La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/12/2018 | FRANCE | N°17/00212

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre b, 06 décembre 2018, 17/00212


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

17e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 06 DECEMBRE 2018



N° 2018/586







MS





RG N° 17/00212

N° Portalis DBVB-V-B7B-72AS







Bertrand X...





C/



SAS ABYLSEN SUD

























Copie exécutoire délivrée

le : 6/12/2018

à :



- Me Olivier Y..., avocat au barreau de LYON



- Me Ed

ward Z..., avocat au barreau de PARIS

































Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 14 Décembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° F 16/00318.





APPELANT



Monsieur Bertrand X..., demeurant [...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

17e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 06 DECEMBRE 2018

N° 2018/586

MS

RG N° 17/00212

N° Portalis DBVB-V-B7B-72AS

Bertrand X...

C/

SAS ABYLSEN SUD

Copie exécutoire délivrée

le : 6/12/2018

à :

- Me Olivier Y..., avocat au barreau de LYON

- Me Edward Z..., avocat au barreau de PARIS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 14 Décembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° F 16/00318.

APPELANT

Monsieur Bertrand X..., demeurant [...]

représenté par Me Olivier Y..., avocat au barreau de LYON (A PRIM [...])

INTIMEE

SAS ABYLSEN SUD, demeurant [...]

représentée par Me Edward Z..., avocat au barreau de PARIS ([...])

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Octobre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:

Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre

Monsieur Thierry LAURENT, Conseiller

Madame Mariane ALVARADE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Pascale ROCK.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Décembre 2018.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Décembre 2018

Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Mme Pascale ROCK, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur Bertrand X... a conclu :

- le 16 décembre 2004, avec la société Abylsen, un contrat de travail en qualité de directeur du développement comportant une clause de non concurrence limitée à la région Lyonnaise,

- le 9 mai 2007, avec la société Abylsen Sud, un contrat de travail comportant une clause de non concurrence limitée à la région Niçoise.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils.

M. X... a par ailleurs signé, le 15 juin 2012, un pacte d'associés de la société CHG Holding détenant les deux sociétés, comportant une clause de non concurrence limitée aux territoires français, belge, allemand. Le 13 janvier 2014, il s'est vu notifier le maintien de son obligation de non concurrence en vertu du pacte d'associés dans «le cadre de sa démission de l'ensemble de ses fonctions au sein du Groupe».Il a perçu diverses sommes, à titre d'indemnité de non concurrence pour la période de janvier 2014 à mai 2015.

Le 2 juillet 2013, M. X... a démissionné de ses fonctions de directeur du développement d'Abylsen Sud, la démission étant effective à la date du 31 décembre 2013.

Le 26 décembre 2013, la société lui a notifié la levée de la clause de non concurrence: «Vous êtes libéré de tous vos engagements au titre de cette clause de non concurrence et la société Abylsen Sud ne vous devra donc aucune rémunération ou aucune somme à ce titre ».

Contestant les conditions dans lesquelles il avait ainsi été libéré de la clause de non-concurrence par la société Abylsen Sud, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes de Grasse le 6 octobre 2015 afin d'obtenir sa contrepartie financière.

Par jugement rendu le 14 décembre 2016, le conseil de prud'hommes de Grasse l'a débouté de ses demandes et l'a condamné aux dépens ainsi qu'à verser à la société Abylsen Sud la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

M. X... a interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas critiquées.

S'agissant de la levée de la clause de non concurrence stipulée au contrat de travail le liant à la société Abylsen, M. X... a introduit une action similaire dont il a été débouté par jugement rendu le 16 février 2017 par le conseil de prud'hommes de Lyon.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électroniquele 30 mars 2017, M. X... appelant, invoque :

à titre principal,

- l'absence de stipulation au contrat de travail d'une faculté de renonciation privant la société du droit de lever la clause de non concurrence,

- le caractère purement potestatif de la clause entraînant sa nullité, la société étant seule en mesure de décider de son applicabilité ou non,

- la tardiveté de l'information qu'il a reçue sur le sort de cette clause, la société ayant attendu le 26 décembre 2013, soit plus de six mois après sa démission intervenue le 2 juillet 2013,

à titre subsidiaire

- le comportement déloyal de la société en ayant levé les clauses de non concurrence des deux contrats de travail tout en maintenant sciemment la même obligation au titre de la clause de non concurrence du pacte d'actionnaire moins bien rémunérée.

Il demande d'infirmer le jugement, de dire et juger que la clause de non concurrence de son contrat de travail n'a pas été valablement levée et de condamner la société Abylsen Sud à lui payer la somme de 196 200 euros bruts à titre d'indemnité de non concurrence et la somme de 19 620 euros à titre de congés payés sur indemnité de non concurrence,la clause prévoyant une indemnité égale à 25 % du salaire mensuel par mois d'ancienneté dans la limite de 12 mois de salaire, et son ancienneté étant de 6 ans et 8 mois dans l'entreprise.

Subsidiairement, il demande à la cour de dire et juger qu'il aurait dû bénéficier d'une contrepartie financière de clause de non concurrence égale à celle contenue dans son contrat de travail, en conséquence,de condamner la société Abylsen Sud au paiement des mêmes montants en deniers ou quittances.

En tout état de cause, il demande de condamner la société Abylsen Sud à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner aux dépens.

Aux termes de ses dernières écritures transmises par voie électronique le 26 mai 2017, la société Abylsen Sud, intimée fait valoir:

- que le contrat de travail prévoyait expressément que la société se réservait le droit de mettre en 'uvre la clause en prévenant M. X... par écrit au plus tard au jour de son départ effectif,

- que M. X... a été informé avant son départ effectif et par deux courriers, de la volonté de la société Abylsen Sud de ne pas faire valoir cette clause,

- que la rédaction de la clause est telle que l'obligation pesant sur la société était de « prévenir le collaborateur par écrit au plus tard le jour de son départ effectif» si elle entendait se prévaloir de la clause, et non si elle entendait y renoncer,

- que, si la cour retenait le caractère potestatif de la clause, les effets ne peuvent être que l'anéantissement rétroactif de la clause, ce qui implique la libération du salarié de tout engagement de non concurrence mais également la libération de la société de toute contrepartie financière,

- que la société n'avait aucun intérêt à faire valoir la clause de non concurrence dans la région Niçoise alors qu'elle avait connaissance du départ de M. X... aux États Unis,

- que, M. X... sollicite vainement à titre subsidiaire la condamnation de la société au paiement des mêmes montants en «deniers ou quittances» au regard des sommes déjà perçues au titre de l'indemnité de non concurrence du pacte d'associés alors qu'il a déjà perçu à ce titre 540 714,56 euros; qu'ainsi la société Abylsen n'a pas exécuté de manière déloyale le contrat de travail, la contrepartie financière prévue au titre du pacte n'étant pas défavorable au salarié.

Elle demande de confirmer le jugement, de débouter M. X... de ses demandes, de le condamner à payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au jugement déféré.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 6 septembre 2018.

MOTIFS DE LA DECISION

M. X... a conclu avec la société Abylsen Sud le 9 mai 2007 un contrat de travail, non produit en première instance mais versé au dossier de la cour, comportant une clause de non concurrence ainsi rédigée :

Le collaborateur devra se considérer lié par le secret projessionnel en ce qui concerne tout élément technique ou commercial dont la divulgation serait de nature à favoriser des intéréts contraires à ceux de l'entreprise. Il est expressément convenu qu'en cas de départ du collaborateur de l'entreprise pour quelque cause que ce soit, licenciement ou démission, il s'engage à s'abstenir d'entrer au service d'une société concurrente, ou d'un des clients de l'entreprise sur le site duquel il aurait effectué des contacts dans l'année précédant son départ, et ceci pendant une période d'un an à compter de la cessation de ses fonctions.

Cette obligation de non concurrence est limitée à la région Nicoise et aux départements où il aurait effectué des prestations ou des contacts commerciaux.

En contrepartie et uniquement si l'entreprise désire faire valoir cette clause de non concurrence, l'entreprise lui versera une indemnité forfaitaire égale à 25% du salaire mensuel (fixe + commissions) par mois d'ancienneté. Cette indemnité forfaitaire ne pourra être inférieure à 3 mois de salaire mensuel (fixe + commissions)et ne pourra être supérieure à 12 mois de salaire mensuel (fixe + commissions).

Si l'entreprise désire faire valoir cette clause de non concurrence, alorsl'entreprise s'engage à prévenir le collaborateur par écrit au plus tard le jour de son départ effectif de l'entreprise.

(..)

Il convient de constater que la faculté pour l'employeur de renoncer au bénéfice de la clause n'est subordonnée à aucune formalité. Il est prévu que l'entreprise devra prévenir le collaborateur par écrit au plus tard le jour de son départ effectif de l'enterprise «si l'entreprise désire faire valoir cette clause». Il s'ensuit que le silence de l'employeur aurait suffi à ce que l'obligation de non concurrence soit levée. L'argument selon lequel il n'est prévu aucune faculté de renonciation à cette clause pour l'employeur n'est donc pas fondé.

Il est de principe que la clause incluse dans le contrat de travail aux termes de laquelle l'employeur se réserve la faculté après la rupture du contrat de travail qui fixe les droits des parties d'imposer au salarié une obligation de non concurrence est nulle.

Au cas d'espèce, la clause de non concurrence prévue au contrat de travail de M. X... est nulle comme étant purement potestative car sa mise en oeuvre est subordonnée à la seule et unique volonté de la société Abylsen Sud de s'en prévaloir.

Cependant, les effets de la nullité sont l'anéantissement rétroactif de la clause de sorte que le salarié est libéré de tout engagement et qu'il est également privé du bénéfice de la contrepartie financière.

M. X... ne démontre pas subir un préjudice du fait de l'illicéité de la clause dans la mesure où il ne conteste pas avoir démissionné et quitté le territoire français pour les Etats Unis.La circonstance que M. X... était cadre dirigeant parfaitement avisé des engagements conclus avec le groupe en son ensemble n'est à cet égard pas indifférente, ainsi que l'a justement relevé le conseil de prud'hommes.

Il n'entre pas dans les pouvoirs de la présente juridiction de se prononcer sur la bonne foi contractuelle du Groupe Abyslen qui n'est pas dans la cause, ce qui la conduirait de surcroît à procéder à l'analyse d'un pacte d'associé.

Dans ce contexte, la démonstration par M. X... d'une déloyauté de la société Abylsen Sud dans l'exécution du contrat de travail manque en fait.

En conséquence, par ces motifs et ceux non contraires des premiers juges la décision frappé e d'appel sera confirmée.

Sur les dépens et les frais non-répétibles:

M. X... qui succombe dans la présente instance, doit supporter les dépens et il y a lieu de le condamner à payer à la société Abylsen Sud une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme de 1.500 euros, en sus de celle qui lui a été allouée en première instance; la société Abylsen Sud doit être débouté de cette même demande.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud'homale,

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Grasse le 14 décembre 2016,

Y ajoutant,

Condamne M. X... à payer à la société Abylsen Sud la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. X... aux dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre b
Numéro d'arrêt : 17/00212
Date de la décision : 06/12/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°17/00212 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-06;17.00212 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award