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20/09/2018 | FRANCE | N°18/04017

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre b, 20 septembre 2018, 18/04017


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE


17e Chambre B





ARRÊT AU FOND


DU 20 SEPTEMBRE 2018





N° 2018/


GP

















N° RG 18/04017 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCB6O


( et RG n°18/4019 joint)








SCP B...








C/





Hervé Y...


Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE MARSEILLE




















>



















Copie exécutoire délivrée


le :20 SEPTEMBRE 2018


à :


Me Philippe Z..., avocat au barreau de NICE





Me Caroline O..., avocat au barreau de NICE





Me Isabelle A..., avocat au barreau de NICE








Décision déférée à la Cour :





Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de N...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

17e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 20 SEPTEMBRE 2018

N° 2018/

GP

N° RG 18/04017 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCB6O

( et RG n°18/4019 joint)

SCP B...

C/

Hervé Y...

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE MARSEILLE

Copie exécutoire délivrée

le :20 SEPTEMBRE 2018

à :

Me Philippe Z..., avocat au barreau de NICE

Me Caroline O..., avocat au barreau de NICE

Me Isabelle A..., avocat au barreau de NICE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 25 Janvier 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 16/00764.

APPELANTE

SCP B..., représentée par Me Marie-Sophie B..., Mandataire judiciaire pris en sa qualité de Liquidateur judiciaire de l'Association APARAMEDIS, demeurant [...]

représentée par Me Philippe Z... de la SCP DELPLANCKE-POZZO DI BORGO-ROMETTI & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE substituée par Me Marie C..., avocat au barreau de NICE

INTIMES

Monsieur Hervé Y..., demeurant [...]

représenté par Me Caroline O..., avocat au barreau de NICE

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE MARSEILLE UNEDIC Délégation AGS CGEA de MARSEILLE, domiciliée [...], demeurant [...]

représentée par Me Isabelle A..., avocat au barreau de NICE substitué par Me Vanessa D..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Juin 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:

Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller

Madame Sophie PISTRE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Pascale ROCK.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Septembre 2018.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Septembre 2018

Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Madame Caroline LOGIEST, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Monsieur Hervé Y... a été Président, du 15 janvier 2005 au 30 juin 2012, de l'Association PARA MEDICALE DE SOINS (APARAMEDIS) gérant un service de soins infirmiers à domicile pour personnes âgées (SSIAD). Son épouse, Madame Corinne E..., a été nommée à son tour Présidente de l'Association le 1er juillet 2012.

Madame Corinne E... agissant en qualité de Présidente de l'Association APARAMEDIS a signé le 1er juin 2012 un contrat de travail à durée indéterminée avec Monsieur Hervé Y..., employé en qualité de cadre administratif, niveau 2, Responsable de l'établissement, en contrepartie d'une rémunération mensuelle de 2408,44 €, outre la majoration spécifique de cadre, une prime d'ancienneté de 7% et une prime décentralisée d'un maximum de 5%.

Il lui a été confié, par délégation de pouvoir en date du 1er juillet 2012, la gestion comptable et financière de l'association.

Ensuite de difficultés internes à l'association conduisant à la paralysie de son fonctionnement, Maître Nathalie F... a été désignée, par ordonnance de référé du 14 mars 2014 du tribunal de grande instance de Nice, administrateur provisoire de l'association. Monsieur G... a été nommé, par décision de l'Agence Régionale de Santé PACA (ARS PACA) en date du 17 avril 2015, administrateur provisoire du service de soins infirmiers à domicile de l'Association APARAMEDIS.

Par jugement du 29 février 2015, le tribunal de grande instance de Nice a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire de l'Association APARAMEDIS et désigné la SCP B... représentée par Maître Marie-Sophie B... en qualité de mandataire judiciaire et Maître Marie-Claire P... en qualité d'administrateur judiciaire. Par jugement du 27 juin 2016, le même tribunal a ordonné la cession des actifs de l'Association APARAMEDIS au profit de l'association UNISAD, puis a prononcé la liquidation judiciaire de l'Association APARAMEDIS par jugement du 6 mars 2017 et désigné la SCP B... en qualité de liquidateur judiciaire.

Monsieur Hervé Y... a été convoqué, par courrier du 18 décembre 2015, à un entretien préalable pour le 4 janvier 2016 avec mise à pied à titre conservatoire. Il a été licencié pour fautes graves selon signification par acte d'huissier de justice en date du 21 janvier 2016 de la lettre de licenciement notifiée par Maître Nathalie F... ès qualités.

Contestant le bien-fondé de la mesure ainsi prise à son encontre et réclamant le paiement d'indemnités de rupture, de dommages intérêts pour harcèlement moral et de dommages intérêts pour non respect de l'obligation de sécurité, Monsieur Hervé Y... a saisi la juridiction prud'homale par requête du 13 juin 2016.

In limine litis, la SCP B... ès qualités de mandataire liquidateur de l'Association APARAMEDIS a soulevé l'incompétence matérielle du conseil de prud'hommes au profit du tribunal de grande instance de Nice au motif de l'absence d'un contrat de travail ayant lié Monsieur Hervé Y... à l'Association.

Par jugement du 25 janvier 2018, le conseil de prud'hommes de Nice a mis hors de cause Maître Nathalie F..., administrateur provisoire, et Maître Marie-Claire P..., administrateur judiciaire, a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la SCP B... ès qualités et l'Unedic, a jugé que Monsieur Hervé Y... avait la qualité de salarié, a mis les parties en demeure de conclure au fond, a renvoyé la cause et les parties à l'audience du bureau de jugement du 26 avril 2018 à 9 heures et a réservé les dépens.

La SCP B... ès qualités de mandataire liquidateur de l'Association APARAMEDIS a formé un recours à l'encontre du jugement de compétence par déclaration en date du 2 mars 2018. La déclaration d'appel sur compétence a été enregistrée sous les numéros 18/04017 et 18/04019. La SCP B... a été autorisée à assigner à jour fixe, par ordonnance présidentielle du 16 mars 2018, à l'audience du 7 juin 2018 à 9 heures.

La SCP B... ès qualités de mandataire liquidateur de l'Association APARAMEDIS a assigné respectivement Monsieur Hervé Y... et le CGEA-AGS de Marseille à comparaître à l'audience du 7 juin 2018 à 9 heures par actes d'huissier de justice en date du 27 mars 2018 et du 29 mars 2018.

La SCP B... représentée par Maître Marie-Sophie B..., ès qualités de mandataire liquidateur de l'Association APARAMEDIS, conclut, aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 12 avril 2018, à la confirmation du jugement rendu en ce qu'il a mis hors de cause Maître P... ès qualités d'administrateur judiciaire et Maître F... ès qualités d'administrateur provisoire de l'Association APARAMEDIS du fait de la liquidation judiciaire de ladite association en date du 6 mars 2017, à l'infirmation du jugement rendu en ce qu'il a :

-rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la SCP B... ès qualités et l'Unedic,

-jugé que Monsieur Hervé Y... avait la qualité de salarié,

-mis les parties en demeure de conclure au fond,

-renvoyé la cause et les parties à l'audience du bureau de jugement du 26 avril 2018 à 9 heures,

-débouté la SCP B... ès qualités de ses demandes de condamnation de Monsieur Hervé Y... à lui payer la somme de 15000 € pour procédure abusive sur le fondement combiné des dispositions des articles 32-1 du code de procédure civile et 1240 du code civil et de condamnation de Monsieur Hervé Y... à lui payer la somme de 4500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

et statuant à nouveau :

à ce qu'il soit jugé que Monsieur Hervé Y... ne rapporte pas la preuve de sa qualité de salarié de l'Association APARAMEDIS, à ce qu'il soit jugé que le conseil de prud'hommes était incompétent au profit du tribunal de grande instance de Nice auquel le présent litige sera renvoyé, à la condamnation de Monsieur Hervé Y... à lui payer la somme de 15000 € pour procédure abusive sur le fondement combiné des dispositions des articles 32-1 du code de procédure civile et 1240 du code civil et à la condamnation de Monsieur Hervé Y... à lui payer la somme de 4500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le mandataire liquidateur de l'Association APARAMEDIS fait valoir que Monsieur Hervé Y..., qui jusqu'alors avait été le Président de l'association de janvier 2005 à juin 2012, a été nommé par son épouse, Madame E... épouse Y..., en qualité de cadre administratif, responsable du service de soins infirmiers à domicile (SSIAD), que Madame E... épouse Y... a établi -en sa qualité de Présidente de l'association et au profit de son époux- un contrat de travail alors que Monsieur Y... était toujours Président de l'association ce qui ôte toute possibilité de reconnaissance du lien de subordination, que la Cour ne pourra que constater le défaut de capacité à contracter pour le compte de l'Association APARAMEDIS de Madame E... épouse Y... au jour où a été conclu le contrat de travail entre l'association et Monsieur Y..., que dans les faits Monsieur Hervé Y... est toujours demeuré le dirigeant de l'association, son épouse ne jouant qu'un rôle fictif, qu'en effet, dans le cadre des missions ainsi dévolues par son épouse, Monsieur Hervé Y... disposait d'une très large autonomie, outre qu'il bénéficiait d'une délégation de pouvoir particulièrement étendue, qu'il a toujours continué à diriger l'association, que pour preuve au 31 janvier 2014 il figurait dans les registres de la Préfecture comme personne chargée de l'administration de l'association en qualité de membre du bureau, que par ailleurs, avantageant outrageusement son époux, Madame E... épouse Y... a reconnu à Monsieur Hervé Y... une ancienneté de 28 ans (avenant n° 1), puis a revu son indice de base à la hausse (avenant n° 2), que Monsieur Claude H..., expert comptable intervenant pour le compte de l'APARAMEDIS, confirme qu'il n'a jamais eu affaire avec Madame E... (pas plus qu'avec les membres du conseil d'administration) et que ses seuls interlocuteurs ont été Messieurs Y... et G... (administrateur provisoire), qu'aucun élément du dossier ne vient démontrer que Monsieur Hervé Y... aurait agi dans le cadre d'un quelconque lien de subordination, tant à l'égard de son épouse qu'à l'égard ensuite de l'administrateur provisoire de l'APARAMEDIS, Maître F..., ainsi qu'à l'égard de l'administrateur provisoire du SSIAD, Monsieur G..., qu'il convient de relever que le fait que Monsieur Hervé Y... dresse, en conseil d'administration, un état des lieux de l'association ne démontre aucunement qu'il répondait à des instructions qui lui auraient été données, que courant 2015, dans le cadre de la procédure prud'homale diligentée par Monsieur I... contre l'APARAMEDIS, Monsieur Y... a exigé que les éléments de la procédure lui soient transmis, agissant pour que le SSIAD soit appelé en la cause, donnant des instructions précises quant aux actions à suivre et a assisté à toutes les audiences du conseil de prud'hommes, que toujours en 2015, Monsieur Y... a demandé à Monsieur G... qu'il négocie le départ de Madame J..., avant finalement d'exiger du collaborateur de Maître F...-M. DOMINGUES- qu'il procède au licenciement de la salariée, que Monsieur Hervé Y... n'agissait aucunement sous la subordination de Maître F..., que le fait qu'une procédure de licenciement ait été engagée et des documents de fin de contrat remis à Monsieur Hervé Y... ne démontre nullement sa qualité de salarié, ce d'autant plus que la lettre de licenciement indique précisément que la qualité de salarié est contestée, que faute pour Monsieur Hervé Y... de prouver effectivement sa qualité de salarié, la Cour ne pourra que déclarer la juridiction prud'homale matériellement incompétente au profit du tribunal de grande instance de Nice, subsidiairement, que la Cour ne pourra que constater la nullité du contrat de travail conclu entre Monsieur Hervé Y... et l'Association APARAMEDIS à défaut de capacité de Madame E... épouse Y... à contracter pour le compte de l'APARAMEDIS au jour où a été conclu le contrat, que cette demande n'est pas prescrite puisque le contrat de travail n'est pas nul seulement au jour de sa signature mais tout au long de la relation, que l'exception de nullité est perpétuelle, que faute de contrat de travail, la Cour ne pourra que déclarer incompétent le conseil de prud'hommes au profit du tribunal de grande instance, qu'en outre, si la Cour entendait statuer sur le fond du dossier, elle devrait nécessairement renvoyer les parties à une audience ultérieure en application de l'article 76 du code de procédure civile.

Monsieur Hervé Y... conclut, aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 28 mai 2018, à la confirmation du jugement du conseil de prud'hommes de Nice en date du 25 janvier 2018 en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par l'employeur et mis en demeure les parties de conclure au fond pour les renvoyer devant le bureau de jugement, à ce que soient rejetées toutes les demandes, fins et conclusions adverses, à ce que soit rejetée l'exception d'incompétence au profit du tribunal de grande instance de Nice soutenue par les parties adverses, à ce que soit rejetée la demande de nullité du contrat de travail et subsidiairement, à ce qu'il soit jugé que Monsieur Y... démontre l'existence d'une relation de travail, le montant de sa rémunération, sa qualification ainsi que son temps de travail, ledit contrat de travail ayant été exécuté, et à la condamnation de l'employeur et du CGEA AGS de Marseille au paiement d'une somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile à son profit.

Monsieur Hervé Y... expose qu'en raison des prétentions financières des époux I... risquant de compromettre l'existence même de l'association, son épouse et lui ont sollicité la désignation d'un administrateur provisoire, demande rejetée dans un premier temps par ordonnance du 26 décembre 2012, que Maître Nathalie F... désignée administrateur provisoire de l'Association APARAMEDIS par ordonnance de référé du tribunal de grande instance de Nice en date du 14 mars 2014 n'a pas défendu suffisamment les intérêts de l'association et de son SSIAD, qu'elle ne pouvait en effet considérer que les injonctions et recommandations de l'Agence Régionale de Santé PACA étaient justifiées et se devait de les combattre, que Maître F... n'a pas respecté les délais impartis par l'ARS PACA et a choisi la facilité consistant à laisser désigner un administrateur du SSIAD par l'ARS qui avait la volonté de "liquider" l'Association APARAMEDIS, que l'ARS PACA a rendu une décision en date du 17 avril 2015 portant nomination d'un administrateur provisoire au sein du SSIAD, que dans les faits l'administrateur provisoire du SSIAD, Monsieur Max G..., n'avait pas pour autre objectif que d'éliminer une part non négligeable de la masse salariale de l'établissement de l'Association, en s'en prenant à certains des salariés (dont le concluant), qui qualifieront les agissements de celui-ci de harcèlement moral et que le surcoût annuel de l'administration provisoire a fait fondre les fonds disponibles du SSIAD.

Monsieur Hervé Y... fait valoir que Maître F... remet en cause pour la première fois sa qualité de salarié dans la lettre de licenciement tout en lui reprochant de prétendus actes d'insubordination, que ces affirmations contradictoires sont un aveu quant à l'existence évidente d'un lien de subordination, qu'il est constant que jamais la qualité de salarié du concluant n'a été remise en cause un seul instant, qu'il est logique qu'en sa qualité de cadre administratif responsable de l'établissement, il se soit vu confier des responsabilités dont l'importance impliquait une certaine indépendance dans l'organisation de son emploi du temps et dans la possibilité de prendre certaines décisions de façon autonome, que dans le courant du mois de juin 2012, il a travaillé avec Madame I... partant à la retraite puisqu'il la remplaçait au poste de cadre administratif, qu'à compter du 1er juillet 2012, le concluant a été sous la subordination juridique de la Présidente et du conseil d'administration de l'Association APARAMEDIS, que le compte rendu du conseil d'administration du 22 octobre 2012 permet de démontrer que Madame E... dirigeait effectivement l'Association et qu'il existait bien un lien de subordination entre le salarié et l'Association APARAMEDIS (et son conseil d'administration), qu'il rendait en effet des comptes au conseil d'administration puisqu'il présentait un bilan provisoire et que le budget 2013 était approuvé, étant précisé que Monsieur Y... ne participait pas à ce vote, n'étant pas membre du conseil d'administration, qu'il ressort également de ce compte rendu du conseil d'administration que la Présidente lui donnait des ordres, que le concluant était également sous lien de subordination de l'Association représentée par le cabinet d'administrateurs judiciaires F..., ainsi qu'en témoignent les nombreux échanges de courriels versés aux débats, que le concluant recevait également des instructions de Monsieur G..., qu'il est donc démontré que Monsieur Y... a agi sous la subordination juridique de l'Association APARAMEDIS (la Présidente et le conseil d'administration), puis de Maître F... et enfin de Monsieur G..., que par conséquent le concluant avait bien la qualité de salarié, que le jugement de première instance doit être confirmé, que le contrat de travail a bien été régularisé le 1er juillet 2012 mais avait été préparé par la Direction précédente (Madame I...) qui l'avait daté du 1er juin 2012, que de ce fait il existe une erreur de date et que le contrat a bien été signé par Madame E... en sa qualité de Présidente le 1er juillet 2012, que le prononcé de la nullité du contrat de travail n'aurait aucun intérêt ni impact sur la présente procédure car le concluant démontre l'existence de la relation de travail, que Maître Nathalie F... n'avait pas qualité pour le licencier et que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

L'Unedic Délégation AGS CGEA de Marseille conclut, aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 23 avril 2018, à ce que soit constatée son intervention forcée et l'y dire bien fondé, à titre principal, à l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la SCP B..., mandataire judiciaire, jugé que Monsieur Hervé Y... avait la qualité de salarié, mis les parties en demeure de conclure au fond et renvoyé les parties à l'audience du bureau de jugement du 26 avril 2018, et statuant à nouveau: à ce qu'il soit jugé que Monsieur Hervé Y... ne justifie pas de la qualité de salarié de l'Association APARAMEDIS, à ce qu'il soit jugé que le conseil de prud'hommes était incompétent au profit du tribunal de grande instance de Nice, à titre infiniment subsidiaire si la Cour confirme le jugement ayant reconnu la qualité de salarié : à ce que l'affaire soit renvoyée à telle audience qu'il plaira après injonction d'avoir à conclure sur le fond, en tout état de cause, à ce qu'il soit jugé que le concluant ne garantit pas la somme réclamée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, à ce qu'il soit dit qu'aucune condamnation ne peut être prononcée à l'encontre des concluants et que la décision à intervenir ne peut tendre qu'à la fixation d'une éventuelle créance en deniers ou quittance, à ce qu'il soit jugé que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement, à ce qu'il soit dit que la décision à intervenir sera déclarée opposable au concluant dans les limites de la garantie et que le CGEA ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-6 et L.3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L.3253-15, L.3253-18, L.3253-19, L.3253-20, L.3253-21 et L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail et à ce qu'il soit statué ce que de droit en ce qui concerne les dépens.

Le CGEA fait valoir que Monsieur Hervé Y... est toujours demeuré le dirigeant de l'association, son épouse ne jouant qu'un rôle fictif, qu'il disposait d'une délégation de pouvoir particulièrement étendue au point de détenir quasiment tous les pouvoirs au sein de l'association, que Monsieur Hervé Y..., alors qu'il était toujours Président de l'Association APARAMEDIS le 1er juin 2012, s'est vu conférer un contrat de travail, que la qualité de salarié de Monsieur Hervé Y... a été clairement remise en cause par Maître F... dans la lettre de licenciement, que Maître F... avait toute compétence pour rompre le contrat de travail (au demeurant fictif) de Monsieur Hervé Y..., que Monsieur Hervé Y... a exercé dans les faits tous les pouvoirs du Président, pouvoirs qui étaient les siens avant la conclusion du contrat de travail, au travers duquel il s'est vu conférer une ancienneté de 28 ans, outre un statut très élevé, que Monsieur Hervé Y... ne démontre pas l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui aurait eu le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, que la juridiction prud'homale est matériellement incompétente au profit du tribunal de grande instance de Nice, que le contrat de travail est nul car à la date de sa signature, Madame E... n'avait pas qualité pour signer pour le compte de l'Association APARAMEDIS et, si la Cour entend statuer sur le fond du dossier, qu'elle devra nécessairement inviter les parties à conclure au fond et renvoyé à une audience ultérieure en application de l'article 76 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, il y a lieu de se référer au jugement du conseil de prud'hommes et aux écritures régulièrement signifiées.

SUR CE :

Les deux procédures d'appel enregistrées sous les numéros 18/04017 et 18/04019 concernent deux appels identiques formés par la SCP B... ès qualités à l'encontre du jugement en date du 25 janvier 2018. Il convient, pour une bonne administration de la justice, de les joindre sous le numéro 18/04017 pour qu'il soit statué par le présent arrêt.

En premier lieu, en l'état de la liquidation judiciaire prononcée en date du 6 mars 2017 à l'égard de l'Association APARAMEDIS, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a mis hors de cause Maître Marie-Claire P... ès qualités d'administrateur judiciaire et Maître Nathalie F... ès qualités d'administrateur provisoire.

S'il existe un contrat de travail écrit en date du 1er juin 2012 prévoyant l'embauche de Monsieur Hervé Y... en qualité de cadre administratif, responsable de l'établissement, ce contrat n'a cependant pas été valablement conclu puisqu'il a été signé par Madame Corinne E... agissant en qualité de Présidente de l'Association APARAMEDIS, alors que cette dernière n'était pas la Présidente de l'Association à cette date. Il est constant en effet que Monsieur Hervé Y... a été le Président de l'Association APARAMEDIS du 15 janvier 2005 au 30 juin 2012, et que sa femme, Madame Corinne E... épouse Y..., est devenue à son tour Présidente de l'Association à compter du 1er juillet 2012. Cette dernière n'avait donc pas la capacité à contracter pour le compte de l'Association APARAMEDIS à la date du 1er juin 2012.

Monsieur Hervé Y... ne peut prétendre qu'il s'agit d'une erreur de date alors qu'il résulte de la déclaration unique d'embauche, effectuée le 1er juin 2012, qu'il a bien été embauché à compter du 1er juin 2012 à 8 heures. Par ailleurs, alors que le contrat de travail en date du 1er juin 2012 prévoyait l'embauche de Monsieur Hervé Y... avec une ancienneté de 7 % à compter du 1er juin 2012, un premier avenant audit contrat en date du 9 juillet 2012 a expressément prévu la modification de la reprise d'ancienneté du salarié au 1er juin 2012 ("28 ans et non 7 ans au 01/06/2012 avec changement le 01/07/2013").

Pour autant, la déclaration unique d'embauche et les bulletins de salaire établis au nom de Monsieur Hervé Y... laissent présumer que celui-ci bénéficiait d'un contrat de travail apparent. Il appartient au représentant légal de l'Association APARAMEDIS, qui conteste l'existence du contrat de travail, de démontrer son caractère fictif.

Si les premiers juges ont relevé que le poste de cadre administratif, responsable du SSIAD, n'avait pas été créé spécifiquement pour Monsieur Hervé Y... mais était devenu vacant par suite du départ à la retraite de Madame I..., il ne peut pour autant en être déduit que les missions correspondant à ce poste s'exerçaient sous la subordination de l'Association APARAMEDIS. Il ressort des différentes pièces versées par les parties que Madame Jacqueline I... était membre fondateur de l'Association en 1984, également responsable gestionnaire comptable et financier de l'Association et Présidente jusqu'en 1992, que son époux, Monsieur Rodolphe I..., assumait les fonctions de conseiller technique dans le domaine juridique et a occupé le poste d'infirmier coordinateur, responsable du SSIAD, du 1er janvier 1986 au 6 novembre 2004 (jusqu'à son arrêt de travail pour maladie), que Madame Jacqueline I... a pris sa suite et est devenue responsable du SSIAD à compter du 1er janvier 2005 jusqu'à son départ à la retraite le 30 juin 2012, qu'il a été jugé par le conseil de prud'hommes de Nice, par jugement de départage du 9 mars 2016, que Monsieur Rodolphe I... bénéficiait d'une totale indépendance dans l'exécution de ses fonctions de responsable du SSIAD, incompatible avec l'existence d'un lien de subordination et d'un contrat de travail, que Madame Jacqueline I... et Monsieur Rodolphe I..., respectivement secrétaire et vice-président de l'Association (conseil d'administration du 22 octobre 2012), ont engagé des démarches en Préfecture pour modifier la composition du bureau et la Présidence de l'Association, entraînant la paralysie du fonctionnement de l'association nécessitant la désignation d'un administrateur provisoire, de même que l'Agence Régionale de Santé PACA désignait un administrateur provisoire par décision du 17 avril 2014 après avoir constaté, d'une part, des dysfonctionnements et irrégularités dans la gestion administrative et budgétaire de l'association et, d'autre part, l'existence de

« dissensions internes entre deux couples antagonistes qui s'en disputent la gouvernance (les époux I... et les époux Y...) » (courrier de l'ARS du 1er avril 2014 et rapport d'inspection du 14 mars 2014). Il s'ensuit que le poste de cadre administratif a été occupé, du 1er janvier 2005 au 30 juin 2012, par Madame Jacqueline I..., membre fondateur, gestionnaire et dirigeante de l'Association, ayant pris la suite de son époux, Monsieur Rodolphe I..., dont il a été jugé qu'il agissait en dehors de tout lien de subordination, le couple I... continuant, après juin 2012, à revendiquer la gouvernance de l'Association, et que, dans ces circonstances, il n'est pas démontré que les missions de cadre administratif, responsable du SSIAD, exercées par Madame I... du 1er janvier 2005 jusqu'au 30 juin 2012, ont été accomplies dans le cadre d'un lien de subordination.

L'inspection régionale de l'ARS PACA observait, dans son rapport provisoire du 14 mars 2014 qu' « il n'y a pas d'étanchéité entre la composition du bureau de l'association et le personnel intervenant au sein du SSIAD. Ainsi, des membres du bureau ont pu occuper parallèlement des fonctions au sein du SSIAD (exemple, les époux I...), ou bien basculer de l'un à l'autre (exemple, Monsieur Y...). Ce fonctionnement n'apporte pas de garantie suffisante pour éviter d'éventuels conflits d'intérêts, d'autant que le procès-verbal du conseil d'administration du 22 octobre 2012 met en évidence des dissensions importantes entre les anciens dirigeants (époux I...) et les nouveaux gestionnaires' » et rappelait que « l'article D.312-3 du code de l'action sociale et des familles ne prévoit pas de poste de direction dans les SSIAD et dispose que la gestion du service doit être confiée à l'infirmier coordinateur. De ce fait, le SSIAD ne peut rémunérer de personnel administratif de niveau 2 et faisant fonction de responsable du service' ».

Les premiers juges ont relevé à tort que la procédure de licenciement engagée à l'encontre de Monsieur Hervé Y... et les documents sociaux de fin de contrat concrétisent l'existence d'une relation salariale, alors qu'en présence d'un contrat de travail apparent, la SCP B... ès qualités n'avait d'autre choix, dans le but de préserver ses intérêts et ceux de l'Association, que d'initier la procédure de licenciement. Les griefs exprimés dans la lettre de licenciement quant à des fautes graves reprochées à Monsieur Hervé Y... et son "insubordination" sont énoncés pour justifier la mesure de licenciement, sans qu'ils constituent une reconnaissance de l'existence du contrat de travail que le mandataire liquidateur a clairement mis en cause dans la lettre de licenciement du 19 janvier 2016, en ces termes : « Je vous rappelle vous avez été embauché par votre propre épouse' Vous avez bénéficié en outre d'une délégation totale de pouvoir donnée par votre épouse, Présidente de l'Association, Mme Corinne E...' Vous avez donc oeuvré depuis lors sans aucun lien de subordination' L'absence totale de lien de subordination vous a donc permis d'oeuvrer pendant des années sans aucun contrôle'' ».

La SCP B... ès qualités de liquidateur de l'Association APARAMEDIS fait valoir que Monsieur Hervé Y..., qui était le Président de l'Association jusqu'en juin 2012, est resté au-delà de cette date le dirigeant de l'Association, disposant d'une très large autonomie.

Il bénéficiait en effet d'une délégation de pouvoir accordée le 1er juillet 2012 par Madame Corinne E..., Présidente de l'Association pour le conseil d'administration, délégation de pouvoir particulièrement étendue puisque Monsieur Y... disposait des pouvoirs suivants :

«1- la gestion comptable et financière de l'établissement

-Prévision budgétaire et bilan

-Gestion comptable

-Gestion et contrôle des achats et dépenses

-Relation avec les organismes de tutelles et de contrôle

-Gestion des litiges et décisions correspondantes

-Gestion des moyens matériels en collaboration avec le Cadre Infirmier Coordinateur dans ses domaines de compétences

-Gestion des biens immobiliers

2- la gestion du SSIAD en tant qu'établissement médico-social

En collaboration avec le Cadre Infirmier Coordinateur vous aurez la responsabilité des relations avec les organismes de sécurité sociale, de tutelle et de contrôle médical.

De même en collaboration avec la Présidente, vous aurez la responsabilité de la gestion des places du SSIAD et de toute demande d'extension de capacité que vous instruirez en lien avec le Cadre Infirmier Coordinateur pour ce qui est de son domaine.

3- la gestion du personnel

En lien avec le Cadre Infirmier Coordinateur qui sera votre collaborateur privilégié du fait de sa position conventionnelle de Cadre, vous assurerez par délégation du conseil d'administration la charge totale de la gestion du personnel à tous les niveaux.

-Accueil et entretien d'embauche en collaboration avec le Cadre Infirmier Coordinateur

-Accueil et accompagnement des stagiaires avec délégation au Cadre Infirmier Coordinateur pour ce qui est de son domaine

-Embauche des personnels

-Définition des salaires et gestion de la paye

-Gestion des dossiers du personnel

-Définition des rôles et tâches de chaque salarié avec mise en place de fiches de poste

-Relation avec les organismes sociaux (URSSAF, ASSEDIC, DDTE')

-Gestion de l'information en collaboration avec le Cadre Infirmier Coordinateur

-Pouvoir disciplinaire par délégation du conseil d'administration en collaboration avec le Cadre Infirmier Coordinateur et en conformité avec la CCN51.

Cette liste de délégation n'est pas limitative et correspond à la gestion et au suivi total du personnel de l'établissement par délégation du conseil d'administration et de la Présidente.

4- l'étendue de la délégation

Comme il se doit vous aurez en tant que Directeur une large autonomie. Celle-ci sera compensée par un échange constant avec la Présidente pour toute question importante au niveau du personnel, des patients pris en charge et de l'évolution du SSIAD.

Vous conserverez en outre par délégation votre totale autonomie de gestion financière caractérisée par votre droit à signature par délégation du Conseil d'Administration et de la Présidente ».

Il était également précisé, dans l'extrait de la réunion extraordinaire du conseil d'administration en date du 1er juillet 2012 que Monsieur Hervé Y... bénéficiait, outre de la délégation de pouvoir, de « l'autorisation de signature à la banque et l'autorisation d'effectuer toutes les opérations bancaires ».

Pour justifier que Monsieur Hervé Y... dirigeait en toute indépendance l'Association APARAMEDIS et que Madame Corinne E..., pourtant Présidente, n'intervenait pas dans les affaires de l'Association, la SCP B... ès qualités produit les éléments suivants :

-des courriels de Hervé Y... adressés au mandataire liquidateur et à son avocat (pièces 14), dont il résulte que Monsieur Hervé Y... est intervenu activement dans la défense de l'Association APARAMEDIS, dans le cadre des procédures opposant Monsieur I... à l'Association (procédure prud'homale, TASS) ; Monsieur Hervé Y... a demandé que le SSIAD soit appelé en la cause devant le TASS (courriel du 24 février 2015), que l'association représentée par le mandataire liquidateur "(l') accompagne sur (sa) plainte", demandé une confirmation écrite auprès de la CPAM de l'existence d'une enquête administrative à l'encontre de Monsieur I... (courriel du 1er décembre 2014), demandé auprès du mandataire et de son avocat d'avoir une copie des conclusions devant le conseil de prud'hommes et de connaître "la stratégie envisagée" (courriel du 23 mars 2015) ;

-un procès verbal d'audition de Monsieur Hervé Y... devant les services de gendarmerie à la suite de la plainte pour vol déposée contre lui par les époux I... ; Monsieur Hervé Y... a déclaré devant les gendarmes, le 29 janvier 2014, que les époux I... avaient convoqué irrégulièrement une assemblée le 23 novembre 2013 et désigné en toute irrégularité un nouveau bureau, validé au niveau de la Préfecture, que lorsqu'il a appris cela, Monsieur Hervé Y... a "immédiatement téléphoné à la Préfecture'", que les époux I... s'étant appropriés les locaux de l'Association et du SSIAD, Monsieur Hervé Y... a "afin de garantir la continuité du service, conservé du matériel informatique, un disque dur, un ordinateurs et divers documents'";

-une plainte déposée par Monsieur Hervé Y... devant le Procureur de la République de Nice le 12 novembre 2014 à l'encontre des époux I... pour faux et usage de faux pour l'utilisation de sa signature scannée sans son autorisation alors qu'il était Président de l'Association ; dans le cadre de cette plainte, Monsieur Hervé Y... a précisé que c'était à sa demande et celle de son épouse qu'avait été désigné un administrateur provisoire de l'Association et il a dénoncé les man'uvres des époux I... mettant en péril financier grave l'Association ;

-un courrier du 18 septembre 2015 adressé par Monsieur Hervé Y... dans des termes vifs à Monsieur Max G..., administrateur provisoire du SSIAD, pour lui demander une négociation avec Madame J... en faveur du départ de cette dernière "dans les meilleures conditions mais rapide voire immédiat" ;

-un courriel du 23 septembre 2015 de Monsieur Hervé Y... adressé au cabinet du mandataire liquidateur pour demander le licenciement pour faute de Madame J... ;

-un courrier du 20 janvier 2016 adressé par Monsieur Hervé Y... au cabinet F... pour demander la convocation d'une assemblée générale, transmettant au mandataire liquidateur les candidatures de trois personnes déclarant souhaiter devenir membre du bureau et l'une d'entre elles Président de l'Association et demandant la "radiation définitive des époux I...".

Il résulte des éléments ainsi versés par le mandataire liquidateur que Monsieur Hervé Y..., disposant d'une très large délégation de pouvoir, dirigeait l'association en dehors de toute instruction ou de tout contrôle de la Présidente de l'Association ou du conseil d'administration.

Monsieur Hervé Y..., aux fins de contredire les éléments versés par le mandataire liquidateur, verse notamment les éléments suivants :

-le procès-verbal du conseil d'administration de l'Association du 22 octobre 2012, -des courriels échangés avec l'étude F... et le commissaire aux comptes ainsi qu'avec Monsieur G...,

-les attestations de Mesdames Déborah K..., Josette L... et Q... M..., anciennes salariées de l'Association APARAMEDIS qui, d'une part, dénoncent des agissements de Monsieur G... ayant selon elles porté préjudice à l'Association et, d'autre part, précisent que « Monsieur Y... recevait ses instructions directement de Monsieur G... et qu'il s'y conformait ».

S'il ressort des courriels versés par Monsieur Hervé Y... qu'il répondait aux demandes de la SCP B... et sollicitait l'accord du mandataire liquidateur sur la gestion de l'Association, il ne peut en être déduit qu'il était soumis par un lien de subordination au représentant légal de l'Association APARAMEDIS ou à l'administrateur provisoire du SSIAD alors qu'il était tenu, en sa qualité de dirigeant de fait de l'Association APARAMEDIS, de respecter les décisions de justice et de l'ARS PACA quant à la gestion et l'administration de l'Association et donc de se soumettre à l'autorité des administrateurs désignés. Les témoignages cités ci-dessus et versés par Monsieur Y... ne font que traduire le respect par Monsieur Hervé Y... des décisions prises par les représentants légaux de l'Association APARAMEDIS et du SSIAD.

La Cour observe d'ailleurs, à travers les courriels ainsi versés par Monsieur Hervé Y... que celui-ci était le seul interlocuteur du cabinet F... et de Monsieur G... . Monsieur Hervé Y... précisait d'ailleurs, dans un courriel du 19 mars 2014 adressé à Maître Nathalie F... que « (son) épouse la "Présidente" est difficile à joindre même sur les portables, son poste de fonctionnaire à Monaco est très prenant... », même s'il ajoutait qu' « elle se rendra disponible pour vous rencontrer à votre convenance ».

L'expert comptable, Monsieur Claude H..., précise également dans une attestation du 1er septembre 2017 que « lors de (ses) interventions auprès de l'Association APARAMEDIS, (il n'a) eu de rendez-vous ou de contact téléphonique qu'avec Monsieur Y... et Monsieur G... et (qu'il n'a) jamais rencontré Madame E..., ni conversé avec elle par téléphone ». Le courrier recommandé adressé parallèlement à un courriel du 6 janvier 2016 par Madame Corinne E... à Monsieur Claude H..., versé en pièce 59 par Monsieur Hervé Y..., lequel était alors mis à pied à titre conservatoire, est insuffisant à justifier que Madame Corinne E... épouse Y... ait été en contact régulier tant avec l'expert comptable de l'Association qu'avec le cabinet F... et l'administrateur provisoire.

Quant au procès verbal du conseil d'administration du 22 octobre 2012, il mentionne certes que Madame Corinne E... dirige la séance en qualité de Présidente, que Monsieur Hervé Y... a « dressé le bilan provisoire sur neuf mois du fonctionnement du SSIAD », budget approuvé par le conseil d'administration, a présenté un "état des lieux" et répondu à des questions de la Présidente (sur l'embauche d'une salariée en CDD alors qu'une autre a bénéficié d'un CDI) et à des questions de Madame Jacqueline I... (sur le non recours à la société "Appel médical", sur le fond d'une procédure de licenciement de M. N..., sur sa demande d'obtenir le budget complémentaire) et s'est vu rappeler par la Présidente que « toute demande émanant d'un membre du Conseil d'Administration aurait dû lui être adressée ».

Cependant, il ressort de l'ensemble du compte rendu du conseil d'administration du 22 octobre 2012 que cette séance faisait suite au changement de la composition du bureau de l'Association et à l'embauche de Monsieur Hervé Y... ayant bénéficié d'une délégation de pouvoir étendue, et qu'il s'agissait, en l'état du conflit largement rapporté dans le compte rendu, opposant le couple I... au couple E...-Y..., d'asseoir l'autorité de la nouvelle gouvernance de l'Association et de mettre en cause l'ancienne gouvernance (mise en cause du recours au crédit-bail pour l'acquisition de véhicules ; mention de la disparition de dossiers, du disque dur externe et d'une partie du contenu de l'ordinateur ; mise en avant d'irrégularités dans la gestion et du nombre de congés payés à Madame I..., présentation par M. Y... de la situation de M. I...).

Monsieur Hervé Y... a d'ailleurs participé à l'ensemble des débats du conseil d'administration, bien qu'il n'en soit pas membre à cette date.

Ce seul procès-verbal est insuffisant à démontrer, comme allégué par Monsieur Hervé Y... et inscrit dans la délégation de pouvoir, que la large autonomie dont il disposait était compensée « par un échange constant avec la Présidente pour toute question importante au niveau du personnel, des patients pris en charge et l'évolution du SSIAD ».

Enfin, Monsieur Hervé Y... ne fournit aucune explication sur sa participation à la direction de l'Association APARAMEDIS en sa qualité de membre du bureau, tel que cela résulte de la « déclaration de la liste des personnes chargées de l'administration d'une association en date du 31 janvier 2014 transmise à la Préfecture des Alpes-Maritimes (pièce 21 versée par la SCP B...).

Il résulte de l'ensemble des pièces produites et des débats que Monsieur Hervé Y..., au-delà du 30 juin 2012, a continué à diriger l'Association APARAMEDIS en dehors de tout lien de subordination et que le contrat de travail apparent, dont il a bénéficié, était fictif.

Il convient, en conséquence, d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nice le 25 janvier 2018 et, en l'absence d'un contrat de travail ayant lié Monsieur Hervé Y... à l'Association APARAMEDIS, de dire que la juridiction prud'homale est incompétente au profit du tribunal de grande instance de Nice.

Le comportement de Monsieur Hervé Y... quant à la gestion comptable de l'association, estimé abusif par le mandataire liquidateur, ne résulte pas d'un manquement à un contrat de travail et ne peut faire l'objet d'une réparation devant la juridiction prud'homale.

Par ailleurs, Monsieur Hervé Y... ayant bénéficié d'un contrat de travail apparent, il ne peut lui être reproché d'avoir agi en justice au titre de ce contrat, même s'il a été jugé fictif.

Dans ces conditions,il n'est pas établi que la procédure diligentée par Monsieur Hervé Y... ait dégénéré en abus de droit. La Cour déboute donc la SCP B... ès qualités en sa demande en paiement de dommages intérêts pour procédure abusive.

Il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la SCP B... ès qualités de mandataire liquidateur de l'Association APARAMEDIS, tel que précisé au dispositif.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par décision prononcée par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale,

Ordonne la jonction des procédures numéros 18/04017 et 18/04019 sous le numéro 18/04017,

Reçoit l'appel en la forme,

Confirme le jugement en ce qu'il a ordonné la mise hors de cause de Maître Marie-Claire P... ès qualités d'administrateur judiciaire et de Maître Nathalie F... ès qualités d'administrateur provisoire de l'Association APARAMEDIS,

Le réforme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Dit que Monsieur Hervé Y... n'était pas soumis à l'Association APARAMEDIS par un lien de subordination et par un contrat de travail,

Dit que la juridiction prud'homale est incompétente au profit du tribunal de grande instance de Nice,

Condamne Monsieur Hervé Y... aux dépens de première instance et d'appel et à payer à la SCP B... ès qualités de mandataire liquidateur de l'Association APARAMEDIS la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette tout autre prétention.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre b
Numéro d'arrêt : 18/04017
Date de la décision : 20/09/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°18/04017 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-09-20;18.04017 ?
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