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28/02/2018 | FRANCE | N°15/22459

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 6e chambre d, 28 février 2018, 15/22459


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

6e Chambre D



ARRÊT AU FOND

DU 28 FEVRIER 2018

E.D.

N°2018/













Rôle N° 15/22459







[Z] [K] [T] [W]





C/



[Y][R] [Q] [W]

[V] [D] [X] [W]

[F] [V] [W]

[B] [Y] [Y] [W]

[E] [C] [I] [W] NEE [M]





























Grosse délivrée

le :

à :



SELARL DEBEAUR

AIN & ASSOCIES





SCP TROEGELER GOUGOT BREDEAU TROEGELER MONCHAUZOU





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 30 Novembre 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13/03375.





APPELANT



Monsieur [Z] [K] [T] [W]

né le [Date naissance 1] 1943 à [L...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

6e Chambre D

ARRÊT AU FOND

DU 28 FEVRIER 2018

E.D.

N°2018/

Rôle N° 15/22459

[Z] [K] [T] [W]

C/

[Y][R] [Q] [W]

[V] [D] [X] [W]

[F] [V] [W]

[B] [Y] [Y] [W]

[E] [C] [I] [W] NEE [M]

Grosse délivrée

le :

à :

SELARL DEBEAURAIN & ASSOCIES

SCP TROEGELER GOUGOT BREDEAU TROEGELER MONCHAUZOU

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 30 Novembre 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13/03375.

APPELANT

Monsieur [Z] [K] [T] [W]

né le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 1],

demeurant [Adresse 1]

représenté et assisté par Me Julien DUMOLIE de la SELARL DEBEAURAIN & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Frédéric BERENGER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur [Y] [R] [Q] [W]

né le [Date naissance 2] 1945 à [Localité 1],

demeurant [Adresse 2]

Monsieur [V] [D] [X] [W]

né le [Date naissance 3] 1971 à [Localité 2],

demeurant [Adresse 1]

Monsieur [F] [V] [W]

né le [Date naissance 4] 1980 à [Localité 2],

demeurant [Adresse 1]

Monsieur [B] [Y] [Y] [W]

né le [Date naissance 5] 1975 à [Localité 2],

demeurant [Adresse 3]R (SENEGAL)

Madame [E] [C] [I] [W] née [M]

née le [Date naissance 3] 1948 à [Localité 1], demeurant [Adresse 1]/FRANCE

représentés et assistés par Me Michel GOUGOT de la SCP TROEGELER GOUGOT BREDEAU TROEGELER MONCHAUZOU, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Janvier 2018 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Chantal MUSSO, Présidente, et Mme Emilie DEVARS, Vice-Présidente placée, chargés du rapport.

Mme Emilie DEVARS, Vice-Présidente placée, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Chantal MUSSO, Présidente

Monsieur Jean-Marc BAÏSSUS, Président de chambre

Mme Emilie DEVARS, Vice-Présidente placée

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Février 2018.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Février 2018.

Signé par Madame Chantal MUSSO, Présidente et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

[U] [W] et [H] [E] son épouse ont eu trois enfants:

-[Z] [W]

-[Y] [W]

-[A] [W], lequel décédait le [Date décès 1] 1998, laissant pour héritiers ses trois enfants et son épouse:

-[V] [W]

-[F] [W]

-[B] [W]

-[E] [M]

[U] [W] est décédé le [Date décès 2] 1983, laissant à recueillir sa succession ses trois enfants, [Z] [Y] et [A], ainsi que sa femme [H] avec laquelle il était marié sous le régime de la communauté réduite aux acquêts.

Maître [J] dressait un acte notarié et une attestation immobilière en son étude le premier le 19 septembre 1983 le second le 20 janvier 1984.

En suite de cet acte et en l'Etude du même Notaire le 12 octobre 1984, Madame [H] [E] veuve [W] procédait à un acte de donation-partage à ses enfants.

Aux termes de cet acte, elle faisait donation entre vifs à titre de partage anticipé, à chacun de ses trois enfants la pleine propriété de la moitié indivis des immeubles précédemment désignés lors de la communauté ayant existé entre elle et son défunt mari, et le quart de l'usufruit desdits biens recueillis dans la succession de [U] [W].

En suite de cette donation, les trois enfants, [Z], [Y] et [A] ont reçu un terrain constructible qu'ils ont pu vendre ainsi que l'atteste le document établi par [O] [H] Notaire à [Localité 2] le 4 septembre 1987.

[A] [W] décédait le [Date décès 1] 1998 en laissant pour recueillir sa succession son épouse Madame [E] [M] et ses trois enfants: [V], [F] et [B].

[H] [E] Veuve [W] décédait le [Date décès 3] 2012, laissant pour recueillir sa succession ses deux fils [Z] et [Y] ainsi que ses trois petits enfants [V], [F] et [B].

Les lots objets des articles 3 et 4 étaient vendus d'un commun accord entre les parties et le lot n°8 a fait l'objet d'un partage.

Seuls restaient dans l'indivision les lots 1, 2, 5, 6, 7 et 9.

Par acte d'huissier en date du 12 juin 2013, Monsieur [Z] [W] a assigné devant le tribunal de grande instance d'Aix-en Provence, Monsieur [Y] [W], Monsieur [V] [W], Monsieur [F] [W], Monsieur [B] [W] et Madame [E] [M] afin de voir ordonner l'ouverture des opération s de compte, liquidation et partage des biens dépendant de la communauté de biens meubles et acquêts ayant existé entre [U] [W] et son épouse [H] [E], et de leur succession.

***

Par jugement contradictoire du 30 novembre 2015, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a essentiellement:

-estimé qu'aucun rapport à la succession n'ayant été ordonné, ni même sollicité, depuis l'attestation ayant constaté le 20 janvier 1984 le transfert de propriété, la succession de [U] [W] était réglée à cette date. Il n'avait donc plus lieu à ordonner l'ouverture des opérations de compte et de liquidation de la succession de [U] [W] mais seulement de statuer sur les éventuelles demandes en partage des parties souhaitant désormais sortir de l'indivision.

- notait que les seuls points de désaccord entre les parties portaient sur la demande d'attribution préférentielle à Monsieur [V] [W] des parcelles sis à [Localité 1] cadastrées AE n°[Cadastre 1] et n°[Cadastre 1] et sur l'existence d'une créance de salaire différé au profit de Monsieur [Z] [W].

-ordonnait l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [H] [E] et de désigner Monsieur le Président de la [Adresse 4] pour procéder à ces opérations.

Le premier juge a ainsi retenu que:

-Sur la demande de créance de salaire différé, après avoir rappelé que lorsque les parents du bénéficiaire du salaire différé ont été exploitants successifs, celui-ci ne peut se prévaloir d'un unique contrat de travail et exercer son droit de créance sur l'une ou l'autre des successions qu'à la condition que ce contrat ait reçu exécution au cours de l'une ou de l'autre, le premier juge retient que Monsieur [Z] [W] avait cessé, au moment du décès de son père, d'exercer son activité d'aide familial dans l'exploitation de ses parents.

-Sur l'attribution préférentielle, le caractère agricole des parcelles sises à [Localité 1] cadastrées section AE n°[Cadastre 1] et n°[Cadastre 1] résulte d'un relevé d'exploitation MSA établissant que [V] [W] participait à l'exploitation agricole des parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 1]

[Z] [W] a interjeté appel de ce jugement.

***

Par conclusions notifiées le 5 décembre 2017, Monsieur [Z] [W] a demandé essentiellement à la cour de:

-d'ordonner le rabat de l'ordonnance de clôture

-de réformer le jugement rendu le 30 novembre 2015 par le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence

-de constater qu'aucun partage amiable n'est possible

-de constater et fixer la créance de salaire différé de Monsieur [Z] [W] à la somme de 92620 euros en application des articles L 321-13 et suivants du Code rural

-de rejeter l'exception de forclusion soulevée par les défendeurs

-d'ordonner les opérations de compte, liquidation et partage des biens dépendant de la communauté des biens meubles et acquêts ayant existé entre [U] [W] et son épouse [H] [E] et de leur succession

-En tant que de besoin, de prendre acte de la vente amiable par les parties de la maison (lot n°1) au prix de 270 000 euros hors frais

- de prendre acte de l'accord des parties pour vendre à l'amiable à Monsieur [Y] [W] les parcelles situées sur la commune [Localité 1]:

-section CI n°[Cadastre 2] pour 47 a et 40 ca, lieudit '[Localité 3]'

-section CI n°[Cadastre 1] pour 20 a, lieudit '[Localité 3]'

-section CI n°[Cadastre 3], une parcelle de terre plantée en vigne pour 93 a 95 ca, lieudit '[Localité 3]'

-section n°[Cadastre 3] pour une superficie de 33a 55 ca, lieudit '[Localité 3]'.

-de désigner tel expert qu'il plaira aux fins de fixation du prix de vente des parcelles situées sur la commune [Localité 1]:

-section CI n°[Cadastre 2] pour 47 a et 40 ca, lieudit '[Localité 3]'

-section CI n°[Cadastre 1] pour 20 a, lieudit '[Localité 3]'

-section CI n°[Cadastre 3], une parcelle de terre plantée en vigne pour 93 a 95 ca, lieudit '[Localité 3]'

-section n°[Cadastre 3] pour une superficie de 33a 55 ca, lieudit '[Localité 3]'.

-de rejeter la demande d'attribution préférentielle formulée au profit de Monsieur [V] [W] concernant les parcelles sises sur la Commune [Localité 1]cadastrées sectionAE n°[Cadastre 1] pour une superficie de 89a et section AE n°[Cadastre 1]pour une superficie de 1ha 44 a 90 ca

-de désigner tel expert qu'il plaira aux fins de fixation du prix de vente des parcelles sises sur la commune [Localité 1] cadastrées section AE n°[Cadastre 1] pour une superficie de 89a et section AE n°[Cadastre 1] pour une superficie de 1ha 44a 90 ca.

-de prendre acte de la demande du concluant d'attribution en pleine propriété d'1/3 de la surface.

-de désigner le Président de la [Adresse 4] ou son délégataire afin de dresser l'acte constatant le partage sous le contrôle d'un juge commis à cet effet

-d'ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir

- de juger que les dépens y compris les frais d'expertise sont employés en frais privilégiés de liquidation partage

L'appelant expose essentiellement les moyens suivants à l'appui de ses demandes:

-Sur la créance de salaire différé:

-l'attestation de propriété, n'est pas un acte translatif qui a simplement pour but de fixer les droits indivis de chacun des héritiers et de détailler les biens immobiliers présents dans la succession et de les mettre au nom de la succession.

-un partage partiel n'éteint pas la succession. La succession est réglée lorsque l'ensemble des biens ont été partagés entre les cohéritiers ou lorsque le passif l'emporte sur l'actif

-une créance de salaire différé peut être revendiquée tant qu'un partage définitif n'est pas intervenu

-la rémunération de la créance peut se faire en nature ou en argent. Cette rémunération suppose donc le partage des biens de l'indivision. Par conséquent, en l'absence de partage, la succession n'est pas réglée. La créance de salaire différé demeure recevable.

-l'acte du 25 mai 1987 n'indique pas dans les origines de propriété que les héritiers auraient acquis le bien suite au partage de la succession de [U] [W]

-la somme versée correspond aux émoluments du notaire dont les frais sont calculés sur la valeur de l'immeuble

-Sur la co-exploitation [H] [E] et [U] [W]:

-la MSA a confirmé que Madame [H] [E] avait cessé son activité agricole au 31 décembre 1990. Elle était coexploitante avec son mari.

-la MSA atteste également que Monsieur [Z] [W] a été enregistré à la MSA dès 1957, sous le dossier de sa mère, Madame [H] [E].

-le document attestant la radiation de Monsieur [Z] [W] prouve que les époux [W] exploitaient ensemble l'exploitation agricole lorsque Monsieur [Z] [W] était aide familial

-Sur la prescription:

le décès de [U] [W] est survenu le [Date décès 2] 1983

L'assignation délivré à [V], [F] [B] [W] et [E] [M] l'a été le 14 juin 2013. Celle délivrée à [Y] [W] l'a été le 12 juin 2013. Sachant qu'en fonction du décès de [U] [W] le délai expirait au [Date décès 2] 2013. Les assignations sont donc bien intervenues dans les délais.

-sur les parcelles dénommées '[Localité 3]', '[Localité 3]' et '[Localité 3]':

-Compte tenu de la discordance entre les parties, il appartiendra à la cour de désigner tel expert aux fins de fixation du prix de vente

-Sur la demande d'attribution préférentielle:

-[H] [W] ne pouvait en aucun cas consentir seule un bail puisqu'elle n'était qu'indivisaire

-reconnaître la validité du bail par l'existence d'un mandat tacite dont disposait [H] [E] alors que la loi le limite à la conclusion d'acte d'administration est totalement irrecevable

-le relevé d'exploitation est la conséquence du bail rural et est donc inopposable

-faute de préciser très exactement leur moyen juridique, leur demande ne saurait aboutir

-aucun élément n'est versé aux débats justifiant de l'existence ou pas d'une exploitation agricole

-les parcelles concernées ont toutes les chances de devenir constructibles , cette attribution entraînerait une iniquité manifeste

***

Par conclusions notifiées et déposées par RPVA le 30 novembre 2017, les consorts [W] ont demandé essentiellement à la cour de:

-confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a déclarée irrecevable la demande de créance en salaire différé de Monsieur [Z] [W]

-confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté Monsieur [Z] [W] de sa demande tendant à voir ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des biens dépendant de la communauté ayant existé entre [U] [W] et son épouse [H] [E], et de la succession de [U] [W]

-confirmer la décision entreprise en ce qu'elle ordonne l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [H] [E]

-confirmer la décision entreprise en ce qu'elle constate l'attribution préférentielle de droit à Monsieur [V] [W] des parcelles sises sur la commune[Localité 1] cadastrées Section AE [Cadastre 1] d'une superficie de 89 a et section AE [Cadastre 1] d'une superficie de 1 ha 44 a et 90 ca

-constater que la maison à usage d'habitation quartier[Localité 4] cadastrée Section AE n°[Cadastre 2] a été vendue le 17 novembre 2016 pour le prix de 270 000 euros et qu'il a été opéré consignation chez Maître [O] d'une somme de 92620 euros

-prendre acte de l'accord de les consorts [W] de céder les parcelles sises à [Localité 1] cadastrées Section CI [Cadastre 2], CI [Cadastre 3]a, [Cadastre 3]b, CI [Cadastre 4]et CI [Cadastre 1] pour le prix de 25 000 euros à Monsieur [Y] [W] pour le prix de 25 000 euros

-condamner Monsieur [Z] [W] à 7000 euros du chef de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens, de première instance et d'appel, ceux d'appel distraits à la SCP TROEGELER GOUGOT BREDEAU-TROEGELER MONCHAUZOU

Les intimés exposent essentiellement les moyens suivants à l'appui de leurs demandes:

Sur la créance de salaire différé:

-l'acte de 1984 indique la répartition du partage post-successoral et notamment le choix de rester en indivision mais également le montant des frais de succession versés.

-si l'actif de [U] [W] n'avait pas été partagé, [H] [E] n'aurait pas pu donner à ses propres enfants une partie des biens qu'elle avait reçus de son époux et l'ensemble des héritiers n'auraient pas pu vendre les lots 3 et 4 et le lot n°8 n'aurait pu être partagé entre eux.

La succession de [U] [W] ayant été liquidée le 20 janvier 1984, la créance de salaire différé de Monsieur [Z] [W] est forclose

-il est démontré que [H] [E] n'a jamais été coexploitante de son mari auquel cas elle aurait dû en cette qualité s'acquitter de cotisation

-il n'est donc pas recevable à exercer son action en demande de créance différé à la succession de [H] [E] veuve [W]

-Sur les parcelles sis à [Localité 1], cadastrées Section CI [Cadastre 2], CI [Cadastre 3]a, [Cadastre 3]b, CI [Cadastre 4]et CI [Cadastre 1]:

-les consorts [W] s'en remettent à la sagesse de la cour sur la nécessité d'une expertise

-Sur l'attribution préférentielle de deux parcelles AE[Cadastre 1] et AE [Cadastre 1] à [V] [W]:

-qu'il soit valide ou non, Monsieur [V] [W] exerce bien sur ces parcelles qu'il a complanté en vigne une activité agricole au vu d'un bail à ferme qui lui avait été consenti du vivant de sa grand-mère le 1er janvier 2001 et pour lequelle il n'a cessé de verser soit à grand-mère soit à l'indivision le montant des fermages

***

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 décembre 2017

***

Sur ce,

Sur l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage:

En application de l'article 815 du Code Civil, nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention.

Le règlement d'une succession se déroule en plusieurs étapes.

L'indivision n'est qu'une étape transitoire dans le règlement de la succession qui s'achève avec le partage du patrimoine.

En l'espèce, il est produit aux débats un acte de notoriété en date du 19 septembre 1983 et une attestation immobilière datée du 20 janvier 1984 s'agissant de la succession de [U] [W] publiée au Bureau des hypothèques [Localité 2] le 27 février 1984.

Cette attestation immobilière est un acte déclaratif constatant la transmission des droits du fait du décès et démontre que la succession de [U] [W] a été ouverte mais non encore réglée puisque que les héritiers ont fait le choix de rester dans l'indivision.

L'action en partage étant un droit impératif et imprescriptible, Monsieur [Z] [W] est fondé à solliciter l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [U] [W], jusque là jamais réglée.

Il y a donc lieu de réformer le jugement entrepris sur ce point et d'ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [U] [W] mais également de la succession de [H] [E], eu égard aux désaccords existants entre les parties et aux diligences accomplies en vue d'un partage amiable non abouties.

Il y a lieu de désigner à cet effet, le Président de la [Adresse 4] ou son délégataire.

Sur la créance de salaire différé:

Aux termes de l'article L321-13 du code rural et de la pêche maritime, les descendants d'un exploitant agricole, qui âgés de plus de 18 ans, participent directement et effectivement à l'exploitation, sans être associés aux bénéfices ni aux pertes et qui ne reçoivent pas de salaire en argent en contrepartie de leur collaboration, sont réputés légalement bénéficiaire d'un contrat de travail à salaire différé sans que la prise en compte de ce salaire pour la détermination des parts successorales puisse donner lieu au paiement d'une soulte à la charge des cohéritiers.

L'article L321-17 du même code précise que le bénéficiaire d'un contrat de salaire différé exerce son droit de créance après le décès de l'exploitant et au cours du règlement de la succession.

Reste que cette action pour le bénéficiaire d'un contrat de travail à salaire différé est soumise aux règles de prescription.

Avant la loi du 17 juin 2007, l'action se prescrivait par 30 ans.

[U] [W] étant décédé le [Date décès 2] 1983, la prescription était en cours au moment de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2007.

Aussi, Monsieur [Z] [W] peut bénéficier de la durée nécessaire pour atteindre trente années sans que l'expiration du délai puisse excéder la date du 19 juin 2013 ( 5 années à compter de l'entrée en vigueur de la loi)

L'assignation a été délivrée par Monsieur [Z] [W] le 12 juin 2013, soit avant le 19 juin 2013 . Son action n'est donc pas prescrite.

La succession de [U] [W], en raison du maintien prolongé de l'indivision entre les héritiers n'ayant pas été encore réglée, Monsieur [Z] [W] est donc recevable à exercer son droit de créance sur le fondement de l'article L321-13 du code rural et de la pêche maritime.

Il est attesté par la fiche de reconstitution de carrière établie par la MSA que Monsieur [Z] [W] a travaillé en tant que participant aux travaux à l'exploitation agricole de son père [U] [W] pour la période allant du 18 mai 1961 au 31 octobre 1962, toujours en tant que participant aux travaux pour la période du 1er mai 1964 au 31 décembre 1964 et en tant qu'aide familial pour la période allant du 1er janvier 1965 au 31 décembre 1969.

Si les consorts [W] contestent la fin de cette dernière période estimant que Monsieur [Z] [W] s'est arrêté juste après son mariage en février 1969, ils ne parviennent pas à le démontrer.

Monsieur [Z] [W] avance que cette créance s'évalue à hauteur de 92620 euros sans pour autant avancer ni le moindre calcul ni indice.

Il y a donc lieu de réformer le jugement entrepris sur ce point et de retenir le principe même de la créance sur les dites périodes et de charger le notaire désigné aux opérations de compte, liquidation et partage d'évaluer cette créance de salaire différée.

Sur le prix des parcelles dénommées '[Localité 3]', '[Localité 3]' et '[Localité 3]':

En vertu de l'article 1365 alinéa 3 du code de procédure civile, le notaire peut, si la valeur ou la consistance des biens le justifie, s'adjoindre un expert, choisi d'un commun accord entre les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis.

Si les parties s'accordent pour que [Y] [W], fils de Monsieur [Z] [W] achète les parcelles CI n°[Cadastre 2], CI n°[Cadastre 3]a, CI n°[Cadastre 3]b, CI n°[Cadastre 3] et CI n°[Cadastre 1], elles ne s'entendent pas sur le prix de vente.

Il appartiendra au notaire chargé de l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de s'adjoindre éventuellement d'un expert pour permettre d'évaluer la valeur vénale des terres en question

Sur la demande d'attribution préférentielle:

En vertu de l'article 831 du code civil, le conjoint survivant ou tout héritier propriétaire peut demander l'attribution préférentielle par voie de partage, à charge de soulte s'il y a lieu, de toute entreprise, ou partie d'entreprise agricole, commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ou quote-part indivise d'une telle entreprise, même formée pour une part de biens dont il était déjà propriétaire ou copropriétaire avant le décès, à l'exploitation de laquelle il participe ou a participé effectivement.

L'attribution préférentielle d'une exploitation agricole est subordonnée à la condition que cette exploitation constitue une unité économique et que l'héritier souhaitant bénéficié de l'attribution préférentielle participe de manière effective à l'exploitation.

La participation effective à la mise en valeur des parcelles agricoles par l'héritier suffit à justifier l'attribution préférentielle de ces biens à ce dernier, peu important les conditions juridiques de son exploitation.

[V] [W] fonde sans conteste sa demande d'attribution préférentielle sur le fondement de l'article pré-cité, étant précisé que l'exploitation agricole dont s'agit ne dépasse pas les limites fixées par décret en Conseil d'Etat et donc échappe aux conditions de l'article 832 du code civil.

En l'espèce, si effectivement le bail rural cédé par [H] [E] à son petit-fils [V] est manifestement irrégulier au seul motif que cette dernière usufruitière ne pouvait signer seule le dit bail, cette irrégularité rendant le bail inopposable aux nu-propriétaires ne remet pas cependant en cause la participation effective de [V] [W] à l'exploitation des parcelles.

En effet, est versé aux débats un relevé d'exploitation MSA d'EARL NAIS dirigée par Monsieur [V] [W], mentionnant l'exploitation des parcelles AE n°[Cadastre 1] et n°[Cadastre 1].

La démonstration que le petit-fils de [U] [W] exploite pour le compte de son EARL NAIS les deux parcelles objet de la demande d'attribution préférentielle est parfaitement établie.

Si Monsieur [Z] [W] avance que les dites parcelles pourraient devenir constructibles et créer ainsi une inéquité entre les cohéritiers, il n'avance aucun extrait du plan local d'urbanisme opposable ou celui éventuellement en cours d'approbation ou de modification permettant de considérer que les parcelles deviendraient constructibles dans un futur certain.

Ses allégations sont donc sans aucun fondement. La constructibilité très hypothétique des dites parcelles ne suffit pas à écarter le bien fondé de l'attribution préférentielle au profit de [V] [W], en sa qualité d'exploitant agricole.

S'agissant de l'évaluation de ces parcelles, il appartiendra au notaire chargé des opérations de s'adjoindre éventuellement d'un expert pour permettre d'évaluer leur valeur vénale.

Sur les demandes accessoires:

La nature du litige commande qu'aucune somme ne soit allouée aux parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation partage.

PAR CES MOTIFS:

la Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] [W] de sa demande tendant à voir ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des biens dépendant de la communauté des biens meubles et acquêts ayant existé entre [U] [W] et son épouse [H] [E], et de la succession de [U] [W].

Statuant à nouveau,

Dit que Monsieur [Z] [W] est créancier de salaire différé à l'égard de la succession de [U] [W] pour la période allant du 18 mai 1961 au 31 octobre 1962, pour la période du 1er mai 1964 au 31 décembre 1964 et pour la période allant du 1er janvier 1965 au 31 décembre 1969.

Ordonne l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession partage des biens dépendant de la communauté des biens meubles et acquêts ayant existé entre [U] [W] et son épouse [H] [E], de la succession de [U] [W] et de la succession de [H] [E].

Commet Maître [N] [X], [Adresse 5] pour procéder aux opérations de partage.

Dit qu'en cas d'empêchement du notaire commis, il sera procédé à son remplacement sur simple ordonnance rendue sur requête par le Président de la chambre.

Dit que dans le délai d'un an suivant sa désignation, le notaire commis dressera un état liquidatif établissant les comptes entre copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots à répartir, en application des dispositions de l'article 1368 du code de procédure civile.

Dit qu'il appartient aux parties de produire devant le Notaire les documents nécessaires à l'établissement des comptes liquidation et partage dans le délai imparti par celui-ci à défaut de quoi elles pourront se voir déclarer irrecevable à émettre ultérieurement des contestations.

Dit que le notaire désigné devra calculer le montant des réserves héréditaires, de la quotité disponible et de l'indemnité de réduction éventuellement due.

Dit que le Notaire pourra, si nécessaire, interroger le Centre des Services Informatiques, cellule FICOBA afin d'obtenir les renseignements de nature bancaire utiles à l'état liquidatif chiffré.

Dit que le notaire pourra, si la valeur ou la consistance des biens le justifie, s'adjoindre les services d'un expert conformément à l'article 1365 alinéa 2 du code de procédure civile.

Dit que le Notaire pourra également s'adresser au fichier central 'PERVAL' détenant la base de données immobilières du Notariat ainsi que l'ensemble des statistiques immobilières nationales et régionales qui en découlent.

Désigne le conseiller de la mise en état de la 6ème chambre D de la cour d'appel d'Aix en Provence pour suivre ces opérations.

Ordonne le retrait du rôle général de la Cour de la présente affaire n° 15/22459 et dit qu'en cas de procès-verbal de difficultés dressé par le notaire, l'affaire pourra être rétablie à la demande de l'une des parties.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

Emploie les dépens qui comprendront la frais et honoraires du Notaire liquidateur en frais privilégiés de partage.

Déboute les parties de toutes autres demandes.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 6e chambre d
Numéro d'arrêt : 15/22459
Date de la décision : 28/02/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6D, arrêt n°15/22459 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-28;15.22459 ?
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