COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Opp. Taxes
ORDONNANCE SUR CONTESTATION
D'HONORAIRES D'AVOCATS
DU 18 SEPTEMBRE 2018
N°2018 / 339
Rôle N° RG 17/17638 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBIAK
Audrey X...
C/
Y...
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
- Me Julien Z...
- Me Bernard A...
Décision déférée au Premier Président de la Cour d'Appel:
Décision fixant les honoraires de Me Y... rendue le
13 Juillet 2017 par le Bâtonnier de l'ordre des avocats de DRAGUIGNAN.
DEMANDERESSE
Madame Audrey X..., demeurant [...] ayant - Élu domicile au cabinet SAMARCANDE AVOCATS [...]
représentée par Me Julien Z..., avocat au barreau de PARIS substitué par Me Rémy B..., avocat au barreau de MARSEILLE
DEFENDERESSE
Y..., demeurant [...]
représentée par Me Bernard A..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ
L'affaire a été débattue le 04 Juillet 2018 en audience publique devant
Madame Catherine LEROI, Conseiller,
délégué par ordonnance du Premier Président .
Greffier lors des débats : Mme Christiane GAYE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2018.
ORDONNANCE
contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2018
Signée par Madame Catherine LEROI, Conseiller et Mme Christiane GAYE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Le 13 juillet 2017, le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Draguignan a, par décision n° 217143-2, fixé les honoraires dus par Mme Audrey X... à la Y... à la somme de 3472,23 € HT soit 4166,68 € TTC selon facture n° A014815 du 16 février 2017, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure.
Par courrier recommandé expédié le 17 août 2017 et réceptionné au greffe le 18 août 2017, Mme Audrey X... a contesté cette décision, non régulièrement notifiée .
A l'audience du 4 juillet 2018, Mme Audrey X..., se référant à ses écritures déposées à l'audience et visées par le greffier, sollicite l'infirmation de la décision déférée. Il demande à la juridiction d'appel de:
- déclarer irrecevable la demande de taxation de la C... en ce que les factures sur lesquelles elle se fonde n'ont pas été adressées préalablement aux consorts X... E..., en ce qu'elle est dirigée contre les consorts X... E... à titre individuel et en ce qu'elle est prescrite sur le fondement de l'article L 237- 2 du code de la consommation,
- en tout état de cause, la déclarer mal fondée pour violation du principe du contradictoire et des règles régissant l'honoraire de résultat,
- rejeter la demande de la C...,
- condamner la C... à lui payer la somme de 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Se rapportant expressément à ses écritures déposées à l'audience et visées par le greffier, la C... sollicite la jonction des affaires RG 18/00757, RG 17/16098, RG 18/04021, RG 17/17639, RG 17/17638, RG 17/17640, RG 17/17641, RG 17/17642, RG 17/16091 et RG 17/16099, le rejet des fins de non recevoir soulevées, la confirmation de la décision déférée ainsi que la condamnation de Mme Audrey X... au paiement de la somme de 50 000 € TTC à proportion de sa part dans le capital social avec intérêts au taux légal à compter de la facturation, et sous astreinte de 100€ par jour et par débiteur à compter de la décision à intervenir, outre la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il sera référé aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens.
MOTIFS DE LA DECISION
Il n'y a pas lieu dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, d'ordonner la jonction de cette procédure aux autres instances enrôlées concernant les consorts X... E....
Le présent recours sera déclaré recevable comme satisfaisant aux conditions prévues par l'article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991.
Il est constant que courant 2012, Mme Nelly D..., Mme Audrey D..., MM. Thomas et Antoine E..., Mme Valérie E... et Mme Anne E... ont confié à la C... ainsi qu'à Me F... exerçant dans le cadre de la G..., la défense de leurs intérêts en vue de procéder à la liquidation d'une SCI ASTERION, en leur qualité d'héritiers des associés, MM William X... et Jacques E..., décédés respectivement [...].
Le 25 novembre 2012, l'assemblée générale ordinaire a décidé la dissolution de la SCI ainsi que sa liquidation amiable, Mme Nelly X... étant désignée en qualité de liquidateur. Les procès-verbaux de dissolution et de liquidation de la société ont été enregistrés auprès de l'administration fiscale avant la date butoir du 31 décembre 2012.
La G... a perçu au titre de ses diligences la somme de 6000 € HT facturée les 27 novembre 2012 et 23 janvier 2013.
Le 30 décembre 2015, ce cabinet a émis aux noms de Mme Nelly D... et de M. Thomas E... deux factures n° 15275 et 15276 d'un montant de 12500 € TTC chacune, au titre de l'honoraire conventionnellement arrêté puis, le 16 février 2017, la C... a émis à l'encontre de chacun des héritiers des associés de la SCI dont M. Antoine E... une facture pour consultation fiscale de 3472,23 € HT soit 4166,68 € TTC correspondant à l'honoraire de 25000 € TTC.
La C... soutient qu'un honoraire complémentaire de résultat de 50000 € TTC aurait été convenu pour les deux cabinets intervenants lors d'une réunion en date du 21 décembre 2012 s'étant tenue au cabinet de Me H..., conformément au courrier adressé en ce sens aux consorts X... E... le même jour.
Pour s'opposer à la demande en fixation de ses honoraires, Mme Audrey X... fait valoir différents moyens qualifiés de fins de non recevoir. Toutefois, le fait que les factures dont il est sollicité le règlement, n'aient pas été adressées préalablement à chacun des héritiers est indifférent en ce qu'il n'est pas contestable que les consorts X... E... s'opposent au paiement des honoraires en cause, parfaitement identifiés. Par ailleurs, le fait que la C... ait individualisé ses demandes à l'égard de chacun des héritiers ne saurait constituer un motif d'irrecevabilité de ses demandes en paiement.
Mme Audrey X... se prévaut également de la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action en paiement de ses honoraires intentée par la C....
Toutefois, il est de jurisprudence constante que la prescription d'une action en paiement de l'honoraire de résultat ne peut commencer avant que ce résultat soit définitivement acquis, ce qui en l'occurrence, a été réalisé au 31 décembre 2015 date de la fin de la prescription fiscale à l'égard de la SCI ASTERION. Dès lors, la saisine du bâtonnier de l'ordre intervenue en février 2017 n'apparaît nullement prescrite.
L'action en paiement de ses honoraires intentée par la C... sera en conséquence déclarée recevable.
Il résulte des alinéas 2 et 3 de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 dans sa rédaction antérieure au 8 août 2015 applicable à la cause, qu'aucun honoraire de résultat n'est dû s'il n'a été expressément stipulé dans une convention préalablement conclue entre l'avocat et le client.
Pour justifier d'une convention intervenue avec les consorts X... E..., les C... et CABINET I... F... se prévalent:
d'un courrier valant lettre de mission en date du 21 décembre 2012 adressé par Me H... à Mme Nelly X... et aux consorts E... sollicitant l'acceptation d'un honoraire de 2000 € HT pour premier examen du dossier, rendez-vous et analyse de la situation et de 4000 € HT pour mise en 'uvre de la solution avec élaboration des procès-verbaux de dissolution, de liquidation et de dépôt au greffe après régularisation de la situation de la société, du fait des décédés et associés et d'un honoraire complémentaire de résultat calculé sur une base forfaitaire de 50000 € TTC payable à hauteur de 49 % par échéances mensuelles ou semestrielles d'ici le 31 juillet 2014 pour l'indivision E... et comptant à hauteur de 51 % pour l'indivision X..., à charge de remboursement éventuel par les cabinets dans l'hypothèse d'un redressement obligeant au paiement de tout ou partie desdits impôts,
d'un mail adressé par Thomas E... à Laurence F... le 24 décembre 2012 envisageant une contre-proposition d'honoraire forfaitaire à régler en trois versements dont le dernier interviendrait «au moment où nous serons sortis d'affaire»,
d'un courriel également adressé à Laurence F... le 31 décembre 2012 par M. Thomas E... proposant que les honoraires de 50000 € TTC comprennent toute la démarche de la dissolution jusqu'à la levée du risque fin 2015 avec un paiement en trois fois, le troisième tiers étant payable en janvier 2015.
Toutefois, outre le fait que cet échange de courriels ne concrétise aucun accord définitif entre le cabinet H... K... d'une part et M. Thomas E... d'autre part, il n'est nullement démontré que ce dernier ait eu le pouvoir d'engager les autres héritiers X... E... dont Mme Audrey X..., laquelle n'a jamais renvoyé la lettre de mission signée par elle ainsi que le sollicitait en vain Me F... par courriel en date du 9 janvier 2013.
Dès lors, en l'absence de convention préalablement conclue avec Mme Audrey X..., la C... ne peut solliciter aucun honoraire de résultat.
La décision déférée sera en conséquence infirmée.
L'équité commande d'allouer à Mme Audrey X... la somme de 200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile. La C... sera déboutée de sa demande aux mêmes fins.
PAR CES MOTIFS, statuant publiquement, contradictoirement en matière de contestation d'honoraires d'avocat,
DISONS n'y avoir lieu à ordonner la jonction de l'instance enrôlée sous le n° 17/17638 aux autres instances concernant les consorts X... - E...;
DECLARONS recevable le recours formé par Mme Audrey X... à l'encontre de la décision
n° 217142-2 en date du 13 juillet 2017 ;
INFIRMONS cette décision et, statuant à nouveau,
DECLARONS recevable mais non fondée la demande de la C... en paiement d'un honoraire complémentaire de résultat;
DEBOUTONS la C... de ses demandes ;
CONDAMNONS la C... à payer àMme Audrey X... la somme de 200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et REJETONS la demande formée du même chef par la C... ;
CONDAMNONS la C... aux dépens.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE