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16/11/2018 | FRANCE | N°17/14444

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 16 novembre 2018, 17/14444


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 16 NOVEMBRE 2018



N° 2018/













Rôle N° RG 17/14444 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA7GI







[U] [U]





C/





ASSOCIATION DE DIALYSE VAROISE

















Copie exécutoire délivrée



le : 16/11/18



à :



Me Danielle DEOUS, avocat au barreau de TOULON



Me Yannick

LE LANDAIS, avocat au barreau de MARSEILLE































Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 30 Juin 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 16/00615.





APPELANTE



Madame [U] [U], demeura...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 16 NOVEMBRE 2018

N° 2018/

Rôle N° RG 17/14444 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA7GI

[U] [U]

C/

ASSOCIATION DE DIALYSE VAROISE

Copie exécutoire délivrée

le : 16/11/18

à :

Me Danielle DEOUS, avocat au barreau de TOULON

Me Yannick LE LANDAIS, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 30 Juin 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 16/00615.

APPELANTE

Madame [U] [U], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Danielle DEOUS, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

ASSOCIATION DE DIALYSE VAROISE, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Yannick LE LANDAIS, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Septembre 2018 à 14h00, les avocats ayant été invités à l'appel des causes à demander à ce que l'affaire soit renvoyée à une audience collégiale s'ils n'acceptaient pas de plaider devant le magistrat rapporteur et ayant renoncé à cette collégialité, l'affaire a été débattue devant Monsieur Thierry CABALE, conseiller faisant fonction de Président de Chambre.

M.Thierry CABALE a fait son rapport avant la plaidoirie

Le magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur M.Thierry CABALE, Conseiller faisant fonction de Président

Monsieur Solange LEBAILE, Conseiller

Madame Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Harmonie VIDAL.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Novembre 2018.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Novembre 2018

Signé par Monsieur Thierry CABALE, conseiller faisant fonction de Président et Mme Suzie BRETER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Le 27 juillet 2016, Madame [U] [U], exposant avoir été verbalement engagée le 18 mai 1998 en tant qu'aide-soignante par l'association ADIVA puis licenciée par lettre en date du 26 février 2016 en raison d'une inaptitude physique qu'elle considère être d'origine professionnelle, a saisi le conseil de prud'hommes de Toulon qui, par jugement en date du 30 juin 2017, l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, notamment de ses demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement d'une indemnité de licenciement doublée.

Le 25 juillet 2017, dans le délai légal, la salariée a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Par dernières conclusions du 27 juin 2018, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, Madame [U] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et :

au principal:

- de dire et juger que son inaptitude est d'origine professionnelle,

- de dire et juger que l'employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement en ne consultant pas les délégués du personnel et en ne faisant pas de recherches loyales de reclassement,

- de dire et juger que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité en laissant perdurer une situation de harcèlement moral ayant conduit à son inaptitude,

- de condamner l'employeur à lui payer les sommes de:

4200 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

420 euros au titre des congés payés sur préavis,

7289 euros au titre du solde de l'indemnité de licenciement doublée,

35.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de reclassement en vertu des dispositions de l'article L 1226-15 du code du travail,

12.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

subsidiairement:

- de dire et juger que la lettre de licenciement a été signée par une personne dépourvue de qualité,

- de dire et juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

en conséquence,

- de condamner l'employeur à lui payer les sommes de:

4200 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

420 euros au titre des congés payés sur préavis,

7289 euros au titre du solde de l'indemnité de licenciement doublée,

25.000 euros à titre de dommages et intérêts 'pour licenciement',

en toute hypothèse:

- d'ordonner la remise des documents rectifiés sous astreinte de 100 euros par jour de retard, soit les bulletins de salaire et l'attestation Pôle Emploi,

- de condamner l'employeur au paiement de la somme de 3600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La salariée soutient qu'elle a été victime d'un accident du travail le 20 juin 2012 tel que celui-ci a été relaté à l'employeur le 9 juillet 2012, qu'ont été établis des certificats médicaux les 20 juin 2012, 16 novembre 2012, 26 septembre 2014 et 8 septembre 2015, que dans le cadre de sa contestation d'un refus de prise en charge de l'événement du 20 juin 2012 au titre de la législation sur les accidents du travail, a été ordonnée une expertise médicale qui a conclu à une décompensation traumatique de troubles anxio-dépressifs aigus imputable aux conditions de travail du 20 juin 2012, et à l'issue de laquelle la cpam a accordé cette prise en charge par lettre en date du 21 janvier 2013, qu'elle a bien perçu des indemnités journalières au titre d'un accident du travail du 20 juin 2012 au 31 octobre 2013, qu'elle a été en congé maternité à compter du 1er novembre 2013 puis en congé parental, qu'elle a été consolidée le 14 août 2014, qu'elle a été placée en arrêts de travail pour maladie à compter du 15 août 2014, qu'elle n'a jamais repris son poste de travail, qu'elle a été déclarée par le médecin du travail, aux termes d'une seconde visite de reprise du 13 octobre 2015, inapte au poste sans proposition de reclassement et sans possibilité, vu son état médical, de préciser les capacités restantes, qu'il résulte de l'ensemble que l'inaptitude a une origine professionnelle, que l'indemnité de licenciement doit donc être doublée; que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse dès lors qu'en violation de l'article L 1226-10 du code du travail, les délégués du personnel n'ont pas été consultés avant de formuler sa proposition de reclassement, que celui-ci n'a pas recherché loyalement un reclassement dès lors qu'il ne justifie d'aucune réaction avant la lettre de convocation à l'entretien préalable expédiée le 4 janvier 2016 contenant sept propositions de postes de reclassement au sein du groupe [Établissement 1] sur lesquels elle devait se prononcer dans un délai trop bref de quatre jours sans avoir obtenu toutes les précisions qu'elle avait sollicitées en raison d'une description succincte des offres; que l'inaptitude résulte d'une situation de harcèlement moral, de l'agression verbale dont elle a été victime le 20 juin 2012 qui avait été précédée d'autres événements à l'origine de la dégradation de ses conditions de travail, qu'elle a relaté les événements dans un courrier recommandé adressé à l'employeur en date du 9 juillet 2012, qu'elle a notamment évoqué que le personnel encadrant, l'infirmière référante et cadre de santé, étaient informés du comportement grossier et agressif de Messieurs [J], [H] et [W], que l'employeur n'ayant pas réagi, sa demande de dommages et intérêts formulée à son encontre est justifiée; qu'elle a subi un préjudice moral distinct découlant du non-respect par l'employeur de son obligation de sécurité en application des articles L 4121-1 et L 4121-2 du code du travail; que, subsidiairement, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse en raison de la signature de la lettre de licenciement par l'un des administrateurs de l'association qui apparaît dépourvu de toute qualité à cette fin.

Par dernières conclusions du 23 décembre 2017, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, l'association ADIVA demande à la cour, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, de rejeter l'ensemble des demandes de la salariée et de la condamner à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'employeur fait valoir que la salariée était en arrêt maladie à compter du 14 août 2014 à la suite de sa consolidation, que celle-ci a été déclarée inapte suite à 'Accident ou maladie NON professionnel', que le médecin du travail a précisé que l'inaptitude était d'origine non-professionnelle, qu'il n'a eu d 'autre choix que de se conformer à l'avis rendu par ce médecin qui n'a pas fait l'objet de contestations de la part de la salariée, que les bulletins de paie ont bien mentionné les périodes d'absence successives pour accident du travail puis pour maladie, qu'il n'a été destinataire d'aucun certificat médical lui permettant de conclure à une inaptitude d'origine professionnelle, que la salariée ne communique aucune pièce sur le harcèlement moral en dehors de son propre courrier du 9 juillet 2012 intervenu quatre ans avant le licenciement et dans lequel elle n'évoque qu'un seul événement relatif à des 'reproches' ' totalement injustifiés' du 20 juin 2012 sans plus de précisions; qu'il en résulte que le licenciement est régulier et fondé et que la salariée n'a pas perçu à bon droit l'indemnité spéciale de licenciement et l'indemnité de préavis; que les délégués du personnel n'avaient pas à être consultés; que c'est à tort qu'il lui est reproché un non-respect de l'obligation de reclassement alors qu'il a formulé des propositions à temps, qui n'ont pas reçu de réponses favorables de la part de la salariée en dépit des précisions qui lui ont été apportées sur les postes proposés; que la salariée ne justifie pas de son préjudice; qu'aucun vice de fond n'affecte la procédure de licenciement dès lors que le signataire de la lettre de licenciement a agi pour ordre suite à une délégation reçue du Président du Conseil d'administration, une telle signature valant ratification d'un mandat; que le nom de Madame [R] [R] apparaît clairement sur la lettre de licenciement et que celle-ci a elle-même le pouvoir de licencier.

L'ordonnance de clôture de l'instruction est intervenue le 31 juillet 2018.

MOTIFS :

- Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

En l'espèce, il résulte des éléments d'appréciation, que l'accident du travail dont a été victime la salariée le 20 juin 2012 consiste en une décompensation traumatique, soit un malaise vagal, de troubles anxio-dépressifs aigus, imputable aux conditions de travail à cette date, que des troubles anxieux avec tachycardie avaient été médicalement constatés lors de son admission à l'hôpital le même jour, qu'un protocole de soins a été établi à compter d'août 2014 pour une durée supérieure à six mois, que selon les constatations faites par un psychiatre le 26 septembre 2014, ' A plus de dix-huit mois des situations traumatisantes, la patiente ressent toujours de nombreuses angoisses, une impression de danger immédiat, et présente une symptomatologie anxio-phobique marquée amenant à des comportements d'évitement et de retrait, d'importants troubles du sommeil avec des cauchemars sur les situations professionnelles et la nécessité d'être accompagnée dans tous ses déplacements', que ce médecin ajoute que Madame [U] ' présente un état dépressif marqué, associé à des éléments de stress post-traumatique qui nécessitent une prise en charge thérapeutique et un traitement psychotrope difficile à mettre en place pour le moment du fait de l'allaitement', outre que l'état de santé de sa patiente lui paraît ' incompatible avec une quelconque reprise d'activité professionnelle et nécessite la poursuite de soins', qu'à la date du 8 septembre 2015, ce même psychiatre relevait la persistance des mêmes troubles nécessitant la poursuite de soins et lui paraissant incompatibles avec une quelconque reprise d'activité professionnelle, qu'aux termes des fiches de visite intervenues peu après, la médecine du travail concluait à une inaptitude au poste, à l'absence de proposition de reclassement sur ' ce site' et à ce que l'état médical constaté ne permettait pas de préciser les capacités restantes.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'inaptitude de la salariée a, au moins partiellement, pour origine l'accident du travail du 20 juin 2012.

Toutefois, alors qu'après notification de l'état consolidé de la salariée, tous les arrêts de travail mentionnaient une maladie d' origine non-professionnelle, Madame [U], qui avait reçu, sans contestation de sa part, des bulletins de paye portant mention d'une absence pour maladie correspondant aux arrêts de travail précités, avait perçu des indemnités afférentes à cette situation, et avait correspondu avec l'employeur, avant son licenciement, en limitant ses objections aux propositions de reclassement, n'a invoqué l'origine professionnelle de son inaptitude que dans un courrier reçu par l'employeur le 09 mai 2016, ce dont il se déduit qu'en l'absence de tout autre élément susceptible d'établir la situation inverse, l'employeur n'avait pas connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

Madame [U] sera donc déboutée de sa demande d'indemnisation supplémentaire en application de l'article L 1226-14 du code du travail, outre de sa demande découlant d'une absence de consultation des délégués du personnel en violation des dispositions alors en vigueur de l'article L 1226-10 du code du travail.

- S'agissant de l'absence de loyauté dans l'exécution de l'obligation de reclassement, il résulte des éléments d'appréciation qu'à la suite de l'avis d'inaptitude définitive au poste de travail antérieurement exercé et malgré l'absence de toute proposition de reclassement sur le site où l'emploi était exercé, l'employeur, qui n'avait pas à interroger le médecin du travail sur l'avis de celui-ci suffisamment clair et précis, a formulé des propositions dans un temps raisonnable, soit un peu plus d'un mois après, ses recherches l'ayant amené, dans le courrier de convocation à l'entretien préalable du 20 décembre 2015, reçu par la salariée au début du mois de janvier 2016, à lui proposer sept postes d'aide-soignante dans le périmètre de reclassement, au sein de structures situées dans la même région, à [Localité 1], dont les caractéristiques mentionnées dans ce courrier quant à la nature du poste et le temps de travail, ont été complétées à suffisance concernant la rémunération, la formation et le remboursement de frais au moyen d'un courrier du 1er février 2016, posté le 8 février 2016 et reçu par la salariée le 16 février 2016, soit quatre jours avant la date butoir pour se prononcer, délai suffisant au regard des précisions successivement apportées, et même dix jours avant la notification du licenciement.

La salariée sera donc déboutée de toute demande au titre d'une exécution déloyale de l'obligation de reclassement.

- En application des dispositions de l'article L 1152-1 du code de travail, « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique et mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».

En vertu de l'article L 1154-1 du même code, la salariée doit présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, et il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

La salariée, qui invoque un harcèlement moral à l'origine de son inaptitude afin d'obtenir des dommages et intérêts pour le préjudice moral subi, présente les éléments suivants:

- une lettre recommandée avec avis de réception en date du 9 juillet 2012 par laquelle elle a dénoncé à son employeur une 'agression verbale de la part de messieurs [W] [S] et [J] [G] respectivement IDE et AS le 20 juin 2012 à l'occasion du transport d'un malade en fauteuil', a indiqué que ' Leurs reproches' lui ont 'paru totalement injustifiés', que 'ces faits se situent dans le cadre d'une attitude régulièrement agressive de la part de messieurs [J], [H] et [W], y compris en présence des patients', qu'elle a 'très mal vécu cet événement', que ' ce stress a entraîné un grave malaise avec oppression et vertiges' qui l'a conduite aux urgences, qu'elle est en arrêt de travail depuis cette date, qu'elle ' a le sentiment de subir un harcèlement moral depuis plusieurs mois de la part de ces soignants dont Mr [J] qui n'a aucune compétence hiérarchique' à son égard, que l'infirmière référante et le cadre de santé 'connaissent leur comportement qui consiste en une attitude agressive et machiste, tout particulièrement' à son égard, que ' cette situation ne peut perdurer', la salariée ajoutant: ' Ainsi, je vous demande, Me le Président, de bien vouloir prendre les mesures nécessaires pour faire cesser ces comportements qui non seulement son intolérables mais menacent ma santé',

- les certificats médicaux du médecin hospitalier et du psychiatre qui mettent en évidence des troubles dépressifs et phobiques en réaction à des conditions de travail évoquées par la patiente comme étant dégradées,

- des arrêts de travail pour accident du travail à la suite de l'événement survenu le 20 juin 2012,

- des arrêts de travail pour maladie non-professionnelle à compter du 15 août 2014 mentionnant des troubles dépressifs et phobiques,

- les avis d'inaptitude de la médecine du travail.

Il ne résulte pas de ces éléments, pris dans leur ensemble, l'établissement de faits répétés permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral.

- Pourtant tenu, en application des dispositions alors en vigueur des articles L 4121-1 et L 4121-2 du code du travail, d'une obligation de sécurité qui lui imposait de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de sa salariée, notamment par la mise en oeuvre de mesures préventives, l'employeur ne justifie de la mise en oeuvre d'aucune mesure à la suite de la dénonciation par la salariée de faits susceptibles de mettre en danger sa santé mentale, pas même du déclenchement d'une simple enquête interne, peu important le placement en arrêt pour accident du travail de Madame [U] peu avant la dénonciation à celui-ci des faits qu'elle invoque et l'absence de reprise du poste par suite du prolongement de son absence justifiée par l'accident du travail puis pour d'autres raisons.

Or, il ressorts des pièces médicales que la salariée présentait notamment des troubles phobiques qu'elle reliait aux conditions de travail qu'elle avait dénoncées à son employeur dont l'absence de réaction est partiellement à l'origine du préjudice moral subi. Il y a lieu en conséquence d'allouer à la salariée la somme de 1500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de ce préjudice.

- Afin d'obtenir que le licenciement soit déclaré sans cause réelle et sérieuse, la salariée invoque à titre subsidiaire le défaut de qualité de la personne ayant signé la lettre de licenciement. Il résulte des éléments d'appréciation que la lettre de licenciement a été signée 'pour ordre' par Madame [R] [R] avec la mention suivant laquelle celle-ci a agi en tant qu'administrateur, alors qu'il ne ressort pas des pièces produites, notamment de statuts, ni que l'administrateur avait le pouvoir de licencier, ni que le président de l'association aurait été autorisé par le conseil d'administration à déléguer ses pouvoirs.

L'absence de pouvoir du signataire de la lettre de licenciement prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.

Dès lors que le licenciement pour inaptitude d'origine non-professionnelle et impossibilité de reclassement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse, la salariée, même dans l'incapacité d'effectuer son préavis, a droit à une indemnité compensatrice de préavis en application des articles L 1234-1 et L 1234-5 du code du travail. Au vu des éléments fournis, il y aura donc lieu d'allouer à la salariée la somme de 4200 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 420 euros bruts au titre des congés payés subséquents.

Compte tenu de l'ancienneté de la salariée, de sa rémunération, de son âge, de son emploi et de sa capacité à retrouver un emploi tel que cela résulte des éléments fournis, il y aura lieu d'allouer à celle-ci la somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du licenciement sans cause réelle et sérieuse par application des dispositions de l'article L 1235.3 du code du travail.

Au vu des éléments fournis, la salariée a été remplie de ses droits en matière d'indemnité légale de licenciement.

- Il y aura lieu de condamner l'employeur à remettre à la salariée un bulletin de salaire correspondant aux condamnations prononcées par le présent arrêt, outre une attestation Pôle Emploi conforme à l'arrêt. Le prononcé d'une astreinte est justifié au vu des circonstances de la cause.

- En considération de l'équité, la somme de 2000 euros sera allouée à la salariée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- L'employeur, qui succombe en partie, sera condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et par mise à disposition au greffe:

Infirme le jugement entrepris.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute Madame [U] [U] de toute demande au titre d'une inaptitude d'origine professionnelle.

Dit que le licenciement de Madame [U] [U] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Condamne l'association ADIVA à payer à Madame [U] [U] les sommes suivantes:

- 1500 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité,

- 4200 euros bruts à titre d'indemnité de préavis,

- 420 euros bruts au titre des congés payés subséquents,

- 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Condamne l'association ADIVA à remettre à Madame [U] [U] un bulletin de paie correspondant aux condamnations prononcées par le présent arrêt, outre une attestation Pôle Emploi conformes à l'arrêt, dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de 30 euros par jour de retard passé ce délai, ce, pendant soixante jours.

Condamne l'association ADIVA à payer en outre à Madame [U] [U] la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties pour le surplus.

Condamne l'association ADIVA aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Le GreffierM.Thierry CABALE, conseiller faisant fonction de Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 17/14444
Date de la décision : 16/11/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°17/14444 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-16;17.14444 ?
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