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14/03/2018 | FRANCE | N°16/02025

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 6e chambre d, 14 mars 2018, 16/02025


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

6e Chambre D



ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2018

E.D.

N°2018/43













Rôle N° 16/02025







[Z] [A]





C/



[F] [A]

[W] [A] épouse [J]

UDAF DES BOUCHES DU RHONE

































Grosse délivrée

le :

à :





SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON



Me Caroline DE FORESTA



Me Cécile BAESA





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 10 Novembre 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 14/10243.





APPELANT



Monsieur [Z] [A]

né le [Date naissance 3] 1955 à [Localité 18],

demeurant [Adresse 17]



(bénéficie d'un...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

6e Chambre D

ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2018

E.D.

N°2018/43

Rôle N° 16/02025

[Z] [A]

C/

[F] [A]

[W] [A] épouse [J]

UDAF DES BOUCHES DU RHONE

Grosse délivrée

le :

à :

SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON

Me Caroline DE FORESTA

Me Cécile BAESA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 10 Novembre 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 14/10243.

APPELANT

Monsieur [Z] [A]

né le [Date naissance 3] 1955 à [Localité 18],

demeurant [Adresse 17]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2016/9572 du 16/09/2016 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

représenté et assisté par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur [F] [A]

né le [Date naissance 2] 1953 à [Localité 18],

demeurant [Adresse 9]

représenté et assisté par Me Caroline DE FORESTA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Madame [W] [A] épouse [J]

née le [Date naissance 10] 1954 à [Localité 18],

demeurant [Adresse 11]

représentée et assistée par Me Caroline DE FORESTA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

UDAF DES BOUCHES DU RHONE

[Adresse 5]

ès qualités de tuteur de Madame [C] [A], née le [Date naissance 4] 1960 à [Localité 15] , demeurant [Adresse 13]' majeur sous tutelle selon jugement du Tribunal d'Instance de Marseille en date du 7 Novembre 2005 .

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2016/3411 du 04/04/2016 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE),

représentée par Me Cécile BAESA, avocat au barreau de MARSEILLE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Janvier 2018 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Joël MOCAER, Président, et Mme Emilie DEVARS, Vice-Présidente placée, chargés du rapport.

Mme Emilie DEVARS, Vice-Présidente placée, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Joël MOCAER, Président

Madame Chantal MUSSO, Présidente de chambre

Mme Emilie DEVARS, Vice-Présidente placée

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2018.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2018.

Signé par Monsieur Joël MOCAER, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

[F] [A] et [O] [R] se sont mariés le [Date mariage 12] 1952 et ont eu quatre enfants:

[F], né le [Date naissance 14] 1953

[W], née le [Date naissance 10] 1954

[Z], né le [Date naissance 3] 1955

[C], née le [Date naissance 4] 1960

[F] [A] et [O] [R] ont divorcé le 8 juin 1967.

[O] [R] est décédée le [Date décès 6] 1979 à [Localité 16].

[F] [A] est décédé le [Date décès 8] 2008.

Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] se sont rapprochés de Maître [E], notaire à [Localité 15] afin qu'un acte de notoriété soit établi.

L'acte de notoriété désignait pour seuls héritiers Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J].

De même, une déclaration de succession a été établie prévoyant un partage de l'actif de la succession entre Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J].

Aux termes d'un acte du 8 mars 2010, Monsieur [Z] [A] a assigné Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] devant le tribunal de grande instance de Marseille aux fins notamment de :

-juger que Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] se sont rendus coupables du délit de recel successoral dans le cadre de la succession de leur père

Aux termes d'un acte en date du 20 décembre 2010 à [C] [A] représentée par l'UDAF des Bouches du Rhône et Monsieur [Z] [A], Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] ont contesté la filiation légitime de Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF.

Par ordonnance d'incident en du 22 mars 2011, le juge de la mise en état a prononcé le sursis à statuer sur les demandes présentées par Monsieur [Z] [A] dans l'attente de l'issue de la procédure engagée par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] suivant exploit en date du 22 décembre 2010 en contestation de la filiation paternelle de Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF et a ordonné la radiation de l'affaire du rang des affaires en cours dans l'attente de la décision.

Par jugement en date du 12 mars 2014, le tribunal de grande instance de Marseille a déclaré l'action en contestation de filiation diligentée par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] irrecevable comme étant prescrite.

Le jugement a été signifié à l'ensemble des parties et est aujourd'hui définitif.

Monsieur [Z] [A] a signifié le 22 juillet 2014 des conclusions aux fins de réenrôlement

Aux termes de ses écritures, il sollicitait essentiellement de juger qu'en occultant sciemment l'existence de deux cohéritiers en la personne de Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF, Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] se sont rendus coupables de délit civil de recel successoral dans le cadre de la succession de leur père, de condamner Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] à restituer entre les mains de maître [K] la somme de 14177,91 euros perçue par chacun d'eux, Maître [K] étant désigné en qualité de séquestre.

Madame [C] [A] représentée par l'UDAF, en sa qualité de co-héritière est intervenue volontairement et s'est associée aux demandes formées par son frère Monsieur [Z] [A].

***

Par jugement en date du 10 novembre 2015, le tribunal de grande instance de Marseille a:

- déclaré recevable l'assignation délivré par Monsieur [Z] [A] le 4 mars 2010

-débouté Monsieur [Z] [A] de sa demande aux fins de voir constater un recel successoral commis par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J]

-en conséquence, dit n'y avoir lieu à ce jour à restitution des sommes de 14177,91 euros perçues par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J]

-ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [F] [A] décédé le [Date décès 8] 2008

-débouté Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] de leur demande de voir constater un recel successoral commis par Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF

-débouté Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] de leur demande de dommages et intérêts

-débouté les parties de leurs demandes fondées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

-prononcé l'exécution provisoire du jugement

-dit que les dépens seront déclarés frais privilégiés de partage avec distraction au profit des avocats constitués

Le tribunal a essentiellement retenu que:

Sur la recevabilité de l'assignation:

-l'assignation délivrée le 2 et 4 mars 2010 fait état de l'existence d'un compte ouvert à La Poste ainsi que 226 parts de la SARL MARIE EUGENIE évaluées à la somme de 226 000 euros. Ces éléments composent l'essentiel du patrimoine du défunt et peuvent être considérés comme un descriptif sommaire du patrimoine à partager

-il ne peut être reproché à Monsieur [Z] [A] de ne pas avoir évoqué ses intentions concernant la répartition des biens ni les diligences entreprises en vue d'un partage amiable dans la mesure ou il sollicite que soit constaté l'existence d'un recel successoral de la part des défendeurs

Sur le recel

Sur l'élément matériel:

-Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] ont fait établir un acte de notoriété par devant maître [E] le 17 novembre 2008 dans lequel ils se déclarent seuls héritiers de leur père décédé; qu'ils ont par la suite procédé une déclaration de succession devant le même notaire aux fins de voir partager par moitié entre eux l'actif net de la succession de [F] [A]: il s'agit d'actes matériels positifs susceptibles de caractériser le recel successoral par dissimulation d'héritiers

Sur l'élément moral:

-si Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] ne pouvaient ignorer l'existence de leurs frères et soeur, l'attestation de madame [T] [U] soeur du défunt énonce que l'année précédant sa mort, son frère l'avait assuré que sa situation avait été régularisée; que par ailleurs les défendeurs étaient en possession d'un livret de famille issu de la société Marie Eugénie, appartenant à leur père et délivré conforme au regsitre le 30 janvier 2004 sur lequel ils étaient seuls mentionnés.

Sur la demande reconventionnelle de recel de la succession de [O] [R]:

-Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] n'établissent pas la réalité d'actes matériels pouvant caractériser un recel successoral de la part de Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF. Ils se contentent d'alléguer qu'ils n'ont pas été appelés à la succession de leur mère et n'établissent pas la réalité de l'ouverture de la succession de cette dernière en fraude de leurs droits. Ils ne démontrent pas plus une quelconque intention frauduleuse des demandes.

***

Selon déclaration en date du 4 février 2016, Monsieur [Z] [A] a interjeté appel du jugement.

***

Aux termes de conclusions notifiées le 4 juillet 2016, Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] ont formé appel incident du jugement du 10 novembre 2015 en qu'il a:

-débouté Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] de leur demande aux fins de voir constater un recel successoral commis par Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF

-débouté Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] de leurs demandes de dommages et intérêts et d'article 700 du code de procédure civile.

***

Par conclusions notifiées le 30 août 2016, l'appelant demande essentiellement à la cour de:

-juger que sa déclaration d'appel recevable et bien fondée

-infirmer purement et simplement le jugement rendu entre les parties le 10 novembre 2015

-juger que Monsieur [Z] [A] est recevable et fondé en ses demandes

-En conséquence, juger qu'en occultant sciemment l'existence de deux cohéritiers en la personne de Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF, Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] se sont rendus coupables du délit civil de recel successoral dans le cadre de la succession de leur père, [F] [A]

-juger en conséquence Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] déchus de tous droits au sein de la succession de [F] [A]

-condamner Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] à restituer la somme de 14177,91 euros perçue par chacun d'eux avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2008, date à laquelle les sommes ont été frauduleusement perçues

-désigner tel notaire qu'il plaira à la juridiction de céans avec por mission de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de la succesion de [F] [A]

-débouter tout contestant de toutes demandes plus amples ou contraires

-Sur l'appel incident, confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a:

-débouté Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] de l'ensemble de leurs demandes

'condamner Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] conjointement et solidairement à payer à Monsieur [Z] [A] une somme de 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

-les condamner dans les mêmes conditions de solidarité au paiement des entiers dépens

A l'appui de ses prétentions,l'appelant fait valoir que:

Sur l'élement matériel du recel:

-il résulte de la démarche entreprise par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] pour obtenir auprès de maître [E] le règlement de la succession en occultant leurs cohéritiers, notamment en fournissant des documents d'état civil ne mentionnant pas l'existence de leurs frère et soeur

Sur l'élément intentionnel du recel:

-l'élément intentionnel résulte du fait que Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] savaient pertinemment qu'ils avaient un frère et une soeur

Sur les demandes reconventionnelles de Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J]:

-Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] disposaient d'un délai expirant le 18 juin 2013 pour former une demande au titre du recel successoral: leur demande est éteinte à ce jour

-aucun élément justificatif ne vient conforter les prétentions de Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J]

***

Par conclusions notifiées le 2 septembre 2016, Madame [C] [A] représentée par l'UDAF demande essentiellement à la cour de:

-dire et juger son intervention volontaire recevable et fondée

-Sur l'appel principal, infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes formées par Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF au titre du recel

statuant à nouveau, juger qu'en dissimulant sciemment l'existence de deux cohéritiers en la personne de Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF, Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] se sont rendus coupables de délit de recel successoral dans le cadre de la succession de leur père [F] [A]

-juger en conséquence que Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] déchus de tous droits au sein de la succession de leur père, [F] [A]

-condamner Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] à restituer la somme de 14177,91 euros perçue par chacun d'eux avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2008, et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision à intervenir

-désigner tel notaire qu'il plaira à la juridiction de céans avec por mission de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [F] [A]

-Sur l'appel incident, confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a:

-débouté Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] de leur demande aux fins de voir constater un recel successoral commis par Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF

-débouté Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] de leur demande d'audition

-débouté Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] de leurs demande de dommages et intérêts et d'article 700 du code de procédure civile

-En conséquence, débouter Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] de l'ensemble de leurs demandes reconventionnelles, dirigées contre Madame [C] [A] représentée par l'UDAF

En tout état de cause,

-condamner Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] conjointement et solidairement à payer à Madame [C] [A] représentée par l'UDAF une somme de 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

-condamner Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] conjointement et solidairement aux entiers dépens de première instance et d'appel distraits au profit de maître Baesa

A l'appui de ses prétentions, Madame [C] [A] représentée par l'UDAF fait valoir que:

Sur la recevabilité de l'action diligentée par Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF:

-outre que l'assignation reprend l'essentiel de l'actif de la masse à partager de la succession de [F] [A], au regard des faits de recel par dissimulation d'héritier sus-énoncés, il est évident qu'aucun partage amiable ne pouvait être entrepris. Ainsi les intentions de Monsieur [Z] [A] quant à la répartition est manifeste et l'impossibilité de partage amiable également, en l'état de la déchéance sollicitée.

Sur le recel

Sur l'élément matériel:

-Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] ont fait établir un acte de notoriété par devant maître [E] le 17 novembre 2008 dans lequel ils se déclarent seuls héritiers de leur père décédé; qu'ils ont par la suite procédé une déclaration de succession devant le même notaire aux fins de voir partager par moitié entre eux l'actif net de la succession de [F] [A]

-il n'est nullement démontré que les actes ont été établis sur la base de documents communiqués par la société de [F] [A]. En outre [F] [A] était associé de ladite société et en a été lui-même le gérant

-Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] ont eu connaissance du dossier de retraite de leur père qui mentionnait l'existence des 4 enfants

Sur l'élément moral:

-la connaissance de l'existence de Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF n'a jamais été niée par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J]

-le livret remis par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] au notaire comme délivré conforme au registre le 30 janvier 2004, comporte des mentions manuscrites, manifestement de la même main qui ne peuvent avoir été rajoutées par un officier d'état civil

-le tribunal de grande instance de Marseille a définitivement tranché sur la question de la filiation

-le ministère public n'a pas considéré que les éléments produits par les demandeurs permettaient de remettre en cause une possession d'état conforme au titre, concernant Madame [C] [A] représentée par l'UDAF et Monsieur [Z] [A].

Sur l'appel incident interjeté par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J]:

Sur la demande reconventionnelle de recel de la succession de [O] [R]

-Madame [C] [A] représentée par l'UDAF en raison de son état de santé n'est pas en mesure d'indiquer ce qui s'est passé au décès de sa mère, si une succession a été ouverte ou non

-Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] sont manifestement défaillants dans la charge de la preuve

Sur les demandes d'auditions:

-la mesure sollicitée n'apporterait rien aux débats et n'aboutirait qu'à retarder la procédure en cours

Sur la demande de dommages et intérêts :

-Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] ne caractérisent une quelconque faute de Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF ni préjudice ni lien de causalité

***

Par conclusions notifiées le 4 juillet 2017, les intimés demandent essentiellement à la cour de:

- communiquer au parquet et l'inviter à conclure

-déclarer Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] recevables en leur appel incident et au fond faire droit à leurs explications et demandes

-débouter Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF de toutes leurs demandes

-dire le recel successoral non établi

-juger Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] fondés à contester le recel reproché

-dire n'y avoir lieu à déchéance de droits dans la succession de [F] [A]

-ordonner si la cour le jugeait utile à la manifestation de la vérité la comparution par la cour de Maître [E] notaire à [Localité 15] et de Monsieur [M] [I] le représentant de l'Udaf, tuteur représentant de Madame [C] [A] représentée par l'UDAF, avec les parties chez Maître [E] à la réunion du 11 septembre 2011

-confirmer le jugement du 10 novembre 2015 du tribunal de grande instance de Marseille qui a:

-débouté Monsieur [Z] [A] de sa demande aux fins de voir constater un recel successoral commis par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J]

-dit n'y avoir lieu à ce jour à restitution des sommes de 14177,91 euros perçues par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J]

-ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [F] [A] décédé le [Date décès 8] 2008

-dit que les dépens seront déclarés frais privilégiés de partage avec distraction au profit des avocats constitués

-réformer le jugement qui a:

-débouté Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] de leur demande aux fins de voir constater un recel successoral commis par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J]

-débouté Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] de leur demande de dommages et intérêts de leurs demandes fondées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

-dire que Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF sont coupables de recel de la succession de leur mère, [O] [R]

-condamner in solidum Monsieur [Z] [A] et l'UDAF représentant Madame [C] [A] représentée par l'UDAF ou contre qui complétera le mieux l'action à payer à Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] 20 000 euros de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral et matériel en application de l'article 1382 du code civil

-condamner in solidum Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF ou contre qui complétera le mieux l'action à payer à Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J] 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel ces derniers distraits au profit de Maître Caroline De Foresta

A l'appui de leurs prétentions et moyens, les intimés font valoir que:

Sur l'élement matériel du recel:

-les ajouts sur le copie du livret de famille sont grossiers et surtout sans incidence sur les éléments qui constitueraient la preuve de l'élément matériel de recel, aucun notaire ne pouvant être trompé par une telle copie, portant telles que l'adresse de l'un ou la profession de [F] [A]

-Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF ne contestent pas que [F] [A] n'était pas leur père

-sur l'élément moral du recel:

-l'attestation de madame [T] [U] soeur du défunt énonce que l'année précédant sa mort, son frère l'avait assurée que sa situation avait été régularisée; que par ailleurs les défendeurs étaient en possession d'un livret de famille issu de la société Marie Eugénie, appartenant à leur père et délivré conforme au registre le 30 janvier 2004 sur lequel ils étaient seuls mentionnés

Sur le recel successoral d'[O] [R]:

-il conviendra que Monsieur [Z] [A] justifie de l'opposabilité de la date du décès à Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] épouse [J]: ces derniers ont appris le décès de leur mère tard et incidemment

-leur mère a vendu un immeuble sis [Adresse 19] le 13 avril 1979 très peu de temps avant son décès du [Date décès 6] 1979

***

Le Parquet Général a émis un avis en date du 21 novembre 2016 dans lequel il s'en rapporte à l'appréciation de la cour.

***

L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 décembre 2017.

***

Sur ce,

Sur le recel successoral reproché à Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A]:

En vertu de l'article 778 du code civil, sans préjudice de dommages et intérêts, l'héritier qui a recelé des biens ou des droits d'une succession ou dissimulé d'un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l'actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l'héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l'auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.

Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l'héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.

L'héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l'ouverture de la succession.

La sanction du recel successoral est applicable dans le cas même où la fraude est l'oeuvre du défunt lorsque les héritiers avantagés ont tenté sciemment de s'assurer du bénéfice de ce dol.

Il résulte des débats que pour formaliser l'acte de notoriété litigieux reprenant seulement les noms de Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] en leur qualité d'héritiers, Maître [E], notaire à [Localité 15] s'est fondé sur le duplicata du livret de famille délivré conforme au registre le 30 juin 2004, sur laquelle ne figure nullement l'existence d'un troisième et quatrième enfant en les personnes de Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF.

La disparition des mentions du troisième et quatrième enfant ne peut résulter que de l'effet d'un jugement ordonnant l'annulation de reconnaissance de paternité, résultant d'une action enfermée dans un délai de 10 ans à compter des actes de reconnaissance litigieux, nécessairement intentée par le père.

Or aucune pièce au dossier ne démontre que le de cujus a contesté devant justice la filiation de [Z] et [C] avant l'année 1965 et 1970, dix ans après leur reconnaissance respective.

En outre, seul ce dernier, titulaire du livret famille pouvait faire une demande pour obtenir un duplicata.

Aussi, à partir d'une comparaison avec le livret de famille délivré conforme au registre en 1962 et celui délivré conforme au registre en 1975, il apparaît manifeste que le duplicata du livret de famille qui a servi de base à l'élaboration de l'acte de notoriété constitue un faux grossier sur lequel figurent des mentions qui n'ont pas pu être écrites de la main d'un officier de l'état civil.

C'est le cas, à titre d'exemple, de la mention 'divorcée suivant jugement tribunal de grande instance Aix 8/06/1967" qui n'est pas portée au niveau du cadre des mentions marginales figurant au bas de la première page du livret de famille et qui ne porte ni le cachet, ni la signature de l'officier d'Etat civil.

Ce duplicata du livret de famille datant de 2004 constituant un faux manifeste suffit à caractériser la matérialité et l'omission intentionnelle d'une dissimulation d'héritier.

A considérer que cette fraude soit l'oeuvre même du défunt, ce que laisse d'ailleurs entendre l'attestation de la soeur du de cujus, Madame [T] [U], indiquant que son frère l'avait assurée que sa situation avait été régularisée, il apparaît néanmoins que Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] ont tenté de s'assurer du bénéfice de ces manoeuvres dolosives commis par leur père auprès du notaire dans l'élaboration de l'acte de notoriété.

En effet, il n'est pas contesté que Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] connaissaient l'existence de Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF. Pourtant, ils l'ont passée sous silence devant leur passage devant notaire.

A supposer qu'ils imaginaient que leur père avait régulièrement contesté sa paternité à l'égard de Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF, il leur incombait cependant d'en faire part auprès de l'officier ministériel afin que ce dernier puisse faire toutes les vérifications utiles au regard de ce duplicata du livret de famille dont ils ne pouvaient sérieusement ignorer l'évidente falsification et qu'ils ont pourtant sciemment remis.

Alors que le tribunal de grande instance de Marseille a tranché définitivement la question de la filiation par jugement du 1 mars 2014 en déclarant l'action en contestation de filiation diligentée par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] irrecevable comme étant prescrite, les différentes attestations versées par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] établissant que Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF n'ont jamais été considérés comme les enfants de [F] [A] ne permettent pas d'écarter l'élément intentionnel du recel largement caractérisé.

L'audition par la cour de Maître [E] et de Monsieur [I] le représentant de l'UDAF tuteur représentant Madame [C] [A], sollicitées par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] apparaissent tout aussi inutiles.

La production du duplicata du livret de famille falsifié et l'abstention fautive de Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] dans leur déclaration au moment de l'ouverture de la succession de [F] [A] démontrent la dissimulation intentionnelle d'héritiers et caractérisent ainsi le recel successoral.

En conséquence, il y a lieu d'infirmer le jugement sur ce point, de dire que la sanction du recel est applicable: Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] seront déchus de tous droits au sein de la succession de leur père [F] [A].

Il résulte de la déclaration de la succession établie par maître [E] pour le compte de Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] que la succession de [F] [A] comprenait un compte ouvert sous le n°[XXXXXXXXXX01] auprès de la Poste de Marseille, présentant un solde créditeur au jour du décès de 37779,96 euros, ainsi que 226 parts de la SARL MARIE EUGENIE dont le siège [Adresse 7], évaluées à une somme de 226 000 euros.

Se rajoutait également au titre du forfait mobilier la somme de 13189 euros, soit un montant total d'actifs fixé à 276968,96 euros.

Il ressort d'un compte établi par Maître [E] le 9 juillet 2009 que Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] ont d'ores et déjà perçu une somme de 14177,91 euros chacun au titre du règlement de la succession.

Par conséquence, il y a lieu d'ordonner la restitution et la consignation de la somme de 14177,91 euros perçue par Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2008 entre les mains du notaire chargé de l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de 8 jours à compter de la dite désignation du notaire.

Sur la demande reconventionnelle de recel de la succession d'[O] [R]:

Invoquant également un recel successoral sur la succession de leur mère, [O] [R], les intimés n'apportent nul élément permettant d'une part de savoir si la succession a fait l'objet d'un règlement et d'autre part de caractériser la matérialité et l'intentionnalité d'un éventuel recel successoral.

Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] sont manifestement défaillants dans la charge de la preuve.

C'est donc à bon droit que le premier juge a rejeté leur demande reconventionnelle.

Sur la demande de dommages et intérêts de Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A]:

Le recel successoral étant établi, Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] sont infondés à solliciter des dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires:

Il n'apparaît pas inéquitable de condamner in solidum Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] à verser à Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF chacun la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] seront condamnés in solidum aux dépens.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes formées par Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF au titre du recel successoral.

Statuant à nouveau,

Dit que Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] se sont rendus coupables du délit civil de recel successoral dans le cadre de la succession de [F] [A].

Dit en conséquence que Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] sont déchus de tous droits au sein de la succession de leur père [F] [A].

Condamne Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] à restituer la somme de 14177,91 euros perçue par chacun d'eux avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2008 et sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de 8 jours à compter de la désignation du notaire chargé des opérations de compte, liquidation et partage .

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toute autre demande.

Condamne Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] in solidum à verser à Monsieur [Z] [A] et Madame [C] [A] représentée par l'UDAF la somme de 2000 euros à chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne Monsieur [F] [A] et Madame [W] [A] in solidum aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions sur l'aide juridictionnelle.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 6e chambre d
Numéro d'arrêt : 16/02025
Date de la décision : 14/03/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6D, arrêt n°16/02025 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-14;16.02025 ?
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