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29/11/2018 | FRANCE | N°16/07665

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 29 novembre 2018, 16/07665


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 29 NOVEMBRE 2018



N°2018/

JLT/FP-D













Rôle N° RG 16/07665 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6QBU







[D] [H]





C/



SARL IMPACT SECURITE























Copie exécutoire délivrée

le :

29 NOVEMBRE 2018

à :

Me Thierry DE SENA, avocat au barreau de NICE





Me Nathalie KOULMANN, avocat au barreau de NICE



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE - section AD - en date du 22 Mars 2016, enregistré au répertoire général sous le n° F15/00561.





APPELANT



Monsieur [D] [H], demeurant [Adresse 2]...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 29 NOVEMBRE 2018

N°2018/

JLT/FP-D

Rôle N° RG 16/07665 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6QBU

[D] [H]

C/

SARL IMPACT SECURITE

Copie exécutoire délivrée

le :

29 NOVEMBRE 2018

à :

Me Thierry DE SENA, avocat au barreau de NICE

Me Nathalie KOULMANN, avocat au barreau de NICE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE - section AD - en date du 22 Mars 2016, enregistré au répertoire général sous le n° F15/00561.

APPELANT

Monsieur [D] [H], demeurant [Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Thierry DE SENA, avocat au barreau de NICE substitué par Me Hélène AUBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMEE

SARL IMPACT SECURITE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Nathalie KOULMANN, avocat au barreau de NICE substitué par Me Mélissa PABLO, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 03 Octobre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Jean-Luc THOMAS, Président

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller

Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Novembre 2018.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Novembre 2018

Signé par Monsieur Jean-Luc THOMAS, Président et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

M. [D] [H] a été embauché par la S.A.R.L. IMPACT SÉCURITÉ, en qualité d'agent de sécurité, par un contrat de travail à durée indéterminée du 1er mars 2008.

Il a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 7 juin 2011

Saisi par M. [D] [H] le 5 janvier 2012, le Conseil de Prud'hommes de Nice, par jugement du 22 mars 2016, a dit que la prise d'acte de rupture du contrat de travail n'est pas justifiée, l'a requalifiée en une démission et a débouté M. [H] de ses demandes.

M. [H] a relevé appel le 25 avril 2016 de ce jugement notifié le 1er avril 2016.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions reprises oralement lors de l'audience, M. [H], concluant à la réformation du jugement, sollicite de constater qu'il a occupé le poste de conducteur cynophile pendant toute la durée du contrat de travail, de constater que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la S.A.R.L. IMPACT SÉCURITÉ à lui payer les sommes de :

- 6 145,89 euros à titre de rappel de salaires,

- 1 744,69 euros à titre de rappel de congés payés,

- 2 024,64 euros à titre de prime de chien,

- 1 195,80 euros à titre de prime de panier,

- 12 241,02 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- 1 343,11 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 12 241,02 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 4 080,34 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 408,03 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante,

- 5 000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

- 5 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il demande :

- de condamner la S.A.R.L. IMPACT SÉCURITÉ à délivrer, sous astreinte, un certificat de travail portant la qualification de conducteur cynophile du 1er mars 2008 au 17 août 2011 et un bulletin de salaire complémentaire pour toutes sommes dues,

- d'ordonner que les sommes dues porteront intérêts au taux légal à compter du 17 juin 2011 et ordonner la capitalisation des intérêts.

Dans ses conclusions reprises oralement lors de l'audience, la S.A.R.L. IMPACT SÉCURITÉ, concluant à la confirmation du jugement, sollicite de débouter M. [H] de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure et des prétentions et moyens antérieurs des parties, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux conclusions déposées, oralement reprises.

DISCUSSION

Sur la demande de rappel de salaire

Les bulletins de salaire montrent que, du 1er juillet 2008 au 30 novembre 2008, M. [H], qui était employé en qualité d'agent d'exploitation de niveau II échelon 2 était rémunéré sur la base d'un taux horaire de 8,73 euros alors que l'accord 'salaires' du 3 décembre 2007 prévoyait, à compter du 1er juillet 2008, pour cette classification, une rémunération de 1337, 57 euros (soit un taux horaire de 8,81 euros).

Toutefois, en décembre 2008, une régularisation 'taux horaire 07 à 11/2008" est intervenue à hauteur de 103,32 euros de sorte que le salarié a été rempli de ses droits au titre de cette période et que ses prétentions sur ce point ne sont pas fondées.

Pour la période du 1er décembre 2008 au 1er juin 2010, M. [H] soutient qu'il aurait dû être payé sur la base du taux horaire de 9,07 euros et non de 8,82 euros. Il convient, cependant, de relever que, pendant cette période, il était classé au niveau II échelon 2, ce qu'il ne conteste pas (p. 10 de ses conclusions) et ce qui résulte, au surplus, de ses bulletins de salaire. Or, il se réfère lui-même à l'accord 'salaires' du 9 octobre 2008 qui prévoit qu'à compter du 1er décembre 2008, le salaire mensuel du niveau II échelon 2 est fixé à 1 337,57 euros, soit un taux horaire de 8,82 euros. Les bulletins de salaire ayant été établis pour toute l'année 2009 et jusqu'au 30 avril 2010 sur cette base, M. [H] n'est pas fondé dans sa revendication.

M. [H], qui a vu son coefficient modifié à partir du mois de mai 2010 pour être porté à 140 (niveau III, échelon 2), a perçu, à compter de ce mois, un salaire brut de 1 416,41 euros conforme à l'accord du 9 octobre 2008.

La demande de rappel de salaire formée pour la période du 1er mars 2008 au 1er juin 2010 n'est donc pas fondée.

Sur la demande au titre des heures supplémentaires, des heures de nuit du dimanche et des jours fériés

Il résulte de l'article L 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, qu'il appartient au salarié de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande mais il incombe aussi à l'employeur de fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

En l'espèce, M. [H], dont les bulletins de salaire font état du paiement d'heures supplémentaires majorées ainsi que de majorations pour travail de nuit et les jours fériés, soutient avoir accompli d'autres heures de travail au-delà de la durée légale, non récupérées et non réglées et ne pas avoir été payé de l'intégralité des majorations dues, et ce entre le mois de mars 2008 et le mois de juin 2011.

Il verse aux débats, outre un décompte récapitulatif de l'ensemble des sommes réclamées mois par mois, des plannings prévisionnels internes à l'entreprise fixant ses horaires quotidiens de travail avec l'indication des heures de début et de fin du travail. Il produit également des plannings rectifiés par ses soins mentionnant les heures de travail qu'il soutient avoir accomplies ainsi que des fiches de surveillance de collègues mentionnant son intervention à leur suite.

De tels documents qui comportent des éléments vérifiables sont de nature à étayer les prétentions du salarié quant à l'exécution des heures supplémentaires alléguées.

Face à ces éléments, l'employeur se prévaut des plannings prévisionnels de l'entreprise ainsi que des 'mains courantes' remplis par les collègues de travail du salarié pour soutenir que les prétentions de celui-ci seraient infondées.

Il n'est pas contesté que les plannings prévisionnels de l'entreprise sont des documents internes ayant servi à l'établissement des horaires de travail des salariés. Ces documents sont donc de nature à apporter la preuve des heures de travail de M. [H] même si, en raison précisément de leur caractère prévisionnel, ils ont pu être modifiés ainsi que le fait valoir l'employeur à qui il incombe, dans cette hypothèse, d'apporter la preuve des horaires effectivement réalisés. Les mains courantes qui attestent de la réalité de la prestation exécutée, de l'identité du salarié qui l'effectue et de celles des salariés assurant la relève, permettent dans certains cas d'apporter des correctifs aux indications fournies par les plannings prévisionnels. Sous cette réserve, ces plannings doivent être retenus pour déterminer les horaires de M. [H] en l'absence de tout autre élément. Les documents produits par l'employeur au titre de l'année 2010, intitulés également 'plannings prévisionnels' ne peuvent être retenus, ne concernant que M. [H] et ne consistant qu'en des feuillets imprimés sans garantie de provenance, de date d'élaboration ni d'authenticité alors que ceux produits par le salarié concernent aussi les autres salariés de l'entreprise et fournissent des indications vérifiables.

La comparaison des documents versés aux débats de part et d'autre, effectuée selon les principes ainsi définis, permet de vérifier que les prétentions du salarié quant au nombre d'heures de travail ne sont pas fondées en ce qui concernent les mois de mars, mai, juillet, septembre et octobre 2008, compte tenu des plannings produits par l'employeur et des indications fournies par les 'mains courantes'. Il en va de même en ce qui concerne toute l'année 2009 ainsi que les mois de janvier 2010, août, octobre et novembre 2010, janvier à mai 2011.

En revanche, alors que le planning présenté par le salarié pour le mois d'avril 2008 fait apparaître 192 heures (le bulletin de salaire n'en mentionnant que 176,50), l'employeur n'apporte aucun élément de preuve contraire. De même, il apparaît que M. [H] a exécuté 161 heures de travail en juin 2008 (et non 151), 199 heures en août 2008 (et non 174,17 heures), 180 heures en novembre et décembre 2008 (et non 174,17 heures et 178,67 heures).

En 2010, il a travaillé:

- 168 heures et non 159,67 heures en février,

- 185 heures et non 163,67 heures en mars,

- 180 heures et non 168,67 heures en avril,

- 168 heures et non 164,67 heures en juin,

- 173 heures et non 159,67 heures en juillet,

- 156 heures et non 153,67 heures en septembre,

- 173 heures et non 160,67 heures en décembre.

En 2011, la comparaison entre les plannings, le décompte du salarié et les bulletins de salaire ne permet pas de mettre en évidence des heures de travail qui n'auraient pas été payées à la seule exception du mois de mai.

Par ailleurs, alors qu'en application de la convention collective, le travail exécuté la nuit (entre 21h et 6h) doit donner lieu à une majoration de 10%, de même que le travail exécuté le dimanche et que le salaire doit être majoré de 100% en cas de travail les jours fériés, il apparaît qu'à diverses reprises l'intégralité des majorations due à ces titres n'a pas été appliquée.

La comparaison entre les sommes dues et les sommes perçues fait apparaître un solde en faveur du salarié de 906,33 euros en 2008, de 1 749,62 euros en 2010 et de 274,17 euros en 2011.

La demande de M. [H] sera accueillie à hauteur de 2 930,12 euros, le jugement devant être infirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande à ce titre.

Sur la demande au titre des congés payés

M. [H] est bien fondé à solliciter l'indemnité compensatrice de congés payés correspondant à la somme allouée ci-dessus, soit 293,01 euros.

C'est, en revanche, à tort, qu'il sollicite la somme de 380,52 euros au titre des 7 jours de congés payés pris en juin 2009 et de 783,72 euros au titre des 12 jours pris en août 2010, puisque les bulletins de salaire montrent que, pour ces deux mois, il a perçu l'intégralité de son salaire mensuel.

S'agissant de l'indemnité compensatrice de congés payés perçue lors de la rupture du contrat de travail au titre du reçu pour solde de tout compte, M. [H] ayant acquis pour toute la période d'exécution du contrat de travail 97,5 jours de congés payés (et non 100) et ayant pris 19 jours de congés (et non 18), il aurait dû percevoir, ainsi que le reconnaît l'employeur, la somme de 5 192,14 euros brut. N'ayant reçu que 5 109,36 euros brut, il reste dû la somme de 82,78 euros.

L'employeur devra donc payer la somme de 375,79 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, le jugement devant être infirmé en ce qu'il l'a débouté sur ce point.

Sur la prime de chien

Il est constant que M. [H] a été employé en qualité de 'conducteur cynophile' à compter du 1er mars 2009, date à partir de laquelle cet emploi a été mentionné sur les bulletins de salaire.

Le salarié sollicite le paiement de la prime de chien prévue par la convention collective pour la période allant de la date de son embauche, le 1er mars 2008, jusqu'au 1er mars 2009, au motif qu'il aurait été embauché dès le mois de mars 2008 pour exercer les fonctions de conducteur cynophile.

A l'appui de ces prétentions, M. [H] se prévaut de son badge professionnel qui porte la mention 'maître chien' mais ce document ne peut à lui seul démontrer qu'il aurait exercé les fonctions de conducteur cynophile avant le 1er mars 2009 alors que la décision du Préfet de Police de [Localité 3] lui octroyant une carte professionnelle n'est en date que du 24 novembre 2009 et qu'avant le mois de mars 2009, il n'est désigné sur les bulletins de salaire qu'en qualité d'agent d'exploitation.

Pour la période postérieure au 1er mars 2009, le salarié demande le paiement d'un rappel de cette prime en la calculant sur l'intégralité des heures travaillées chaque mois mais aucun des éléments versés aux débats ne permet d'établir qu'il aurait accompli l'intégralité de sa prestation de travail en sa qualité d'agent cynophile accompagné de son chien alors que les bulletins de salaire ne mentionnent la prime de chien que pour une partie de cette activité et que deux salariés témoignent de ce que, 'très souvent', il venait assurer son service 'sans aucun chien'.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté sur ce point.

Sur la prime de panier

Aux termes de la convention collective, 'une indemnité de panier est accordée au personnel effectuant une durée minimale de travail de 6 heures continue' (7 heures jusqu'en octobre 2010).

L'employeur conteste cette demande en soutenant que le salarié n'effectuait pas systématiquement 6 heures de travail effectif continues. Selon lui, il était convenu, pour permettre à M. [H] de prendre son repas, que le chef d'équipe se déplace une fois par vacation sur le site et prenne sa relève. Toutefois, aucun des éléments versés aux débats ne vient corroborer cette affirmation et permet de vérifier une telle pratique.

Le calcul de M. [H] qui prend en compte les vacations de 6 heures apparaissant sur les plannings et déduit les indemnités de panier payées par l'employeur, doit être retenu de sorte que la société devra lui payer la somme de 453,00 euros au titre de l'année 2008, 312,00 euros au titre de l'année 200, 201,00 euros au titre de l'année 2010 et 229,80 euros au titre de l'année 2011, soit au total la somme de 1 195,80 euros.

Sur la demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé

Il résulte des dispositions de L 8223-1 du code du travail qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié dont l'employeur a volontairement dissimulé une partie du temps de travail a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

En l'espèce, il n'est pas démontré que l'employeur aurait, de façon intentionnelle, mentionné sur les bulletins de salaire un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué, cette intention ne pouvant résulter du seul fait que quelques heures de travail n'ont pas été rémunérées alors que, pendant toute la durée d'exécution du contrat de travail, des heures supplémentaires ainsi que des majorations pour travail les jours fériés ou de nuit ont été régulièrement mentionnées sur les bulletins de paie et que, le plus souvent, les plannings produits confirment les indications des bulletins de salaire. Il résulte, en outre, des bulletins de salaire, que des heures de travail ont été parfois payées en plus de celles figurant sur les plannings.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande du salarié sur ce point.

Sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail

En droit, lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.

Pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les faits invoqués par le salarié doivent non seulement être établis mais constituer des manquements suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail et caractériser une rupture aux torts de l'employeur.

En l'espèce, M. [H] invoque, pour justifier sa prise d'acte, les manquements dont il s'est prévalu ci-dessus à l'appui de ses demandes de rappels de salaire et de primes. Même si, pour partie, ses réclamations ne sont pas fondées, il apparaît néanmoins que l'employeur n'a pas payé l'intégralité des heures de travail ainsi que certaines majorations et qu'il n'a payé qu'une partie des primes de panier dues.

M. [H] invoque en outre un manquement de l'employeur à son obligation de formation en lui reprochant de ne pas lui avoir permis de suivre la formation professionnelle exigée pour être habilité à exercer la fonction de conducteur cynophile après le 30 juin 2010, date d'expiration de son agrément.

La loi n°2008-582 du 20 juin 2008 et le décret du 23 février 2009 ont, en effet, rendu obligatoire une formation d'au moins 315 heures permettant l'obtention de la qualification professionnelle spécifique à l'activité d'agent de sécurité cynophile et la délivrance de la carte professionnelle. Les agents concernés disposaient d'un délai expirant le 30 juin 2010 pour acquérir ou justifier de l'aptitude professionnelle spécifique requise pour exercer cette activité.

Il est constant que M. [H] qui a obtenu sa carte professionnelle de conducteur cynophile le 24 novembre 2009 avec une période de validité expirant au 30 juin 2010, devait suivre la formation requise pour pouvoir continuer à exercer ses fonctions après cette date.

Le salarié reproche à l'employeur de ne pas lui avoir fait suivre cette formation en se prévalant du contrat de travail prévoyant qu'il bénéficierait des 'formations spécifiques prises en charge par la société' et en se référant à deux courriers adressés à l'employeur le 2 juin 2011 par lesquels il indique avoir sollicité 'depuis plus d'un an' une formation pour pouvoir continuer à intervenir comme agent de sécurité cynophile et il reproche à l'employeur de ne pas avoir tenu ses promesses à cet égard.

Même s'il n'est pas davantage justifié de démarches antérieures du salarié, il convient de relever que ces courriers font suite à une mise en demeure de l'employeur faite le 25 mai 2011d'avoir à fournir le certificat de qualification professionnelle pour son activité d'agent de sécurité cynophile, document demandé 'depuis plusieurs mois'. Par ce courrier, il était rappelé au salarié que ce document était obligatoire pour exercer son activité et qu'à défaut de le fournir, il serait reclassé au poste d'agent de sécurité.

Ce courrier démontre que l'employeur n'ignorait pas la nécessité pour le salarié de régulariser sa situation pour pouvoir continuer à exercer son activité de conducteur cynophile. Il ne pouvait ignorer non plus que cette régularisation imposait le suivi de la formation requise.

Même s'il s'agit d'une formation propre aux agents propriétaires de chiens et que la loi du 20 juin 2008 ne met pas expressément cette formation à la charge de l'employeur, ce dernier avait néanmoins l'obligation légale d'assurer l'adaptation de son salarié à son poste de travail et de veiller au maintien de sa capacité à occuper un emploi. Or, il est constant qu'il n'a pris aucune initiative en vue de permettre à M. [H] de suivre la formation nécessaire pour l'obtention du certificat exigé.

Il apparaît ainsi que M. [H] n'a pas été mis en mesure de suivre la formation requise, que la société a continué à l'employer en qualité de conducteur cynophile pendant près d'un an sans qu'il dispose de l'agrément nécessaire et qu'elle s'est bornée alors à faire le constat de cette irrégularité pour le déclasser en l'affectant à un poste d'agent de sécurité à compter du 8 juin 2011.

Un tel manquement aux obligations de l'employeur présente un caractère de gravité tel qu'il justifie la rupture du contrat de travail à ses torts laquelle doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes relatives à la rupture du contrat de travail.

M. [H], né en 1979, a vu son contrat de travail rompu après trois ans d'ancienneté au service d'une entreprise employant au moins 11 salariés, à l'âge de 32 ans . Il ne justifie pas de sa situation postérieure à la rupture.

Compte tenu de son salaire mensuel brut (1 724,40 euros en moyenne en 2011), il lui sera alloué, en application de l'article L 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, la somme de 11 000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que la somme de 1 135,25 euros à titre d'indemnité légale de licenciement correspondant à 1/5 de mois par année d'ancienneté et celle de 3 448,80 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis (2 mois de salaire), outre l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante (344,88 euros).

Sur la demande de dommages-intérêts pour licenciement abusif

A ce titre, M. [H] demande réparation du préjudice résultant des irrégularités imputées à l'employeur en ce qui concerne sa rémunération et en ce qu'il l'a empêché de suivre la formation devant lui permettre de conserver son accréditation.

Toutefois, s'agissant de la rémunération, il n'est pas apporté la preuve d'un préjudice distinct qui aurait été causé par le manquement de l'employeur et qui ne serait pas réparé par l'octroi des intérêts de retard.

Quant à l'absence de formation, faute pour le salarié de justifier de ses activités postérieures au licenciement, il n'est pas démontré que le manquement de l'employeur lui aurait causé un préjudice non réparé par les sommes allouées ci-dessus au titre de la rupture du contrat de travail.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté sur ce point.

Sur les intérêts

En application des dispositions des articles 1153 ancien du code civil (article 1231-6 nouveau) et R 1452-5 du code du travail, les sommes allouées au titre des créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de convocation de l'employeur à l'audience de tentative de conciliation valant mise en demeure, soit le 9 janvier 2012.

La somme allouée à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Les intérêts seront eux-mêmes capitalisés en application de l'article 1154 ancien du code civil (article 1343-2 nouveau).

Sur la demande de documents

Il n'y a pas lieu à délivrance d'un certificat de travail portant la qualification de conducteur cynophile à compter du 1er mars 2008, la demande du salarié à ce titre n'ayant pas été accueillie.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

En application de l'article 700 du code de procédure civile, l'employeur doit payer à M. [H] la somme de 3 000,00 euros au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile,

Infirme le jugement en ce qu'il a débouté M. [D] [H] de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail, au titre des rappels de salaire, des rappels de congés payés et des primes de panier,

Statuant à nouveau,

- Dit la prise d'acte de la rupture du contrat de travail bien fondée et dit qu'elle doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Condamne la S.A.R.L. IMPACT SÉCURITÉ à payer à M. [D] [H] les sommes de :

* 2 930,12 euros à titre de rappel de salaire,

* 375,79 euros à d'indemnité compensatrice de congés payés,

* 1 195,80 euros à titre de prime de panier,

* 11 000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 135,25 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

* 3 448,80 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 344,88 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés correspondante,

- Dit que la somme allouée à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, que les autres sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter du 9 janvier 2012 et que les intérêts seront eux-mêmes capitalisés en application de l'article 1154 ancien du code civil (article 1343-2 nouveau),

- Dit que la S.A.R.L. IMPACT SÉCURITÉ doit délivrer à M. [D] [H] un bulletin de salaire conforme au présent arrêt,

Confirme le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

- Condamne la S.A.R.L. IMPACT SÉCURITÉ à payer à M. [D] [H] la somme de 3 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Dit que la S.A.R.L. IMPACT SÉCURITÉ doit supporter les dépens de première instance et d'appel.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

F. PARADIS-DEISS J.L. THOMAS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 16/07665
Date de la décision : 29/11/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°16/07665 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-29;16.07665 ?
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