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27/03/2018 | FRANCE | N°16/13557

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1ère chambre a, 27 mars 2018, 16/13557


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1ère Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 27 MARS 2018

L.V

N° 2018/













Rôle N° N° RG 16/13557 - N° Portalis DBVB-V-B7A-67M6







[D] [N]

[Z], [N], [P], [H] [N] NÉE [C]





C/



DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES





















Grosse délivrée

le :

à :Me DEUR

Me DESOMBRE







r>








Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 23 Juin 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 14/05305.





APPELANTS



Monsieur [D] [N]

né le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 1]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représe...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1ère Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 27 MARS 2018

L.V

N° 2018/

Rôle N° N° RG 16/13557 - N° Portalis DBVB-V-B7A-67M6

[D] [N]

[Z], [N], [P], [H] [N] NÉE [C]

C/

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES

Grosse délivrée

le :

à :Me DEUR

Me DESOMBRE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 23 Juin 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 14/05305.

APPELANTS

Monsieur [D] [N]

né le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 1]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Nicolas DEUR de l'ASSOCIATION E. W. D ET ASSOCIES, avocat au barreau de NICE

assisté par Me AMEDEE MANESME Gilles, avocat au barreau de PARIS, plaidant

Madame [Z], [N], [P], [H] [N] NÉE [C] demeurant [Adresse 1]

née le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 2]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Nicolas DEUR de l'ASSOCIATION E. W. D ET ASSOCIES, avocat au barreau de NICE

assistée par Me AMEDEE MANESME Gilles, avocat au barreau de PARIS, plaidant

INTIMEE

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES Direction Départementale des Finances Publiques [Localité 3], représentée par son Directeur en exercice domicilié en cette qualité en ses bureaux, [Adresse 2]

représentée par Me Martine DESOMBRE de la SCP DESOMBRE M & J, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 19 Février 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame VIGNON, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller faisant fonction de Président,

Madame Danielle DEMONT, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Mars 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Mars 2018,

Signé par Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller faisant fonction de Président, et Madame Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

M. [D] [N] et son épouse Mme [Z] [C] épouse [N] ont fait l'objet d'un redressement d'impôt de solidarité sur la fortune ( ISF) pour les années 2009-2010-2011 pour un montant total de 663.509 € ayant abouti à la notification de trois avis de mise en recouvrement en date du 10 février 2014, au motif de la réévaluation par les services de leur Villa Soleiado, sise sur la commune de [Localité 4].

Selon proposition de rectification en date du 06 août 2012 notifiée aux époux [N], l'administration fiscale a rehaussé la valeur vénale de cette villa, déclarée à hauteur de 1.019.173 €, en la fixant ainsi:

- année 2009: 24.301.000 €

- année 2010: 24.301.000 €

- année 2011: 24.787.000 €.

Le service a également considéré que le manquement délibéré des déclarants justifiait que l'impôt redressé soit majoré de 40%, ce qui aboutissait à une proposition de redressement de 1.741.213 € dont 1.161.083 € de droits.

En réponse aux observations formulées par les contribuables, l'administration a maintenu partiellement suivant lettre du 08 février 2013 les rectifications notifiées:

- année 2009: 15.608.000 €

- année 2010: 15.608.000 €

- année 2011: 1.7150.000 €.

Le litige persistant entre les parties sur la détermination de la valeur vénale du bien, celui-ci a été soumis à la commission départementale de conciliation qui, dans sa séance du 10 octobre 2013, a ramené la valeur vénale de la propriété litigieuse à 10.707.000 € pour les trois années concernées.

L'administration fiscale s'est rangée à l'avis de la commission départementale de conciliation et les impositions supplémentaires correspondantes ont donc été notifiées le 10 février 2014.

La contestation formée par M. et Mme [N] ayant fait l'objet d'une décision de rejet le 21 juillet 2014, ces derniers ont saisi le tribunal de grande instance de Nice, par acte d'huissier en date du 18 septembre 2014, demandant:

- à titre principal, la décharge des impositions supplémentaires mises à leur charge au motif que la procédure de rectification dont ils ont fait l'objet est irrégulière,

- à titre subsidiaire: de fixer la valeur vénale de leur propriété pour les années en cause à 7.000.000 € et d'annuler la majoration de 40% retenue en cas de manquement délibéré.

Par jugement contradictoire en date du 23 juin 2016, le tribunal de grande instance de Nice a:

- déclaré régulière la procédure de rectification diligentée par l'administration fiscale au titre de l'ISF dû au titre des exercices 2009-2010-2011 par M. et Mme [N],

- fixé la valeur vénale de la Villa Soleiado au 1er janvier des années 2009-2010-2011 à la somme de 7.586.902 € ,

- dit que l'administration fiscale devra calculer l'insuffisance de déclaration en prenant en compte la valeur vénale de la propriété de M. et Mme [N] telle qu'elle a été fixée par le tribunal pour les années 2009-2010 et 2011,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné M. et Mme [N] à payer à la Direction générale des finances publiques [Localité 3] la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par déclaration en date du 20 juillet 2016, les époux [N] ont interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 22 décembre 2016, M. et Mme [N] demandent à la cour de:

- dire et juger recevable et bien fondé l'appel interjeté par M. et Mme [N] à l'encontre du jugement du 23 juin 2016,

- infirmer ledit jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau:

- déclarer la procédure fiscale suivie à l'encontre des époux [N] comme nulle pour violation du principe du contradictoire et non motivation de l'avis de la commission de conciliation,

Et à défaut:

- arrêter la valeur vénale de la villa Soleiado à 7.000.000 € pour les années 2009,2010 et 2011,

- annuler les pénalités de mauvaise foi de 40%,

- condamner le services des impôts à supporter une indemnité de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils concluent en premier lieu à l'irrégularité de la procédure de contrôle de l'ISF à leur encontre au motif d'une violation du principe du contradictoire, qui est consubstantiel à tout contrôle et/ou examen des déclaration fiscales du contribuables susceptibles de déboucher sur des vérifications, en faisant valoir les observations suivantes:

- en réponse à la proposition de rectification qui leur a été adressée le 06 août 2012, ils ont adressé, par l'intermédiaire de leur conseil, par courrier du 17 octobre 2012, un rapport d'évaluation établi le 26 septembre 2012 par M. [U], expert judiciaire, qui conclut à une valeur de leur villa de 7.000.000 €,

- le service a commis de nombreuses erreurs substantielles concernant notamment la surface de la propriété et ses caractéristiques, les référentiels retenus par l'administration ne correspondant à la Villa litigieuse: la surface utile retenue par l'inspecteur des impôts, Mme [X], était de 555 m2 alors que la rapport de M. [U] fait état d'une surface de 347 m2,

- le premier rendez-vous du 07 décembre 2012 s'est révélé purement formel puisque l'inspectrice qui les recevait, Mme [X], avait déjà rédigé sa réponse aux observations du contribuable avant le rendez-vous et elle a fait lecture dès le début du rendez-vous,

- ils ont adressé le 30 janvier 2013 un rapport établi par le géomètre-expert faisant état d'une superficie à prendre en compte de 384,40 m2 mais le nouveau rendez-vous qui devait être pris après la transmission de ce rapport n'a jamais eu lieu, compte tenu du refus de l'administration,

- celle-ci n'a finalement pris en compte que la seule valeur résultant du rapport du géomètre-expert sans aucune considération des autres éléments de contestation qu'ils avaient présentés lors du rendez-vous du 07 décembre 2012,

- ce refus de dialogue caractérisé a été dénoncé par leur conseil par courrier du 15 février 2013, l'administration prenant pour prétexte que leur courrier du 30 janvier 2013 n'apportait aucun élément nouveau alors qu'il avait été expressément convenu qu'une telle correspondance avait uniquement pour objet de communiquer l'attestation de superficie du géomètre-expert et que les parties devaient se revoir pour rechercher un consensus sur la valeur vénale de la propriété,

- ils ont également essuyé un refus de rendez-vous avec l'interlocuteur départemental ou tout autre supérieur hiérarchique et ont été informés par Mme [X], que s'agissant d'un contrôle sur pièces, la décision était prise de transmettre le dossier à la commission départementale de conciliation.

Ils en tirent pour conséquence que dans le cadre de la présente affaire, il rapportent la preuve:

- d'une exagération manifeste des redressements par le service des impôts, de 24 millions d'euros proposés à 7,5 millions finalement retenus par le tribunal,

- de la très mauvaise volonté du service des impôts à vouloir tenir compte des éléments objectifs de situation et de configuration présentés par eux, à l'exception du métré établi par le géomètre-expert,

- de la volonté du service des impôts à rendre le caractère contradictoire de la procédure totalement artificiel.

Ils considèrent que la procédure diligentée à leur encontre est également irrégulière au motif que l'avis de la commission de conciliation est radicalement vicié, puisqu'elle a adopté une motivation erronée et contradictoire en violation du principe posé par la Cour de Cassation, en recherchant une valeur moyenne plus proche des évaluations avancées par le service des impôts. Ils font valoir que le caractère vicié de l'avis de la commission de conciliation, formalité substantielle de la procédure d'imposition, qui devient alors irrégulière et doit être annulée.

Sur la valeur vénale de leur propriété, ils ne contestent pas l'analyse rigoureuse opérée par le tribunal pour arrêter la valeur au mètre carré à un montant de 21.930 € en ne retenant que des villas comparables, soit une valeur globale de la Villa de 7.586.902 €, ce qui correspond globalement à celui arrêté par le rapport d'expertise de M. [U] le 26 septembre 2012 à 7.000.000 €. Ils précisent que la commission départementale avait elle-même retenu un abattement sur les éléments non contestés de 15%, pourcentage qu'ils demandent à la cour de retenir, au lieu et place des 10% arbitrés par le tribunal, permettant de retrouver un montant de 7.165.408 €, très proche de la valeur proposée par M. [U].

Enfin, ils nient catégoriquement avoir délibérément minoré à l'ISF la valeur de la villa SOLEIADO, en rappelant qu'il s'agit d'une propriété entrée dans la famille depuis 4 générations, que cette villa été construite à la fin des années 80 pour un coût de 800.000 francs, qu'en déclarant leur propriété à un peu plus d'un million d'euros, ils ont opéré une réévaluation en vingt ans de ce bien de 260% et qu'il existe de très grandes difficultés à connaître la valeur de ce bien, qui n'est pas à vendre à l'extérieur de la famille, dans un marché totalement imprévisible, animé par des ressortissants étrangers ainsi que des investisseurs richissimes du Proche-Orient créant une bulle spéculative sur certaines villas, dont la leur ne fait pas partie. Ils estiment que dans ces conditions, la mauvaise foi ne se présumant pas, ils ne peuvent être réputés avoir eu connaissance de la valeur de leur villa qu'ils auraient intentionnellement minorée.

La DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES, Direction départementale des finances publiques [Localité 3], dans ses conclusions en réponse déposées et notifiées le 09 janvier 2017, demandent à la cour de:

- confirmer la régularité de la procédure de rectification contradictoire mise en oeuvre par l'administration,

- débouter les intéressés de l'ensemble de leurs prétentions et déclarer les impositions fondées,

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Nice en toutes ses dispositions,

- allouer à l'administration une indemnité de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle ne partage pas l'analyse des appelants sur l'irrégularité de la procédure de rectification diligentée à leur encontre, dont le caractère contradictoire a parfaitement été respecté au regard des dispositions des articles L 57 et R 57-1 du livre des procédures fiscales:

- elle a indiqué dans les propositions de rectification de façon claire la nature et les motifs de droits puis de fait des rehaussements envisagés ainsi que les éléments chiffrés et les termes de comparaison qui les justifient,

- elle a maintenu partiellement les rectification notifiées afin de tenir compte des observations des époux [N], la réponse qu'elle a apportée par lettre du 08 février 2013 répondant point par point à leurs arguments,

- s'agissant de l'absence de débat oral et contradictoire dont ils se prévalent ( refus d'un nouveau rendez-vous et de soumettre le litige à l'interlocuteur départemental), elle précise que de telles garanties concernent uniquement les échanges en cas de vérification de comptabilité ou examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, ce qui n'est pas le cas d'un contrôle des déclarations d'ISF dont la procédure contradictoire est écrite,

- sur la différence de superficie constatée, elle précise que le service vérificateur reprend les superficies contenues dans la documentation cadastrale mise à jour à partir des déclarations modèle H1 souscrites par les propriétaires eux-mêmes, que l'erreur ne lui est donc pas imputable et a en toute hypothèse été corrigée dans le cadre de la procédure contradictoire, compte tenu de l'attestation du géomètre qui lui a été communiquée, de sorte que les appelants ne subissent aucun grief,

- aucune disposition légale n'impose au vérificateur dans le cadre du contrôle sur pièces d'engager un dialogue, étant précisé qu'un rendez-vous a eu lieu le 07 décembre 2012,

- l'avis de la commission départementale de conciliation est parfaitement motivé au sens de l'article R* 60-3 du livre des procédures fiscales, que dans sa séance du 10 octobre 2013, la commission a statué après avoir procédé à l'audition des parties, l'administration, le conseil des époux [N] et l'expert immobilier qu'ils avaient mandaté, que son avis contient de manière précise la description du bien, sa situation, ses caractéristiques, étant observé qu'elle a établi sa valorisation après avoir écarté quatre termes de comparaison proposées par l'administration et accepté deux termes proposés par le conseil des appelants et que l'annexion des termes de comparaison retenus à la décision permet de porter à la connaissance du requérant les éléments comparatifs qui ont été pris en compte,

- le texte n'exige aucune parité entre membres non fonctionnaires et membres fonctionnaires composant ladite commission.

Sur l'évaluation, elle se range à la décision du tribunal de grande instance de Nice et s'oppose à la majoration du taux d'abattement réclamé par les époux [N] de 10 % à 15 % dès lors que le premier juge a écarté les trois termes de comparaison de l'administration et a retenu les quatre termes comparables proposés par l'expert [U] dans son rapport du 13 janvier 2014 pour établir la valeur vénale de la propriété en cause.

Elle sollicite l'application de la majoration de 40% pour manquement délibéré au titre de l'article 1729 du code général des impôts en faisant valoir que:

- en sa qualité de professionnel ayant exercé dans le domaine de l'immobilier, M. [N] ne pouvait pas ignorer l'évolution du marché immobilier de la [Localité 5] à la date du fait générateur des impositions litigieuses,

- suivant avis établi à la demande de Me [Q], notaire, les époux [N] ont eu connaissance le 27 décembre 2011 d'une valeur de leur propriété estimée à 7.182.300 €, valeur qui aurait dû les conduire à régulariser leur situation au regard des déclarations d'ISF des années litigieuses, leur propriété étant évaluée très en-deçà de la réalité,

- les appelants n'ont pas découvert la valeur de leur propriété à l'occasion de la cession de celle-ci à leurs enfants en 2012 sous couvert d'une SCI, la complexité du montage organisé pour la transmission de cette villa montre que les époux [N] ne pouvaient ignorer sa valeur dès lors que ce type d'organisation nécessite la participation de conseils expérimentés.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 06 février 2018.

MOTIFS

Sur la régularité de la procédure fiscale suivie à l'encontre de M. et Mme [N]

M. et Mme [N] concluent en premier lieu à l'irrégularité de la procédure de rectification diligentée à leur encontre au titre de l'ISF dû pour les années 2009-2010-2011 par l'administration fiscale en raison d'une part, d'une violation du principe du contradictoire et, d'autre part, de la non motivation de l'avis de la commission de conciliation.

Il est constant qu'en application de l'article 17 alinéa 1 du livre des procédures fiscales, l'administration des impôts peut rectifier le prix ou l'évaluation d'un bien ayant servi de base à la perception de droits d'enregistrement lorsque ce prix ou cette évaluation paraît inférieur à la valeur vénale réelle des biens transmis ou désignés dans les actes ou déclarations à taxer.

Le rectification correspondante est alors effectuée selon la procédure de rectification contradictoire prévues aux articles L 55 et suivants du livre des procédures fiscales.

En vertu de l'article 57 du même code, l'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation.

En l'espèce, l'administration fiscale a régulièrement adressé le 06 août 2012 aux époux [N] une proposition de rectification en opérant un rehaussement de la valeur de la vénale de la villa Soleiado au titre des trois exercices concernés, que cette proposition indique de façon claire la nature et les motifs des rehaussements envisagés ainsi que les éléments chiffrés et les termes de comparaison justifiant les redressements et qu'elle était donc suffisamment motivée pour permettre au contribuable d'en comprendre la signification et d'y répliquer en conséquence.

Il n'est pas contesté qu'en réponse aux observations formulées dans le délai légal par lettre du conseil des époux [N] en date du 17 octobre 2012 et suite à la transmission par eux, le 30 janvier 2013, du rapport établi par un géomètre expert sur la superficie de la villa litigieuse, l'administration a répondu favorablement de manière partielle à leurs observations, puisqu'elle a maintenu pour partie les rectifications notifiées, en prenant en compte précisément les éléments qui lui avaient été transmis par les appelants, par lettre du 08 février 2013.

A la lecture de cette lettre, il apparaît que l'administration fiscale a répondu point par point à l'ensemble des observations formulées par les époux [N], même si elle n'a fait pas droit à l'ensemble de leurs prétentions, ce qui ne saurait s'analyser en un défaut de réponse.

De même, le désaccord persistant après réception de la réponse aux observations du contribuable, la commission départementale de conciliation a été saisie conformément aux dispositions des articles L 59 et L 59 B du livre des procédures fiscales, étant observé que le service des impôts a pris en compte l'avis formulé par cette commission en adressant à M. et Mme [N] le 08 novembre 2013 une décision modificative de rectification.

Le caractère contradictoire de la procédure de rectification a été respecté par l'administration, qui n'avait pas à leur accorder un nouveau rendez-vous ni à soumettre leur litige à l'interlocuteur départemental, de telles modalités ne s'appliquant pas au contrôle dont ils faisaient l'objet et qui était soumis aux dispositions des articles L 17, L 57 et R 57-1 du livres des procédure fiscales, selon une procédure contradictoire mais écrite.

Les différences de superficies constatées, l'administration ayant opéré son rehaussement à partir d'une surface retenue de 555 m2, contre 384,40 m2 au final, ne sont pas de nature à vicier la procédure suivie, dès lors que le service vérificateur prend en considération les superficies figurant dans la documentation cadastrale mise à jour à partir des déclarations modèle H& souscrites par les propriétaires eux-mêmes, d'autant qu'en l'espèce, le service des impôts a corrigé, dans le cadre de la procédure contradictoire, la superficie de la villa Soleiado, en tenant compte précisément des observations formulées par le contribuable.

Concernant l'avis de la commission départementale de conciliation, celui-ci doit être, conformément à l'article R * 60-3 du livre des procédures fiscales, motivé de manière à permettre aux parties, à défaut d'accord, de poursuivre utilement leur discussion devant le juge au vu des éléments qu'elle a pris en considération.

L'obligation de motiver cet avis prévue à l'article susvisé est une formalité substantielle dont la violation entraîne la nullité de l'imposition.

En l'occurrence, dans sa séance du 10 octobre 2013, la commission a procédé à l'audition des parties: l'administration, le conseil des époux [N] et un expert immobilier mandaté par eux.

Au terme de l'avis qu'elle a rendu le 11 octobre 2013, la commission a:

- décrit précisément le bien et ses caractéristiques,

- établi sa valorisation, après avoir écarté quatre termes de comparaison proposés par l'administration estimés par elle comme non pertinents, pour retenir trois termes proposés par celle-ci et deux, par les contribuables, en motivant à chaque ses choix,

- appliqué un coefficient d'abattement pour tenir compte d'un certain nombre de particularités de la villa Soleiado, comme se trouvant adossée à une paroi rocheuse et à proximité de parcelles de terrain en friche.

La commission a calculé la valeur vénale du bien au titre des années litigieuses sur la base d'un prix au mètre carré pour retenir une valeur et a annexé les termes de comparaison retenus dans sa décision.

En considération de ces éléments, l'avis de la commission départementale de conciliation en date du 11 octobre est suffisamment motivé et répond aux exigences de l'article R* 60-3 du livre des procédures fiscales.

C'est donc à juste titre que le premier juge a déclaré régulière la procédure de rectification diligentée par l'administration fiscale au titre de l'ISF dû au titre des exercices 2009-2010-2011 par M. et Mme [N].

Sur la valeur vénale de la villa Soleiado pour les années 2009-2010-2011

En cause d'appel, les parties ne discutent aucunement l'analyse rigoureuse du tribunal de grande instance pour arrêter la valeur vénale de la villa Soleiado à un montant de 21.930 € ne retenant que des biens comparables, soit une valeur de la villa retenue à hauteur de 7.586,902 €, les époux [N] faisant observer que ce montant correspond globalement à celui arrêté par le rapport d'expertise de M.[U] qui a estimé à la propriété à 7.000.000 €.

Les parties s'opposent uniquement sur l'application d'un taux d'abattement:

- fixé à 10 % par le tribunal et dont l'administration sollicite la confirmation,

- M. et Mme [N] réclamant pour leur part un abattement de 15% conformément à ce qui a été retenu par la commission de conciliation.

Or, les deux rapports [U] dont se prévalent les époux [N] ont retenu un taux d'abattement de 10 % pour tenir compte de la particularité de la villa SOLEIADO dévalorisée par l'existence d'une falaise dominant les constructions ôtant ainsi toute vue de ce côté ainsi que de la proximité du terrain correspondant à l'ancienne carrière et dégradant l'environnement ce la propriété.

Aucun élément ne justifie en revanche de retenir un taux d'abattement supérieur, d'autant que comme le fait observer à juste titre l'intimée, le premier juge n'a retenu que les quatre termes de comparaison proposés par l'expert [U] dans son rapport du 13 janvier 2014 pour établir la valeur vénale de la propriété.

En conséquence, la valeur vénale de la villa Soleiado au 1er janvier des années 2009,2010 et 2011sera fixée, conformément au jugement déféré, à la somme de 7.586.902 €.

Sur l'application de la majoration de 40% pour manquement délibéré

M. et Mme [N] contestent l'application par l'administration fiscale de la majoration de 40 % en cas de manquement délibéré prévue par l'article 1729 a du code général des impôts.

Il n'est pas contesté que cette majoration ne peut être appliquée que si l'administration établit le caractère délibéré de l'omission ou de l'inexactitude.

En l'espèce, les époux [N] ont déclaré, au titre des années litigieuses, leur propriété pour une valeur de 1.019.173 €.

La seule disproportion entre la valeur déclarée à cette époque des déclarations avec la valeur vénale réelle de la villa Soleiado, qu'ils ont au demeurant spontanément reconnue eux-mêmes au travers de la cession de cette propriété qu'ils ont effectuée en faveur de leurs enfants en 2012, témoigne d'une volonté délibérée de leur part de sous-évaluer leur bien de sept fois sa valeur réelle.

Ils ne justifient d'ailleurs pas des éléments qui les ont conduit à estimer la villa litigieuse à 1.019.173 €, l'application par eux d'un pourcentage de réévaluation 5,5 % en moyenne par an étant manifestement insuffisante au regard des évolutions du marché immobilier de la [Localité 5] particulièrement de la commune de [Localité 4] et n'est que la traduction d'une intention délibérée de leur part de minorer la valeur de cette propriété, située dans le quartier prestigieux de la presqu'île et qui est édifiée sur un terrain de 5800 m2, comprenant deux unités d'habitations, 10 pièces principales pour une superficie de 384 m2 et une piscine de 60 m2.

Dans ces conditions, l'administration fiscale est fondée à appliquer une pénalités de 40% calculée sur les impositions dont il s'agit.

En définitive, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Déboute M. [D] [N] et Mme [Z] [C] épouse [N] des fins de leur recours et confirme le jugement du tribunal de grande instance de Nice déféré en toute ses dispositions,

Y ajoutant:

Condamne M. [D] [N] et Mme [Z] [C] épouse [N] à payer à La DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES, Direction départementale des finances publiques [Localité 3] la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [D] [N] et Mme [Z] [C] épouse [N] aux dépens de la procédure d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1ère chambre a
Numéro d'arrêt : 16/13557
Date de la décision : 27/03/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°16/13557 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-27;16.13557 ?
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