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07/06/2018 | FRANCE | N°16/17821

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre b, 07 juin 2018, 16/17821


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

17e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 07 JUIN 2018



N° 2018/320

MS









N° RG 16/17821

N° Portalis DBVB-V-B7A-7KWC







SAS AMADEUS





C/



Wilfried X...



























Grosse délivrée

le :07 JUIN 2018

à :

Me Pierre-Yves Y..., avocat au barreau d'AIX EN

PROVENCE



Me Rémi Z.

.., avocat au barreau de NICE





























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE section E en date du 29 Avril 2015 enregistré au répertoire général sous le n° F 12/00973.





APPELANTE



SAS AMADEUS prise en la personne de son...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

17e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 07 JUIN 2018

N° 2018/320

MS

N° RG 16/17821

N° Portalis DBVB-V-B7A-7KWC

SAS AMADEUS

C/

Wilfried X...

Grosse délivrée

le :07 JUIN 2018

à :

Me Pierre-Yves Y..., avocat au barreau d'AIX EN

PROVENCE

Me Rémi Z..., avocat au barreau de NICE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE section E en date du 29 Avril 2015 enregistré au répertoire général sous le n° F 12/00973.

APPELANTE

SAS AMADEUS prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant [...] C... A...

représentée par Me Pierre-Yves Y... de la SELARL LEXAVOUE AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE substituée par Me Elodie B..., avocat au barreau de GRASSE

INTIME

Monsieur Wilfried X..., demeurant [...]

représenté par Me Rémi Z..., avocat au barreau de NICE substitué par Me Sarah D..., avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Mars 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:

Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller

Madame Sophie PISTRE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Caroline LOGIEST.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Juin 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Juin 2018

Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Madame Pascale ROCK, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

M.Wilfried X... a été engagé par la société Amadeus SAS, à compter du 10 mars 2011 en qualité d'analyste fonctionnel.

M. X... a saisi le 25 septembre 2012 le conseil de prud'hommes de Grasse d'une demande de rappel d'indemnité de congés payés.

Par jugement du 29 avril 2015, le conseil de prud'hommes de Grasse a dit que les primes d'astreinte, le bonus annuel et la prime NISS devaient être inclus dans le salaire de référence servant au calcul des indemnités de congés payés suivant la règle du 1/10, et a condamné la société Amadeus à lui régler les sommes suivantes :

- 330,48 euros à titre de complément d'indemnité de congés payés pour les années 2011, et 2012,

-1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le conseil de prud'hommes a en outre débouté la société Amadeus de sa demande reconventionnelle au titre de ces mêmes dispositions, et lui a laissé la charge des dépens de l'instance.

La société Amadeus, à qui cette décision a été notifiée le 4 mai 2015, a régulièrement interjeté appel le 18 mai 2015.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

La société Amadeus, SAS, appelante, demande à la cour de confirmer le jugement du 29 avril2015 en ce qu'il a jugé que les demandes antérieures à 2008 étaient prescrites en application del'article L 3245'1 du code du travail dans sa rédaction applicable à la date de la saisine du conseil de prud'hommes, et d'infirmer toutes les autres dispositions de ce jugement. La société Amadeus demande à la cour de juger que le bonus annuel et la prime exceptionnelle dite NISS sont exclus del'assiette du calcul de l'indemnité de congés payés, et de juger que la prime d'astreinte a d'ores et déjà été intégrée dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés. Par conséquent, la société Amadeus demande à la cour de débouter M. X... de toutes ses demandes, de lui ordonner la restitution de la somme payée en exécution du jugement de première instance, et de la condamner à payer, outre les entiers dépens, la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

À cet effet, l'appelante expose qu'elle a conclu le 25 avril 2000, un accord d'entreprise relatif au temps de travail prévoyant notamment que les congés payés sont calculés en jours ouvrés et qu'ils s'élèvent annuellement à 30 au lieu des 25 jours ouvrés légaux ; qu'à ce congé annuel de 30 jours ouvrés s'ajoutent des jours de congés supplémentaires au titre de l'ancienneté acquise; que pour le calcul de l'indemnité de congés payés, la société applique la méthode dite du maintien de salaire ;qu'à la fin de la période des congés, elle procède au calcul de la règle dite du 10 , afin de s'assurer que la méthode utilisée est toujours la plus favorable au salarié, ce qui peut, le cas échéant, donner lieu au paiement d'une indemnité de congés payés.

La société Amadeus ajoute, concernant M. X..., que les parties ont convenu dans le cadre du contrat de travail que le salarié bénéficierait d'un bonus salarial « en fonction des résultats économiques du groupe et de l'atteinte des objectifs personnels négociés », celui-ci étant calculé « en fonction d'un pourcentage sur le salaire brut annuel » c'est-à-dire sur la rémunération annuelle de l'exercice N-1, incluant les congés payés versés au cours de cet exercice ; que par ailleurs, étant soumis à des astreintes, il a bénéficié d'indemnités d'astreinte.

La société Amadeus précise, qu'interrogée par ses délégués du personnel le 13 mars 2012, sur l'inclusion dans l'assiette des congés payés des gratifications versées elle a indiqué que « les sommes prises en compte dans le salaire de référence sont celles prévues par la loi et la jurisprudence. Sont notamment exclues les primes et gratifications versées globalement et couvrant l'ensemble de l'année ».

Pour s'opposer à la demande de rappel d'indemnité de congés payés, la société Amadeus soutient que pour être incluses dans l'assiette du calcul, les primes annuelles doivent remplir certains critères, dégagés par la jurisprudence, qui sont cumulatifs, à savoir que la prime doit être versée en contrepartie du travail personnel du salarié, et que le montant et/ou le mode de calcul de la prime doivent être affectés par la prise des congés payés annuels du salarié ; qu'en décider autrement aboutirait à faire payer, même pour partie, une seconde fois par l'employeur, la prime versée incluant déjà l'indemnité de congés payés sur cette prime ; que dans la mesure où le critère déterminant est l'influence de la prise de congés annuels sur le montant de la prime, la seule circonstance qu'une prime soit directement liée à la prestation de travail du salarié ne suffit pas à l'inclure dans l'assiette des congés payés ; que sont ainsi exclus de l'assiette des congés payés, des sommes attribuées aux salariés en fonction d'une production globale annuelle sans distinction entre les périodes travaillées et celles des congés payés, qu'elles soient liées ou non à l'activité personnelle du salarié.

La société Amadeus soutient qu'en l'espèce, le bonus versé annuellement est assis sur la rémunération des périodes de travail et de congés payés confondues ; que ce bonus annuel est versé en avril de l'année (N+1) qui suit celle au titre de laquelle il est attribué (N) ; qu'il est calculé en fonction d'un pourcentage appliqué à la rémunération annuelle brute du salarié, laquelle comprend l'indemnisation des congés payés puisque le salaire est maintenu durant les congés payés ; que la prise de congés payés n'impacte en aucun cas le montant du bonus annuel.

En ce qui concerne les indemnités d'astreinte, la société Amadeus ne conteste pas qu'elles doivent être incluses dans l'assiette de l'indemnité de congés payés, mais fait valoir que les primes d'astreinte sont déjà incluses dans cette assiette ; qu'elles sont intitulées « on call/in call», comme cela ressort des tableaux versés aux débats, lesquels démontrent que M. X... a été rempli de ses droits.

Sur le quantum des demandes, la société Amadeus fait valoir qu'en application des dispositions del'article L 3245'1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi du 14 juin 2013, l'action tendant au paiement de créances de nature salariale se prescrit par cinq ans à compter de l'exigibilité de la créance ; que l'indemnité de congés payés ayant la nature d'un substitut de salaire, suit le même régime juridique ; que si le point de départ du délai de la prescription doit, s'agissant de l'indemnité de congés payés, être fixé à l'expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés payés auraient pu être pris, ce principe n'est applicable que lorsque l'objet de la demande est un rappel d'indemnité de congés payés pour des congés qui n'ont pas été octroyés au salarié et qu'il n'a donc pas pu prendre ; qu'en revanche, dès lors que les congés payés ont été effectivement pris, le point de départ de la prescription correspond alors à la date habituellede paiement des salaires en vigueur dans l'entreprise ; que M. X... a saisi le conseil de prud'hommes le 25 septembre 2012 et que dès lors toutes ses demandes antérieures au 25 septembre 2007 sont prescrites.

La société Amadeus soutient enfin que les tableaux produits par M. X... visant à démontrer que la règle dite du 10 est plus favorable que celle du maintien de salaire lorsque sont inclus le bonus annuel et la prime de NISS, sont erronés dans la mesure où ils ne prennent pas en considération les indemnités de congés payés et les primes vacances qui ont été réellement versées telles qu'elles figurent sur les bulletins de salaire de l'intéressé ; que la prime de vacances, telle que prévue à l'article 31 de la convention collective Syntec, intégrée dans son chapitre relatif aux congés payés, fait partie intégrante de l'indemnisation des congés payés. La société appelante soutient qu'aucune indemnité complémentaire n'est due en cas d'exclusion du bonus annuel de l'assiette de calcul, et qu'aucune indemnité complémentaire n'est due en cas d'inclusion du bonus annuel dans l'assiettede calcul ; que les tableaux produits aux débats par la société employeur démontrent que lorsque le bonus annuel est inclus dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés selon la règle du 10ème, le maintien de salaire opéré demeure toujours plus favorable.

M.Wilfried X... demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que les primes d'astreinte, le bonus annuel et les primes NISS perçus devaient être intégrés dans la base de calcul de l'indemnité de congés payés sur la base de la règle du 1/10ème, de réformer le jugement en ce qu'il a dit les créances d'indemnité de congés payés antérieures au 1er janvier 2008 prescrites, et de confirmer en conséquence les condamnations prononcées, sauf à porter le montant du complément d'indemnité de congés payés à la somme de 1.311,16 euros pour les années 2011 à 2016.

L'intimé demande en outre la condamnation de la société Amadeus à payer outre les entiers dépens, la somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

A cet effet, M. X... fait valoir que la société Amadeus maintient pendant les congés payés, le seul salaire de base, excluant ainsi le bonus annuel, les primes d'astreinte, et les primes « Niss» ; que le bonus annuel correspond à un pourcentage du salaire brut annuel de chaque salarié, pourcentage fixé par la direction à l'occasion des négociations annuelles obligatoires ; qu'invariablement, la société alloue aux bonus un budget de 8 % de la masse salariale ; que l'attribution de ce bonus annuel est tributaire de la réalisation par chaque salarié des objectifs de performance qui lui sont assignés ; que cette exigence est mentionnée dans le contrat de travail et dans les NAO ; que ce bonus varie en fonction des années, en raison de la réalisation plus ou moins complète des objectifs ; que doivent être intégrés dans la base de calcul toute rémunération variable, tout bonus dont l'octroi est tributaire de l'activité des salariés, afin de ne pas dissuader le salarié de prendre les congés auxquels il a droit ; que doit être qualifié de rémunération le bonus venant rétribuer le travail fourni par le salarié pour réaliser les objectifs de performances qui lui sont fixés ; qu'en effet, les congés ne pourraient,sans être dénaturés, lui permettre d'améliorer sa productivité, qui est fonction de son travail effectif; que la Cour de cassation sanctionne tout arrêt refusant cette intégration, et qui ne démontre pas que la part variable de la rémunération (bonus, primes, commissions) est également calculée sur les périodes de congés payés, ce dont il découlerait que son octroi ne résulte pas de l'activité du salarié ;qu'en l'espèce, le bonus annuel répond aux exigences posées par la Cour de cassation en ce que son attribution dépend, au moins pour partie, de la réalisation des objectifs individuels de performance par le salarié lesquels ne peuvent être réalisés que par l'activité personnelle pendant son temps de travail effectif, et en ce que la prise en compte des résultats économiques du groupe est indifférente quant à la qualification de rémunération de la décision d'octroyer le bonus annuel.

En ce qui concerne la prime NISS, M. X... soutient qu'elle est soumise aux mêmes conditions d'atteinte des objectifs individuels que le bonus annuel, et qu'elle est dès lors également partie intégrante de la rémunération servant de base au calcul des indemnités de congés payés. M. X... conteste les tableaux de calcul produits par Amadeus, et soutient que la société employeur ajoute aux sommes qu'elle verse au titre des indemnités de congés payés, une prime conventionnelle de vacances, laquelle est instaurée par l'article 31 de la convention collective Syntec ; que cette prime ne constitue pas une part de l'indemnité de congés payés et ne saurait s'y substituer ; qu'elle s'y ajoute.

M. X... fait valoir qu'il bénéficiait chaque année entre 2011 et 2016 du bonus annuel et qu'il n'était assujetti à aucune période d'astreinte. Pour savoir quelles sommes restent dues, il faut, selon lui, prendre les bulletins de salaire de la période de référence : de l'année d'acquisition du 1er juin au 31 mai. Ses demandes sont actualisées au 31 mai 2016.

Dans un premier temps, il faut déterminer le montant des indemnités de congés payés dû. On relève le montant des primes d'astreintes, celui le bonus annuel et celui de la prime NISS.Il reste dû 1/10 de ces montants au titre de l'indemnité de congés payés afférente. On y ajoute 10 % au titre de la prime conventionnelle de vacances (article 31de la convention collective SYNTEC) On totalise ces deux montants : le montant de l'indemnité légale et celui de la prime de vacances. Dans un second temps, il faut proratiser ce total en fonction du nombre de jours de congés payés. Le prorata est alors de 31/25 pour 1 jour d'ancienneté, 32/25 pour 2 jours etc. M. X... dispose de 31 jours de congés payés annuels, puis 32 à partir de 2012. Il est donc dû à M. X... la somme de 1 311,16 euros au 1er Juin 2016.

En ce qui concerne le moyen tiré de la prescription, M. X... fait valoir que l'acquisition des jours de congés payés s'effectue du 1er juin au 31 mai de l'année suivante et que ces jours ne sauraient être utilisés qu'à partir du 1er juin de cette même année ; que la comparaison avant régularisation, avec les indemnités qui auraient été perçues en application de la règle des 10 %, ne peut intervenir qu'après la fin de l'année N+1, soit à partir du 1 juin N+2 ; qu'il s'ensuit que la connaissance de l'étendue de la demande de complément d'indemnisation des congés payés de 2007 ne pourrait être connue à partir du 1 juin 2008 ; que par conséquent, toutes les demandes reçues entre le 1er juin et 2012 et le 31 mai 2013 interrompent la prescription des créances d'indemnités de congés payés à prendre à partir du 1 juin 2007.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des demandes et moyens des parties, il convient de se référer aux écritures des parties, oralement reprises.

SUR CE

- Sur les éléments de rémunération pris en compte dans l'indemnité de congés payés

Pour déterminer si les gratifications doivent ou non être incluses dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés, il y a lieu de rechercher si celles-ci ont été versées à l'occasion de travail et si elles ont pour objet de rémunérer des périodes de travail et de congés réunis.

- Sur le bonus annuel

La société Amadeus soutient que le bonus versé annuellement est assis sur la rémunération des périodes de travail et de congés payés confondues ; que ce bonus annuel est versé en avril de l'année (N+1) qui suit celle au titre de laquelle il est attribué (N) ; qu'il est calculé en fonction d'un pourcentage appliqué à la rémunération annuelle brute du salarié, laquelle comprend l'indemnisation des congés payés puisque le salaire est maintenu durant les congés payés ; que la prise de congés payés n'impacte en aucun cas le montant du bonus annuel.

Il est toutefois stipulé à l'article 12 du contrat de travail de M. X..., qu'en fonction des résultats économiques du Groupe et qu'en fonction de l'atteinte des objectifs personnels négociés, la direction de la société pourra octroyer à l'employé un bonus annuel qui sera calculé en fonction d'un pourcentage sur le salaire brut annuel.

La variabilité du montant de ce bonus en fonction de la performance individuelle, est confirmée par les termes employés les NAO, et en particulier dans l'accord collectif 2012.

L'employeur ne verse aucun élément de nature à contredire que le droit à recevoir cette rémunération résulte de l'atteinte par le salarié d'objectifs personnels négociés.

Le versement du bonus dépend en conséquence, au moins en partie, de la performance du salarié et rémunère de ce fait l'activité déployée pendant sa période de travail, à l'exclusion de la période de congés, période qui ne lui permet pas d'améliorer sa productivité. Le montant de la prime est donc affecté par la prise des congés payés annuels du salarié.

La circonstance que le calcul de la prime a pour assiette le revenu global annuel y compris la période de maintien de salaire pendant le congé payé, est indifférente dès lors que l'employeur ne maintient la rémunération durant les congés payés que sur le salaire de base, en sorte qu'il ne paye pas « deux fois » la prime.

Le bonus annuel doit donc être inclus dans l'assiette de l'indemnité de congés payés.

- Sur la prime NISS

Selon courrier du 15 novembre 2006, l'employeur a invité les salariés à participer à un plan de prime exceptionnelle dénommée NISS (« New incentive scheme for staff »), basé d'une part sur la performance de la société, et d'autre part sur l'atteinte, avec un niveau de performance minimum, des objectifs individuels fixés dans le cadre du processus d'évaluation des performances pendant les années application du plan.

Le fait que la prime litigieuse ait été versée une seule fois et à la discrétion de l'employeur, n'emporte pas en soit exclusion de la gratification de l'assiette de l'indemnité de congés payés.

L'employeur soutient qu'en tout état de cause, cette prime doit échapper à l'assiette de calcul car elle est, comme le bonus annuel, calculée en pourcentage du salaire de base, lequel est maintenu durant les congés payés.

L'employeur ne verse toutefois aucun élément de nature à contredire le fait que le droit de recevoir cette rémunération résulte de l'atteinte par le salarié d'objectifs personnels négociés.

Le versement de la prime NISS dépend en conséquence, au moins en partie, de la performance du salarié et rémunère de ce fait l'activité déployée pendant sa période de travail, à l'exclusion de la période de congés, période qui ne lui permet pas d'améliorer sa productivité. Le montant de la prime est donc affecté par la prise des congés payés annuels du salarié.

La circonstance que le calcul de la prime a pour assiette le revenu global annuel y compris la période de maintien de salaire pendant le congé payé, est indifférente dès lors que l'employeur ne maintient la rémunération durant les congés payés que sur le salaire de base, en sorte qu'il ne paye pas « deux fois » la prime.

La prime NISS doit donc être incluse dans l'assiette de l'indemnité de congés payés.

- Sur la prime de vacances

Il est constant que la société Amadeus verse chaque année la prime dite « vacances » issue de l'article 31 de la convention collective Syntec. L'employeur soutient que cette prime est exclue de l'assiette du salaire servant de référence au calcul de l'indemnité de congés payés selon la règle du 10ème.

Le salarié soutient quant à lui que cette prime ne constitue pas une part de l'indemnité de congés payés et ne saurait s'y substituer.

Il résulte des conclusions oralement reprises de la société Amadeus, que lorsque celle-ci compare, pour déterminer le régime le plus favorable au salarié, le montant calculé selon « la règle du maintien de salaire » avec le montant calculé selon la règle du 1/10ème, elle inclut dans le premier à la fois le montant la rémunération maintenue pendant les congés payés et le montant de la prime de vacances.

En procédant ainsi, alors que dans ses conclusions oralement reprises l'employeur admet que cette prime résultant des dispositions de la convention collective n'entre pas dans l'assiette du salaire servant de référence au calcul de l'indemnité de congés payés, l'employeur se contredit.

En tout état de cause, les montants versés au titre de la prime conventionnelle « vacances » ne peuvent être inclus dans l'assiette de calcul des droits du salarié.

Sur la « proratisation »

Il est constant que les salariés de la société Amadeus bénéficient d'un nombre de jours de congés supérieur à celui prévu par les dispositions de l'article L 3141-3 du code du travail, et cela en appli-cation d'une part de l'article 3.2 de l'accord d'entreprise d'aménagement du temps de travail, etd'autre part, de l'article 23 de la convention collective Syntec qui prévoit des jours de congés payés supplémentaires en fonction de l'ancienneté.

Il n'est pas contesté que doivent en conséquence trouver application les dispositions de l'article L3141-22 du code du travail, aux termes desquelles lorsque la durée du congé est différente de celle prévue à l'article L 3141'3, l'indemnité est calculée proportionnellement à la durée du congé effectivement dû.

Sur la prescription

M. X... a saisi le conseil de prud'hommes le 25 septembre 2012.

A cette date, l'article L 3245-1 énonçait : L'action en paiement ou en répétition du salaire se

prescrit par cinq ans conformément à l'article 2224 du code civil.

Aux termes des dispositions de l'article 2224 du Code civil, en sa rédaction applicable au litige, Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En l'espèce le droit du salarié est né au jour où, recevant son bulletin de salaire régularisant ses droits à congés payés, il a pu connaître le calcul opéré par l'employeur, et déterminer si celui-ci l'avait correctement rempli de ses droits.

L'année de travail ouvrant droit à des congés payés est déterminée à partir d'une période de référence, fixée du 1er juin de l'année précédente au 31 mai de l'année en cours.

Monsieur X... qui sollicite un complément d'indemnité de congés payés produit aux débats un tableau justificatif (annexe de ses conclusions oralement reprises) qui démontre que le point de départ de sa demande concerne l'exercice 2011.

La connaissance de l'étendue de la demande de complément d'indemnisation des congés payés de 2011 ne pouvait être connue qu'à partir du 1 juin 2012. L'action ayant été engagée moins de cinq ans plus tard, le 25 septembre 2012, la prescription n'est pas encourue.

Sur la détermination des droits de M. X...

M. X... verse aux débats un tableau précis des sommes réclamées. Pour s'opposer à ce calcul, la société Amadeus fait valoir que ces « tableaux sont erronés dans la mesure où ils ne prennent pas en considération les indemnités de congés payés et les primes de vacances qui ont été réellement versées telles qu'elles figurent sur les bulletins de salaire de M. X... » ; que « la prime devacances prévue à l'article 31 de la convention collective fait partie intégrante de l'indemnisationdes congés payés » ; que les estimations de M. X... sont « purement théoriques, inexactes et infondées juridiquement et ne sauraient emporter la conviction de la cour ».

Il apparaît toutefois que les calculs proposés par la société Amadeus ne peuvent être retenus dès lors que celle-ci opère une comparaison avec un montant, au titre de la règle du maintien de salaire, inexact en ce qu'elle y inclut la prime de vacances.

Par ailleurs, il ne peut être fait reproche à M. X... de n'avoir pas tenu compte de « l'indemnité de congés payés réellement versée telle qu'elle apparaît sur les bulletins de salaire», alors qu'à l'examen des bulletins de salaire, il apparaît que la société Amadeus n'a jamais versé d'indemnité de congés payés, ayant toujours considéré que le salarié était rempli de ses droits par la seule application de la règle du maintien de salaire.

L'affirmation de M. X... selon laquelle « en fin de période de prise des congés payés, l'employeur ne verse jamais de complément au titre du calcul des indemnités de congés payés suivant la règle légale du 10 » n'est d'ailleurs pas discutée, et il résulte des conclusions oralement reprises par la société appelante que celle-ci a considéré que la règle du maintien de salaire était systématiquement plus favorable au salarié.

En conséquence, la cour constate que la société Amadeus n'apporte aucun moyen de contestation sérieuse au tableau de réclamation précis produit aux débats par M. X..., tableau qui fait application des règles ci-dessus retenues par la cour. La demande qui est étayée dans son principe de calcul, et dans ses montants, sera en conséquence accueillie.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il serait inéquitable de laisser supporter à M. X... la charge des frais irrépétibles par lui exposée à l'occasion de la présente procédure. La condamnation prononcée par le conseil de prud'hommes au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, sera confirmée sauf à en ramener le quantum à la somme de 600 €. La société Amadeus sera condamnée en outre à régler la somme de 800 € au titre de ces mêmes dispositions, pour les frais irrépétibles d'appel.

Aucune considération d'équité ne commande en revanche de faire droit à la demande formée par la société appelante au titre de ces mêmes dispositions.

La société Amadeus, qui succombe, supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par décision prononcée par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale

Reçoit les parties en leur appel

Sur le fond,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Grasse du 29 avril 2015 en ce qu'il a jugé que les primes d'astreinte, le bonus annuel, et la prime dite « Niss » , doivent être inclus dans le salaire de référence servant au calcul des indemnités de congés payés suivant la règle du 1/10ème, en ce qu'il a condamné la société Amadeus à payer à Monsieur X... une somme au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sauf à ramener le quantum de celle-ci à 600 euros, et en ce qu'il a débouté la société Amadeus de sa demande reconventionnelle au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Statuant à nouveau pour le surplus, et y ajoutant,

Condamne la société Amadeus à payer à Monsieur Wilfried X... la somme de 1311,16euros à titre de complément d'indemnité de congés payés pour les années 2011 à 2016

Condamne la société Amadeus à payer à Monsieur Wilfried X... la somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la société Amadeus aux dépens de première instance et d'appel

Rejette toutes autres prétentions.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre b
Numéro d'arrêt : 16/17821
Date de la décision : 07/06/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°16/17821 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-07;16.17821 ?
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