COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
17e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 22 NOVEMBRE 2018
N° 2018/
MS
RG N°17/09064
N° Portalis DBVB-V-B7B-BAQTM
SARL XPO VRAC FRANCE venant aux droits de la SA NORBERT DENTRESSANGLE HYDROCARBURES
C/
Thierry X...
Copie exécutoire délivrée
le : 22/11/2018
à :
- Me Dominique Y..., avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE
- Me Jean-Luc Z..., avocat au barreau de NICE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de CANNES en date du 04 Avril 2017 enregistré au répertoire général sous le n° F 14/00458.
APPELANTE
SARL XPO VRAC FRANCE, venant aux droits de la SA NORBERT DENTRESSANGLE HYDROCARBURES, demeurant [...]
représentée par Me Dominique Y... de la SCP SCP Y... ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me A... B..., avocat au barreau de LYON
INTIME
Monsieur Thierry X..., demeurant [...]
représenté par Me Jean-Luc Z..., avocat au barreau de NICE substitué par Me Alexandra J..., avocat au barreau de GRASSE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Septembre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:
Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre
Monsieur Thierry LAURENT, Conseiller
Madame Mariane ALVARADE, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Pascale ROCK.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Novembre 2018.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Novembre 2018
Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Mme Pascale ROCK, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*-*-*-*-*
FAITS ET PROCEDURE
Monsieur Thierry X... a été engagé par la SARL Xpo Vrac France en qualité de conducteur routier à compter du 4 avril 2011suivant contrat à durée indéterminée, moyennant un salaire brut moyen mensuel qui était en dernier lieu de 3 013 €. La SARL Xpo Vrac France vient aux droits de la société Norbert Dentressangle.
Monsieur Thierry X... travaillait à l'aéroport de Cannes-Mandelieu et ravitaillait les avions.
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des transports routiers (IDCC 16). La SARL Xpo Vrac France employait habituellement au moins onze salariés au moment du licenciement.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 17 juillet 2014, M. X... a été convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement et par lettre du 1er août 2014, adressée sous la même forme, il a été licencié pour faute grave.
Contestant son licenciement, M. X... a saisi le la juridiction prud'homale afin d'obtenir diverses indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et un rappel de prime de fin d'année.
Par jugement rendu le 2016 le conseil de prud'hommes de Cannes, a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et a condamné M. X... au paiement des sommes suivantes :
- 1.506 € à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire
- 150,60 € de congés payés afférents
- 6.026 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis
- 602,60 € de congés payés afférents
- 2.109 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement
- 18.078 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
La SARL Xpo Vrac France a interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas critiquées.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 18 octobre 2017, la SARL Xpo Vrac France, appelante explique les faits suivants (sic) : la société G... était cliente de la société Norbert Dentressangle et lui demandait régulièrement de remplir une cuve lorsque celle-ci n'était pas pleine, la particularité de cette cuve étant de ne pas posséder de compteur. Ainsi, lorsque le client G... constatait de visu que la cuve n'était pas pleine, il mandatait la société Norbert Dentressangle pour la remplir. Un salarié de la société Norbert Dentressangle se déplaçait, remplissait la cuve et émettait un bon du volume du carburant fourni. La livraison se faisait sans la présence du client en parfaite autonomie par société Norbert Dentressangle. Les relations étaient dès lors établies sur un rapport de confiance entre société Norbert Dentressangle et la société G.... Or, il s'avère que lorsqu'il était appelé pour remplir la cuve de la société G..., M. X... en profitait pour livrer quelques appareils aéronefs de particuliers dans le but de se faire remettre des espèces, ce qui est constitutif de faute grave.
Elle soutient :
- que nonobstant le classement sans suite de l'enquête pénale la matérialité des faits fondant le licenciement pour faute grave de M. X... est établie notamment par les témoignages de MM C...,Laurent et de Mme D...,
- que les attestations inverses sont inopérantes, les témoignages des complices d'un délit étant sans portée utile, ue les procédures d'avitaillement sont telles que les propos de M. X... et des deux propriétaires d'aéronefs MM E... et F... sont contestables,
- subsidiairement sur l'indemnisation, que le salarié réclame près de 14 mois de salaire brut sans fournir aucun élément sur sa situation actuelle ni sur ses recherches actives d'emploi aucun lien n'existant entre le licenciement et son état dépressif,
- que M. X... n'indique pas le fondement juridique de la prime de fin d'année réclamée laquelle ne résulte pas d'un usage pour n'avoir été versée que deux fois.
La SARL Xpo Vrac France demande en conséquence d'infirmer le jugement sauf en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande en paiement d'un rappel de salaire au titre de la prime de fin d'année, de dire et juger bien fondé le licenciement pour faute grave de M. X..., de débouter celui-ci de l'intégralité de ses demandes, à titre subsidiaire, de ramener les demandes indemnitaires à de plus justes proportions, et de condamner M. X... au paiement d'une somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 24 août 2017, M. X..., intimé fait valoir :
- que la matérialité des faits qualifiés faute grave n'est pas établie, que l'attestation de M. C..., qui est le signataire de la lettre de licenciement doit être écartée,
- que l'enquête diligentée par les services de la Police des Frontières des Alpes Maritimes, n'a pas permis d'établir que X..., M.Roland E... et M. Roger F... étaient les auteurs d'un vol en réunion de carburant au préjudice de la société Norbert Dentressangle et G... Hélicoptère d'autant plus que ces deux sociétés sont dans l'impossibilité de justifier et de quantifier les pertes qu'elles invoquent ce confirment les déclarations des propriétaires d'aéronefs ( MM E... et F...) ainsi que l'attestation d'un autre salarié M. H... ne font que confirmer,que le classement sans suite de la plainte pénale pour défaut de caractérisation des faits de vols rend le licenciement pour faute grave dénué de cause réelle et sérieuse et, donc, abusif,
- que le salarié a droit aux indemnités de rupture et à des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- que M. X... a touché une prime de fin d'année en décembre 2012 d'un montant de 518 € bruts et en décembre 2013, d'un montant de 464,44 € bruts ; qu'il était donc habituel de verser une prime de fin d'année au salarié.
Formant appel incident M. X... demande de condamner la SARL Xpo Vrac France à lui verser la somme de 36.156 € nets à titre de dommages-intérêts, celle de 292 € bruts calculée au prorata temporis au titre de la prime de fin d'année 2014 ainsi que la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, de confirmer le jugement pour le surplus et de condamner la SARL Xpo Vrac France, à lui payer une somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 13 septembre 2018.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au jugement déféré.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail :
La lettre de licenciement en date du 1er août 2014 est ainsi motivée :
« En date du 16 juillet 2014, vous étiez en poste de matin. Lors de votre vacation, vos 2 autres collègues étant occupés ailleurs, vous avez été amené à prendre le camion d'AVGAS afin de livrer la cuve G.... Avant d'effectuer cette livraison, je vous ai personnellement vu effectuer deux avitaillements d'AVGAS sur 2 avions à 12h50 et 13 heures le premier immatriculé F ' GDOK et le second qui se trouvait devant le hangar du RSA.
À la fin de votre vacation, lors du contrôle de votre journée, il s'avère que ces 2 pleins n'apparaissent nulle part :
- ni sur la feuille journalière de bord du camion d'AVGAS (1189). En effet, il est noté que vous avez uniquement réalisé de plein sur le client G... (le premier à 7h30, numéro BL 434 283 avec 500 litres livrés et le 2e à 13h15, numéro BL 434 284 avec 283 litres livrés)
- ni dans notre classeur des BL NO fuel.
Lors de l'entretien, vous m'avez indiqué avoir essayé de faire ces 2 avitaillements sans avoir livré le moindre litre de produits car les réservoirs des 2 avions étaient pleins.
Vos explications ne sont pas recevables.
Premièrement, car elles ne correspondent à aucune procédure en vigueur aussi bien pour l'aéroport de Cannes que pour notre client air BP ! Pour mémoire, nous agissons à la demande du PGE de l'aéroport, qui fait suite à une demande reçue d'un pilote « commandant de bord» afin d'être avitaillé.
Deuxièmement, car je ne comprends pas pourquoi pour le premier avion alors, vous dérouleriez les flexibles, mettriez en route la pompe du porteur et le pistolet dans le réservoir pour constater à ce moment-là que celui-ci était plein alors que le propriétaire de l'avion était présent et vous aurait, je pense, prévenu que le plein n'était pas nécessaire.
Tout comme pour le 2e avion, 2 personnes auraient ouvert les portes du hangar, sorti un premier avion (blanc) et ensuite un 2e avion (rouge) et où là aussi vous auriez également déroulé le flexible, mit la pompe en route et commencé à avitailler avant de vous rendre compte que le réservoir était plein...
Pour la bonne forme, je vous rappelle que la gestion du carburant d'un aéronef est une préoccupation vitale en aviation et constitue une obligation réglementaire pour le commandant de bord, alors comment expliquer ces 2 demandes non avérées '
Vos explications, sont fallacieuses et ne correspondent pas à la réalité : vous avez bien servi ces 2 aéronefs en carburant (je vous rappelle que je vous ai surpris en train de le faire, photos à l'appui), mais au lieu d'établir les 2 bons comme le prévoit nos procédures, vous avez sciemment falsifié ces 2 livraisons et camouflé les quantités livrées en laissant penser qu'elles avaient été livrées dans la cuve G..., (sur laquelle les livraisons se font de façon autonome et sans aucun contrôle de ce destinataire des quantités réellement livrées), lui imputant ainsi une quantité livrée supérieure à la réalité.
Comme je vous l'ai indiqué lors de l'entretien, j'ai porté plainte pour vol auprès de la police de l'air de l'aéroport et notre client air BP a également déposé plainte pour vol. Une enquête est en cours et à cet effet les enregistrements des caméras de sécurité de l'aéroport, où vous apparaissez distinctement, ont été saisi par la police aux fins de l'enquête.
Au vu de ces graves manquements professionnels et compte tenu de l'extrême gravité de ceux-ci, je vous signifie par la présente votre licenciement pour faute grave à la date du présent courrier.»
La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et justifie la cessation immédiate du contrat de travail.
M. X... ayant été licencié pour faute grave, il appartient à l'employeur d'établir que la faute commise par le salarié dans l'exécution de son contrat de travail est d'une gravité telle qu'elle rend impossible le maintien du contrat de travail pendant le préavis.
Il est constant que le salarié a été licencié pour des faits fautifs ayant donné lieu à une plainte pénale puis à une enquête pénale de la PAF.
Après audition de Messieurs Thierry X..., Roland E... et Roger F... l'enquête a conclu qu'il n'était pas établi « que ceux-ci soient les auteurs d'un vol en réunion au préjudice des sociétés Norbert Dentressangle et G... Hélicoptère, ces deux sociétés étant dans l'impossibilité de justifier et quantifier les pertes ».
Or, le directeur d'agence Monsieur C... a déclaré aux services de police avoir lui même constaté que Monsieur X... livrait en carburant des avions et des hélicoptères sans émettre de bon. Lors de son audition devant les services de la police de l'air et des frontières il a déclaré avoir vu M. X... faire deux pleins d'avion le 16 juillet 2014 sans remettre de bon. Il réitère ce déclarations par une attestation remise à la cour. Les déclarations de M. C... n'emportent pas la conviction car elles émanent du directeur de l'agence qui emploie M. X..., au demeurant signataire de la lettre de licenciement.
En revanche, aucun élément objectif ne permet de douter de l'authenticité du témoignage de Mme D..., employée de la société G... K..., personne extérieure à l'entreprise n'ayant aucun intérêt au litige,qui déclare :
« (...) le camion d'AVGAS 100 LL est arrivé. Le plein a été fait, conformément aux instructions du pilote.
Le plein terminé, le camion de carburant se déplaçait pour que le pilote puisse s'installer dans l'hélicoptère et mettre en route.
J'étais en compagnie de l'épouse du pilote. Nous avons réglé le plein de carburant pour une somme de 130 € en espèces et je l'ai accompagné au hangar 10 pour assurer sa sécurité au moment de la mise en route de la machine.
Les formalités accomplies avec l'avitailleur, celui-ci est parti et l'hélicoptère a été mis en route.
L'avitailleur n'a pas remis de bon de livraison ni au pilote ni à son épouse.»
Les déclarations de ce témoin concordent avec celles de Laurent I..., chauffeur avitailleur :
« Le 13 juin 2014, alors que je prenais mon service d'après-midi, j'ai entendu à la radio de service qu'il y avait eu un problème de délai, plus d'une heure d'attente, pour le plein d'un hélicoptère fonctionnant à l'AVGAS 100 LL.
Vers 20h15, j'ai fait le plein d'un bimoteur à l'AVGAS 100 LL et remarque sur la planche de bord du camion qu'il n'a pas été utilisé qu'une fois, en fin de matinée pour la cuve d'G... hélicoptère par Monsieur X....
Le lendemain j'ai été appelé à 14h20 pour un plein en l'AVGAS 100 LL d'un hélicoptère immatriculé FHITM. Pendant que je remplissais la facture, le client me fit part de son insatisfaction quant à la longue attente qu'il a subi la veille. Après discussion et compte tenu que je n'avais pas vu de traces de ce plein sur les documents de la veille je me suis fait confirmer par les clients qu'il a bien eu son plein la veille et ait demandé une description de l'agent qui avait effectué ce plan.
Le client a confirmé le plein du 13 juin 2014 et la description faite de l'agent ravitailleur correspond à Monsieur X.... »
Pour combattre ces éléments de preuve, M. X... a produit le témoignage de Monsieur F..., technicien aéronautique, qui déclare pour le disculper « l'avoir autorisé à effectuer des contrôles sur les niveaux de carburant de son aéronef ». Ce témoin ainsi que M E... ont été entendus en tant que co-auteurs (avec M. X...) des faits de vol objets de l'enquête de la PAF.
Leurs déclarations n'emportent pas la conviction et en conséquence n'apportent pas de contradiction à celles précises de MM Laurent et Mme D.... Quant à M. H..., ce salarié témoigne du sérieux de M. X... ce qui n'exclut pas la commission des faits précisément décrits par les témoins.
Les faits reprochés à M. X... dans la lettre de licenciement sont donc établis en leur matérialité. Ils constituent un détournement frauduleux des biens de l'entreprise qui justifie la cessation immédiate du contrat de travail.
Il se déduit de ces motifs que le licenciement a été exactement prononcé pour faute grave.
Le licenciement étant motivé par une faute grave, le salarié ne peut prétendre à l'indemnité compensatrice de préavis, à une indemnité de licenciement, ni à un rappel se salaire durant sa mise à pied et il sera débouté du surplus de ses prétentions d'indemnisation mal fondées compte tenu de l'issue de l'appel.
Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat de travail :
L'avantage dont le salarié n'a bénéficié que deux fois ne présente pas la constance caractérisant l'usage.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il déboute le salarié de sa demande de rappel de salaire au titre d'une prime de fin d'année.
Sur les dépens et les frais non-répétibles :
Sucombant, M. X... supportera les dépens
Nonobstant l'issue de l'appel, l'équité et les circonstances économiques commandent de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud'homale,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il déboute M. Thierry X... de sa demande en paiement d'un rappel de salaire pour prime de fin d'année,
L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau :
Juge le licenciement fondé sur une faute grave,
Déboute M. X... de l'ensemble de ses demandes,
Condamne M. X... aux dépens de première instance et d'appel,
Déboute les parties du surplus de leurs prétentions.
Nonobstant l'issue de l'appel, l'équité et les circonstances économiques commandent de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
Eu égard aux succombances respectives chacune des parties supportera ses propres frais irrépétibles et dépens.
LE GREFFIERLE PRESIDENT