COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
17e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 12 AVRIL 2018
N° 2018/
NT/FP-D
Rôle N° N° RG 17/03169 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BABNV
[F] [C]
C/
SARL TERRAZUR
Grosse délivrée
le :
à :
Me Olivier LAERI, avocat au barreau de PARIS
Me Henri ROBERTY, avocat au barreau de GRASSE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 18 Janvier 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 15/01019.
APPELANTE
Madame [F] [C], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Olivier LAERI, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
SARL TERRAZUR agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Henri ROBERTY, avocat au barreau de GRASSE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785,786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Février 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Luc THOMAS, Président
Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller
Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Avril 2018
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Avril 2018
Signé par Monsieur Jean-Luc THOMAS, Président et Madame Françoise PARADIS-DEISS,, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCEDURE
Mme [F] [C] embauchée en qualité de directrice d'agence le 2 juillet 2012 par la SARL Terrazur, exerçant une activité d'agent immobilier à [Localité 1], a fait l'objet d'un licenciement économique par lettre du 30 janvier 2015 ainsi motivée :
« (') Suite à notre entretien préalable en date du 12/0 l/2015 où nous vous avons exposé les motifs qui nous conduisaient à envisager votre licenciement pour raisons économiques :
Suite à une suppression de poste liée à trois ans de pertes importantes consécutives rendant les capitaux propres négatifs et rendant donc impossible le maintien de votre emploi.
Nous vous confirmons donc votre lícenciement (...) ».
Saisi par Mme [F] [C], le conseil de prud'hommes de Cannes a, par jugement du 18 janvier 2017, dit son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et n'ayant occasionné aucun préjudice moral mais condamné la SARL Terrazur à payer 30 194 € à titre de rappel de frais professionnels et 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [F] [C] a relevé appel de cette décision le 16 février 2017.
Elle soutient en cause d'appel que la SARL Terrazur n'a effectué aucune recherche de reclassement, conteste les difficultés économiques de l'entreprise ayant effectué plusieurs embauches en 2015 et pourvu à son remplacement et évoque le non-remboursement de ses frais professionnels à compter du mois d'octobre 2012.
La salariée sollicite ainsi le paiement de :
42 000 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
5 000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
30 194 € à titre de rappel de frais professionnels,
3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La SARL Terrazur conclut au bien-fondé du licenciement en raison des difficultés économiques récurrentes et pertes qu'elle a rencontrées à partir de l'année 2012 et de l'impossibilité de pourvoir au reclassement de la salariée et fait valoir que les frais professionnels dont le remboursement est sollicité, excèdent le plafond de 1 000 € mensuels fixé par le contrat de travail et ne sont en rien justifiés par Mme [F][C].
L'intimée sollicite ainsi le rejet de toutes les demandes de l'appelante, le paiement de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et subsidiairement la désignation d'un expert judiciaire quant aux frais professionnels.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 8 septembre 2017.
La cour renvoie pour plus ample exposé aux écritures reprises et soutenues oralement par les conseils des parties à l'audience d'appel tenue le 19 février 2018.
MOTIFS DE LA DECISION
1) Sur le licenciement
Attendu qu'il sera constaté, outre le fait que la lettre de licenciement économique du 30 janvier 2015 n'évoque pas le reclassement de Mme [F] [C], qu'aucune pièce produite par la SARL Terrazur ne confirme qu'une quelconque recherche concrète d'une solution de reclassement ait été entreprise conformément à l'article L 1233-4 du code du travail, avant la notification du licenciement, non seulement en interne mais également au sein des autres sociétés du groupe Immorevel auquel elle appartient, comprenant plusieurs implantations régionales selon le document de présentation produit (pièce 14) mais dont l'activité, le périmètre exact comme l'effectif, en l'absence de tout registre du personnel produit, ne sont ni précisés ni vérifiables ;
Attendu qu'en l'état de ces seules constatations le licenciement économique sera déclaré sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que compte tenu de l'ancienneté de Mme [F] [C] soit approximativement 2 ans et demi au service d'une entreprise employant moins de 11 salariés, du salaire mensuel brut qu'elle a perdu (3 230,78 € hors 13eme mois) et des pièces relatives à sa situation professionnelle (indemnisation par Pôle emploi justifiée jusqu'au 10 août 2015), il lui sera alloué en application de l'article 1235-5 du code du travail dans sa version alors applicable, une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse fixée à 12 000 € ;
2) Sur les frais professionnels
Attendu que le salarié a droit au remboursement des frais qu'il justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur ;
Attendu que l'examen des documents produits par Mme [F] [C], à savoir des tableaux de type « excel » récapitulant des frais de déplacement mensuels (pièces 5), quelques notes de restaurant, des factures de travaux adressées à l'agence immobilière ne correspondant manifestement pas à des frais professionnels et un extrait de la comptabilité mentionnant des écritures comptables intitulées « frais Ferriel [C]», ne permet pas de vérifier la nature professionnelle des dépenses dont le remboursement est sollicité, voire la réalité même des déplacements constituant la majeure partie de la réclamation ; qu'en outre, l'employeur ayant explicitement contesté les décomptes de Mme [F] [C] dans un courriel du 10 septembre 2014 (pièce 6), cette dernière n'est pas fondée à soutenir dans ses écritures d'appel que ses notes de frais ont été tacitement validées par le gérant de l'entreprise ; qu'en l'état de ces constatations, la demande en remboursement sera rejetée ;
3) Sur les autres demandes
Attendu que Mme [F] [C] ne justifiant par aucune pièce convaincante que l'employeur lui aurait occasionné un préjudice moral spécifique en raison de manquements à ses obligations contractuelles, la demande en dommages et intérêts à ce titre sera rejetée ;
Attendu que l'équité exige d'allouer à Mme [F] [C] 3 000 € en compensation de ses frais non compris dans les dépens par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que les entiers dépens seront laissés à la charge de la SARL Terrazur qui succombe partiellement à l'instance ;
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile :
Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Grasse du 18 janvier 2017 et statuant à nouveau :
Dit le licenciement économique de Mme [F] [C] dépourvu de cause réelle et sérieuse :
Condamne la SARL Terrazur à payer à Mme [F] [C] une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant de 12 000 € et une indemnité de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire ;
Condamne la SARL Terrazur aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT