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06/03/2018 | FRANCE | N°16/15537

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1ère chambre a, 06 mars 2018, 16/15537


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1ère Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 06 MARS 2018

L.V

N° 2018/













Rôle N° N° RG 16/15537 - N° Portalis DBVB-V-B7A-7EZJ







[V] [S] [H] [C]





C/



COMMUNE DE [Localité 1]





















Grosse délivrée

le :

à :Me Ramognino

Me Kara

















Décision

déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 28 Juillet 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 13/00492.





APPELANT



Monsieur [V] [S] [H] [C], venant aux droits en qualité d'héritier unique de Mlle Mademoiselle [N] [R], née le [Date naissance 1]/30 et décédée le [Dat...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1ère Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 06 MARS 2018

L.V

N° 2018/

Rôle N° N° RG 16/15537 - N° Portalis DBVB-V-B7A-7EZJ

[V] [S] [H] [C]

C/

COMMUNE DE [Localité 1]

Grosse délivrée

le :

à :Me Ramognino

Me Kara

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 28 Juillet 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 13/00492.

APPELANT

Monsieur [V] [S] [H] [C], venant aux droits en qualité d'héritier unique de Mlle Mademoiselle [N] [R], née le [Date naissance 1]/30 et décédée le [Date décès 1]/14

né le [Date naissance 2] 1955

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Claude RAMOGNINO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

COMMUNE DE [Localité 1],

[Adresse 2]

représentée par Me Sonnia KARA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée par Me Shirley LETURCQ, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Brice MICHEL, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 30 Janvier 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame VIGNON, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller, faisant fonction de Président

Mme Danielle DEMONT, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Mars 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Mars 2018,

Signé par Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller, faisant fonction de Président et Madame Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Mme [N] [R] a transmis à la commune de [Localité 1] une déclaration d'intention d'aliéner ( DIA) en date du 13 octobre 2011 en vue d'une vente de gré à gré au profit de Mme [O] [C], épouse de son neveu M. [V] [C], de deux parcelles non bâties n° AE [Cadastre 1] et [Cadastre 1] situées chemin des Trompettes, d'une superficie totale de 6312 m2 au prix de 96.130 €.

Par décision de M. le maire en date du 10 novembre 2011, la commune de [Localité 1] a exercé son droit de préemption au prix fixé dans la DIA et la somme de 96.130 € a été consignée par décision du maire en date du 21 février 2012 auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations.

Par jugement en date du 21 mars 2011, le tribunal administratif de Marseille a débouté Mme [R] et Mme [C] de leur recours en annulation de la décision de préemption.

Ces dernières ont interjeté appel de cette décision.

Par acte d'huissier en date du 19 décembre 2012, la commune de [Localité 1] a fait assigner Mme [R] devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence aux fins de constater la vente à son profit par suite de préemption.

Suite à son décès survenu le 10 juillet 2014, Mme [R] a laissé comme seul héritier M. [V] [C]. Il a donc été assigné en intervention forcée par la commune de [Localité 1], par exploit du 10 avril 2015, devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, en sa qualité d'ayant droit de Mme [R].

Par jugement contradictoire en date du 28 juillet 2016, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a:

- déclaré éteinte l'instance à l'égard de feue [N] [R],

- constaté que les conditions de la vente des parcelles non bâties n° AE [Cadastre 1] et [Cadastre 1] sises sur la commune de [Localité 1], chemin des Trompettes, propriété de Mme [N] [R] au profit de la Commune de [Localité 1] sont réunies et opposables à M. [V] [C],

- déclaré parfaite la vente au profit de la commune de [Localité 1] des parcelles non bâties n° AE [Cadastre 1] et [Cadastre 1] à compter du 16 novembre 2011, date de notification de la décision de préemption n°80/11 du 10 novembre 2011,

- débouté M. [V] [C] de l'ensemble des chefs de sa demande reconventionnelle,

- condamné M. [V] [C] à payer à la Commune de [Localité 1] la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 24 août 2016, M. [V] [C] a formé appel à l'encontre de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 08 février 2017, M. [V] [C] demande à la cour, au visa des articles 544 et 1131 du code civil, de:

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence le 28 juillet 2016,

Statuer à nouveau:

- dire et juger que la commue de [Localité 1] ne peut se prévaloir de la décision de préemption du 10 novembre 2011,

- dire et juger que la vente sollicitée par la commune de [Localité 1] des parcelles cadastrées section AE n°[Cadastre 1] et [Cadastre 1] appartenant à M. [C] est dépourvue de cause,

- dire et juger en conséquence que la vente n'est pas parfaite et inopposable à M. [C],

- débouter la commune de [Localité 1] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, reconventionnelles et incidentes,

- condamner la commune de [Localité 1] à payer à M. [V] [C] la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il expose en premier lieu qu'un élément nouveau est intervenu puisque par jugement du 13 mai 2013, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a prononcé son adoption par Mme [R], que l'objectif de la vente consistait à maintenir le terrain dans la famille de Mme [R], qui était sans postérité et qu'en l'état de cette adoption, cet objectif est satisfait, la vente se trouvant en conséquence dépourvue de cause.

Il soutient que la cour d'administrative d'appel de Marseille, dans son arrêt du 04 décembre 2014, a annulé le jugement du tribunal administratif du 21 mars 2013 et a rejeté le surplus de la requête en appel de Mme [R], de sorte le droit de préemption exercé par la commune de [Localité 1] est irrégulier et ne peut être invoqué pour solliciter la réalisation de la vente à son profit des deux parcelles, objets du litige. Il précise avoir formé un pourvoi à l'encontre de cet arrêt mais uniquement à titre conservatoire, pour confirmation de l'annulation du jugement.

Il considère que la commune n'est pas fondée à invoquer les dispositions de l'article 1583 du code civil puisque la vente n'est nullement parfaite aux motifs que:

- S'agissant de Mme [R]:

* Mme [R] n'a jamais entendu vendre ses parcelles à la commune mais à l'épouse de son neveu, afin qu'elles demeurent dans le patrimoine familiale,

* la préemption exercée par l'intimée vicie le consentement de Mme [R] pour qui la considération de la personne de l'acquéreur était la cause principale de la vente,

* la vente projetée se trouve dépourvue de cause, puisqu'en l'état du jugement d'adoption du 13 mai 2013, il est devenu l'héritier de Mme [R] ,

* l'objectif de la vente, à savoir que les parcelles demeurent dans le patrimoine familial, est satisfait par ce seul jugement d'adoption et la vente n'a donc plus lieu d'être, expliquant que Mme [R] était bien fondée à retirer son offre de vente,

- Pour sa part, en l'absence de cause:

* il est aujourd'hui propriétaire des parcelles, comme étant l'unique héritier de Mme [R],

* il est marié avec son épouse sous le régime de la communauté de biens, de sorte qu'il n'existe plus aucune cause à la vente entre deux époux communs en bien,

* certes la cause doit exister au moment de la conclusion du contrat mais la disparition ultérieure de la cause justifie son annulation et qu'en l'espèce, le contrat de vente étant dépourvu d'objet, la vente est nulle faute de cause,

* la vente forcée est impossible puisque fondée sur une vente initiale nulle et un projet de vente devenu irréalisable par confusion du vendeur et de l'acquéreur.

Il estime que le retrait de son offre de vente par Mme [R] ne permet pas à la commune intimée de poursuivre la réalisation de la vente, un tel retrait se justifiant par la personnalité de l'acquéreur, condition déterminante eu égard au fait que l'objectif de la vente avait toujours été de maintenir le bien en cause dans la famille, la décision de préemption méconnaissant le caractère intuitu personae déterminante de la vente envisagée. Il fait valoir en effet, que le droit de préemption ne peut être exercé légalement lorsque l'opération revêt un caractère intuitu personae très prononcé et qu'il est nécessaire de tenir compte du droit de propriété ainsi que de la liberté contractuelle. Il en tire pour conséquence, que même en matière de ventes immobilières, la légalité d'une décision de préemption doit s'apprécier au regard de la volonté du vendeur et qu'en l'occurrence l'intuitu personae de la proposition de vente établie par Mme [R] au profit de Mme [C] était indiscutable, comme étant le résultat de l'étroit lien de parenté entre elles. Il expose que ce caractère intuitu personae était également démontré par le prix auquel Mme [R] envisageait de céder les parcelles, 96.130 €, alors que la valeur réelle de ces terrains s'élève à 2.194.800 €.

Il en conclut que passer outre le défaut de cause de cette vente et ignorer délibérément la motivation initiale de Mme [R], lui occasionnerait une atteinte grave à son droit de propriété. Il précise enfin que les parcelles en question sont situées juste devant sa maison d'habitation où il réside avec son épouse et que si la cession avec la commune devait se réaliser, sa propriété serait dévalorisée de manière conséquente puisqu'elle perdrait son jardin situé au sud et constitué par la parcelle AE n°[Cadastre 1].

La commune de [Localité 1], dans ses dernières conclusions signifiées le 24 avril 2017, demande à la cour, au visa des articles 1134 et 1583 du code civil, L 210-1 et L 213-14 et suivants du code de l'urbanisme, de:

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 28 juillet 2016,

- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de M. [C],

- constater que les conditions de la vente des deux parcelles non bâties n° AE [Cadastre 1] et [Cadastre 1] situées chemin des Trompette, au profit de la commune de [Localité 1] sont réunies et opposables à M. [V] [C],

- dire et juger parfaite la vente au profit de la commune de [Localité 1] des deux parcelles non bâties n° AE [Cadastre 1] et [Cadastre 1] situées chemin des Trompette, à compter du 16 novembre 2011, date de notification de la décision de préemption n°80/11 du 10 novembre 2011,

- condamné M. [C] à verser à la commune de [Localité 1] la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles.

Elle soutient que M. [C] fait une analyse erronée de la décision rendue par la cour administrative d'appel le 04 décembre 2014 dans la mesure où si elle a entendu annuler partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a omis de statuer sur les conclusions tendant à ce qu'il soit donné acte à Mme [R] du retrait de son offre de vente des parcelles litigieuses, elle a:

- jugé qu'il n'appartient pas au juge administratif dans un litige relatif à une décision de préemption de donner acte au vendeur du bien préempté de ce qu'il entend renoncer à son projet en retirant son offre,

- et d'autre part, rejeté les conclusions susmentionnées de Mme [R] présentées devant le tribunal et le surplus de sa requête d'appel.

Elle fait valoir que contrairement aux affirmations de M. [C] la cour administrative d'appel n'a donc pas annulé le jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 mars 2013 et que l'appelant en est d'ailleurs parfaitement conscient puisqu'il formé un recours auprès du Conseil d'Etat en arguant que la cour d'appel avait entaché son arrêt d'une erreur de droit en jugeant que le droit de préemption pouvait légalement s'exercer, recours qui a été rejeté.

Elle en tire pour conséquence que M. [C], qui a épuisé toutes les voies de recours à l'encontre de la décision n°80/11 du 10 novembre 2011, est particulièrement mal fondé à venir soulever son illégalité dans le cadre de la présente instance.

Elle conclut au caractère parfait de la vente des parcelles litigieuses à son profit dès lors que:

- sur l'absence de consentement de Mme [R]:

* aucune preuve d'une quelconque erreur qui aurait été commise par celle-ci n'est démontrée, étant précisé que la circonstance que Mme [R] ait entendu vendre les parcelles en cause intuitu personae à sa future belle-fille adoptive est indifférente à la vente réalisée par la voie de préemption au profit de la commune,

* le mécanisme institué par les dispositions des articles L 210-1 et suivants du code de l'urbanisme a justement pour effet de substituer la commune à l'acquéreur initial, aucune erreur ne pouvant donc être opposée sur ce point,

* la transmission par Mme [R] d'une DIA le 19 octobre 2011 établit que celle-ci avait parfaitement connaissance que ses parcelles se trouvaient dans une zone urbaine de préemption urbaine créée par délibération du conseil municipal,

- sur le défaut de cause:

* lors de l'adoption de l'appelant par Mme [R], intervenue le 13 mai 2013, cette dernière n'était déjà plus propriétaire des parcelles, objets du litige,

* en matière de préemption, la vente est parfaite à la date à laquelle l'autorité titulaire du droit de préemption adresse au déclarant sa lettre de notification de la décision de préemption dès lors qu'à cette date, ladite autorité n'a été saisie d'aucune rétractation de la déclaration,

* en l'espèce, la décision de préemption du 10 novembre 2011 a été notifiée le 21 novembre 2011, date à laquelle la vente est devenue parfaite,

* la circonstance que M. [C] soit l'unique héritier de Mme [R] ne lui donne aucun titre de propriété sur les parcelles en cause acquises par la commune avant le décès du de cujus,

- sur le retrait de l'offre:

* en application de l'article L 213-7 du code de l'urbanisme, c'est uniquement en cas de désaccord sur le prix que le propriétaire du bien soumis à droit de préemption a la faculté de retirer son offre,

* tel n'est pas le cas en l'espèce, puisqu'elle a préempté au prix mentionné dans la DIA, soit 96.130 €,

- sur la primauté du caractère intuitu personae:

* une décision de préemption est légalement justifiée dès lors que l'action ou l'opération qui la fonde est engagée dans l'intérêt général, ce qui a été définitivement jugé par la cour administrative d'appel dans son arrêt du 04 décembre 2014,

* M. [C] n'est donc pas fondé à se prévaloir du caractère intuitu personae de la vente envisagée en vue de s'opposer au droit de préemption,

* il ne peut davantage critiquer la vente intervenue au regard de son prix, qui correspond à celui indiqué par le propriétaire dans sa DIA et en l'absence de la moindre démonstration que les parcelles en cause auraient une valeur de 2.194.800 €,

* elle justifie au demeurant que le prix de vente fixé par Mme [R] à 96.130 € était supérieur à la valeur réelle des deux parcelles.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 09 janvier 2018.

MOTIFS

Il est constant que suite à la transmission par Mme [R] à la commune de [Localité 1] d'une déclaration d'intention d'aliéner ( DIA) en date du 13 octobre 2011 en vue d'une vente de gré à gré au profit de Mme [O] [C], épouse de son neveu M. [V] [C], de deux parcelles non bâties n° AE [Cadastre 1] et [Cadastre 1] situées chemin des Trompettes, d'une superficie totale de 6312 m2 au prix de 96.130 €, la commune de [Localité 1] a exercé son droit de préemption, par décision du 10 novembre 2011, notifiée à Mme [R] le 16 novembre 2011,au prix fixé dans la DIA.

M. [V] [C] conteste ne premier lieu la légalité de cette décision de préemption, soutenant que la cour administrative d'appel de Marseille, dans son arrêt du 04 décembre 2014, a annulé le jugement du tribunal administratif de Marseille en date 21 mars 2011, qui avait rejeté le recours en annulation de la décision de préemption formé par Mme [R] et Mme [C].

Or, à la lecture de l'arrêt du 04 décembre 2014, la cour administrative d'appel a:

- dans son article 1er: a annulé le jugement du tribunal administratif de Marseille mais uniquement en ce qu'il a omis de statuer sur les conclusions tendant à ce qu'il doit donné acte à Mme [R] du retrait de son offre de vente des parcelles AE n°[Cadastre 1] et [Cadastre 1],

- dans son article 2: a rejeté les conclusions susmentionnées de Mme [R] présentées devant le tribunal et le surplus de sa requête d'appel.

En d'autres termes, si elle a entendu annuler partiellement le jugement en tant qu'il a omis de statuer sur la demande de Mme [R], la cour a définitivement statué sur ce point, en rejetant ce moyen au motif ' qu'il n'appartient pas au juge administratif dans un litige relatif à une décision de préemption de donner acte au vendeur du bien préempté de ce qu'il entend renoncer à son projet en retirant son offre.'

La cour a, en effet, jugé que ' Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme [R] et Mme [C] ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille, a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision n°80/11 du 10 novembre 2011 du maire de [Localité 1] décidant d'exercer le droit de préemption sur les parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 1]".

Il est ainsi établi que la cour administrative d'appel de [Localité 2] a débouté Mme [R] de ses demandes tendant à:

- lui donner acte de son retrait de son offre de vente des parcelles préemptées,

- l'annulation de la décision de préemption.

Il sera au demeurant observé que M. [C] a formé un recours à l'encontre de cet arrêt devant le Conseil d'Etat, en arguant notamment que ' la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit en jugeant que le droit de préemption pouvait légalement s'exercer ( ...)', pourvoi qui a fait l'objet d'une décision de refus d'admission.

M. [C], ayant en conséquence épuisé toutes les voies de recours à l'encontre de la décision n°80/11 du 10 novembre 2011, ne peut utilement soutenir devant la cour que celle-ci est irrégulière.

S'agissant du caractère parfait de la vente au profit de la commune de [Localité 1], en vertu de l'article 1583 du code civil, la vente est parfaite entre les parties et la propriété acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée, ni le prix payé.

L'appelant considère que la vente n'est nullement parfaite, opposant le défaut de consentement de Mme [R], qui n'a jamais entendu vendre ses parcelles à la Commune mais à l'épouse de son neveu, afin qu'elles demeurent dans le patrimoine familial.

Une telle circonstance est cependant sans incidence sur la vente réalisée par la voie de préemption par la Commune de [Localité 1], le mécanisme institué par les dispositions des articles L 210-1 et suivants du code de l'urbanisme ayant précisément pour effet de substituer la commune à l'acquéreur initial, situation dont Mme [R] avait parfaitement connaissance puisque celle-ci, par le truchement de son notaire mandataire, a transmis à la commune sa déclaration d'intention d'aliéner les parcelles, conformément à l'article L 213-2 du même code, ce qui démontre à l'évidence qu'elle était parfaitement informée que les biens dont la vente était envisagée, se trouvaient situés dans la zone de préemption urbaine créée par

délibération du conseil municipal en date du 23 novembre 2007, modifiée le 24 juin 2010.

M. [C] ne peut davantage invoquer un défaut de cause comme faisant obstacle à la demande de la commune de [Localité 1], au motif que la cause initiale de la vente envisagée au profit de Mme [C] qui consistait à laisser le bien dans la famille, est aujourd'hui satisfaite du fait du jugement d'adoption et du décès de Mme [R] qui l'a institué seul et uniquement héritier.

En effet, l'adoption de M. [C] par Mme [R] a été prononcée le 13 mai 2013, alors qu'à cette date Mme [R] n'était déjà plus propriétaire des parcelles litigieuses, dans la mesure où en matière de préemption, la vente est parfaite à la date à laquelle l'autorité titulaire du droit de préemption adresse au déclarant sa lettre de notification de la décision de préemption dès lors qu'à cette date, ladite autorité ladite autorité n'a été saisie d'aucune rétractation de la déclaration, ce qui en l'espèce était le cas dès le 21 novembre 2011.

Le fait que M. [C], suite au décès de Mme [R] survenu le 10 juillet 2014 soit l'unique héritier des biens du de cujus, ne saurait lui conférer un quelconque titre de propriété sur des parcelles acquises par la commune intimée par voie de préemption, bien avant le décès du propriétaire.

C'est également en vain que M. [C] prétend, qu'étant marié sous le régime légal de la communauté, la vente envisagée est totalement dépourvue de cause puisqu'elle consisterait pour M. [C] à céder son propre bien, à sa propre communauté conjugale, que la cause de la disparition du projet de vente, objet de la DIA à l'époque, est totalement étrangère, la vente en cause étant parfaite depuis le 21 novembre 2011 et l'appelant n'ayant jamais été propriétaire des parcelles acquises par l'intimée.

M. [C] ne peut aujourd'hui remettre en cause unilatéralement un contrat de vente légalement formé entre Mme [R] et la commune de [Localité 1], le transfert de propriété étant acquis depuis le 21 novembre 2011, au seul motif qu'il serait l'unique héritier de la venderesse, près de trois ans après.

M. [C] est également infondé à soutenir que Mme [R] ayant retiré son offre, la commune ne peut poursuivre la réalisation de la vente, les dispositions du code de l'urbanisme et plus particulièrement l'article L 213-7 encadrant strictement les conditions dans lesquelles le propriétaire d'un bien soumis au droit de préemption peut ultérieurement retirer son offre, limitées au seul cas de désaccord entre les parties sur le prix de vente.

En l'occurrence, la commune de [Localité 1] a préempté au prix mentionné dans la DIA, à sa voir 96.130 € et il n'existe en conséquence aucun désaccord entre les parties sur ce point, autorisant le retrait de l'offre par le vendeur.

Enfin, M. [C] ne peut davantage invoquer la primauté de l'intuitu personae sur le droit de préemption, le droit de préemption urbain institué par l'article L 211-1 et suivants du code de l'urbanisme étant largement encadré et institué en vue de la réalisation, dans l'intérêt général , des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L 300-1 et la cour administrative d'appel, dans son arrêt du 04 décembre 2014, ayant définitivement jugé que précisément la commune de [Localité 1] justifiait, à la date de la décision en litige, de la réalité d'un projet d'aménagements de logements sociaux, lequel revêt un caractère d'intérêt général au sens des dispositions susvisées.

Ainsi le droit de préemption, lorsqu'il est légalement justifié, n'a nullement à s'incliner devant l'intuitu personae et l'appelant ne peut non plus critiquer le prix de vente des deux parcelles, au motif que leur valeur réelle serait de 2.194.800 €, en l'absence du moindre élément produit par celui-ci à l'appui d'une telle affirmation, alors que pour sa part l'intimée communique une évaluation effectuée par le service [Adresse 3], qui dans son avis du 09 novembre 2011, a déterminé la valeur des terrains à la somme globale de 95.082 €, soit une somme inférieure au prix de vente fixé par Mme [R] dans sa DIA et accepté par la commune.

Au regard de ces éléments, c'est à juste titre que le premier jugea déclaré parfaite la vente au profit de la Commune de [Localité 1] des deux parcelles non bâties n° AE [Cadastre 1] et [Cadastre 1] situées chemin des Trompettes à compter du 16 novembre 2011, date de notification de la décision de préemption n°80/11 du 10 novembre 2011, les conditions de cette vente étant réunies et opposables à M. [V] [C].

Ce dernier sera en conséquence débouté des fins de son recours et le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Déboute M. [V] [C] des fins de son recours et confirme le jugement du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant:

Condamne M. [V] [C] à payer à la commune de [Localité 1] la somme de 2.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [V] [C] aux entiers dépens de la procédure d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1ère chambre a
Numéro d'arrêt : 16/15537
Date de la décision : 06/03/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°16/15537 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-06;16.15537 ?
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