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24/11/2017 | FRANCE | N°15/17197

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre b, 24 novembre 2017, 15/17197


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 24 NOVEMBRE 2017



N°2017/



Rôle N° 15/17197







[K] [I]





C/



SA MARTIGUES COMMUNICATION























Grosse délivrée le :



à :



Monsieur [K] [I]



Me Dominique CHABAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :


>Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES - section AD - en date du 05 Juin 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 13/1139.





APPELANT



Monsieur [K] [I], demeurant [Adresse 1]



comparant en personne





INTIMEE

...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 24 NOVEMBRE 2017

N°2017/

Rôle N° 15/17197

[K] [I]

C/

SA MARTIGUES COMMUNICATION

Grosse délivrée le :

à :

Monsieur [K] [I]

Me Dominique CHABAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES - section AD - en date du 05 Juin 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 13/1139.

APPELANT

Monsieur [K] [I], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne

INTIMEE

SAEM MARITIMA MEDIAS venant aux droits de laSA MARTIGUES COMMUNICATION, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Dominique CHABAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 04 Octobre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Marie-Agnès MICHEL, Président

Monsieur Jean Yves MARTORANO, Conseiller

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Novembre 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Novembre 2017

Signé par Madame Marie-Agnès MICHEL, Président et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [K] [I] a été employé par la SA d'économie mixte MARTIGUES COMMUNICATION suivant contrats de travail à durée déterminée d'usage.

Le 26 juin 2009, les parties ont signé un protocole d'accord de fin de relations contractuelles ainsi rédigé : « Il est rappelé ce qui suit. M. [K] [I] collabore de manière régulière avec la société MARTIGUES COMMUNICATION depuis le 27 novembre 2000 dans les conditions prévues par les articles L 3123-31 du Code du Travail, de la Convention collective nationale des journalistes du 1er novembre 1976, telle qu'étendue par arrêté du 2 février 1988 et de tous les accords et avenants subséquents et enfin de l'accord d'entreprise signé en octobre 1990 entre la Direction de MARTIGUES COMMUNICATION et le délégué syndical, que chacune des parties déclare bien connaître. La société souhaitant procéder à une réorganisation de son pôle télévisuel dénommé « Canal Maritima » a informé l'ensemble de son personnel de ses intentions qui consistent pour l'avenir notamment à ne plus recourir aux contrats à durée déterminée d'usage, lors d'une réunion qui s'est tenue le 14 janvier 2009 et des discussions approfondies s'en sont suivies entre les intéressés dûment assistés d'une organisation syndicale. Monsieur [K] [I] n'a pas souhaité bénéficier d'un contrat à durée indéterminée. C'est à la suite de quoi les comparants aux présentes ont pu se rapprocher et parvenir à un accord dans les termes ci-dessous. Cela étant rappelé il a été arrêté ce qui suit :

Article 1

Les parties sont convenues de mettre fin à toutes relations contractuelles entre elles sous forme de contrat à durée déterminée d'usage, M. [K] [I], déclare par ailleurs expressément ne pas souhaiter s'engager avec la société MARTIGUES COMMUNICATION selon l'avenant au contrat à durée indéterminée qui lui a été proposé par cette dernière.

Article 2

Le présent accord donne lieu aux concessions réciproques suivantes :

' le salarié renonce à faire valoir toute obligation pour la société de poursuivre les relations contractuelles par contrat à durée déterminée d'usage ou de toute autre manière.

' la société versera, en contrepartie au comparant de deuxième part, la somme de 20 000 € à titre d'indemnités de dommages et intérêts destinée à lui permettre de faire face aux frais et obligations de recherche d'emploi. Cette indemnité sera versée par la société au plus tard le 30 juillet 2009.

Article 3

Moyennant le strict respect des dispositions arrêtées aux articles 1 et 2 ci-dessus du présent accord, les parties se déclarent satisfaites et déclarent renoncer à toute instance ou action dont les relations de travail ayant existé entre elles par référence au dispositif des contrats à durée déterminée d'usage et jusqu'au jour de la signature des présentes serait la cause, l'objet ou l'occasion.

Article 4

Les parties conviennent de conférer au présent accord l'autorité de la chose jugée par application des dispositions des articles 2044 et suivants et spécialement de l'article 2052 du Code Civil. »

Sollicitant le bénéfice d'un contrat de travail à durée indéterminée et dès lors l'annulation du protocole d'accord précité, se plaignant de plus d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. [K] [I] a saisi le 6 novembre 2013 le conseil de prud'hommes de Martigues, section activités diverses, lequel, par jugement de départage rendu le 5 juin 2015, a :

dit que le salarié a travaillé pour l'employeur dans le cadre de contrats de travail à durée déterminée d'usage au visa des dispositions de l'article L. 1242-2 du code du travail ;

dit que l'accord du 26 juin 2009 constitue une transaction régie par les articles 2044 et suivants du code civil ;

débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes ;

débouté l'employeur de sa demande de remboursement de la somme de 20 000 € allouée par la transaction ;

condamné le salarié aux dépens.

Cette décision a été notifiée le 9 septembre 2015 à M. [K] [I] qui en a interjeté appel suivant déclaration du 30 septembre 2015.

Vu les écritures déposées à l'audience et soutenues par M. [K] [I] aux termes desquelles il demande à la cour de :

dire qu'il bénéficiait d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet ;

dire que le protocole d'accord du 26 juin 2009 ne constitue pas une transaction et que son consentement a été vicié par le dol ;

fixer le salaire mensuel brut de référence à la somme de 2 643,40 € bruts ;

condamner l'employeur à lui payer les sommes suivantes :

'47 904,38 € au titre de rappel de salaires pour les années 2007, 2008 et 2009 ;

'  4 790,43 € au titre des congés payés y afférents ;

'  5 683,52 € au titre du treizième mois conventionnel pour les années 2007, 2008 et 2009 ;

'  6 339,11 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et d'incidence de congés payés pour les années 2007, 2008 et 2009 ;

'25 932,69 € à titre d'indemnité légale de licenciement ;

'50 000,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

'20 000,00 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct ;

condamner l'employeur à lui remettre un reçu pour solde de tout compte, un certificat de travail ainsi qu'une attestation ASSEDIC rectifiés ;

condamner l'employeur aux dépens.

Vu les écritures déposées à l'audience et reprises par son conseil selon lesquelles la SAEM MARITIMA MEDIA, anciennement dénommée MARTIGUES COMMUNICATION, demande à la cour de :

à titre principal,

confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

à titre subsidiaire,

ordonner le remboursement de la somme de 20 000 € versée dans le cadre de la transaction du 26 juin 2009 ;

constater que le salarié était recruté par le biais de contrats de travail à durée déterminée d'usage ;

constater que le salarié n'était pas à sa disposition permanente ;

constater qu'il n'y a pas lieu à requalification à temps complet des relations de travail ;

constater que les relations de travail se sont achevées avec l'arrivée du terme des contrats d'usages ;

constater qu'il n'y a pas de rupture abusive des relations de travail ;

constater qu'il n'y a pas lieu à indemnisation pour préjudice distinct ;

débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes ;

condamner le salarié au paiement de la somme de 3 000 € au titre des frais irrépétibles ;

le condamner aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1/ Sur la demande de requalification des contrats à durée déterminée d'usage en un contrat de travail à durée indéterminée

Le salarié expose avoir travaillé pour la société MARTIGUES COMMUNICATION, sans contrat, comme journaliste reporter d'image, à compter du 27 novembre 2000 jusqu'au 6 avril 2004, jour où il a été victime d'une agression lors d'un reportage. Il indique qu'il n'a plus travaillé dès lors jusqu'au mois de mars 2007, à partir duquel il a été repris mais pour un volume de travail inférieur.

Il est constant que le salarié n'a bénéficié de contrats de travail écrits qu'à compter du 10 avril 2009.

Le contrat à durée déterminée d'usage ne dispense pas l'employeur d'établir un contrat écrit comportant la définition précise de son motif. À défaut d'écrit, le contrat est présumé conclu à durée indéterminée et l'employeur ne peut écarter la présomption légale en apportant la preuve de l'existence d'un contrat verbal conclu pour une durée déterminée.

En conséquence, le salarié bénéficiait bien d'un contrat de travail à durée indéterminée et la survenue du terme du dernier contrat de travail à durée déterminée d'usage dont se prévaut l'employeur, soit le 29 juillet 2009, doit s'analyser un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

2/ Sur le protocole d'accord

Le protocole d'accord ayant été conclu le 26 juin 2009, c'est-à-dire avant toute rupture du contrat de travail à durée indéterminée, il est nul et le salarié devra rembourser à l'employeur la somme de 20 000 €.

3/ Sur la demande de rappel de salaire

Le salarié sollicite la somme de 47 904,38 € à titre de rappel de salaire pour les années 2007, 2008 et 2009 outre celle de 4 790,43 € au titre des congés payés y afférents. Il considère en effet que pour 5 mois en 2007, pour 12 mois en 2008 et pour 7 mois en 2009, il était à l'entière disposition de l'employeur et devait donc être rémunéré à temps plein en qualité non d'opérateur de prise de vue, mais de journaliste reporter d'image relevant de la convention collective des journalistes.

Les contrats écrits portent la mention d'opérateur de prise de vue puis de reporter cameraman. Les reporters cameramen étant cités dans les grilles de la convention collective des journalistes, cette dernière trouve à s'appliquer en l'espèce.

Comme l'ont justement relevé les premiers juges, le salarié n'a travaillé pour l'employeur courant 2007 que 8 mois pour une moyenne mensuelle de 6,75 jours, courant 2008, sur 10 mois pour une moyenne mensuelle de 4,8 jours et courant 2009 sur 7 mois pour une moyenne mensuelle de 6 jours alors que pour l'année 2007 il percevait de l'employeur un revenu de 5 385 € et déclarait des revenus salariaux pour 18 320 € et que pour l'année 2008, il percevait 7 510 € de l'employeur mais déclarait la somme de 114 725 € à titre de revenus salariaux.

Ainsi, il est établi que le salarié ne se tenait nullement à la disposition de l'employeur pendant les périodes interstitielles. Il sera donc débouté de sa demande de rémunération durant ces périodes malgré l'absence de contrat de travail écrit.

Le salarié revendique avec raison la qualification de journaliste reporter d'image, mais il n'en tire aucune demande de rappel de salaire sur les sommes qui lui ont été versées et en particulier il ne réclame par un coefficient précis. Les documents produits par les parties ne permettent pas à la cour de rétablir la rémunération qu'aurait dû percevoir le salarié sur les seules périodes effectivement travaillées pour la société MARTIGUES COMMUNICATION.

4/ Sur le treizième mois

Il en va de même pour la demande formée au titre du treizième mois conventionnel pour les années 2007, 2008 et 2009 et que la cour n'est pas en mesure de calculer au vu des éléments qui lui sont fournis, faute de connaître les salaires dus sur cette période en application de la convention collective.

Il ne sera dès lors alloué au salarié qu'un treizième mois sur la base des salaires qu'il a effectivement perçus soit :

pour l'année 2007, 1/12 de 5 385 € soit 448,75 € ;

pour l'année 2008, 1/12 de 7 510 € soit 625,83 € ;

pour l'année 2009, 1/12 de 7 773 € soit 647,75 € ;

soit la somme totale de 1 722,33 € outre celle de 172,23 € au titre des congés payés y afférents.

5/ Sur l'indemnité de compensatrice de préavis

Le salaire de référence s'établit, compte tenu des éléments précédents, à la somme de (7 773 € + 647,75 € + 64,77 €) / 7 mois = 1 212,21 €.

Le salarié bénéficiant d'un préavis de 2 mois, il lui sera alloué à titre d'indemnité compensatrice la somme de 2 424,42 € outre celle de 241,44 € au titre des congés payés y afférents.

6/ Sur l'indemnité de licenciement

L'ancienneté du salarié est de 8 ans et 8 mois. En application des dispositions de l'article L. 7112-3 du code du travail, l'indemnité de licenciement s'établit à (8 + 8/12) x 1 212,21 € soit la somme de 10 505,82 €.

7/ Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Compte tenu de l'ancienneté du salarié et de son âge de 39 ans à la rupture du contrat, son préjudice sera réparé par l'allocation d'une somme équivalente à 10 mois de salaire soit 12 122,10 € à titre de dommages et intérêts.

8/ Sur les dommages et intérêts pour préjudice distinct

Le salarié sollicite la somme de 20 000,00 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct en reprochant à son employeur des man'uvres dolosives qui « pourraient s'apparenter à du harcèlement moral ».

Mais la cour constate qu'aucune pièce produite ne permet de retenir l'existence de telles man'uvres dolosives. En conséquence, le salarié sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice distinct.

9/ Sur les autres demandes

L'employeur remettra au salarié un reçu pour solde de tout compte, un certificat de travail ainsi qu'une attestation Pôle Emploi rectifiés.

L'employeur supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Requalifie les contrats de travail à durée déterminée d'usage en un contrat de travail à durée indéterminée.

Dit que la survenue du terme du dernier contrat de travail à durée déterminée d'usage produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Annule le protocole d'accord du 26 juin 2009.

Condamne M. [K] [I] à payer à la SAEM MARITIMA MEDIAS la somme de 20 000 € au titre de l'annulation du protocole d'accord précité.

Condamne la SAEM MARITIMA MEDIAS à payer à M. [K] [I] les sommes suivantes :

 1 722,33 € au titre du treizième mois ;

172,23 € au titre des congés payés y afférents ;

2 424,42 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

241,44 € au titre des congés payés y afférents ;

10 505,82 € à titre d'indemnité de licenciement ;

12 122,10 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Condamne la SAEM MARITIMA MEDIAS aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre b
Numéro d'arrêt : 15/17197
Date de la décision : 24/11/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9B, arrêt n°15/17197 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-24;15.17197 ?
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