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01/03/2018 | FRANCE | N°15/18820

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre, 01 mars 2018, 15/18820


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 01 MARS 2018



N°2018/

GB/













Rôle N° 15/18820







[P] [Z]





C/



SAS LES OPALINES MARSEILLE LA ROSERAIE





























Grosse délivrée le :

à :

Me Sylvanna GUGLIERMINE, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Paul SCOTTO DI CARLO, avocat au

barreau D'AIX-EN-

PROVENCE







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE - section AD - en date du 30 Septembre 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 12/02743.





APPELANT



Monsieur [P] [Z], demeurant [Adresse 1]



compar...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 01 MARS 2018

N°2018/

GB/

Rôle N° 15/18820

[P] [Z]

C/

SAS LES OPALINES MARSEILLE LA ROSERAIE

Grosse délivrée le :

à :

Me Sylvanna GUGLIERMINE, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Paul SCOTTO DI CARLO, avocat au barreau D'AIX-EN-

PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE - section AD - en date du 30 Septembre 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 12/02743.

APPELANT

Monsieur [P] [Z], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Sylvanna GUGLIERMINE, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SAS LES OPALINES MARSEILLE LA ROSERAIE, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Paul SCOTTO DI CARLO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Alexandra MARY, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 10 Janvier 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Jean-Luc THOMAS, Président

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller

Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Mars 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Mars 2018

Signé par Monsieur Jean-Luc THOMAS, Président et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE

Par déclaration électronique enregistrée le 26 octobre 2015, M. [Z] a interjeté appel du jugement rendu le 30 septembre 2015 par la formation de départage du conseil de prud'hommes de Marseille, condamnant la société La Roseraie à lui verser les sommes suivantes :

5 756,25 euros, ainsi que 575,62 euros au titre des congés payés afférents, en rappel d'un salaire basé sur le coefficient conventionnel 295 sur la période du 25 septembre 2009 au 27 mars 2012,

546,40 euros, ainsi que 54,64 euros au titre des congés payés, par suite de l'incidence de ce salaire conventionnel sur sa prime d'ancienneté,

1 700 euros, ainsi que 170 euros au titre des congés payés afférents, en paiement de deux primes pour les années 2010 et 2011, ces créances salariales produisant intérêts au taux légal capitalisés à compter du 25 septembre 2012,

2 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation d'une discrimination syndicale,

1 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'employeur est condamné à remettre au salarié un bulletin de salaire mentionnant les créances salariales.

.../...

M. [Z] poursuit devant le cour la condamnation de la société La Roseraie à lui verser les sommes suivantes :

8 405,47 euros, ainsi que 840,54 euros au titre des congés payés afférents, en paiement d'heures supplémentaires pour les années 2007 et 2008,

10 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation d'un prêt de main-d'oeuvre illicite,

1 013,24 euros, ainsi que 101,32 euros au titre des congés payés afférents, en paiement d'heures supplémentaires pour l'année 2009,

100 euros au titre d'une prime de gestion,

15 216,96 euros pour travail dissimulé,

9 263,28 euros, ainsi que 926,32 euros au titre des congés payés afférents, après calcul de son salaire sur le coefficient conventionnel 295,

810,17 euros, ainsi que 81,01euros au titre des congés payés, par suite de l'incidence de ce rattrapage de salaire sur sa prime d'ancienneté,

1 700 euros, ainsi que 170 euros au titre des congés payés afférents, en paiement de deux primes pour les années 2010 et 2011,

2 000 euros pour discrimination syndicale,

7 744,27 euros, ainsi que 774,42 euros au titre des congés payés afférents, au principal, en rappel de salaire sur la base du protocole de transposition relatif à la mise en oeuvre de la convention collective du 18 avril 2012 ; subsidiairement, paiement de 2 767,09 euros, ainsi que 276,70 euros au titre des congés payés afférents,

753,46 euros, ainsi que 75,34 euros à titre de congés payés afférents, par suite de l'incidence de ce protocole de transposition sur les heures supplémentaires payées,

45 650,88 euros à titre de dommages-intérêts du fait de la prise d'acte de la rupture

de son contrat de travail produisant les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

5 073,24 euros pour préavis, ainsi que 507,32 euros au titre des congés payés afférents,

6 722,02 euros au titre de son indemnité de licenciement,

1 240 euros à titre de dommages-intérêts pour une perte de chance d'utiliser son droit individuel à une formation, le tout avec intérêts au taux légal capitalisés à compter de sa demande introductive d'instance,

4 000 euros pour ses frais irrépétibles.

Le salarié réclame la délivrance de bulletins de salaire rectifiés, ainsi que ses documents de rupture, sous peine d'une astreinte de 50 euros par jour de retard, et par document, ce à compter de l'arrêt à intervenir.

.../...

La société La Roseraie, au bénéfice de son appel incident, conclut à l'infirmation, en toutes ses dispositions, du jugement déféré à la censure de la cour, ainsi qu'au rejet des fins de l'appel principal, sans préjudice de l'allocation d'une indemnité de 5 000 euros pour ses frais non répétibles.

.../...

La cour renvoie pour plus ample exposé aux écritures déposées et soutenues oralement par les parties à l'audience d'appel tenue le 10 janvier 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION

M. [Z] a été au service de l'EHPAD La Roseraie, en dernier lieu en qualité d'employé hautement qualifié, du 5 février 2001 au 24 mars 2012, date de sa lettre recommandée de prise d'acte de la rupture de son contrat de travail à effet au 27 mars 2012.

Sur la prescription des demandes salariales

M. [Z] réclame divers rappels de salaires pour la période du 1er janvier 2008 au 27 mars 2012 (page 34 conclusions salarié), fixant l'interruption de la prescription quinquennale à la date de sa réquisition d'audience du 25 septembre 2012.

Le premier juge a cependant limité à un délai de trois ans son action en paiement sur les fins de l'exception de fin de non-recevoir que la société La Roseraie maintient en cause d'appel au titre de ses demandes en rappels de salaires.

Mais l'article 21-V de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à l'action en paiement ou en répétition du salaire, dispose que 'Lorsqu'une instance a été introduite avant le 16 juin 2013, date de la promulgation de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne.

Cette loi s'applique également en appel et en cassation.'.

La loi ancienne visée par ce texte était la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, codifiée sous l'article L. 3245-1 ancien du code du travail, lequel disposait que 'L'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l'article 2224 du code civil.'.

Par application de cet article L. 3245-1 ancien, l'action en paiement des salaires introduite par M. [Z], le 25 septembre 2012, se prescrit par cinq ans.

La société La Roseraie ayant accusé réception le 28 septembre 2012 du pli recommandé la convoquant devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes , valant première mise en demeure de payer, l'action en paiement de M. [Z] est recevable pour la période du 28 septembre 2007 au 28 septembre 2012.

Sur l'existence d'un prêt de main-d'oeuvre à but lucratif

M. [Z] démontre (voir infra) avoir travaillé pour le compte de plusieurs autres établissements appartenant au groupe IGH, duquel dépend l'EHPAD [Établissement 1], pour la période non prescrite de 13 jours en mars 2008 et de 11 jours en avril 2008 au sein de la Résidence [Établissement 2].

Son conseil dénonce l'existence d'un prêt de main-d'oeuvre à but lucratif que l'employeur conteste pour la période considérée.

M. [Z] verse aux débats 72 feuillets regroupant des tickets de péage, des factures de fournitures et d'essence qui ne concernent que les années 2006 et 2007, ainsi que des pièces 71 à 74 (conventions de mise à disposition, copie de chèques) qui ne concernent que la période allant de 2006 à 2007 (avant le 28 septembre 2007).

La facture n°05/2006 (pièce 33 dossier salarié), émise le 30 mai 2005, par laquelle la société La Roseraie facturait la somme de 1 406,20 euros TTC en paiement des 'interventions forfaitaires de Monsieur [Z]. Les 26/04 -28/04 - 03/05 et 10/05/2006" aurait été susceptible de caractériser un prêt de main-d'oeuvre à but lucratif si les faits ayant donné lieu à son édition n'étaient pas prescrits.

La faiblesse du dossier interdit de retenir que la société La Roseraie a porté atteinte aux droits du salarié par l'effet d'un prêt de main d'oeuvre à but lucratif au cours de la période non prescrite.

Pour soutenir, à titre subsidiaire, que les règles de forme sur le prêt de main d'oeuvre à but non lucratif ont été méconnues, le salarié invoque l'article L. 8241-2 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-893 du 2 juillet 2011, lequel n'est pas applicable aux faits litigieux ; que le précédent texte, issu de la loi n° 74-808 du 19 septembre 2009, interdisait 'Toute opération à but lucratif de fourniture de main d'oeuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu'elle concerne ou d'éluder l'application des dispositions de la loi, de règlement ou de convention ou accord collectif de travail, ou marchandage, est interdite.', de sorte que l'exigence de la démonstration d'une opération à but lucratif était déjà posée.

En conséquence, M. [Z] ne recevra pas l'indemnité de 10 000 euros qu'il réclame ce titre.

Sur les heures supplémentaires 2007 et 2008

M. [Z] réclame à ce titre le paiement de la somme de 8 405,47 euros, ainsi que 840,54 euros au titre des congés payés afférents.

Pour la période non prescrite, le salarié étaye sa demande par des éléments précis sur les dates d'accomplissement de ces heures de travail réalisées à l'extérieur de son lieu de travail, mais sur les instructions de son employeur, en plus de ses horaires réguliers, ce qui induit nécessairement le dépassement de son temps de travail.

Ces heures supplémentaires ont été réalisées pour le compte de la [Établissement 3], propriété du groupe IGH, auquel appartient la maison de retraite La Roseraie,M. [Z] étant chargé par son employeur de réaliser des travaux de maintenance et d'entretien dans les locaux de cette résidence.

Le salarié verse aux débats deux tableaux récapitulatifs de ces heures supplémentaires réalisées en 2007 (à partir du 23 novembre) et 2008, selon un détail permettant à son employeur d'en contester la teneur (pièces 27 et 28 dossier salarié), ces deux mentionnant les jours et les heures de travail supplémentaires restant dues représentant 52 heures en 2007 et 239 heures en 2008.

L'employeur a dissimulé ces heures supplémentaires qui ont été rémunérées sous la forme de primes exceptionnelles au sujet desquelles il ne dit mot, se bornant à contester la réalité des heures litigieuses sans entrer dans une discussion de détail.

Il convient de rappeler que le versement de primes exceptionnelles ne peut tenir lieu de règlement des heures supplémentaires et ce, même si le montant de ces primes correspond à celui des heures supplémentaires effectuées.

Le montant de ces primes exceptionnelles confirme l'ampleur des heures supplémentaires accomplies :

- 873,09 euros brut versés en novembre 2007,

- 873,09 euros brut versés en décembre 2007,

- 450 euros brut versés en juillet 2008,

- 750 euros brut versés en décembre 2008.

Le fait que l'employeur, par le passé, employait déjà M. [Z] à la réalisation de travaux extérieurs au sein de différents établissements de santé lui appartenant (voir infra), confirme l'habitude prise de lui faire réaliser de tels travaux en le rémunérant sous forme de primes afin d'échapper au contrôle de son temps de travail.

La cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour arrêter à la somme de 2 946,18 euros, ainsi que 294,61 euros au titre des congés payés afférents, la juste rémunération de ce temps de travail supplémentaire.

Sur les heures supplémentaires 2009

M. [Z] réclame à ce titre le paiement de la somme de 1 013,24 euros, ainsi que 101,32 euros au titre des congés payés afférents.

Le salarié, à nouveau, étaye sa demande par des éléments précis sur les dates d'accomplissement de ces heures de travail réalisées à l'intérieur de son lieu de travail, celui-ci étant affecté au service de la cuisine en raison de personnel manquant.

Le directrice de l'établissement La Roseraie adressait le 26 novembre 2009 une télécopie au groupe IGH indiquant que M. [Z] assurait un service de cuisine en plus de ses heures normales de travail un week-end sur deux, s'étonnant du non-paiement de ses heures supplémentaires.

Selon la note de service établie le 19 mai 2009 par cette directrice (pièce 55 dossier salarié), M. [Z] a été affecté à la cuisine à partir du 20 mai 2009 ; il résulte d'une correspondance adressée le 11 décembre 2009 par le salarié à sa directrice que cette affectation l'a conduit à accomplir 63 heures supplémentaires dont 37 heures n'ont pas été payées à l'examen de ses bulletins de salaire.

Ces différentes pièces, contrairement à ce que soutient l'employeur, établissent sans contestation sérieuse l'existence de ces 37 heures supplémentaires.

La cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour arrêter à la somme de 585 euros, ainsi que 58,50 euros au titre des congés payés afférents.

Sur la prime de gestion

L'octroi d'une prime de gestion de 100 euros évoquée par sa directrice dans la télécopie sus-indiquée n'a pas eu pour effet d'engager l'employeur, sachant que M. [Z] ne formule aucune observation complémentaire pour asseoir sa prétention.

Sa demande sera à nouveau rejetée.

Sur le travail dissimulé

M. [Z] réclame 15 216,96 euros au titre d'un travail dissimulé en raison de l'accomplissement de ces nombreuses heures de travail réalisées pour le compte d'un établissement de santé distinct de l'établissement l'employant.

Pour conclure au rejet de cette prétention, son employeur se borne à exciper de la prescription de son action, cependant que les faits postérieurs au 28 septembre 2007, comme vu ci-dessus, ne tombent pas sous le coup de cette prescription quinquennale.

Le fait que la sanction du travail dissimulé se prescrive désormais par cinq ans n'interdit pas à la cour de rechercher dans les faits antérieurs à la date de cette prescription si l'employeur s'est volontairement soustrait à ses obligations.

La volonté de dissimulation de cet employeur est établie par la production aux débats de cinq conventions, dénommées 'de mise à disposition', datées des 20 avril, 29 mai et 22 juin 2006, 2 juin 2007 et 16 août 2007, par lesquelles la maison de retraite [Établissement 1] mettait M. [Z] à disposition de la maison de retraite [Établissement 4], de la [Établissement 5] ou de la Résidence [Établissement 2], ces établissements appartenant au groupe IGH, sachant que ces conventions ont été rédigées après l'exécution de ces travaux comme il résulte clairement d'un courriel adressé le 29 juillet 2009 par les services de l'employeur aux sociétés bénéficiaires (pièce 70 dossier salarié) dont la teneur ne laisse pas la place à une interprétation contraire :

'Mercredi 29 juillet 2009 10.55

Voilà les conventions 2006 et 2007.

Merci d'éditer 2 ex de chaque, les faire tamponner et signer et me les redescendre lundi.

Pour celles antérieures à 2006, je vais préparer une autre mise en page afin que cela ne fasse pas trop 'tout neuf'...

Est-il obligatoire de faire 1 convention avec AGELOS pour la facture 05571 du 03/06/2008 concernant surement du matériel que [P] ([Z]) est allé acheté à IKEA et qu'il a porté à St Cannat les 19 et 20 mai 2008 '

Sinon, me dire qui représente AGELOS.'.

S'agissant des heures de travail réalisées par M. [Z] en exécution de ces conventions, les bulletins de salaire n'en font pas mention :

- le bulletin de salaire de novembre 2007 mentionne 0 heure supplémentaire au lieu de 9 heures (à compter du 28) + une prime exceptionnelle de 873,09 euros brut en paiement de ces heures supplémentaires,

- le bulletin de salaire de décembre 2007 mentionne15 heures supplémentaires au lieu de 45 + une prime exceptionnelle de 873,09 euros brut en paiement de ces heures supplémentaires,

- le bulletin de salaire de juillet 2008 mentionne 12 heures supplémentaires au lieu de 50 + une prime exceptionnelle de 450 euros en paiement de ces heures supplémentaires,

- le bulletin de salaire de décembre 2008 mentionne 16 heures supplémentaires au lieu de 35 + une prime exceptionnelle de 750 euros en paiement de ces heures supplémentaires.

De surcroît, le bulletin de salaire de décembre 2009 ne mentionne pas 37 heures supplémentaires.

L'article L. 8221-5 du code du travail répute travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Eu égard à l'omission sur le bulletin de salaire de M. [Z] de nombreuses heures de travail pour la seule période non prescrite, au fait que l'employeur érigeait en système cette dissimulation par la présentation de conventions de mise à disposition de complaisance, après avoir constaté que le paiement de ce temps de travail s'opérait par moyens déguisés, la cour dit que la société La Roseraie s'est rendue coupable de dissimulation pour entrer en voie de condamnation à hauteur de la somme de 14 310 euros (2 385 € x 6).

Sur les rappels de salaires liés au coefficient 295

L'article 73-1 bis de la convention collective prévoit que :

'Le salaire minimum conventionnel afférent à chaque emploi est fixé par les grilles au titre 'Classification'.

Il est calculé sur la base de la valeur du point appliquée aux coefficients des grilles de classifications, le tout majoré, le cas échéant, de l'ancienneté. Le pourcentage d'ancienneté qui vient majorer le salaire minimum conventionnel évolue d'1% par an jusqu'à 30% pour 30 ans et plus.

SMCB = (valeur du point x coefficient) + % d'ancienneté.'.

M. [Z] revendique le coefficient d'emploi 295.

En 2012, la valeur du point était de 6,83 euros, de sorte que le salaire minimum conventionnel de M. [Z] à raison de 151,67 heures de travail par mois ne pouvait être inférieur à 2 014,85 euros (6,83 x 295) + 221,63 euros (11% d'ancienneté) = 2 236,48 euros brut.

En 2008, le salaire mensuel de M. [Z] s'élevait déjà à une somme supérieure au minimum de l'indice 295 qu'il revendique en 2012, soit la somme de 2 216,18 euros pour 151,67 heures de travail par mois + 104,77 euros au titre de l'ancienneté = 2 489,40 euros brut ; en 2012, le salaire mensuel de M. [Z] s'élevait à 2 216,18 euros pour 151,67 heures de travail par mois + 168,45 euros au titre de sa prime d'ancienneté = 2 384,63 euros brut, de sorte que sa rémunération a toujours été supérieure au salaire minimum conventionnel sur la base du coefficient d'emploi 295 revendiqué.

Les rémunérations minimales décidées par une convention collective n'ayant d'effet obligatoire qu'en ce qui concerne le montant minimum des salaires de chaque catégorie professionnelle, il n'y a donc lieu d'accorder un rattrapage de salaire (9 263,28 € + 926,32 €), pas plus qu'il n'y a lieu de prendre en compte l'incidence de ce rattrapage sur le montant de la prime d'ancienneté (810,17 € + 81,01 €).

La cour, en conséquence, supprimera les condamnations au paiement des sommes de 5.756,25 euros, 575,62 euros, 546,40 euros et 54,64 euros.

Sur les primes de fin d'année

M. [Z] indique avoir perçu une prime de fin d'année de 2005 à 2009 correspondant à un usage ; le salarié dénonce l'imputation de 20 heures d'absence injustifiées, en 2010, ayant eu pour effet de réduire cette prime à 347,50 euros contre 1 500 euros en 2008 et 2009 ; le salarié s'étant vu attribuer un mandat de délégué syndical le 22 octobre 2010, il soutient que ces 20 heures correspondaient en fait au temps nécessaire à l'exercice de ses fonctions ; il dénonce, enfin, la suppression totale de cette prime à la fin de l'année 2011.

Pour s'opposer à la demande en paiement à ce titre de la somme de 1 700 euros, outre 170 euros au titre des congés payés afférents, l'employeur réplique que ces primes de fin d'année n'avaient pas le caractère d'un usage et que sa décision discrétionnaire de diminuer en 2010 la prime de M. [Z], puis de la supprimer en 2011, ne présentait aucun caractère discriminatoire.

.../...

Sur l'existence d'un usage, le salarié indique qu'il percevait cette prime de fin d'année depuis 2005, mais il ne fournit à la cour aucun élément permettant de retenir qu'une telle prime était versée à tout le personnel ou au moins à une catégorie du personnel.

Tout au contraire, il est établi par un tableau (pièce 50 dossier salarié) que pour l'année 2010 environ la moitié des salariés de l'EHPAD [Établissement 1] ne percevait pas, en tout ou partie, cette prime de fin d'année.

L'absence de ce critère de fixité interdit de retenir l'existence d'un usage.

.../...

Sur l'existence d'une discrimination de nature syndicale, la cour relève que l'utilisation par M. [Z] de ses heures de délégation, en sa qualité de délégué du personnel élu depuis le 1er août 2006, n'a donné lieu à aucune difficulté ; que son nouveau mandat de délégué syndical le créditait d'un temps de délégation de 12 heures par mois, l'EHPAD [Établissement 1] occupant 50 à 150 salariés, de sorte que la relation de cause à effet entre la comptabilisation de ce temps de délégation et les 20 heures d'absence injustifiées mentionnées sur les bulletins de salaire des mois d'octobre et de décembre 2010 (en fait 20 heures et 5 heures) fait défaut ; que cette démonstration n'étant pas faite, il n'y a lieu de retenir l'existence d'une telle discrimination qui ne ressortit d'aucun autre élément d'appréciation.

La cour, en conséquence, supprimera la condamnation au paiement de la somme de 2 000 euros pour discrimination syndicale.

.../...

Sur l'existence d'une rupture du principe d'égalité, il n'est pas allégué que la diminution de cette prime de fin d'année en 2010, suivie de sa suppression totale en 2011, portait atteinte au principe 'à travail égal, salaire égal', ce que la cour vérifie objectivement par le tableau sus-indiqué à l'examen duquel il résulte que, pour l'année 2010, le salarié a perçu une prime d'un montant supérieur à la plupart de ses collègues de travail.

.../...

Il sera donc retenu que le versement et le montant de ces gratifications dépendaient librement de l'employeur qui avait toute latitude pour les modifier ou les supprimer.

La cour, en conséquence, supprimera les condamnations au paiement des sommes de 1 700 euros et 170 euros au titre des congés payés afférents.

Sur l'indemnité différentielle de transposition de la CCU

La réclamation de M. [Z] portant sur la période du 1er mai 2007 au 31 mars 2012 inclus, son contradicteur est bien fondé à invoquer cette prescription quinquennale pour l'entendre limiter à la période du 27 septembre 2007 au 27 mars 2012 (par commodité du 1er octobre 2007 au 31 mars 2012).

.../...

M. [Z] réclame à ce titre un rappel de salaire de 7 744,27 euros, ainsi que 774,42 euros au titre des congés payés afférents ; subsidiairement, le paiement de la somme de 2.767,09 euros, ainsi que 276,70 euros au titre des congés payés afférents.

La convention collective nationale unique de l'hospitalisation privée du 18 avril 2002 (CCU), régissant la relation de travail ayant lié les parties, applicable aux établissements privés accueillant des personnes âgées par un arrêté d'extension publié le 15 novembre 2003, s'est intégralement substituée aux anciens textes conventionnels nationaux ; un avenant du 10 décembre 2002 concernait le protocole de transposition spécifique aux établissements privés accueillant des personnes âgées (pièce 4 dossier employeur), définissant les modalités d'intégration des salariés dans la nouvelle grille de classification, la concordance des emplois et la conséquence sur les rémunérations et sur les accessoires à ces rémunérations.

L'article 4 de ce protocole de transposition disposait que :

'Lorsque, en application de la nouvelle classification, après reclassement du salarié (-) le nouveau salaire conventionnel de base mensuel est inférieur à l'ancien salaire conventionnel de base mensuel (prime d'ancienneté comprise), est crée une indemnité différentielle d'emploi qui s'ajoute au nouveau salaire mensuel conventionnel.

Son montant est défini par la différence en euros entre le salaire conventionnel en application de l'ancienne grille conventionnelle et le nouveau salaire conventionnel apprécié à la date d'effet de la nouvelle convention collective.

Afin de tenir compte de l'objectif d'harmonisation avec le secteur public, et dans la limite de cet objectif, lors de l'augmentation de la valeur du point, la moitié de cette augmentation s'imputera sur le montant de l'indemnité différentielle.

Les parties à la convention collective peuvent décider lors de la négociation de la valeur du point et de la RAG (acronyme pour Rémunération Annuelle Garantie) d'augmenter ce pourcentage.

Le mécanisme d'évolution de l'indemnité différentielle d'emploi conventionnelle (DEC) telle que prévue ci-dessus n'est pas obligatoirement applicable à la différence entre le salaire réel et le salaire conventionnel, lors des différentes augmentations du salaire conventionnel.

Au sens de l'alinéa ci-dessus, par salaire réel on entend le salaire de base auquel s'ajoutent les différents compléments de rémunération (à l'exception des éléments variables).

L'indemnité différentielle pourra être incluse dans le montant de la RAG.

Afin que le salarié concerné par l'une de ces situations soit en mesure de vérifier que son salaire réel mensuel correspond bien au salaire mensuel conventionnel ainsi majoré de l'indemnité différentielle, il lui sera remis un document écrit sur lequel sera indiqué, outre son coefficient d'emploi, le montant en euros composant son indemnité différentielle.'.

Son article 5 disposait que :

- article 5-1 : 'Le salaire conventionnel issu de la nouvelle convention collective intègre les primes spécifiques à certains emplois ou fonctions, tels que ces primes pouvaient résulter des conventions collectives nationales, accords collectifs nationaux ou recommandations en vigueur jusqu'à la date d'effet de la convention collective du 18 avril 2002.'.

- article 5-3 :'Lors de la mise en oeuvre de la nouvelle convention collective, il sera tenu compte pour la comparaison entre l'ancien salaire et le salaire conventionnel de base de l'ensemble des éléments de salaire existants.

Ne seront pas pris en compte pour la comparaison, les seuls éléments suivants :

- des remboursements de frais professionnels,

- les heures supplémentaires, les bonifications et majorations portant sur ces heures,

- des contreparties au temps d'habillage ou de déshabillage mis en place par les établissements accueillant des personnes âgées,

- des indemnités pour sujétions spéciales,

- des produits de l'intéressement, de la participation, ou des plans d'épargne d'entreprise en application des article L. 441-1 et suivants du Code du Travail et les produits financiers du compte épargne temps.'.

Au 1er janvier 2003, M. [Z], occupant un emploi de technicien hautement qualifié, percevait un salaire mensuel de 1 642,90 euros brut, pour 151,67 heures de travail par mois, ainsi décomposé :

- salaire de base : 1 065,62 euros

- CRTT (complément de réduction du temps de travail): 78,01 euros

- prime ancienneté: 34,31 euros

- prime responsable entretien: 228,67 euros

- prime achats : 152,45 euros

- prime contagion: 76,22 euros

- prime habillage / déshabillage: 7,62 euros

A la même date, son nouveau salaire, résultant de l'accord de transposition du 10 décembre 2002, sur la base du coefficient 211, s'élevait à 1 642,90 euros brut, pour 151,67 heures de travail par mois, ainsi décomposé (hors postes rémunérations aléatoires) :

- salaire conventionnel: 1 266,00 euros

- prime ancienneté: 12,66 euros

- indemnité différentielle: 356,62 euros

- prime habillage / déshabillage: 7,62 euros

Le coefficient 211 servant au calcul du salaire de base de M. [Z] a stagné du 1er janvier 2003 au 1er janvier 2006, date à laquelle son coefficient conventionnel a été porté à 267, son nouveau salaire s'élevant à la somme de 2 272,18 euros brut, pour 151,67 heures de travail par mois, ainsi décomposée :

- salaire conventionnel: 2 197,49 euros

- prime ancienneté: 43,47 euros

- prime habillage / déshabillage: 7,62 euros

Au constat de la violation de l'article 4 sus-indiqué, en ce qu'il disposait que 'Afin de tenir compte de l'objectif d'harmonisation avec le secteur public, et dans la limite de cet objectif, lors de l'augmentation de la valeur du point, la moitié de cette augmentation s'imputera sur le montant de l'indemnité différentielle.', M. [Z], pour la période du 1er juin 2007 au 31 mars 2012, réclame la moitié restante, représentant un rappel de salaire de 7 744,27 euros, ainsi que 774,42 euros au titre des congés payés afférents, selon le calcul reproduit sur un tableau (pièce 47 dossier salarié) selon la formule suivante : salaire conventionnel coefficient 295 (valeur du point x coefficient 295) + 1/2 de l'indemnité différentielle ; subsidiairement, M. [Z] réclame, pour la même période, un rappel de salaire de 2.767,09 euros, ainsi que 276,70 euros au titre des congés payés afférents, selon le calcul reproduit sur un tableau (pièce 48 dossier salarié) selon la formule suivante : salaire conventionnel coefficient 267 (valeur du point x coefficient 267) + 1/2 de l'indemnité conventionnelle.

Son contradicteur rétorque que cet article 4 prévoit expressément que l'indemnité différentielle de transposition s'ajoute au salaire conventionnel de base, seulement, et seulement 'Lorsque, en application de la nouvelle classification, après reclassement du salarié (-) le nouveau salaire conventionnel de base mensuel est inférieur à l'ancien salaire conventionnel de base mensuel (prime d'ancienneté comprise).', pour en conclure que tel n'est pas le cas en l'espèce.

Mais l'article 5-3 sus-indiqué prévoit que 'Lors de la mise en oeuvre de la nouvelle convention collective, il sera tenu compte pour la comparaison entre l'ancien salaire et le salaire conventionnel de base de l'ensemble des éléments de salaire existants.' ; sauf à exclure du calcul comparatif la prime afférente au temps d'habillage et de déshabillage, le salaire avant l'application de la CCU s'élevait à 1 635,28 euros brut, cependant que le nouveau salaire conventionnel s'élevait à 1 278,66 euros, ce dont il doit être constaté que ce nouveau salaire conventionnel était inférieur à l'ancien salaire de base, ceci expliquant le versement d'une indemnité compensatrice.

L'employeur fait ensuite valoir que le mécanisme qui prévoit que la moitié, au moins, de l'augmentation périodique de la valeur du point vient s'imputer sur l'indemnité différentielle, tandis que la part d'augmentation non imputée est affectée à l'augmentation du salaire conventionnel de base, conduit, à terme, et sans que le salaire total soit réduit, à la disparition de cette indemnité par imputation de sa moitié à chaque augmentation de la valeur du point.

Pour les besoins de sa démonstration, l'employeur propose l'exemple suivant :

Si un salarié percevait un salaire mensuel brut de 4 000 euros, avant l'entrée en vigueur de la CCU, et que l'application de la nouvelle grille de salaire prévue par cette dernière instituait, pour le type de poste occupé par le salarié, un salaire de base minimum mensuel de 1 000 euros bruts, il convenait de créer une indemnité différentielle de 1 000 euros.

Si l'augmentation de la valeur du point correspond à la somme de 100 euros et que l'employeur décide d'en imputer la moitié (50 euros) sur l'indemnité différentielle, cette dernière passera de 1 000 euros à 950 euros, tandis que la part d'augmentation non imputée (50 euros) viendra s'ajouter au salaire de base conventionnel pour le porter à 3 050 euros.

La rémunération totale du salarié (salaire de base + indemnité différentielle) ne sera donc pas modifiée puisqu'elle sera de 3 050 euros + 950 euros = 4 000 euros.

A ce stade de sa démonstration, l'employeur ajoute que le dispositif prévu par le protocole de transposition de la CCU a pour objet :

- d'assurer le maintien de la rémunération des salariés qui percevaient, avant l'entrée en vigueur de cette nouvelle convention collective, un salaire plus élevé que celui résultant des minima prévus par le CCU,

- de permettre à l'employeur, en imputant au moins la moitié des augmentations de valeur du point sur l'indemnité de transposition, de ne pas augmenter le salaire global (hors ancienneté) tant que l'indemnité différentielle n'a pas totalement été absorbée par ces imputations.

De conclure que le fait que l'indemnité de transposition ait été supprimée des feuilles de paie de M. [Z], à compter du 1er janvier 2006, n'est pas condamnable dans la mesure où cette suppression n'a pas entraîné de baisse de la rémunération du salarié.

Mais M. [Z], à bon droit, soutient que ce raisonnement n'est admissible que si le salaire conventionnel évolue avec la valeur du point, mais non en cas de stagnation de ce salaire conventionnel comme il doit être constaté dans son cas particulier, puisque son salaire conventionnel qui s'élevait à 2 216,18 euros au 1er juillet 2006 s'élevait exactement à la même somme au 27 mars 2012, jour de la rupture de son contrat de travail, bien que les partenaires sociaux, à plusieurs reprises, ont augmenté la valeur du point d'indice pour compenser le coût de la vie, ces augmentations devant être rétablies au bénéfice du salarié.

Les partenaires sociaux ont émis un avis n° 1 du 29 octobre 2002 relatif à la commission paritaire nationale d'interprétation et de conciliation, instaurée par l'article 5 de la CCU, selon lequel le terme 'imputer' présent dans la phrase 'Afin de tenir compte de l'objectif d'harmonisation avec le secteur public, et dans la limite de cet objectif, lors de l'augmentation de la valeur du point, la moitié de cette augmentation s'imputera sur le montant de l'indemnité différentielle.' signifie 'en déduction de'.

Reprenant l'exemple ci-dessus, la solution proposée par l'employeur est incorrecte car elle a pour effet de neutraliser l'augmentation de la valeur du point de 100 euros.

La solution correcte est la suivante :

Si l'augmentation de la valeur du point correspond à la somme de 100 euros et que l'employeur décide d'en imputer la moitié (50 euros) sur l'indemnité différentielle, cette dernière passera de 1 000 euros à 950 euros, tandis que le salaire conventionnel de base sera de 3 100 euros.

La rémunération totale du salarié (salaire de base + indemnité différentielle) est modifiée : 3 100 euros + 950 euros = 4 050 euros.

A compter du 1er janvier 2006, l'employeur a usé de la faculté d'intégrer l'indemnité différentielle dans la rémunération annuelle garantie (RAG) conformément l'article 4 de l'accord de transposition.

Cette indemnité différentielle de transposition disparaissant, il n'y a plus lieu de retrancher du revenu de M. [Z] la moitié de l'augmentation de la valeur du point conventionnel.

Le calcul du rattrapage de salaire de M. [Z] intégrera donc les quatre augmentations de la valeur du point utiles durant la période non prescrite, sur la base du coefficient 267, selon le détail ci-après :

- du 1er octobre 2007 au 1er juillet 2008 : augmentation de la valeur du point de 0,19 centime d'euro, soit 50,73 euros par mois (267 x 0,19 €), soit pour la période de 9 mois un rappel de 456,57 euros ;

- du 1er juillet 2008 au 1er septembre 2009 : augmentation de la valeur du point de 0,12 centime d'euro, soit 32,04 euros par mois (267 x 0,12 €), soit pour la période de 14 mois un rappel de 448,56 euros ;

- du 1er septembre 2009 au 1er avril 2011 : augmentation de la valeur du point de 0,05 centime d'euro, soit 13,35 euros par mois (267 x 0,05 €), soit pour la période de 19 mois un rappel de 253,64 euros ;

- du 1er avril 2011 au 31 mars 2012 : augmentation de la valeur du point de 0,05 centime d'euro, soit 13,35 euros par mois (267 x 0,05 €), soit pour la période de 12 mois un rappel de 160,20 euros.

En conséquence, la cour entrera en voie de condamnation à hauteur de la somme de 1 328,97 euros, outre 132,89 euros au titre des congés payés afférents.

.../...

La répercussion de ces augmentations est insignifiante sur les heures supplémentaires payées échappant à la prescription.

Sur le harcèlement moral

M. [Z] n'est pas fondé à évoquer l'initiative de l'employeur qui a fait dépêcher à son domicile un médecin-conseil afin de vérifier sa présence, son employeur n'ayant fait qu'user de son droit.

M. [Z] n'est pas davantage fondé à se prévaloir à ce titre de l'avertissement qui lui a été infligé le 6 mars 2012 (pièce 2 dossier employeur), dès lors que cette sanction faisait suite à ses pressions exercées auprès de la direction de la société La Roseraie afin d'obtenir la remise de la somme de 70 000 euros en contrepartie de sa démission, tandis que la Direccte, saisie par l'employeur d'une demande de licenciement pour faute de ce salarié protégé, par décision en date du 10 février 2013, a estimé que ces faits '... sont avérés et qu'ils revêtent une gravité suffisante pour justifier un licenciement même replacés dans leur contexte ; que le caractère discriminatoire de la demande n'est pas démontré.'.

Il convient de constater que l'employeur n'a pas entendu mettre en oeuvre la procédure de licenciement, malgré cette autorisation administrative, se bornant à infliger au salarié un simple avertissement, motifs pris '... compte tenu du fait que vous avez reconnu les faits et compte tenu du fait que vous n'avez jamais eu de sanction disciplinaire ...', une telle bienveillance étant exclusive d'un harcèlement moral.

M. [Z] verse aux débats l'attestation de Mme [J], ancienne salariée, laquelle déclare 'Pour [P] ([Z]), j'ai constaté une dégradation physique et morale dès la fin du mois de septembre (2011). J'ai vu leur manège envers [P] quand j'étais là-bas. Je suis révoltée encore aujourd'hui, car [P] a beaucoup donné de sa personne pour le groupe IGH. Ces déplacements repété dans les autres établissements du groupe, ces heures tardives pour rentrer chez lui. On ne le voyait pas pendant des semaines car il était à leurs services dans d'autres établissements.' ; que ce témoignage isolé, non circonstancié et émanant d'une salariée qui reproche à l'employeur le retrait sans motif d'une partie de ses attributions, n'est pas susceptible faute de crédibilité suffisante d'entraîner la conviction de la cour.

M. [Z] se prévaut enfin de l'attestation d'un psychiatre attestant du fait qu'il été régulièrement suivi entre le 12 janvier et le 13 mars 2012 '... pour des troubles se rapportant à un conflit d'ordre professionnel. Son état de santé avait nécessité un arrêt de travail du 12 janvier au 31 mars 2012.'.

Mais l'emploi du mot 'troubles' dans ce certificat médical est insuffisant pour caractériser une atteinte significative à son état de santé en rapport avec des faits de harcèlement.

Ces éléments, pris dans leur ensemble, sont insuffisants pour établir des faits de nature à laisser présumer le harcèlement moral allégué.

La demande sera à nouveau rejetée.

Sur la prise d'acte

La prise d'acte produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse lorsque les manquements de l'employeur sont actuels et présentent un degré de gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Ne constitue pas, en l'espèce, un manquement actuel de l'employeur le non-paiement d'heures supplémentaires accomplies durant les années 2007, 2008 et 2009 pour lesquelles le salarié ne justifie pas avoir élevé une réclamation moins de trois ans avant la saisine du conseil de prud'hommes.

Constitue, en revanche, un manquement grave à l'obligation de loyauté qui sous-tend l'exécution du contrat de travail la dissimulation et le non-paiement par la société La Roseraie de multiples heures supplémentaires.

Constitue également un manquement grave, et actuel, la méconnaissance par l'employeur du droit conventionnel ayant privé le salarié pendant six années des augmentations de salaire auxquelles il avait droit.

La cour, en conséquence, dira que la prise d'acte par M. [Z] de la rupture de son contrat de travail produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Âgé de 47 ans au moment de cette rupture, M. [Z] a perdu un salaire mensuel brut de 2 385 euros en l'état d'une ancienneté de onze années au sein d'un établissement occupant habituellement plus de 11 salariés.

L'intéressé, né au Liban, indique avoir été contraint de s'expatrier pour chercher un travail avant de revenir en France ; il produit au dossier son avis de situation déclarative à l'impôt sur le revenu 2016 duquel il résulte qu'il a perçu environ 1 000 euros par mois au titre des salaires ou revenus assimilés.

La cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour arrêter à la somme de 23 000 euros la juste et entière réparation du préjudice né de la rupture illégitime de son contrat de travail.

L'employeur, au titre du préavis dont il a été privé du fait de la suspension de son contrat de travail, versera à M. [Z] l'équivalent de deux mois de préavis, représentant la somme de 4.770 euros, ainsi que la somme de 477 euros au titre des congés payés afférents.

L'indemnité de licenciement est égale, calcul refait, à la somme de 5 724 euros (2 385 x 1/5 x 10) + (2 385 x 2/5).

Sur le droit au DIF

Le salarié ne démontre pas la perte de chance qu'il allègue d'utiliser les droits qu'il a acquis au titre du droit individuel à la formation.

Sur les intérêts et l'anatocisme

Les créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter du 28 septembre 2012.

Le bénéfice de l'anatocisme est acquis depuis le 28 septembre 2013.

Sur la délivrance de documents sociaux

La société La Roseraie délivrera à M. [Z], sans astreinte en l'état, un bulletin de salaire, un reçu pour solde de tout compte et une attestation destinée au Pôle emploi indiquant que le motif de la rupture du contrat de travail est un licenciement, chacun de ces documents sociaux mentionnant le détail de ses créances salariales.

Sur les dépens

L'intimée, qui succombe au principal, supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile.

Infirme le jugement déféré.

Statuant à nouveau, dit que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Condamne la société La Roseraie à verser à M. [Z] les sommes suivantes :

2 946,18 euros, ainsi que 294,61 euros au titre des congés payés afférents, en paiement d'heures supplémentaires pour les années 2007 et 2008,

585 euros, ainsi que 58,50 euros au titre des congés payés afférents, en paiement d'heures supplémentaires pour l'année 2009,

14 310 euros pour travail dissimulé,

1 328,97 euros, outre 132,89 euros au titre des congés payés afférents, au titre de l'indemnité différentielle de transposition de la convention collective unifiée,

23 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

4 770 euros pour préavis, ainsi que 477 euros au titre des congés payés afférents,

5 724 euros au titre de l'indemnité de licenciement.

Dit que les créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter du 28 septembre 2012, le bénéfice de l'anatocisme étant acquis depuis le 28 septembre 2013.

Condamne la société La Roseraie à délivrer à M. [Z] un bulletin de salaire, un reçu pour solde de tout compte et une attestation destinée au Pôle emploi indiquant que le motif de la rupture du contrat de travail est un licenciement, ces documents sociaux mentionnant le détail des créances de nature salariale ci-dessus.

Rejette les demandes plus amples ou contraires.

Condamne la société La Roseraie aux entiers dépens.

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société La Roseraie à verser à M. [Z].la somme de 3 000 euros pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel confondus.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre
Numéro d'arrêt : 15/18820
Date de la décision : 01/03/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°15/18820 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-01;15.18820 ?
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