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31/05/2018 | FRANCE | N°17/13440

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 31 mai 2018, 17/13440


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE


8e Chambre C





ARRÊT


DU 31 MAI 2018





N° 2018/ 230




















Rôle N° N° RG 17/13440 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA4QD











Geneviève X... épouse Y...


Jean-Luc Y...








C/





SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DÉVELOPPEMENT - CIFD























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Grosse délivrée


le :


à :


JUSTON


ERMENEUX























Décision déférée à la Cour :





Ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de Grande Instance de Marseille en date du 29 Juin 2017 enregistrée au répertoire général sous le n° 15/04597.








APPELANTS





Madame Geneviève X... épouse Y...,
...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre C

ARRÊT

DU 31 MAI 2018

N° 2018/ 230

Rôle N° N° RG 17/13440 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA4QD

Geneviève X... épouse Y...

Jean-Luc Y...

C/

SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DÉVELOPPEMENT - CIFD

Grosse délivrée

le :

à :

JUSTON

ERMENEUX

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de Grande Instance de Marseille en date du 29 Juin 2017 enregistrée au répertoire général sous le n° 15/04597.

APPELANTS

Madame Geneviève X... épouse Y...,

demeurant [...]

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et assistée de Me Cécile PION, avocat au barreau de MARSEILLE de la SCP GOBERT & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur Jean-Luc Y...,

demeurant [...]

représenté par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et assistée de Me Cécile PION, avocat au barreau de MARSEILLE de la SCP GOBERT & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DÉVELOPPEMENT - CIFD

venant aux droits de la S.A. BANQUE PATRIMOINE ET IMMOBILIER

- B.P.I., prise en la personne de son représentant légal en exercice

dont le siège est [...]

représentée par Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX-ARNAUD- CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 27 Mars 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de:

Monsieur Dominique PONSOT, Président

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Conseiller

Madame Isabelle DEMARBAIX, Vice-président placé auprès du Premier Président

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Mai 2018 après prorogation du délibéré

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 31Mai 2018,

Signé par Monsieur Dominique PONSOT, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu l'ordonnance du tribunal de grande instance de Marseille du 29 juin 2017 ayant, notamment :

- déclaré recevable l'intervention volontaire de la SA Crédit Immobilier de France Développement venant aux droits et obligations de la SA Banque Patrimoine et Immobilier,

- prononcé la jonction des instances n° 09/13299 et n° 15/4597,

- rejeté la demande de sursis à statuer formée par M. Jean-Luc Y... et Mme Geneviève X... épouse Y...,

- rejeté la demande de provision formée par la SA Crédit Immobilier de France Développement,

- rejeté la demande de communication de pièces formée par la SA Crédit Immobilier de France Développement,

- condamné in solidum M. Jean-Luc Y... et Mme Geneviève X... épouse Y... à verser à la SA Crédit Immobilier de France Développement la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- renvoyé la cause et les parties à l'audience du jeudi 7 décembre 2017 à 9h00,

- enjoint à M. Jean-Luc Y... et Mme Geneviève X... épouse Y... de conclure au fond pour cette date,

- condamné in solidum M. Jean-Luc Y... et Mme Geneviève X... épouse Y... aux dépens de l'incident ;

Vu la déclaration du 12 juillet 2017, par laquelle M. Jean-Luc Y... et MmeGeneviève X... épouse Y... ont relevé appel de cette décision ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 5 mars 2018, aux termes desquelles M. Jean-Luc Y... et Mme Geneviève X... épouse Y... demandent à la cour de :

- réformer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle rejette la demande de sursis à statuer sur l'assignation de la banque,

Vu les articles 101, 105, 775 du code de procédure civile,

Vu les articles 30 alinéa 2 du code de procédure civile et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- ordonner le sursis à statuer sur l'assignation du Crédit Immobilier de France Développement, venant aux droits de la Banque Patrimoine et Immobilier, jusqu'à ce qu'une décision définitive et irrévocable soit rendue sur leur plainte actuellement en cours d'instruction devant le tribunal de grande instance de Marseille,

A titre subsidiaire et en tout état de cause,

Vu l'article 4 du code de procédure pénale, l'article 30 du code civil, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

Vu l'article 771 du code de procédure civile,

- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle déboute le Crédit Immobilier de France Développement de sa demande de provision,

- débouter le Crédit Immobilier de France Développement de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner le Crédit Immobilier de France Développement à leur payer une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le Crédit Immobilier de France Développement aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 6 mars 2018, aux termes desquelles la SA Crédit Immobilier de France Développement, venant aux droits de la SA Banque Patrimoine et Immobilier, demande à la cour de :

Vu les articles 4 et suivants du code de procédure pénale,

Vu les articles 101 et suivants, 367, 700 et 771 du code de procédure civile,

Vu les pièces produites au débat,

Vu la jurisprudence,

- confirmer l'ordonnance déférée sauf en ce qu'elle a rejeté la condamnation des époux Y... au paiement d'une provision entre ses mains,

- débouter les époux Y... de leur demande de sursis à statuer,

- condamner les époux Y... au paiement provisionnel de la somme de 779,06 euros tous les 10 de chaque mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- débouter les époux Y... de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- la dire et juger recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

- condamner les époux Y... au paiement de la somme de 3.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les époux Y... aux entiers dépens ;

SUR CE, LA COUR,

Attendu que les époux Y... ont acquis par l'intermédiaire de la SAS Apollonia ou de personnes en lien avec elle des biens immobiliers financés par des prêts souscrits auprès de différentes banques ; que ces ventes et prêts ont fait l'objet de différents actes notariés;

Que contestant les conditions dans lesquelles les différents contrats ont été souscrits et matérialisés, ils ont introduit, le 16 octobre 2009, une action en responsabilité à l'encontre des différents intervenants devant le tribunal de grande instance de Marseille ;

Que par ordonnance du 1er juillet 2010, le juge de la mise en état de ce tribunal a ordonné le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale en cours ;

Que par acte d'huissier en date du 6 février 2012, la SA Banque Patrimoine et Immobilier (la BPI) aux droits de laquelle vient la SA Crédit Immobilier de France Développement (le CIFD) a fait assigner les emprunteurs devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence à l'effet qu'ils soient condamnés, à titre principal, à payer les sommes dues au titre des différents prêts ;

Que par ordonnance en date du 12 mars 2015, le juge de la mise en état de ce tribunal s'est dessaisi au profit de celui de Marseille;

Que statuant sur incident, le juge de la mise en état au tribunal de grande instance de Marseille a prononcé l'ordonnance entreprise dans les termes ci-dessus rappelés ;

Sur le sursis à statuer

Attendu qu'au soutien de leur demande de sursis à statuer, les époux Y... font valoir notammentque :

- la connexité impose d'instruire et juger les affaires ensemble au regard des articles 101 et 105 du code de procédure civile, et de l'ordonnance du 12 mars 2015 ;

- les prêts sont le fruit d'une escroquerie en bande organisée en cours d'instruction devant le tribunal de grande instance de Marseille ; l'action pénale et les actions civiles forment un tout indivisible ; la procédure pénale va déterminer les responsabilités et le degré d'implication de chacun;

- ils ne peuvent être privés de moyens de se défendre au regard du droit à un procès équitable et du principe d'égalité des armes ;

- l'absence de mise en examen de la banque n'est pas un critère d'appréciation du sursis à statuer; la formation des prêts résulte de l'intervention de plusieurs intermédiaires et intervenants dont le CIFD est responsable ;

- leur consentement a été vicié par des manoeuvres dolosiveset la nullité des prêts a été sollicitée ; il existe un risque de contrariété des décisions civiles et pénales ;

- la durée de la procédure pénale n'est pas de leur fait et doit s'apprécier au regard de la complexité du litige; de plus, le parquet de Marseille a pris un réquisitoire supplétif le 29 novembre 2017 du chef de recel d'escroqueries en bande organisée;

- le risque de contrariété de décisions existeet il y a lieu d'éviter un déni de justice et un dysfonctionnement grave de la justice ;

Attendu que pour s'opposer à la demande, la SA Crédit Immobilier de France Développement relève notamment que:

- conformément à l'article 4 du code de procédure pénale, le sursis présente un caractère facultatif lorsqu'il n'est pas imposé par le législateur et relève dès lors du pouvoir discrétionnaire conféré au juge ;

- la connexité n'emporte par le sursis; la décision du juge de la mise en état du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a eu pour objet unique de renvoyer le litige à une autre juridiction tenue de retenir sa compétence mais qui conserve sa libre appréciation quant aux mesures d'administration judiciaire qu'elle prend,

- les instances jointes peuvent être instruites et jugées à des rythmes différents de sorte que la jonction, simple mesure administrative, n'emporte pas le sursis;

- l'action pénale n'a pas d'incidence sur l'action en paiement de la banque d'autant que cette dernière ne fonde pas sa demande sur les actes authentiques de prêt et qu'elle n'est plus mise en examen;

- le sursis sollicité est incompatible avec une bonne administration de la justice alors que le juge doit statuer dans un délai raisonnable, que la demande en paiement de la banque ne présente aucune difficulté sérieuse, et que le risque de contrariété des décisions est inexistant puisque le mécanisme de la compensation de créances s'appliquera s'il doit l'être;

Attendu que c'est de manière inopérante que les époux Y... arguent des motifs selon lesquels le juge de la mise en état du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a fondé la décision de renvoi pour cause de connexité dès lors que l'autorité de la chose jugée n'est attachée qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet de la décision et a été tranché dans son dispositif;

Que par ailleurs, ni la jonction, ni la connexité ne créent de procédure unique ; que dès lors, le sursis à statuer précédemment ordonné dans l'une des procédures ayant fait l'objet de la jonction ne saurait, de ce seul fait, emporter l'obligation de surseoir à statuer dans l'autre instance, fût-elle connexe ; qu'il appartient en effet au juge d'examiner, dans chacune des procédures, s'il existe un cas de sursis à statuer obligatoire ou facultatif ;

Que l'article 4 du code de procédure pénale n'impose le sursis à statuer que sur le seul jugement de l'action civile exercée devant une juridiction civile en réparation du dommage causé par l'infraction ; qu'en dehors de cette hypothèse, l'opportunité du sursis à statuer est appréciée discrétionnairement par le juge, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice;

Qu'en l'espèce, il est constant que la demande formée par le CIFD ne tend pas à la réparation du dommage causé par les infractions, de sorte que le prononcé du sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale présente un caractère facultatif ;

Que les emprunteurs poursuivant, en défense à l'action en paiement initiée par le CIFD, la nullité pour dol du prêt consenti, il apparaît d'une bonne administration de la justice et afin d'éviter tout risque de contrariété de décisions, de ne statuer sur l'existence de manoeuvres dolosives susceptibles d'avoir vicié son consentement qu'au vu des résultat de l'information judiciaire suivie, notamment, du chef d'escroquerie en bande organisée ; que la circonstance que le CIFD n'est pas mis en examen est sans portée, dès lors que les agissements de tiers, qu'ils soient eux-mêmes mis en examen ou non, pourront, le cas échéant, caractériser l'existence de manoeuvres dolosives, en présence d'une collusion frauduleuse ;

Que l'ordonnance sera, en conséquence, infirmée de ce chef et le sursis à statuer ordonné, dans les termes énoncés au dispositif du présent arrêt ;

Sur la provision

Attendu que le Crédit Immobilier de France Développement sollicite l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle l'a débouté de sa demande de provision, en faisant valoir que la contestation de l'emprunteur ne peut être considérée comme sérieuse puisque ce dernier ne conteste ni l'existence ni le principe de la créance, et qu'il ne démontre pas la réalité de ses difficultés financières ou une situation de surendettement ;

Mais attendu que la demande de provision présentée par le Crédit Immobilier de France Développement se heurte à une contestation sérieuse au sens de l'article 771, paragraphe 3 du code de procédure civile, les emprunteurs contestant notamment le droit aux intérêts contractuels du prêteur ;

Que l'ordonnance sera confirmée de ce chef ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Attendu que l'équité justifie d'allouer aux appelants une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME l'ordonnance entreprise, sauf en ce qu'elle a débouté M. Jean-Luc Y... et Mme Geneviève X... épouse Y... de leur demande de sursis à statuer et l'a condamné aux frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens ;

STATUANT à nouveau des chefs d'infirmation,

ORDONNE le sursis à statuer de l'action en paiement engagée par la SA Crédit Immobilier de France Développement venant aux droits de la SA Banque Patrimoine et Immobilier, dans l'attente de l'issue de l'information judiciaire suivie devant le tribunal de grande instance de Marseille sous le numéro d'instruction G08/00012 du chef, notamment, d'escroquerie en bande organisée ;

CONDAMNE la SA Crédit Immobilier de France Développement venant aux droits de la SA Banque Patrimoine et Immobilier à verser à M. Jean-Luc Y... et Mme Geneviève X... épouse Y... la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

REJETTE toute autre demande des parties,

CONDAMNE la SA Crédit Immobilier de France Développement venant aux droits de la SA Banque Patrimoine et Immobilier aux dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre c
Numéro d'arrêt : 17/13440
Date de la décision : 31/05/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°17/13440 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-31;17.13440 ?
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