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24/05/2018 | FRANCE | N°17/12900

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 24 mai 2018, 17/12900


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE


8e Chambre C





ARRÊT


DU 24 MAI 2018





N° 2018/ 200




















Rôle N° N° RG 17/12900 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA22S











Evelyne X... épouse Y...


Luc Y...








C/





SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DÉVELOPPEMENT - CIFD

























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à :


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ERMENEUX























Décision déférée à la Cour :





Ordonnance du juge de la mise en état du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 15 Juin 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 14/10627.








APPELANTS





Madame Evelyne X... épouse Y..., demeurant [.....

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre C

ARRÊT

DU 24 MAI 2018

N° 2018/ 200

Rôle N° N° RG 17/12900 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA22S

Evelyne X... épouse Y...

Luc Y...

C/

SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DÉVELOPPEMENT - CIFD

Grosse délivrée

le :

à :

Z...

ERMENEUX

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du juge de la mise en état du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 15 Juin 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 14/10627.

APPELANTS

Madame Evelyne X... épouse Y..., demeurant [...]

représentée par Me Sandra Z... de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD Z..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et assistée de Me Cécile PION, avocat au barreau de MARSEILLE de la SCP GOBERT & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur Luc Y..., demeurant [...]

représenté par Me Sandra Z... de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD Z..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et assistée de Me Cécile PION, avocat au barreau de MARSEILLE de la SCP GOBERT & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SA Crédit Immobilier de France Développement - CIFD venant aux droits de la S.A. Banque Patrimoine et Immobilier - B.P.I., prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est [...]

représentée par Me Agnès A... de la SCP ERMENEUX-ARNAUD- CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 27 Mars 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de:

Monsieur Dominique PONSOT, Président

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Conseiller

Madame Isabelle DEMARBAIX, Vice-président placé auprès du Premier Président

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 mai 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 mai 2018,

Signé par Monsieur Dominique PONSOT, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu l'ordonnance du tribunal de grande instance de Marseille du 15 juin 2017 ayant, notamment :

- prononcé la jonction des instances n° 13/7470 et n° 14/10627,

- rejeté la demande de sursis à statuer formée par M. Luc Y... et Mme Evelyne X... épouse Y...,

- rejeté la demande de provision formée par la SA Banque Patrimoine et Immobilier,

- enjoint à M. Luc Y... et Mme Evelyne X... épouse Y... de produire les déclarations fiscales de revenus fonciers pour les années 2006 à 2016, ainsi que les déclarations suivantes suivant leur établissement,

- condamné in solidum M. Luc Y... et Mme Evelyne X... épouse Y... à verser à la SA Banque Patrimoine et Immobilier la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande formée par M. Luc Y... et Mme Evelyne X... épouse Y... sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- renvoyé la cause et les parties à l'audience du jeudi 16 novembre 2017 à 9h00,

- enjoint à M. Luc Y... et Mme Evelyne X... épouse Y... de conclure au fond pour cette date,

- condamné in solidum M. Luc Y... et Mme Evelyne X... épouse Y... aux dépens de l'incident;

Vu la déclaration du 4 juillet 2017, par laquelle M. Luc Y... et Mme Evelyne X... épouse Y... ont relevé appel de cette décision ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 1er mars 2018, aux termes desquelles M. Luc Y... et Mme Evelyne X... épouse Y... demandent à la cour de :

- réformer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle rejette la demande de sursis à statuer sur l'assignation de la banque,

Vu les articles 101, 105, 775 du code de procédure civile,

Vu les articles 30 alinéa 2 du code de procédure civile et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- ordonner le sursis à statuer sur l'assignation de la SA Crédit Immobilier de France Développement, venant aux droits de la SA Banque Patrimoine et Immobilier, jusqu'à ce qu'une décision définitive et irrévocable soit rendue sur leur plainte actuellement en cours d'instruction devant le tribunal de grande instance de Marseille,

A titre subsidiaire et en tout état de cause,

Vu l'article 4 du code de procédure pénale, l'article 30 du code civil, et l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- ordonner le sursis à statuer sur l'assignation de la SA Crédit Immobilier de France Développement, venant aux droits de la SA Banque Patrimoine et Immobilier, jusqu'à ce qu'une décision définitive et irrévocable soit rendue sur leur plainte actuellement en cours d'instruction devant le tribunal de grande instance de Marseille,

Vu l'article 771 du code de procédure civile,

- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle déboute la SA Crédit Immobilier de France Développement de sa demande de provision,

- débouter le Crédit Immobilier de France Développement de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner le Crédit Immobilier de France Développement à leur payer une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le Crédit Immobilier de France Développement aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 6 mars 2018, aux termes desquelles la SA Crédit Immobilier de France Développement, venant aux droits de la SA Banque Patrimoine et Immobilier, demande à la cour de :

Vu les articles 4 et suivants du code de procédure pénale,

Vu les articles 101 et suivants, 367, 700 et 771 du code de procédure civile,

Vu les pièces produites au débat,

Vu la jurisprudence,

- confirmer l'ordonnance déférée sauf en ce qu'elle a rejeté la condamnation des époux Y... au paiement d'une provision entre ses mains,

- débouter les époux Y... de leur demande de sursis à statuer,

- condamner les époux Y... au paiement provisionnel de la somme de 969,37 euros tous les 10 de chaque mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- débouter les époux Y... de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- la dire et juger recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

- condamner les époux Y... au paiement de la somme de 3.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les époux Y... aux entiers dépens ;

SUR CE

Attendu que M. Luc Y... et Mme Evelyne X... épouse Y... ont acquis par l'intermédiaire de la SAS Apollonia ou de personnes en lien avec elle des biens immobiliers financés par des prêts souscrits auprès de différentes banques ; que ces ventes et prêts ont fait l'objet de différents actes notariés;

Que par acte d'huissier en date du 29 août 2012, la SA Banque Patrimoine et Immobilier (la BPI) aux droits de laquelle vient la SA Crédit Immobilier de France Développement (le CIFD) a fait assigner les emprunteurs devant le tribunal de grande instance de Saint-Étienne à l'effet qu'ils soient condamnés, à titre principal, à payer les sommes dues au titre des différents prêts;

Que par ordonnance en date du 26 juin 2014, le juge de la mise en état de ce tribunal s'est dessaisi au profit de celui de Marseille;

Que parallèlement, les époux Y... ont introduit, selon acte d'huissier en date du 14 juin 2013, une action en responsabilité des différents intervenants devant le tribunal de grande instance de Marseille ;

Que par ordonnance du 8 janvier 2015, le juge de la mise en état de ce tribunal a ordonné le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale en cours ;

Que statuant sur incident, le juge de la mise en état au tribunal de grande instance de Marseille a prononcé l'ordonnance entreprise dans les termes ci-dessus rappelés ;

Sur le sursis à statuer

Attendu qu'au soutien de leur demande de sursis à statuer, M. Luc Y... et Mme Evelyne X... épouse Y... font valoir notammentque :

- la connexité impose d'instruire et juger les affaires ensemble au regard des articles 101 et 105 du code de procédure civile, et de l'ordonnance du 26 juin 2014 ;

- les prêts sont le fruit d'une escroquerie en bande organisée en cours d'instruction devant le tribunal de grande instance de Marseille ; l'action pénale et les actions civiles forment un tout indivisible ; la procédure pénale va déterminer les responsabilités et le degré d'implication de chacun;

- l'absence de mise en examen de la banque n'est pas un critère d'appréciation du sursis à statuer tandis que sa défaillance a créé une situation dangereuse sans laquelle l'escroquerie n'aurait pas prospéré ;

- leur consentement a été vicié par dol et ils ont conclu en défense à la nullité des prêts;

- la durée de la procédure pénale ne résulte pas de leur fait et doit s'apprécier au regard de la complexité du litige; de plus, le parquet de Marseille a pris un réquisitoire supplétif le 29 novembre 2017 du chef de recel d'escroqueries en bande organisée;

- le risque de contrariété de décisions existe et il y a lieu d'éviter un déni de justice et un dysfonctionnement grave de la justice ;

Attendu que pour s'opposer à la demande, le Crédit Immobilier de France Développement indique notamment que:

- conformément à l'article 4 du code de procédure pénale, le sursis présente un caractère facultatif lorsqu'il n'est pas imposé par le législateur et relève dès lors du pouvoir discrétionnaire conféré au juge ;

- la connexité n'emporte par le sursis; la décision du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Saint-Étienne a eu pour objet unique de renvoyer le litige à une autre juridiction tenue de retenir sa compétence mais qui conserve sa libre appréciation quant aux mesures d'administration judiciaire qu'elle prend,

- les instances jointes peuvent être instruites et jugées à des rythmes différents de sorte que la jonction, simple mesure administrative, n'emporte pas le sursis;

- l'action pénale n'a pas d'incidence sur l'action en paiement de la banque d'autant que cette dernière ne fonde pas sa demande sur les actes authentiques de prêt et qu'elle n'est plus mise en examen;

- le sursis sollicité est incompatible avec une bonne administration de la justice alors que le juge doit statuer dans un délai raisonnable, que la demande en paiement de la banque ne présente aucune difficulté sérieuse, et que le risque de contrariété des décisions est inexistant puisque le mécanisme de la compensation de créances s'appliquera s'il doit l'être;

Attendu que c'est de manière inopérante que les époux Y... arguent des motifs selon lesquels le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Saint-Étienne a fondé la décision de renvoi pour cause de connexité dès lors que l'autorité de la chose jugée n'est attachée qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet de la décision et a été tranché dans son dispositif;

Que par ailleurs, ni la jonction, ni la connexité ne créent de procédure unique ; que dès lors, le sursis à statuer précédemment ordonné dans l'une des procédures ayant fait l'objet de la jonction ne saurait, de ce seul fait, emporter l'obligation de surseoir à statuer dans l'autre instance, fût-elle connexe ; qu'il appartient en effet au juge d'examiner, dans chacune des procédures, s'il existe un cas de sursis à statuer obligatoire ou facultatif ;

Que l'article 4 du code de procédure pénale n'impose le sursis à statuer que sur le seul jugement de l'action civile exercée devant une juridiction civile en réparation du dommage causé par l'infraction ; qu'en dehors de cette hypothèse, l'opportunité du sursis à statuer est appréciée discrétionnairement par le juge, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice;

Qu'en l'espèce, il est constant que la demande formée par le CIFD ne tend pas à la réparation du dommage causé par les infractions, de sorte que le prononcé du sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale présente un caractère facultatif ;

Que, toutefois, les époux Y... poursuivant, en défense à l'action en paiement initiée par le CIFD, la nullité pour dol des prêts consentis, il apparaît d'une bonne administration de la justice et afin d'éviter tout risque de contrariété de décisions, de ne statuer sur l'existence de manoeuvres dolosives susceptibles d'avoir vicié leur consentement qu'au vu des résultat de l'information judiciaire suivie, notamment, du chef d'escroquerie en bande organisée ; que la circonstance que le CIFD n'est pas mis en examen est sans portée, dès lors que les agissements de tiers, qu'ils soient eux-mêmes mis en examen ou non, pourront, le cas échéant, caractériser l'existence de manoeuvres dolosives, en présence d'une collusion frauduleuse ;

Sur la provision

Attendu que le Crédit Immobilier de France Développement sollicite l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle l'a débouté de sa demande de provision, en faisant valoir que la contestation de l'emprunteur ne peut être considérée comme sérieuse puisque ce dernier ne conteste ni l'existence ni le principe de la créance, et qu'il ne démontre pas la réalité de ses difficultés financières ou une situation de surendettement ;

Mais attendu que la demande de provision présentée par le CIFD se heurte à une contestation sérieuse au sens de l'article 771, paragraphe 3 du code de procédure civile, les époux Y... demandant notamment la nullité des contrats de prêt ; que l'ordonnance sera confirmée de ce chef ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME l'ordonnance entreprise, sauf en ce qu'elle a débouté les époux Y... de leur demande de sursis à statuer et les a condamnés au frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens;

STATUANT à nouveau des chefs d'infirmation,

ORDONNE le sursis à statuer de l'action en paiement engagée par la SA Crédit Immobilier de France Développement venant aux droits de la SA Banque Patrimoine et Immobilier, dans l'attente de l'issue de l'information judiciaire suivie devant le tribunal de grande instance de Marseille sous le numéro d'instruction G08/00012 du chef, notamment, d'escroquerie en bande organisée;

CONDAMNE la SA Crédit Immobilier de France Développement venant aux droits de la SA Banque Patrimoine et Immobilier solidairement à verser à M. Luc Y... et Mme Evelyne X... épouse Y... la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

REJETTE toute autre demande des parties,

CONDAMNE la SA Crédit Immobilier de France Développement venant aux droits de la SA Banque Patrimoine et Immobilier aux dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre c
Numéro d'arrêt : 17/12900
Date de la décision : 24/05/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°17/12900 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-24;17.12900 ?
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