COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
1ère Chambre C
ARRÊT
DU 08 NOVEMBRE 2018
N° 2018/732
G. T.
Rôle N° RG 17/15410
N° Portalis DBVB-V-B7B-BBBYR
SA COFIDIS
C/
X... Z... R...
Pascal Y...
CONSEIL Q... Z... L'ORDRE DES CHIRURGIENS DENTISTES
SA GRANT THORNTON
SA FRANFINANCE
SA CORHOFI
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Maître A...
Maître B...
Maître C...
Maître D...
Maître P... E...
Maître F...
Maître G...
DÉCISION DÉFÉRÉE À LA COUR :
Ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 28 juillet 2017 enregistrée au répertoire général sous le n° 17/00770.
APPELANTE :
SA COFIDIS,
dont le siège est [...]
représentée par Maître Serge A..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Maître Jean H..., avocat au barreau de PARIS, substitué par Maître Emmanuel S..., avocat au barreau de PARIS, plaidant
INTIMÉS :
Maître X... Z... R...,
ès qualités de liquidateur judiciaire de l'association DENTEXIA,
domicilié en cette qualité Aix-Métropole - bâtiment E - 30, avenue de Malacrida CS 10730 - [...]
représenté et assisté par Maître Gilles B..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant
Monsieur Pascal Y...
né le [...] à Thionville,
demeurant [...]
représenté et assisté par Maître Jean-Paul C..., avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Maître Cédric I..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
CONSEIL Q... Z... L'ORDRE DES CHIRURGIENS DENTISTES,
ès qualités de contrôleur de droit de la liquidation judiciaire de l'association DENTEXIA,
dont le siège est [...]
représenté par Maître Paule D..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Maître Marie J..., avocat au barreau de PARIS, substituée par Maître Maël K..., avocat au barreau de PARIS, plaidant
SA GRANT THORNTON,
dont le siège est [...]
représentée et assistée par Maître Virginie P... E..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
SA FRANFINANCE,
dont le siège est [...]
représentée par Maître Romain F... de la SELARL SELARL LEXAVOUE AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substitué par Maître Germain L..., avocat au barreau de MARSEILLE, assistée de Maître Sébastien T... Z..., avocat au barreau de PARIS, plaidant
SA CORHOFI,
dont le siège est [...]
représentée par Maître Caroline G..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Maître Jean M..., avocat au barreau de PARIS, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION Z... LA COUR :
L'affaire a été débattue le 24 septembre 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Geneviève TOUVIER, présidente, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
[...]
Madame Geneviève TOUVIER, présidente
Madame Sylvie PEREZ, conseillère
Madame Michèle CUTAJAR, conseillère
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Monsieur Serge LUCAS.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 octobre 2018 ; délibéré prorogé au 08 novembre 2018, les avocats ayant été avisés par courriel en date du 18 octobre 2018.
ARRÊT :
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 novembre 2018,
Signé par Madame Geneviève TOUVIER, présidente, et Monsieur Serge LUCAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
Créée en 2011, l'association DENTEXIA avait pour objet de favoriser l'accès aux soins dentaires à toutes les catégories sociales notamment aux personnes démunies en créant des centres de santé dentaire accessibles à tous et pratiquant des tarifs modérés ainsi que toutes autres structures complémentaires visant à atteindre ce but. Dans le cadre de son activité, cette association a conclu divers contrats avec la société CORHOFI en vue de louer divers matériels d'équipements médicaux et informatiques. Elle a également fait appel à la société FRANFINANCE qui a proposé, par l'intermédiaire de DENTAL FINANCE, des offres de crédits à la clientèle de l'association, ainsi qu'à la société SOFEMO, absorbée depuis par la société COFIDIS, auprès de laquelle les patients pouvaient aussi souscrire des crédits permettant de financer les soins dentaires.
Après avoir fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire le 24 novembre 2015, l'association DENTEXIA a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 4 mars 2016 avec désignation de maître X... de R... en qualité de liquidateur.
Invoquant l'importance des crédits octroyés par les sociétés COFIDIS et FRANFINANCE aux personnes faisant appel aux services de l'association et l'ampleur des contrats conclus avec la société CORHOFI, maître X... de R..., agissant en qualité de liquidateur judiciaire de l'association DENTEXIA, a fait assigner en référé, au mois de mai 2017, les sociétés FRANFINANCE, CORHOFI, COFIDIS et GRANT N..., le Conseil national de l'Ordre des chirurgiens dentistes et Pascal Y..., président de l'association DENTEXIA, pour obtenir l'organisation d'une expertise aux fins d'établir les circonstances dans lesquelles les contrats ont été conclus entre l'association DENTEXIA et la société CORHOFI et les crédits souscrits par les patients auprès des établissements de crédit.
Par ordonnance de référé en date du 28 juillet 2017, réputée contradictoire pour défaut de comparution de Pascal Y..., le président du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a :
- rejeté les exceptions d'incompétence élevées par les sociétés COFIDIS, FRANFINANCE et CORHOFI ;
- déclaré recevable l'action de maître de R... ;
- ordonné une expertise confiée à monsieur Jean-Louis O... avec mission notamment d'analyser les conditions et modalités des contrats de crédits souscrits par l'association DENTEXIA et les patients en donnant tous éléments permettant à la juridiction d'apprécier l'existence d'un soutien abusif ou de relations financières anormales entre les parties ;
- mis à la charge de maître de R... une consignation de 6000 € à valoir sur les frais d'expertise ;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
- condamné maître de R..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de l'association DENTEXIA, aux dépens.
La SA COFIDIS a interjeté appel total de cette ordonnance le 7 août 2017.
Par ordonnance en date du 14 septembre 2017, le magistrat chargé du contrôle des expertises a pris acte de l'empêchement de monsieur O... et désigné en remplacement madame Carole V....
Par dernières conclusions du 10 septembre 2018, la SA COFIDIS demande à la cour:
- d'infirmer l'ordonnance déférée en ce que le juge des référés s'est déclaré territorialement compétent ;
- de renvoyer l'affaire devant la cour d'appel de renvoi ;
- en tout état de cause, d' infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a fait droit à la demande d'expertise judiciaire sollicitée par maître de R... et infirmer l'ordonnance du 14 septembre 2017 ayant désigné madame V... en qualité d'expert ;
- de débouter maître de R... de toutes ses demandes ;
- de condamner l'association DENTEXIA à lui payer la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions du 21 septembre 2018, la SA FRANFINANCE demande à la cour:
- d'infirmer l'ordonnance déférée ;
- de déclarer le juge des référés du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence territorialement incompétent au profit du juge des référés du tribunal de grande instance de Nanterre ;
- de renvoyer l'affaire devant la cour d'appel de Versailles ;
- subsidiairement, de débouter maître de R... de sa demande formée à son encontre et de la déclarer à tout le moins irrecevable ;
- très subsidiairement, de modifier la mission de l'expert en ce sens que :
' la mission de l'expert ne saurait porter sur l'analyse des prestations contractées par les patients auprès de l'association DENTEXIA et sur les opérations de crédit souscrites dans ce cadre, s'agissant d'opérations au titre desquelles le liquidateur judiciaire n'a pas qualité à agir et eu égard au secret bancaire et au secret médical ;
' la mission de l'expert ne saurait porter non plus sur l'analyse des virements reçus en provenance de la société FRANFINANCE et sur l'analyse du fondement de ce règlement par l'analyse de la facture ou du devis correspondant ou de l'ordre de paiement correspondant ;
' il appartiendra à maître de R... de communiquer toutes les pièces en sa possession sans pouvoir en transférer cette charge sur la société FRANFINANCE;
' il appartiendra à maître de R... de produire l'intégralité de la comptabilité de l'association DENTEXIA retraçant l'ensemble des fonds reçus en provenance de la société FRANFINANCE sans qu'il puisse être demandé à celle-ci de communiquer ses propres documents comptables ni d'établir des tableaux ou documents de synthèse qui ne constituent pas des pièces préexistantes ;
' il appartiendra à maître de R... de produire l'ensemble des relevés bancaires de chacun des centres DENTEXIA retraçant l'ensemble des fonds reçus en provenance de la société FRANFINANCE en sollicitant le cas échéant des établissements teneurs des comptes bancaires leur communication ;
' il appartiendra à maître de R... de produire les pièces en sa possession permettant de justifier l'origine de ces versements, à savoir la facture, le devis ou l'ordre de paiement correspondant ;
' il appartiendra à maître de R... de justifier du recollement entre les versements reçus et la facture ou le devis correspondant, ou à défaut à l'expert mais non à la société FRANFINANCE ;
' l'expert ne pourra solliciter la communication de pièces afférent aux dossiers des patients concernant les prestations souscrites et les contrats de crédit souscrits, eu égard au secret bancaire et au secret médical, sous la seule réserve de l'ordre de paiement donnée ou cette communication ne se heurte pas à un quelconque secret ;
' à défaut, la communication sera strictement limitée quant aux pièces concernées et aux parties pouvant se les voir communiquer ;
' en tout état de cause, il appartiendra à maître de R... de communiquer lui-même ces éléments en produisant l'ensemble des déclarations de créances reçues des patients avec les pièces justificatives y afférent ;
- de dire que le Conseil national de l'Ordre des chirurgiens dentistes doit être écarté des opérations d'expertise ;
- de dire qu'il conviendra de respecter le principe du contradictoire en ce sens que la société FRANFINANCE devra être convoquée, qu'elle devra être mise en mesure de faire valoir ses observations et de faire des dires au vu du pré-rapport qui sera établi ;
- en tout état de cause, de condamner maître X... de R..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de l'association DENTEXIA, à lui payer la somme de 6000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de son avocat, les dépens étant employés en frais privilégiés de la procédure.
Par dernières conclusions du 21 août 2018, la SA CORHOFI demande à la cour :
- de réformer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;
- de se déclarer incompétente au profit du tribunal de commerce de Lyon ou subsidiairement au profit du juge des référés de Lyon ;
- subsidiairement, de déclarer les demandes de maître de R... irrecevables;
- très subsidiairement, de débouter maître de R... de toutes ses demandes;
- infiniment subsidiairement, de dire que l'Ordre des chirurgiens dentistes doit être écarté des débats de même que ses écritures et pièces et qu'en toute hypothèse il ne pourra être nommé comme sachant ou alors de nommer un autre sachant pour donner son avis au même titre que l'Ordre des chirurgiens dentistes ;
- en tout état de cause, de condamner maître de R..., ès qualités, à payer à la société CORHOFI 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions du 7 septembre 2018, le Conseil national de l'Ordre des chirurgiens-dentistes sollicite :
- la confirmation de l'ordonnance déférée ;
- qu'il soit déclaré recevable en ses explications et pièces ;
- qu'il soit invité à participer aux opérations d'expertise dans le respect du contradictoire;
- que les dépens soient réservés.
Par conclusions du 7 septembre 2018, Pascal Y... s'en rapporte à justice et sollicite la condamnation des parties défaillantes au paiement de la somme de 3500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par dernières conclusions du 18 septembre 2018, maître X... de R..., mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de l'association DENTEXIA, sollicite :
- la révocation de l'ordonnance de clôture du 10 septembre 2018 et l'admission de sa pièce n° 51 ;
- le débouté de la société COFIDIS de son appel et des sociétés FRANFINANCE et CORHOFI de leurs demandes ;
- la confirmation de l'ordonnance déférée ;
- qu'il soit dit que le secret bancaire ne saurait être opposé à un expert judiciaire;
- la condamnation des parties défaillantes au paiement de la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Il est renvoyé aux écritures susvisées des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens.
La W... N... a constitué avocat mais n'a pas conclu.
MOTIFS Z... LA DÉCISION :
La demande de révocation de l'ordonnance de clôture est sans objet, une telle ordonnance n'ayant pas été rendue.
1- sur les exceptions d'incompétence territoriale et d'attribution
Par des motifs pertinents que la cour adopte, le premier juge a fait une exacte appréciation des faits de la cause en retenant que :
- la compétence territoriale du juge des référés du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence est justifiée au regard du lieu de l'établissement Z... la société GRANT THORNTON et du lieu du déroulement de l'expertise sollicitée ;
- que l'action engagée par l'association DENTEXIA contre la société CORHOFI devant le tribunal de commerce de Lyon ne fait pas obstacle à la compétence d'attribution du juge des référés du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, dès lors que ces instances ne tendent pas aux mêmes fins et que l'instance commerciale est actuellement radiée.
En cause d'appel, il n'est pas plus justifié du fait que l'établissement Z... la société GRANT THORNTON situé à Aix-en-Provence n'aurait pas d'autonomie alors que ladite société n'a pas contesté le lieu où elle a été assignée. Quant au moyen relatif au caractère artificiel de la mise en cause de la société GRANT THORNTON, il est inopérant dans la mesure où il rajoute une condition non prévue à l'article 42 du code de procédure civile et où la présence de la société GRANT THORNTON à l'expertise est légitime au regard de sa qualité de dernier commissaire aux comptes de l'association DENTEXIA, étant observé par ailleurs que cette société n'a pas contesté sa mise en cause.
S'agissant du lieu de l'expertise, les premières modalités de cette mesure confirment que son déroulement principal aura bien lieu sur Aix-en-Provence. En effet, l'expert s'est déplacée dans les locaux de maître de R..., où un inventaire des très nombreuses pièces mises à disposition de l'expert a été dressé sur place, maître de R... détenant l'essentiel des pièces utiles à l'instruction dont les justificatifs annexés aux déclarations de créances de 1450 patients. L'expert va en outre consulter la comptabilité de l'association DENTEXIA à l'étude de maître de SAINT RAPT qui la détient en sa qualité d'administrateur judiciaire. En outre, par ordonnance en date du 24 avril 2018, devenue définitive, le juge des référés du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a, sur assignation de monsieur Y..., étendu l'expertise à deux anciens trésoriers de DENTEXIA qui résident tous deux dans le ressort du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence. Si cette mesure postérieure à l'ordonnance déférée ne peut influer sur la détermination de la compétence territoriale sur l'action engagée par maître de R..., elle conforte l'analyse sur le lieu de déroulement principal de l'expertise.
Enfin l'ampleur de la mission d'expertise sollicitée à l'égard de plusieurs parties n'a manifestement pas le même but que l'action engagée contre la seule société CORHOFI devant le tribunal de commerce de Lyon, de sorte que cette action, toujours radiée, ne saurait faire obstacle a la compétence matérielle du juge des référés du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence.
2- sur la recevabilité de l'action de maître de R...
Maître R... a bien qualité pour agir en justice au nom de l'association DENTEXIA dont il est le liquidateur judiciaire. Contrairement, à ce qui est soutenu par la société FRANFINANCE, il représente non pas uniquement l'intérêt des patients ayant souscrit des contrats et déclaré leur créance, mais l'intérêt de tous les créanciers de l'association.
Par ailleurs, le liquidateur judiciaire qui soupçonne des flux financiers anormaux entre les organismes financiers en cause et l'association DENTEXIA a bien un intérêt à agir pour solliciter une expertise afin de déterminer la nature et les conséquences de ces relations financières. Les moyens portant sur la légitimité de sa demande d'expertise et sur le caractère légalement admissible de cette mesure sont des questions de fond et non des fins de non recevoir.
Ainsi qu'il a été dit précédemment, l'action engagée par l'association DENTEXIA contre la société CORHOFI devant le tribunal de commerce de Lyon n'a pas le même objet que la présente action et maître de R... a un intérêt à ce que la mesure d'expertise qu'il sollicite soit commune à touts les organismes ayant eu des relations financières qu'il estime anormales avec l'association.
L'ordonnance déférée sera en confirmée en ce qu'elle a déclaré recevable l'action de maître de R....
3- sur la mesure d'expertise
La demande d'expertise est fondée sur l'article 145 du code de procédure civile aux termes duquel, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé. Le motif légitime n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien fondé de l'action susceptible d'être engagée au fond, laquelle doit cependant être plausible et ne pas être manifestement vouée à l'échec.
La mesure d'expertise sollicitée a pour but de déterminer si la faillite de l'association DENTEXIA a été précipitée par des relations entretenues avec les sociétés COFIDIS, FRANFINANCE et CORHOFI ce qui serait susceptible de caractériser une confusion de patrimoine avec toutes les conséquences en découlant.
Il résulte des pièces versées aux débats (conventions de crédit-vendeur souscrit ou de partenariat souscrit entre les organismes de crédit et DENTEXIA, déclarations de créances de certains patients, courriels échangés entre DENTEXIA et DENTAL FINANCE (FRANFINANCE), rapport de l'administrateur judiciaire maître de SAINT RAPT) que les contrats de crédits affectés étaient souscrits par les patients dans les locaux des établissement de DENTEXIA, le personnel de l'association agissant comme de véritables vendeurs pour l'organisme de crédit, que l'argent emprunté était versé directement à DENTEXIA par l'organisme de crédit juste après l'expiration du délai de rétractation et quelquefois avant sans que les soins aient été effectués en tout cas en totalité et que DENTEXIA payait les intérêts du prêt à l'organisme de crédit à tel point que pour les exercices 2013 et 2014, le résultat négatif de l'association correspondait aux intérêts de ces prêts accordés par FRANFINANCE. Ces éléments ainsi que la complexité technique du dossier et l'abondance de documents à examiner justifient le recours à une expertise pour déterminer les circonstances dans lesquelles ont été conclus et exécutés les contrats signés entre les organismes de crédit et les patients d'une part et DENTEXIA d'autre part. Cette dernière, représentée par son liquidateur judiciaire, ne saurait être considérée comme un tiers à ces opérations financières alors que son personnel semblait directement impliqué dans la conclusion des contrats de crédit et qu'elle réglait les intérêts de ces contrats.
S'agissant de la société CORHOFI, elle a été débouté de son action en restitution des matériels loués par jugement du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 30 septembre 2016 qui a relevé la confusion notable crée par cette société du fait de l'absence de tout numéro de série sur les factures de location du matériel et de l'incertitude en résultant sur l'identification des matériels revendiqués. Ces éléments et le coût financier élevé des contrats de location justifient qu'un expert examine les conditions de conclusion et d'exécution de ces contrats.
Les développements des sociétés COFIDIS, FRANFINANCE et CORHOFI sur l'absence de soutien abusif ou l'impossibilité d'invoquer celui-ci et l'absence de relations financières anormales sont des moyens relevant de l'appréciation de la seule juridiction du fond éventuellement saisie ultérieurement. En l'état, maître de R... justifie d'un motif légitime pour voir ordonner une expertise.
Les sociétés COFIDIS et FRANFINANCE invoquent le secret bancaire et le secret médical. Mais dès lors que la société DENTEXIA a pu inciter les patients à conclure des contrats de crédit, qu'elle percevait directement l'argent emprunté et réglait les intérêts de ces contrats, elle ne saurait être considérée comme tiers à ces conventions financières dont elle connaissait la teneur. En outre, il résulte des articles L.622-6 alinéa 3 et
L.641-4 alinéa 4 du code de commerce que le liquidateur d'une société en liquidation judiciaire peut obtenir, nonobstant toute disposition législative ou réglementaire contraire, communication, notamment par les établissements de crédit, des renseignements de nature à lui donner une exacte information sur la situation patrimoniale du débiteur. Tel est le cas en l'espèce de sorte qu'il n'y a pas lieu de modifier la mission d'expertise sur la communication de documents.
Par ordonnance en date du 14 juin 2018, le juge chargé du contrôle des expertises a déclaré que les sociétés FRANFINANCE et COFIDIS sont fondées à opposer à l'expert le secret bancaire concernant certaines de ses demandes. Mais il s'agit d'une instance distincte faisant également l'objet d'un appel et qui ne porte pas sur la mission générale de l'expert mais sur les demandes précises de celui-ci, litige dont la cour n'est pas saisie dans le cadre de la présente procédure.
Quant au secret médical, il n'empêche pas l'examen par un expert judiciaire des devis établis par le personnel de DENTEXIA et objet des déclaration de créances des patients ni la mise en concordance des règlements effectués avec la réalisation ou non de ces devis.
La société FRANFINANCE conteste également trois chefs de la mission donnée à l'expert à savoir :
- vérifier si les établissements de crédit ont fait diligence en regard de leur devoir de vigilance sur l'opération financée ;
- donner tous éléments permettant à la juridiction d'apprécier l'existence le cas échéant d'un soutien abusif entre les parties ou de flux anormaux entre l'association et les établissements de crédit ;
- porter à la connaissance des parties et de la juridiction tous éléments de nature à qualifier les relations entre les parties de relations financières anormales.
Elle soutient que le libellé ce des chefs de mission revient à déléguer à l'expert le pouvoir de dire le droit. Mais le fait de demander à un expert de vérifier s'il y a eu diligence de la part des établissements de crédit et de recueillir des éléments pour permettre à la juridiction d'apprécier l'existence de relations financières anormales ne s'analyse pas en une demande de dire le droit. Il n'y a dès lors pas lieu à suppression de ces chefs de mission.
Le premier juge a justement retenu que le Conseil de l'Ordre des chirurgiens dentiste est directement intéressé par le litige qui concerne la profession qu'il représente de sorte qu'il n'y a pas lieu de l'écarter de la mesure d'expertise.
Enfin, l'ordonnance déférée prévoit que l'expert devra accomplir sa mission en présence des parties ou celles-ci dûment appelées, les entendre en leurs dires et leur communiquer la teneur de son rapport en leur impartissant un délai pour faire des observations. Ce libellé est suffisant pour assurer le respect du principe du contradictoire sans qu'il y ait lieu d'y apporter des précisions complémentaires.
4- sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Au des circonstances de la cause et s'agissant d'une mesure d'expertise préalable à tout procès, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.
S'agissant des dépens, l'ordonnance déférée sera confirmée pour ceux de première instance en revanche, la société COFIDIS, la société FRANFINANCE et la société CORHOFI supporteront in solidum les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Déclare sans objet la demande de révocation d'une ordonnance de clôture non rendue ;
Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;
Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum les sociétés COFIDIS, FRANFINANCE et CORHOFI aux dépens d'appel.
Le greffier, La présidente,