La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/10/2018 | FRANCE | N°17/00772

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1ère chambre a, 23 octobre 2018, 17/00772


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1ère Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 23 OCTOBRE 2018

L.V

N° 2018/













Rôle N° RG 17/00772 - N° Portalis DBVB-V-B7B-73JX







Association DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS LIBE RALES PROVENCE CORSE





C/



Florence X...





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :Me Y...

Me Z...

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 05 Décembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 15/03201.





APPELANTE



ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS

LIBERALES PROVENCE CORSE

prise en la personne de son...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1ère Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 23 OCTOBRE 2018

L.V

N° 2018/

Rôle N° RG 17/00772 - N° Portalis DBVB-V-B7B-73JX

Association DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS LIBE RALES PROVENCE CORSE

C/

Florence X...

Copie exécutoire délivrée

le :

à :Me Y...

Me Z...

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 05 Décembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 15/03201.

APPELANTE

ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS

LIBERALES PROVENCE CORSE

prise en la personne de son Président en exercice demeurant et domicilié [...]

représentée et assistée par Me Alexandrine Y..., avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

INTIMEE

Madame Florence X...

née le [...] à MARSEILLE (13000), demeurant [...]

représentée par Me Cecile Z..., avocat au barreau de MARSEILLE

assistée par Me Hubert A..., avocat au barreau de TOULOUSE,substitutée par Me Cecile Z..., avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Septembre 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame VIGNON, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de:

Madame Anne VIDAL, Présidente

Madame Danielle DEMONT, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2018.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2018,

Signé par Madame Anne VIDAL, Présidente et Madame Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Mme Florence X..., adhérente de l'Association de Gestion Agréée des Professions Libérales Provence Corse ( APLPC) depuis 1991 en sa qualité d'infirmière libérale, a quitté le département des Bouches du Rhône pour ouvrir un cabinet dans le département du Lot sur la Commune de THEGRA, dont l'installation sera effective à compter du mois de janvier 2006.

Elle a revanche maintenu son adhésion à l'APLPC.

Indiquant avoir constaté en 2014 qu'elle se trouvait exonérée du paiement de l'impôt sur le revenu compte tenu de la localisation du département du Lot en Zone de Revitalisation Rurale ( ZRR), elle a obtenu par son centre des impôts la restitution des sommes prélevées à tort pour les années 2010 à 2013.

Reprochant à l'APLPC d'avoir manqué à son devoir de conseil en ne l'informant pas de l'exonération dont elle bénéficiait, Mme X... l'a fait assigner, par exploit du 05 mars 2015, devant le tribunal de grande instance de Marseille, afin d'obtenir sa condamnation à lui régler, à titre de dommages et intérêts, les sommes réglées indûment depuis son installation dans le Lot au titre de l'impôt sur le revenu et non remboursées par le Trésor Public.

Par jugement contradictoire en date du 05 décembre 2016, le tribunal de grande instance de Marseille a:

- condamné l'APLPC à payer à Mme Florence X... la somme de 57.686 € à titre de dommages et intérêts,

- débouté Mme Florence X... du surplus de ses demandes,

- condamné l'APLPC à payer à Mme Florence X... la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Le tribunal a retenu que l'Association était débitrice d'un devoir de conseil en sus de sa mission d'assurer l'examen des déclarations quant aux anomalies formelles qu'elles sont susceptibles de contenir, que plus particulièrement il apparaissait que celle-ci procédait en 2007 à des corrections sur la déclaration 2035 de Mme X..., de sorte qu'elle exerçait une véritable vérification des déclarations et aurait donc dû informer son adhérente de l'exonération dont elle bénéficiait au titre de l'impôt sur le revenu.

Par déclaration en date du 12 janvier 2017, l'APLPC a relevé appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 30 janvier 2018, l'APLPC demande à la cour de:

- dire et juger l'appel de l'APLPC recevable et bien fondé,

- infirmer en son entier le jugement du 05 décembre 2016,

Statuant à nouveau:

- dire et juger que l'APLPC a respecté ses obligations contractuelles,

- débouter Mme Florence X... de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- la condamner au paiement de la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle rappelle qu'elle n'avait nullement reçu mandat de la part de Mme X... de tenir ou de gérer sa comptabilité, ni d'établir ses déclarations fiscales ou d'opérer pour son compte les options fiscales, étant précisé qu'elle n'a pas pour mission de se substituer à un expert-comptable, ne disposant pas de l'agrément de cette profession.

Elle expose qu'aucune lettre de mission de tenue de comptabilité n'ayant été régularisée, les seuls éléments dont elle disposait de Mme X... étaient son registre comptable (équivalent du grand livre) ainsi que sa déclaration 2035 aux fins de transmission aux services des impôts par le biais d'une télé-déclaration.

Se prévalant des dispositions de l'ancien article 1649 du CGI applicable au litige, elle précise qu'une Association de Gestion Agréée (AGA) a une mission principale clairement définie, à savoir un examen de forme des déclarations consistant dans la vérification de cohérence de la déclaration et de l'absence d'erreurs telles qu'un calcul erroné, que ladite mission peut s'accompagner de missions accessoires, comme la fourniture d'une aide personnalisée, ce qui suppose qu'elle ait été demandée par l'adhérent et qu'elle fasse l'objet d'une facturation distincte.

Elle fait valoir que:

- Mme X... tenait seule sa comptabilité et lui transmettait ses déclarations 2035 intégralement remplies, sans avoir sollicité les services d'un expert-comptable,

- le contrat de mission régularisé entre les parties était exclusivement limité à la mission obligatoire de l'association, à savoir la vérification de l'absence d'erreur matérielle et de la cohérence de la déclaration fiscale produite et de la comptabilité elle-même,

- elle n'élaborait donc pas les déclarations fiscales de son adhérente et n'avait pas à contrôler que l'intimée remplissait les conditions d'éligibilité au dispositif ZRR, contrôle qui excédait manifestement sa mission,

- Mme X... pouvait certes prétendre au bénéfice des avantages fiscaux liés à une adhésion à une AGA, principalement l'abattement fiscal de 25% qui en découle, mais cela ne signifie nullement la possibilité pour elle de bénéficier de tous les avantages fiscaux liés aux modalités d'exercice de son activité et des choix fiscaux qui peuvent en découler, accompagnement qui suppose une mission permanente de conseil et d'orientation,

- l'avantage fiscal dont elle se prévaut résulte en réalité d'une option fiscale et donc d'un choix possible, les documents transmis dans le cadre du contrôle formel ne lui permettant pas de vérifier l'éligibilité de Mme X... à un tel dispositif,

- en conseillant à Mme X... d'opter pour le régime ZRR, elle aurait excédé ses compétences mais aussi donné des informations non contrôlées, la question de l'éligibilité à un tel dispositif relevant d'une opportunité fiscale et donc de la compétence d'un expert-comptable.

Elle confirme que lors de l'examen formel réalisé en 2007, elle a effectivement relevé une possible incohérence résultant de l'absence de taxe professionnelle sur la déclaration 2035 de Mme X... et l'a ainsi interrogée sur ce point, ce qui est parfaitement conforme à sa mission.

Elle soutient avoir en outre respecté son obligation d'information dès lors que son site internet fournit à ses adhérents l'ensemble des précisions nécessaires et qu'elle organise des formations chaque année , outre l'édition d'un guide fiscal à destination de ses adhérents. Elle souligne que Mme X... a bien été destinataire des conditions d'exonération et d'obtention relatives au dispositif fiscal de ZRR, étant rappelé qu'elle n'avait pas à attirer l'attention de l'intimée sur les options fiscales offertes.

Elle fait par ailleurs observer que:

- à la lecture des déclarations fiscales établies par l'intéressée, celle-ci n'a coché aucune des mentions correspondant à une demande d'exonération d'impôt sur le revenu mais a seulement demandé le bénéfice de l'exonération de la taxe professionnelle,

- elle a attiré à plusieurs reprises l'attention de son adhérente sur la nécessité pour elle de se rapprocher de son centre des impôts afin de régulariser sa situation puisqu'elle indiquait résider en zone ZRR,

- son silence fautif est manifeste dès lors qu'elle n'a pris contact avec le service des impôts qu'en octobre 2014 perdant ainsi le bénéfice de l'exonération de 2009 à 2011,

- l'absence de démarches de Mme X... auprès de l'administration fiscale lui est exclusivement imputable d'autant qu'elle avait pris le soin de s'enquérir de l'exonération de la taxe professionnelle et aurait dû faire de même s'agissant de l'impôt sur le revenu.

Elle insiste également sur le fait qu'elle n'est pas garante des possibilités offertes par la loi fiscale en raison des modalités d'exercice professionnel de son adhérente, qu'aucune mission accessoire en une aide personnalisée n'avait été convenue et facturée, rien ne permettant d'assurer qu'elle pouvait bénéficier du régime ZRR, d'autant qu'elle ne lui a jamais indiqué qu'il s'agissait d'une création d'activité mais uniquement d'un transfert d'activité, conséquence d'un déménagement.

Mme Florence X..., dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 24 novembre 2017, demande à la cour de:

- rejeter les demandes, fins et conclusions de l'Association, confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité contractuelle de l'Association,

- accueillir l'appel incident de Mme Florence X... quant au quantum indemnitaire,

- condamner l'APLPC à verser à Mme Florence X..., à titre de dommages et intérêts, la somme de 77.586 €,

- condamner l'APLPC à verser à Mme Florence X... de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Elle rappelle qu'aux termes des articles 1649 quater F,G, H du code général des impôts ainsi que des données du contrat, l'APLPC est tenue :

- d'une mission d'assistance des adhérents,

- d'un contrôle de régularité des déclarations et doit , à cette fin, demander tous renseignement utiles de nature à établir la concordance, la cohérence et la vraisemblance entre les résultats fiscaux et la comptabilité,

- d'une information en matière de prévention des risques,

- de faire bénéficier les adhérents des avantages fiscaux ouverts par la loi.

Elle reproche à l'appelante d'avoir commis un certain nombre de manquements contractuels et plus particulièrement:

- une absence fautive d'analyse des conséquences liées au changement de lieu d'exercice: lorsqu'elle informe l'APLPC d'une activité libérale dans le Lot à compter de 2006, celle-ci ne procède à aucune analyse alors que la totalité de ce département est en ZRR, conduisant de facto à une exonération de l'impôt sur le revenu,

- une absence fautive d'analyse des conséquences de l'exonération de taxe professionnelle, bien que dûment informée de cette situation dès le 02 mai 2017,

-une absence fautive de contrôle et de conseil des années 2007 à 2014: durant cette période, l'association persiste à ne faire aucun lien entre l'absence de paiement de la taxe professionnelle et l'exonération de l'impôt sur le revenu dont elle devait bénéficier, alors qu'être accompagnée par une AGA doit permettre aux professionnels libéraux de disposer de conseils et de garanties sur un plan comptable tout en bénéficiant des avantages fiscaux offerts par la loi.

Elle précise que compte tenu de telles fautes contractuelles imputables à l'appelante, elle a été contrainte de s'acquitter, pour les années 2006 à 2010, d'un impôt sur le revenu indu pour un montant total de 57.686 €.

Elle ne partage pas l'analyse de l'APLPC quant à l'étendue de ses missions et fait observer que:

- s'il n'est pas contesté qu'il appartient aux adhérents d'établir eux-mêmes leurs déclarations, il revient à l'Association d'assurer l'examen des déclarations quant aux anomalies qu'elles sont susceptibles de contenir, outre un devoir de conseil lui imposant a minima de réaliser un contrôle de concordance, de cohérence et de vraisemblance des déclarations, en réclamant à ses adhérents tous renseignements utiles

- il ne s'agit en rien d'un choix d'optimisation fiscale dès lors qu'elle réclame uniquement l'application de la loi fiscale et non un quelconque bénéfice complémentaire,

- quant au prétendu respect de son obligation d'information, l'intimée se retranche derrière des envois non personnalisés, qui au demeurant ne lui sont jamais parvenus,

- l'arrêté du 30 décembre 2005 constatant le classement des communes en ZRR, place l'ensemble du département du Lot dans cette zone.

Elle conteste tout manquement fautif de sa part en soutenant que:

- l'absence de mention sur ses déclarations ne lui est pas imputable car elle ignorait avoir droit à une exonération totale des impôts sur le revenu pendant 5 ans et avait été uniquement informée d'une exonération de la taxe professionnelle par une autre infirmière libérale,

- elle a répondu aux demandes de l'Association et lui a toujours exposé depuis 2007 exercer dans une ZRR, sans que l'appelante ne tire aucune conséquence sur le fait que les déclarations qu'elle lui adressait n'était pas renseignée sur ce point,

- en sa qualité d'AGA, elle aurait dû faire le lien entre l'absence de paiement de la taxe professionnelle, la situation et la création de l'activité dans le Lot et la possibilité pour son adhérente de bénéficier d'autres exonérations.

Elle formule enfin un appel incident quant au quantum qui lui a été alloué par le premier juge, en réclamant une somme complémentaire de 20.000 € à titre de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral et financier.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 26 juin 2018.

MOTIFS

En l'espèce, alors qu'elle demeurait sur Marseille, Mme Florence X..., infirmière libérale, a adhéré à compter du 08 janvier 1991 à l'APLPC, association de gestion agréée par la direction générale des impôts sous le numéro 2.03.131, qu'elle a déménagé en juillet 2005 dans le Lot et a maintenu son adhésion à l'APLPC, transférant au titre de ce même exercice son cabinet médical, toujours dans le département du Lot, dont l'installation deviendra effective à compter du mois de janvier 2006.

Elle reproche à l'APLPC d'avoir commis un certain nombre de manquements contractuels consistant pour l'essentiel à ne pas l'avoir informée de l'exonération du paiement de l'impôt sur le revenu dont elle bénéficiait compte tenu de son installation dans le département du Lot, classé Zone de Revitalisation Rurale, en ne remplissant pas son rôle:

- tendant principalement à assurer la concordance, la cohérence et la vraisemblance entre les résultats fiscaux, la comptabilité établie, les déclarations de résultat et les déclarations de taxes sur le chiffre d'affaires,

- en fonction des données transmises par son adhérentes puisque l'appelante n'a ni recherché, ni donné tous les renseignements utiles au bénéfice de son adhérente.

Il est constant que l'APLPC est une structure associative ayant reçu l'agrément des services fiscaux afin de réaliser diverses missions pour ses adhérents.

En vertu de l'article 1649 quater F du code général des impôts dans sa version en vigueur jusqu'au 1er janvier 2016, une association agréée a pour objet de développer l'usage de la comptabilité, de fournir une analyse des informations économiques, comptables et financières en matière de prévention des difficultés économiques et financières ainsi que de faciliter l'accomplissement de leurs obligations administratives et fiscales notamment par les membres des professions libérales.

L'article 1649 quater H du même code ( dans sa version applicable au litige) définit ses missions comme suit:

- s'assurer de la régularité des déclarations de résultats, de taxes sur le chiffre d'affaires, de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et, le cas échéant, de revenus encaissés à l'étranger que leur soumettent leurs adhérents,

- de procéder aux contrôles de concordance, cohérence et vraisemblance des déclarations de résultats, de taxes sur le chiffre d'affaires, de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et, le cas échéant, de revenus encaissés à l'étranger.

L'appelante communique à cet égard un rapport dressé en 2007 par la Direction Générale des Finances publiques relatif à une présentation et un bilan de ces organismes agréées, aux termes duquel il ressort que ces derniers sont investis d'une mission centrale en matière de prévention fiscale consistant à vérifier, pour les adhérents qui lui ont confié la comptabilité:

- l'absence d'erreur matérielle dans le contenu porté à l'intention de l'administration fiscale,

- l'existence de documents comptables,

- la cohérence entre la déclaration fiscale produite et la comptabilité de l'entreprise elle-même.

En contrepartie, les adhérents bénéficient d'avantages fiscaux, à savoir la non application d'une majoration de 25% du bénéfice imposable.

Il s'agit là de sa mission principale d'AGA et elle peut certes exercer des missions accessoires, consistant à fournir à ses adhérents une aide personnalisée, notamment une assistance en matière fiscale et sociale, qui doit cependant avoir été expressément demandée par l'adhérent et faire l'objet d'une facturation distincte.

En l'occurrence, lors de son adhésion à l'APLPC, Mme X... ne lui a aucunement donné mandat d'exercer des missions complémentaires.

Il doit être rappelé que les seuls éléments transmis par Mme X... à l'association étaient:

- son registre comptable, équivalent du grand livre, sur lequel elle inscrivait elle-même ses écritures,

- sa déclaration 2035 aux fins de transmission au service des impôts compétent, déclaration qui était établie par l'adhérente elle-même.

En l'état de ces éléments, l'APLPC n'avait pas à tenir la comptabilité de l'intéressée mais se devait uniquement de s'assurer que cette dernière respectait ses obligations en matière fiscale en procédant à un examen formel des documents qui lui étaient transmis.

Il s'agit, en d'autres termes, d'opérer un contrôle en vue de rectifier des erreurs matérielles évidentes constatées dans les déclarations souscrites par le contribuable pour prévenir des anomalies d'ordre fiscal.

La vérification de la cohérence, de la concordance et de la vraisemblance des déclarations ne peut s'entendre que comme un examen de forme desdits documents, à savoir la mission obligatoire qui est dévolue à de telles structures, avec in fine pour objectif de faciliter les démarches auprès des administrations fiscales.

L'APLPC n'avait pas à procéder à des vérifications fiscales et à analyser les conséquences liées au changement de lieu d'exercice de Mme X..., lors de son déménagement dans le département du Lot, en se renseignant sur une éventuelle exonération du paiement de certains impôts ou taxes, dans la mesure où seul un expert-comptable, en sa qualité de professionnel de la comptabilité, est débiteur d'un devoir de conseil, ses connaissances lui permettant de donner des conseils en matière fiscale et d'orienter le choix d'imposition.

Tel n'est pas le rôle de l'APLPC, qui n'est pas un expert-comptable et n'a donc ni la qualité, ni la compétence pour déterminer si un de ses adhérents peut bénéficier d'un dispositif fiscal ou non, ce qui suppose la réalisation d'investigations complémentaires excédant le simple contrôle formel auquel elle est tenue.

En revanche, il lui appartient effectivement, en cas d'anomalie constatée dans la déclaration 2035 qui lui est adressée, d'informer son adhérent, de demander des précisions et de s'assurer que ses interventions sont suivies d'effet.

Tel a été le cas en 2007 lorsque Mme X... a envoyé une déclaration 2035 sans servir la case relative à la taxe professionnelle, situation qui a motivé un courrier en date du 06 avril 2007 de la part de l'appelante interrogeant son adhérente sur le non paiement de la taxe professionnelle, Mme X... lui répondant que son cabinet se trouvant en ZRR, elle bénéficiait d'une exonération de cette taxe.

L'APLPC a donc rempli sa mission de vérification de la cohérence entre la déclaration et la comptabilité en apportant le cas échéant des corrections de forme, afin de s'assurer du respect des exigences de l'administration fiscale. En effet, l'examen formel qu'elle a effectué cette année a révélé une possible incohérence résultant de l'absence de taxe professionnelle sur sa déclaration et elle se devait de prévenir Mme X... afin d'éviter toute difficulté ultérieure avec le service des impôts.

En revanche, il ne lui appartenait pas de vérifier si Mme X... remplissait les conditions d'éligibilité au dispositif ZRR, ce qui excédait sa mission comme impliquant des recherches d'éléments d'appréciation en dehors des seuls éléments comptables produits par son adhérente et de procéder à un contrôle de pièces qu'elle n'avait pas à sa disposition.

Mme X... ne peut davantage soutenir que l'APLPC s'engage à faire bénéficier ses adhérents des avantages fiscaux prévus par la loi pour prétendre que celle-ci se devait de la renseigner sur la possibilité de bénéficier d'une exonération du paiement de l'impôt sur le revenu, alors que l'adhésion à une association de gestion agréée permet d'être éligible à un abattement fiscal de 25% du bénéfice imposable mais n'a pas vocation à conseiller les adhérents quant aux avantages fiscaux liés aux modalités d'exercice de leur activité et aux choix fiscaux qui peuvent en découler.

Il convient en outre de relever que:

- l'appelante a adressé plusieurs courriers à Mme X... ( notamment le 28 mai 2010, 14 avril 2011 et 5 avril 2012) afin d'attirer son attention sur la nécessité de se rapprocher de son centre des impôts afin d'obtenir la confirmation d'une dérogation fiscale et relevant qu'aucune indication ne figurait sur sa déclaration 2035 justifiant sa présence en ZRR,

- l'APLPC justifie informer régulièrement ses adhérents, par le biais de son site internet, de l'édition d'un guide fiscal chaque année ainsi que d'un condensé d'informations récentes adressées chaque trimestre ' Flash d'information' , dont plus particulièrement ceux des 2ème trimestre 2005 et 3ème trimestre 2006 contiennent des éléments sur l'implantation en ZRR,

- elle n'avait aucunement à faire le lien entre le non paiement de la taxe professionnelle revendiqué par Mme X... et une éventuelle exonération du paiement de l'impôt sur le revenu, en la conseillant sur ce point, ce qui supposait qu'elle porte une appréciation sur telle ou telle opportunité fiscale en lien avec le régime ZRR, alors qu'elle n'a pas la qualité pour apprécier les conditions d'éligibilité à un tel dispositif et n'avait pas reçu communication des documents lui permettant de porter une telle appréciation,

- les imprimés 2035 qui ont été régulièrement transmis jusqu'en 2014 au centre des impôts compétent sans la moindre observation de part des services fiscaux, mettent en évidence que l'appelante a bien procédé aux contrôles de concordance, cohérence et vraisemblance des déclarations conformément à la mission qui lui était impartie en application l'article 1649 quater H du code général des impôts.

Le jugement entrepris sera donc infirmé et Mme X... sera déboutée de ses demandes à l'encontre de l'APLPC, en l'absence de manquement de contractuel de sa part.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Marseille déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau:

Constate l'absence de faute contractuelle commise par l'Association de Gestion Agréée des Professions Libérales Provence Corse,

Déboute, en conséquence, Mme Florence X... de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de l'Association de Gestion Agréée des Professions Libérales Provence Corse,

Condamne Mme Florence X... à payer à l'Association de Gestion Agréée des Professions Libérales Provence Corse la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme Florence X... aux dépens de première instance et de la procédure d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1ère chambre a
Numéro d'arrêt : 17/00772
Date de la décision : 23/10/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°17/00772 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-23;17.00772 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award