,

- condamner la SARL G. Seris à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens ;

SUR CE, LA COUR,

Attendu qu'il est constant que la société G. Seris, société d'expertise comptable, a entretenu avec M. [V] [R], expert-comptable et commissaire aux comptes, des relations anciennes qui se sont matérialisées par différentes conventions de mise à disposition de matériel et de salariés permettant à M. [R] d'exercer son activité d'expert-comptable de manière indépendante au sein du cabinet G. Seris, de même que des conventions de sous-traitance, par

lesquelles M. [R] a confié à la société G. Seris la réalisation de certaines opérations techniques pour les besoins de ses activités de commissaire aux comptes ;

Qu'il est constant que la société, transformée en SARL le 28 juillet 2005, a permis à M. [R] de devenir associé à hauteur de 10.000 euros, soit 5 % du capital, par suite de l'acquisition de deux parts auprès de Mme Dominique Seris ; qu'à cette occasion, il a été désigné en qualité de cogérant, aux côtés de M. [K] Seris ;

Qu'à compter de l'année 2007, des tensions sont apparues entre M. [R] et M. Seris sur les différents aspects de leurs relations ; que le règlement des redevances dues par M. [R] à la SARL G. Seris au titre de la mise à disposition de matériel et de personnel, qui s'élevait à l'époque à 37.000 francs HT par mois jusqu'au 1er janvier 2008, puis 4.000 euros HT par mois jusqu'au 31 décembre 2008, montant ramené à 2.000 euros HT par mois à compter du 1er janvier 2009, n'a plus été effectué de manière régulière ; qu'une convention financière a été signée le 3 janvier 2010, aux termes de laquelle M. [R] reconnaissait devoir à la SARL G. Seris une somme totale de 121.130,24 euros, qu'il s'engageait à régler notamment par deux versements, l'un de 51.831,35 euros, devant être payé le 30 novembre 2010, l'autre, de 41.298,89 euros, devant être payé le 31 mai 2011 ;

Qu'estimant que M. [R] demeurait redevable de certaines sommes au titre de cette convention et qu'il se trouvait devoir des redevances postérieures à cette convention, la SARL G. Seris l'a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Marseille, réclamant une somme totale de 220.142,07 euros, par acte du 2 septembre 2014 ;

Qu'en réponse, M. [R] a soutenu que la convention de moyens n'était pas convenablement exécutée par la SARL G. Seris, tant au regard du matériel que du personnel mis à disposition, que la sous-traitance effectuée pour les besoins de l'activité de commissariat aux comptes n'était pas satisfaisante, que des honoraires dus au titre de cette activité avaient été détournés par la SARL G. Seris et qu'enfin, la SARL G. Seris demeurait redevable envers lui des rémunérations qui lui étaient dues au titre de ses fonctions de gérant, les parties s'opposant sur la date de cessation de ces fonctions ;

Qu'au préalable, M. [R] a soulevé une fin de non-recevoir tirée de l'incompétence matérielle du tribunal de grande instance de Marseille au profit du président du conseil régional de l'Ordre des experts-comptables, en application de l'article 30 des statuts de la SARL ;

Que le jugement entrepris a fait droit à cette exception et déclaré l'action irrecevable ;

Sur l'exception d'incompétence

Attendu que la SARL G. Seris, appelante, rappelle que l'article 30 de ses statuts prévoit simplement qu'en cas de différend, la société s'efforcera de faire accepter l'arbitrage du président du conseil régional de l'Ordre des experts-comptables ; qu'une telle disposition ne peut, selon elle, s'analyser en une clause compromissoire ;

Qu'en effet, aucun des modèles de clauses compromissoires utilisées dans le domaine du commerce international ne recourt selon elle à l'expression s'efforcer ou à une expression du même ordre, pour soumettre les parties à l'obligation de recourir à un arbitrage ;

Qu'en d'autres termes, dans une clause compromissoire, la soumission du différend à l'arbitrage est une obligation de résultat, et non une obligation de moyens ; que, selon elle, la commune intention des parties a été de prévoir une obligation de moyens (s'efforcer de faire accepter l'arbitrage) et non une obligation de résultat (soumettre obligatoirement le litige à l'arbitrage) ;

Qu'elle note que c'est en se sens que se prononce la jurisprudence, qui considère qu'une clause ne constitue pas une clause d'arbitrage, dès lors qu'elle n'oblige nullement les parties à se soumettre à l'arbitrage ;

Qu'elle constate, en outre que l'article 30 des statuts comporte un second alinéa prévoyant que toutes les contestations qui pourront surgir entre les associés, ou entre les associés et la société, relativement aux affaires sociales ou à l'exécution des statuts, seront soumises aux tribunaux compétents ; que l'expression relativement aux affaires sociales est particulièrement large, au point, selon elle, que tout est relatif aux affaires sociales, dès lors que la société est impliquée ;

Qu'elle ajoute que l'article 30 des statuts ne saurait être interprété comme une clause de règlement amiable ; qu'en effet, une clause de conciliation préalable doit être claire et non équivoque, et doit manifester de manière incontestable une volonté d'évitement du juge étatique ;

Qu'en tout état de cause, M. [R] s'étant reconnu débiteur d'une somme de 121.130,24 euros, et s'étant engagé sur un protocole d'apurement, elle considère que le litige dont il s'agit ne constitue ni un litige entre la société et l'un de ses clients, ni un litige entre associés, ni un litige entre la société et son gérant, ni un litige entre la société et l'un de ses associés, mais un litige entre la société et l'un de ses co-contractants, qui n'entre pas dans le champ de la clause ;

Qu'en réponse, M. [R] soutient que l'article 30 des statuts constitue bien une clause compromissoire et répond précisément à la définition donnée par l'article 1442 du code de procédure civile ;

Qu'il constate que la seule condition de forme, à savoir l'existence d'un écrit, a bien été satisfaite ;

Qu'il conteste le recours au second alinéa de l'article 30 des statuts, auquel procède la SARL G. Seris ; que selon lui, en effet, ce second alinéa n'est applicable qu'aux contestations spécifiques, relatives aux affaires sociales ou à l'exécution des présents statuts, ce qui ne serait pas le cas des demandes de la société G. Seris à son égard, ou de ses demandes reconventionnelles à l'encontre de la SARL G. Seris, qui constituent seulement une contestation entre associés relative au reversement d'honoraires ; qu'il ne s'agit pas d'un litige relatif aux affaires sociales ou à l'exécution des statuts ;

Qu'ainsi que l'ont retenu les premiers juges, en décider autrement aboutirait à vider le premier alinéa de l'article 30 de sa substance ;

Qu'il rappelle qu'en application de l'article 1157 du code civil, lorsqu'une clause est susceptible de deux sens, on doit l'entendre dans celui qui lui fait produire un effet, plutôt que dans le sens avec lequel elle n'en produirait aucun ; qu'il estime que la commune intention des parties résulte clairement du terme arbitrage et la désignation précise et non équivoque de l'arbitre choisi ;

Qu'il réfute l'argumentation développée par la SARL G. Seris sur l'existence d'une simple obligation de moyens, résultant de l'emploi du verbe s'efforcer, et soutient que la clause ne laisse pas d'alternative ;

Qu'il ajoute que les statuts sont conformes au code de déontologie des experts-comptables qui prévoit un arbitrage par le président du conseil régional de l'Ordre pour les litiges entre deux experts-comptables ;

Attendu qu'aux termes de l'article 1442 du code de procédure civile, la convention d'arbitrage prend la forme d'une clause compromissoire ou d'un compromis ; que la clause compromissoire est la convention par laquelle les parties à un ou plusieurs contrats s'engagent à soumettre à l'arbitrage les litiges qui pourraient naître relativement à ce ou à ces contrats ;

Attendu que l'article 30 des statuts de la SARL G. Seris est ainsi rédigé :

Article 30 - Contestations

En cas de contestation entre la société et l'un de ses clients, soit entre les associés, les gérants, les liquidateurs et la société ou entre les associés eux-mêmes, la société s'efforcera de faire accepter l'arbitrage du président du Conseil régional de l'Ordre des experts-comptables ;

En cas de pluralité d'associés, toutes les contestations qui pourraient surgir pendant la durée de la société ou lors de sa liquidation entre les associés ou entre la société et les associés, relativement aux affaires sociales ou à l'exécution des présents statuts, seront soumises aux tribunaux compétents ;

Qu'il doit tout d'abord être observé, au regard du champ d'application de la clause, que si une partie du litige opposant M. [R] à la SARL G. Seris, celle relative au paiement des rémunérations en qualité de gérant, relève incontestablement des relations entre le gérant et la société, il en va autrement de l'exécution de la convention de mise à disposition de moyens matériels et humains, qui n'intéresse pas les relations sociétales et dans lesquelles M. [R] ne saurait être considéré comme un client, mais comme un cocontractant ;

Que, pour le reste, c'est à juste titre que M. [R] fait observer que la clause litigieuse s'inspire du dispositif prévu par le décret du 30 mars 2012, et plus particulièrement de son article 159, selon lequel, en cas de contestation par le client ou adhérent des conditions d'exercice de la mission ou de différend sur les honoraires, l'expert-comptable s'efforce de faire accepter la conciliation ou l'arbitrage du président du conseil régional de l'Ordre avant toute action en justice ; que, toutefois, ce texte, qui n'ouvre qu'une faculté, ne peut faire obstacle au droit qu'a toute personne d'agir en justice, ainsi qu'il ressort de la jurisprudence de la Cour de cassation ;

Qu'en l'espèce, il n'est pas sérieusement contestable que la clause litigieuse ne met à la charge des parties aucune obligation de soumettre les différends qu'elle vise à l'arbitrage ; que le terme s'efforcer, qui ne renvoie qu'au bon vouloir de la société G. SERIS sans même lui imposer de justifier, le cas échéant dans un certain délai, des diligences accomplies pour obtenir l'accord de son contradicteur au règlement du litige par voie d'arbitrage, ne saurait s'analyser en une clause d'arbitrage au sens de l'article 1442 du code de procédure civile susvisé ;

Qu'il n'y a aucune conséquence a contrario à tirer au cas particulier du second alinéa de l'article 30 litigieux des statuts, dont la portée apparaît limitée à l'hypothèse dans laquelle le litige oppose plusieurs associés entre eux ou à l'égard de la société ;

Que le jugement entrepris sera, en conséquence, infirmé en ce qu'il a accueilli l'exception d'incompétence ; que les nécessités d'une bonne administration de la justice ne justifient pas que la cour fasse usage de son pouvoir d'évoquer le fond de l'affaire ; que la complexité du litige justifie au contraire que les parties bénéficient des garanties du double degré de juridiction ;

Qu'au surplus, le renvoi vers le premier juge ne pourra que favoriser la recherche d'une solution transactionnelle entre les parties ;

Que les parties seront donc renvoyées devant le tribunal de grande instance de Marseille pour y voir trancher le litige au fond ;

Attendu que M. [R], qui succombe dans son exception d'incompétence, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel ;

Qu'aucune considération d'équité ne justifie, en l'état, de faire droit aux demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement rendu le 5 juillet 2016 par le tribunal de grande instance de Marseille en toutes ses dispositions ;

STATUANT à nouveau,

-REJETTE l'exception d'incompétence ;

-DÉCLARE le tribunal de grande instance de Marseille compétent pour connaître du litige ;

-RENVOIE la cause et les parties devant le tribunal de grande instance de Marseille ;

REJETTE toute autre demande des parties, et notamment celles fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [V] [R] aux dépens de première instance et d'appel ;

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-4
Numéro d'arrêt : 16/14272
Date de la décision : 10/01/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°16/14272 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-10;16.14272 ?
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