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23/11/2017 | FRANCE | N°17/01932

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2e chambre, 23 novembre 2017, 17/01932


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

2e Chambre



ARRÊT SUR CONTREDIT

DU 23 NOVEMBRE 2017



N° 2017/ 434













Rôle N° 17/01932







STEAMSHIP MUTUAL UNDERWRITING ASSOCIATION LIMITED





C/



Société AQUASEA YACHTING LP

SARL SEASECURE

SARL SOMECASSUR





















Grosse délivrée

le :

à :





Me RAISON



Me MAGNAN





Me D'HAUSSY











Décision déférée à la Cour :



Contredit à l'encontre d'un jugement rendu par le Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 13 Janvier 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 2015/F1265.





DEMANDERESSE EN CONTREDIT





STEAMSHIP MUTUAL UNDERWRITING ASSOCIATION LIMI...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

2e Chambre

ARRÊT SUR CONTREDIT

DU 23 NOVEMBRE 2017

N° 2017/ 434

Rôle N° 17/01932

STEAMSHIP MUTUAL UNDERWRITING ASSOCIATION LIMITED

C/

Société AQUASEA YACHTING LP

SARL SEASECURE

SARL SOMECASSUR

Grosse délivrée

le :

à :

Me RAISON

Me MAGNAN

Me D'HAUSSY

Décision déférée à la Cour :

Contredit à l'encontre d'un jugement rendu par le Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 13 Janvier 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 2015/F1265.

DEMANDERESSE EN CONTREDIT

STEAMSHIP MUTUAL UNDERWRITING ASSOCIATION LIMITED dont le siège est [Adresse 1] et ayant élu domicile chez Me RAISON,

domicile élu chez SELARL RAISON & ASSOCIES, avocats - [Adresse 2]

représentée par Me Olivier RAISON, avocat au barreau de MARSEILLE

DEFENDERESSES AU CONTREDIT

Société AQUASEA YACHTING LP,

dont le siège est [Adresse 3] et ayant élu domicile chez SCP LAROQUE, avocats - [Adresse 4]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée et plaidant par Me Hervé LAROQUE, avocat au barreau de PARIS

SARL SEASECURE,

demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Fabien D'HAUSSY, avocat au barreau de MARSEILLE

SARL SOMECASSUR,

demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Fabien D'HAUSSY, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 12 Octobre 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, monsieur PRIEUR, conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Marie-Christine AIMAR, Présidente

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Novembre 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Novembre 2017,

Signé par Madame Marie-Christine AIMAR, Présidente et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DE L'AFFAIRE

La société STEAMSHIP MUTUAL UNDERWRITING ASSOCIATION LTD (société STEAMSHIP) a formé un contredit à l'encontre d'une décision rendue le 13 janvier 2017 par le tribunal de commerce de Marseille qui, saisi par la société AQUASEA YACHTING LP d 'une demande en remboursement d 'indemnités versées à son salarié victime d'un accident, a statué ainsi :

Écarte des débats, les pièces 10 et 19 communiquées par la Société AQUASEA YACHTING LP ;

-Dit et juge que la clause compromissoire invoquée par THE STEAMSHIP MUTUAL UNDERWRITING ASSOCIATION LIMITED est inopposable à la société AQUASEA YACHTING LP subrogée dans les droits de M. [W] ;

En conséquence,

-Dit et juge que le litige opposant la société AQUASEA YACHTING LP à la société THE STEAMSHIP MUTUAL UNDERWRITING ASSOCIATION LIMITED, la société SEASECURE S.A.R.L. et à la Société SOMECASSUR S.A.R.L. relève de la compétence du tribunal de commerce de Marseille ;

Vu les dispositions des articles 16 et 444 du Code de Procédure Civile,

-Ordonne la réouverture des débats en enjoignant à la société THE STEAMSHIP MUTUAL UNDERWRITING ASSOCIATION LIMITED, de conclure sur le fond du litige ;

Renvoie l'affaire à la plus prochaine audience utile, afin que les parties s'expliquent contradictoirement sur le litige qui les oppose ;

Elle expose :

-que le 25 mai 2011, la société AQUASEA YACHTING LP, armateur du M/Y African Queen, a souscrit une garantie dite «protection and indemnity '' auprès du « P and I Club» STEAMSHIP MUTUAL (le club) visant notamment a couvrir les blessures causées à un membre d'équipage dans les limites fixées par les « Rules '' applicables,

-que le 5 août 2011, lors d'une sortie en ski nautique, Monsieur [W], résident français membre d'équipage du M/Y African Queen, a été blessé par 1'hélice du moteur hors-bord,

-qu'après avoir remboursé les frais médicaux, les frais de rapatriement et d'assistance ainsi que les salaires de Monsieur [W] dans le cadre de son contrat de travail, « le club » a estimé que l'accident n'était pas garanti,

-que le contrat d'assurance passé par la société AQUASEA YACHTING LP comporte une clause compromissoire opposable à l'armateur en sa qualité d'assuré laquelle est opposable lorsqu'il est subrogé dans les droits de la victime qui invoque le contrat d'assurance souscrit par l'armateur;

-que selon cette clause « En cas de différend ou litige quel qu'il soit, entre ou affectant un Membre et le Club et concernant l'assurance accordée par le Club dans les Règles ou tous montants dus par le Club au Membre ou par le Membre au Club, ce différend ou litige devra être soumis en première instance à une décision des Administrateurs. Le différend ou litige sera soumis à un arbitrage à Londres, à moins que les Gérants pour le compte du Club, à leur entière discrétion, ne décident que le différend ou litige sera soumis à la Haute Cour de Justice,

-qu'en vertu du principe compétence-compétence, le juge étatique n'a pas à examiner l'inopposabilité alléguée de la clause d'arbitrage,

-que par application de l'article 47 du contrat d'assurance, la clause compromissoire s'applique à tout « litige quel qu'il soit, entre ou affectant un Membre et le Club et concernant l'assurance accordée par le Club dans les Règles ou tous montants dus par le Club au Membre ou par le Membre au Club » et que cela inclut nécessairement les litiges relatifs à la mise en 'uvre de l'assurance responsabilité vis-à-vis des marins,

-que la subrogation n'a aucune influence sur l'opposabilité de la clause compromissoire, l'armateur étant soumis à cette clause,

-qu'en outre le tribunal de commerce de Marseille est incompétent puisque SEASECURE est le représentant à Marseille du P&I Club STEAMSHIP MUTUAL est intervenu en qualité de gestionnaire de sinistre, et que sa responsabilité envers les tiers est improbable,

-qu'il y a une absence de connexité entre la mise en cause de SEASECURE et celle du Club, rendant le tribunal de commerce de Marseille incompétent.

La société STEAMSHIP demande de :

-déclarer irrecevable la demande formée à titre liminaire par AQUASEA concernant l'incident de communication de pièces dans la présente procédure de contredit,

subsidiairement le rejeter et confirmer le jugement,

-infirmer le jugement du tribunal de commerce de Marseille du 13 janvier 2017 et de déclarer cette juridiction incompétente pour statuer,

-renvoyer les parties à mieux se pourvoir.

La société AQUASEA YACHTING LP rétorque :

-que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a écarté des débats pièces n°10 et 19 de la société AQUASEA YACHTING LP,

-que le principe de « compétence-compétence » ne s'applique que lorsque la clause d'arbitrage n'est pas manifestement inapplicable;

-qu'il résulte de l'article 1448 du Code de procédure civile, qu'en présence d'une convention d'arbitrage, lorsque la juridiction arbitrale n'est pas encore saisie, les juridictions étatiques doivent automatiquement se déclarer incompétentes sauf nullité ou inapplicabilité manifeste de la clause,

-que la clause compromissoire invoquée par le STEAMSHIP MUTUAL est inopposable à la société AQUASEA agissant dans les droits de M. [W],

-qu'elle n'agit pas en qualité d'assuré mais en qualité de subrogée dans les droits de la victime et que dès lors, la clause compromissoire ne lui est pas opposable,

-que la présente procédure se fait donc dans les mêmes conditions que si c'était M. [W] lui-même qui exerçait le recours,

-que Monsieur [W], résident français, a été soigné en France et a subi les dommages de l'accident en France et est donc bien recevable à agir directement à l'encontre du P&I Club et l'action directe est recevable,

-que la clause compromissoire est inopposable à la société AQUASEA puisqu'elle était inopposable à M. [W].

La société AQUASEA YACHTING LP demande de :

- Infirmer le jugement du 13 janvier 2017 en ce qu'il a écarté des débats lespièces n°10 et 19 de la société AQUASEA YACHTING LP,

- Confirmer le jugement du 13 janvier 2017 en toutes ses autres dispositions,

-Constater que la clause compromissoire invoquée par le STEAMSHIP MUTUAL UNDERWRITENG ASSOCIATION LIMITED est manifestement inapplicable,

- Renvoyer l'affaire devant le Tribunal de Commerce de Marseille et donner injonction au P&l club THE STEAMSHIP MUTUAL UNDERWRITING ASSOCIATION LlMlTED de conclure au fond.

La S.A.R.L. SEASECURE correspondant et de gestionnaire de sinistre du P&I Club THE STEAMSHIP MUTUAL UNDERWHTING ASSOCIATIONS LIMITED et la société SOME CASSUR ont constitué avocat le jour de l'audience et demandent de faire droit au contredit.

La cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties à leurs écritures précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

Il n'appartient pas à la présente juridiction statuant dans le cadre d'un contredit de se prononcer sur la recevabilité de pièces écartées par les premiers juges.

Dans le cadre de l'arbitrage international, l'effet négatif du principe compétence-compétence, l'existence d'une convention d'arbitrage entraîne l'incompétence des juridictions étatiques par application en France de l'article 1448 du code de procédure civile.

Selon l' article 47 du contrat d'assurance signé entre les parties :

« i a. En cas de différend ou litige quel qu'il soit, entre ou affectant un Membre et le Club et concernant l'assurance accordée par le Club dans les Règles ou tous montants dus par le Club au Membre ou par le Membre au Club, ce différend ou litige devra être soumis en première instance à une décision des Administrateurs. Cette décision sera fondée uniquement sur des documents et demandes écrites et sera rendue conformément aux procédures que les Gérants choisissent parfois à leur entière discrétion.

ii. Si le Membre souhaite contester la décision des Administrateurs rendue dans le cadre de leur jugement en vertu de la Règle 47i ci-dessus, alors :

a Le différend ou litige sera soumis à un arbitrage à Londres, à moins que les Gérant (pour le compte du Club), à leur entière discrétion, ne décident que le différend ou litige sera soumis à la Haute Cour de Justice. ''

Cette disposition précise donc que la clause compromissoire s'applique à tout « litige quel qu'il soit », entre ou affectant un Membre et le Club et concernant l'assurance accordée par le Club dans les Règles ou tous montants dus par le Club au Membre ou par le Membre au Club.

Cette nullité ou inapplicabilité manifeste de la convention d'arbitrage doit pouvoir être constatée lors d'un examen sommaire de la clause par le juge étatique, tout contrôle substantiel et approfondi étant interdit.

Il résulte des articles L721-3 du code de commerce et 1465 du code de procédure civile que seule la nullité manifeste de la convention d'arbitrage peut faire obstacle à l'application du principe de compétence-compétence, selon lequel il appartient à l'arbitre de premier lieu de statuer sur sa propre compétence et donc de se prononcer l'existence et la validité de la convention d'arbitrage.

Le fait que la société AQUASEA YACHTING LP se prétende subrogée dans les droits de la victime, n'est pas de nature à écarter cette clause dont l'opposabilité ne peut être examinée que par la juridiction arbitrale.

En effet, le corollaire de l'incompétence des juridictions étatiques en présence d'une convention d'arbitrage est l'affirmation du principe de la compétence des arbitres pour statuer sur leur propre compétence.

Il n'est pas démontré par la société AQUASEA YACHTING LP que la clause litigieuse serait manifestement inapplicable et nulle.

En conséquence, le jugement attaqué est infirmé et les parties doivent être renvoyées à mieux se pourvoir.

Il convient de condamner la société AQUASEA YACHTING LP à payer :

- à la société STEAMSHIP MUTUAL UNDERWRITING ASSOCIATION LTD une somme de 6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-aux sociétés SEASECURE et SOMECASSUR, une somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare irrecevable la demande présentée par la société AQUASEA YACHTING LP visant à voir statuer sur la recevabilité de pièces écartées en première instance,

Infirme le jugement attaqué,

Statuant à nouveau,

Déclare le Tribunal de commerce de Marseille incompétent pour statuer sur les demandes formées par la société AQUASEA,

Renvoie les parties à mieux se pourvoir,

Condamne la société AQUASEA YACHTING LP à payer :

- à la société STEAMSHIP MUTUAL UNDERWRITING ASSOCIATION LTD une somme de 6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-aux sociétés SEASECURE et SOMECASSUR, une somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples,

Condamne la société AQUASEA YACHTING LP aux dépens de première instance et d'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 17/01932
Date de la décision : 23/11/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 02, arrêt n°17/01932 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-23;17.01932 ?
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