COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
18e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 17 NOVEMBRE 2017
N°2017/ 515
TC
Rôle N° 16/17434
[O] [E]
C/
SARL TRANS PROVENCE
Grosse délivrée le :
à :
Me Sandrine OTT-RAYNAUD, avocat au barreau de TOULON
Me Cécile SCHWAL, avocat au barreau de NICE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DRAGUIGNAN - section - en date du 15 Septembre 2016, enregistré au répertoire général sous le n° 13/00294.
APPELANT
Monsieur [O] [E], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Sandrine OTT-RAYNAUD, avocat au barreau de TOULON
INTIMEE
SARL TRANS PROVENCE, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Cécile SCHWAL, avocat au barreau de NICE substitué par Me Pascale FRAISIER, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Octobre 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M.Thierry CABALE, Conseiller, chargé du rapport.
M.Thierry CABALE, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Chantal BARON, Présidente de chambre
Monsieur Thierry CABALE, Conseiller
Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2017
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2017
Signé par Madame Chantal BARON, Présidente de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Aux termes d'un contrat à durée indéterminée daté du 9 décembre 2009, Monsieur [O] [E] a été embauché à compter du 8 décembre 2009 par la sarl Trans-Provence en tant que chauffeur livreur moyennant un salaire brut 'correspondant au moins au salaire minimum conventionnel de la catégorie' pour 39 heures hebdomadaires. La convention collective nationale applicable est celle des transports routiers.
A la suite d'un entretien préalable fixé au 21 mai 2013, Monsieur [E] a été licencié pour faute grave par lettre recommandée avec avis de réception du 24 mai 2013 pour les motifs suivants:
'- Le 30 avril 2016, vous avez refusé de faire votre travail de chauffeur livreur;
- vous prononcez régulièrement des insultes à l'encontre de la société, de leurs dirigeants et
de vos collègues de travail;
- vous prononcez également des insultes envers les clients de la société dont certains refusent votre présence dans leurs locaux (notamment chez notre client EXAPAQ);
- dès que l'on vous fait une remarque sur votre travail (quelle qu'elle soit) vos réactions sont imprévisibles; par exemple dernièrement Monsieur [B] vous a demandé de ranger vos colis suite à quoi vous êtes parti en trombe dans le dépôt et vous avez cassé la balance qui nous sert à peser les colis que nous expédions pour le compte de nos clients; autre exemple lorsque l'on vous demande de couper la musique qui hurle de votre camion dans le dépôt pour les simples raisons qu'on ne s'entend pas et que cela peut gêner la concentration de vos collègues de travail vous vous vexez etc..;
- vous avez un comportement agressif envers vos relations de travail ce qui les rend compliquées;
- vous utilisez le véhicule de l'entreprise (qui vous est confié pour effectuer votre travail) à titre privé ce qui a pour conséquence l'achat supplémentaire de carburant à nos frais, le risque accru d'accidenter le véhicule, et l'utilisation du badge d'autoroute à nos frais;
- vous utilisez les postes informatiques de la société pour jouer au PMU et autres jeux d'argent;
- lorsque nous avons rangé le véhicule qui vous est confié nous avons découvert 4 colis pour lesquels nous avons des preuves de livraison signées.'
Le 9 octobre 2013, Monsieur [O] [E] a saisi le conseil de prud'hommes de [Localité 1] qui, aux termes d'un jugement rendu le 15 septembre 2016, l'a débouté de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné à payer à la société Trans-Provence la somme de 200 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Le 27 septembre 2016, dans le délai légal, Monsieur [O] [E] a régulièrement relevé appel de ce jugement.
Par dernières conclusions du 7 décembre 2016, Monsieur [E] demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de constater qu'il a effectué des heures supplémentaires non déclarées et non payées, et que les durées légales maximales du travail n'ont pas été respectées, outre de condamner la société Trans-Provence à lui payer les sommes de :
- 28.427,20 euros à titre de rappel de salaire correspondant à des heures supplémentaires effectuées, en moyenne 80 par mois, dans les limites de la prescription triennale, du 1er mai 2010 au 27 mai 2013, en sus des heures rémunérées suivant des horaires contractuels initiaux de 6h-12h, 15h-17h du lundi au jeudi, et de 6h-12h,15h-16h le vendredi, modifiés en février 2012 comme suit: semaine 1: 7h-12h, 15h-17h du lundi au vendredi, de 8h à 12h le samedi, semaines 2 et 3: 6h-12h, 15h-16h le lundi, 6h-12h, 15h-17h du mardi au vendredi,
- 2842,72 euros au titre des congés payés subséquents,
- 1460,37 euros à titre d'indemnité compensatrice correspondant à 26,5 jours de repos compensateurs auquel ouvrent droit les heures supplémentaires accomplies au-delà de 35 heures hebdomadaires à prendre en compte sur un trimestre en application de l'article 5 du décret 83-40 du 26 janvier 1983 modifié, seuls les repos compensateurs acquis au titre des 4 heures supplémentaires hebdomadaires mentionnées sur les bulletins de paie ayant été indemnisés en avril 2015,
- 146 euros au titre des congés payés afférents,
- 14.563,24 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé en raison de l'intention de l'employeur de dissimuler des heures supplémentaires non-inscrites volontairement sur les bulletins de paie de manière systématique et sur une longue durée, alors qu'il savait que les exigences des donneurs d'ordre, les distances à parcourir et le nombre de clients étaient incompatibles avec les horaires contractuels
- 3000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat prévue par l'article L 4121-1 du code du travail, par suite du dépassement de la durée légale maximale du travail par semaine, du non-respect du repos quotidien de 11 heures consécutives, ayant effectué son travail en moyenne plus de 55 heures par semaine avec un risque de dommages envers les tiers comme pour lui-même au regard du stress et de la fatigue engendrés,
- 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il soutient que le nombre de clients à livrer, entre 80 et 100, pour cinq donneurs d'ordre, les distances à parcourir et les contraintes de livraison, les colis Chronopost devant être livrés avant 13h puis 15h puis 18h, ne lui permettaient pas de respecter les horaires contractuels prévoyant des livraisons de 10 à 12h et de 15h à 16h, ce qui le conduisait à supprimer sa pause et, à la demande de son employeur, à modifier les heures de livraison de certains colis, les clients témoignant de livraisons durant la plage horaire située entre 12h et 15h.
Il prétend étayer sa demande à suffisance en produisant un décompte détaillé des horaires accomplis, un planning, un calendrier, un descriptif détaillé, des attestations de clients, des bons de livraison, une fiche Chronopost indiquant un départ à 6h50 de [Localité 2] avec un taux de remplissage du camion à 100% nécessitant une présence à l'entrepôt à 5h30, une fiche Exapaq qui exige une livraison avant 14h, le suivi de colis Chronopost mentionnant une livraison à 14h15 ou des tris effectués dans l'entrepôt de distribution entre 5h45 et 6h35 ou des livraisons entre 16h45 et 17h15 à [Localité 2], outre une analyse de tournée de distribution qui met en évidence également la nécessité de scanner des colis, non soumis à des impératifs horaires, au même moment, l'enregistrement en temps réel de 5 bordereaux différents avec 5 procédures différentes étant quasiment impossible.
Il fait valoir que que l'employeur ne justifie pas d'un décompte de la durée du travail correspondant à des horaires individualisés en méconnaissance des dispositions des articles L 3171-2 et D 3171-8 du code du travail, faute de toute feuille d'enregistrement de la durée du travail.
Par dernières conclusions du 15 février 2017, la société Trans-Provence demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, en conséquence, de dire et juger que le salarié n'apporte aucun élément permettant d'étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires, de dire et juger qu'elle justifie pour sa part de la réalité des horaires de travail de Monsieur [E], de dire et juger que le salarié a été rempli de ses droits en matière de paiement des heures travaillées et du repos compensateur, de dire et juger qu'elle a respecté l'obligation de sécurité de résultat, de débouter celui-ci de toutes ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en sus de la somme allouée sur ce même fondement en première instance.
La société Trans-Provence fait valoir que le salarié n'étaye pas sa demande en paiement d'heures supplémentaire; qu'ainsi, les calendriers complétés par lui-même ne font pas apparaître, jour par jour, les horaires qu'il allègue avoir réalisés; que la 'journée-type' invoquée n'est pas corroborée par un élément extérieur, qu'elle est contredite par le fait que les seules contraintes horaires pour la livraison des colis étaient: Chronopost: avant 10h, 13h ou 18 h, 'TNT' : avant 13h, en début d'après-midi pour les zones rurales, 'GLS': entre 8h30 et 18h; que la coupure entre 12h et 15h correspond aux horaires des magasins, commerces et collectes; que les attestations fournies par le salarié, pour certaines à évincer pour irrégularité formelle, ne contiennent pas d'éléments sur les horaires effectués par Monsieur [E] et ne sont pas crédibles puisqu'un premier témoin évoque des livraisons vers 13h30-14h alors que le magasin qu'il gère est fermé à cette heure-là, qu'un autre ne précise pas le nom du livreur, et qu'un troisième, ancien salarié de l'entreprise durant trois moi et demi entre 2003 et 2004, indique seulement avoir travaillé en moyenne 12 heures par jour sans avoir réclamé le paiement d'heures supplémentaires; que les sept documents intitulés 'liste des envois' ne sont pas des bons de livraison mais de simples suivis de colis en ligne extraits du site internet de Chronopost saisis manuellement par le personnel de cette entreprise en début de journée lors du tri au centre de tri de [Localité 2], situé à dix minutes de son siège social, puis en fin de journée en fonction des livraisons réalisées par les chauffeurs livreurs; que les mentions qui y sont portées pour la journée du 25 avril 2013 ne sont pas en adéquation avec les heures de livraison mentionnés par le salarié sur le bordereau de distribution correspondant à la même journée; que les bordereaux de distribution des 24 et 25 avril 2013 comportent des horaires non-conformes à ceux revendiqués; qu'il en va de même s'agissant de la tournée 'TNT' du 12 avril 2013; que les témoignages qu'elle produit remettent en cause le lien établi par Monsieur [E] entre sa propre tournée et le relevé de tournées 'TNT' qu'il fournit correspondant en définitive à plusieurs chauffeurs.
La société indique avoir respecté l'horaire prévu par le contrat de travail modifié par avenant du 2 janvier 2010; que la journée-type était: arrivée au dépôt du [Localité 3] à 7h, départ pour la tournée Flayosc-Salernes, pause-déjeuner de 12h à 15h, reprise des livraisons à 15h, retour au dépôt pour 17 h ou 16h; que le salarié accomplissait ainsi 17,33 heures supplémentaires mensuelles qui lui ont été payées; qu'aucun chrono tachygraphe ne peut être produit dès lors que les véhicules n'en étaient pas équipés, s'agissant de véhicules non soumis à cette obligation; que les chauffeurs ont l'obligation de respecter les feuillés d'horaires de services numérotés conformes à l'arrêté du 20 juillet 1998 qu'ils ont préalablement signés sur le registre unique de délivrance des horaires de service, sous peine d'être verbalisés; qu'une fiche de ce type est produite; que les attestations de salariés ou d'anciens salariés qu'elle produit lui permettent de démontrer que les horaires étaient adaptés aux tournées.
La société ajoute qu'elle a réglé l'indemnité compensatrice au titre des huit jours de repos compensateur auxquels le salarié avait droit en fonction des heures supplémentaires accomplies sur trois mois et payées; que son intention frauduleuse n'est pas démontrée à l'appui de la demande au titre d'un travail dissimulé; qu'elle a respecté l'obligation de sécurité de résultat et que le salarié ne justifie pas de l'existence ni de l'étendue de son préjudice.
L'ordonnance de clôture de l'instruction est intervenue le 15 avril 2017.
MOTIFS :
Sur les heures supplémentaires:
Il résulte de l'article L 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux heures effectivement réalisées par lui pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.
Le salarié indique que ses horaires effectifs étaient les suivants:
* une semaine sur 3:
. lundi, mardi, mercredi, vendredi: 5h30 (au dépôt Chronopost de [Localité 2]/St Raphaël)-17h,
. jeudi: 5h30-19h30: 'jour de retour': attendre en fin de journée que tous les chauffeurs de la société finissent leur travail afin de ramener les colis non-livrés et les tournées traitées à Saint Raphaël,
. samedi: 6h-14h
* 2 semaines sur 3:
. du lundi au vendredi : 7h-17h,
. jeudi : 7h-19h30.
Monsieur [E] décrit son planning quotidien comme suit:
7h, 2 semaine sur 3 au dépôt du [Localité 3],
7h: arrivé au [Localité 3],
8h: arrivée de l'Exapaq: décharger, trier,
8h30: trier, scanner les tournées,
9h: arrivée du 'TNT': décharger, trier,
9h30: arrivée du 'GLS': décharger trier,
six bordereaux différents et 2 appareils pour scanner en temps réel les colis livrés au client, impliquant de ranger les colis dans le bon ordre dans le fourgon,
9h45-10h: départ en livraison ( tournée Flayosc-[Localité 4]-[Localité 5]-Salernes),
10h: premiers clients centre de [Localité 6],
10h30: direction [Localité 4], avec quelques clients sur la route,
11h: arrivée à [Localité 7],
11h30: livraison du centre-ville,
12h: départ pour effectuer la livraison dans l'autre partie de [Localité 4],
12h30: livraison de [Localité 5] ( pause pour scanner les colis à livrer avant 13h)
13h: direction [Localité 7] en finissant les derniers clients de [Localité 5]-[Localité 4],
13h30: livraison des particuliers à [Localité 7],
14h: 'ramasse régulière' auprès de la société LRS puis départ pour [Localité 6],
14h30: livraison des particuliers à [Localité 6],
15h: derniers clients,
15h30: départ pour [Localité 3],
15h45: arrivée au [Localité 3],
16h: manutention, rendre clairement les tournées (durée 1/2 heure voire 1 heure),
16h30-17h: fin de journée de travail excepté le jeudi.
Il précise qu'il devait préparer sa tournée en triant et en classant les colis et les documents provenant de cinq donneurs d'ordre, puis qu'il devait parcourir des distances importantes pour livrer chaque jour 80 à 100 clients répartis sur quatre villes, ce que ne permettaient pas les horaires prévus qui devaient être dépassés en début de journée pour effectuer le tri et entre 12 heures et 15 heures afin de livrer des clients.
Il s'appuie sur de nombreuses pièces en adéquation avec le modèle de planning décrit, soit des bordereaux de distribution, des fiches d'envoi, une fiche de liaison, un calendrier mentionnant, pour la période concernée, le nombre d'heures accomplies chaque jour travaillé semaine par semaine, variant de 9 heures à 14 heures suivant une répartition récurrente entre les jours de la semaine, des attestations, très nombreuses, pour l'essentiel conformes aux exigences formelles de l'article 202 du code de procédure civile et dans tous les cas présentant des garanties suffisantes pour emporter la conviction de la cour en ce qu'elles comportent le récit synthétique de faits précis et circonstanciés que leurs auteurs ont personnellement et directement constatés, en l'espèce la livraison de leurs colis par le salarié durant la plage horaire comprise entre 12 heures et 15 heures.
Alors que le salarié étaye sa demande à suffisance au moyen de cet ensemble d'éléments précis, cohérent et complet permettant à l'employeur d'y répondre, celui-ci n'apporte pas la contradiction de manière suffisamment sérieuse au moyen d'éléments objectifs, en produisant les horaires contractuels théorique, qui ne contiennent aucune donnée, notamment quantitative, sur les tournées quotidiennes, également un extrait du site internet de Chronopost dont il ne résulte pas que le salarié aurait été dans l'impossibilité de livrer des colis entre 12 heures et 15 heures ou après 17 heures, des attestations de salariés de la société qui font état du respect de leurs horaires contractuels sans éléments précis et objectifs à propos de ceux réalisés par Monsieur [E], des bulletins de paie qui ne mentionnent que le paiement des 17,33 heures supplémentaires mensuelles insérées dans l'horaire contractuel.
L'employeur ne justifie pas d'une organisation concrète du temps de travail accompli par le salarié qu'il n'indique pas avoir contrôlé par un moyen quelconque; il n'apporte aucune explication pertinente sur la compatibilité entre la charge de travail décrite par le salarié, qu'il ne contredit pas sérieusement s'agissant du temps de préparation des tournées, du nombre de clients à livrer, de la longue distance à parcourir, plus d'une centaine de kilomètres au total, du temps de parcours total de plusieurs heures n'incluant pas les opérations de préparation et de livraison elles-mêmes; il n'établit aucun lien suffisant entre les motifs du licenciement pour faute grave, non-contesté, et la demande en paiement d'heures supplémentaires, en excipant d'une addiction aux jeux.
En conséquence, au vu des éléments fournis de part et d'autre, dont les décomptes établis par le salarié correspondant à la période concernée, il sera fait droit à la demande de celui-ci en paiement d'heures supplémentaires, l'employeur devant être condamné à ce titre au paiement de la somme de 28.427,20 euros bruts outre de celle de 2842,72 euros bruts au titre des congés payés subséquents.
Sur l'indemnisation des repos compensateurs:
En application de l'article 5 du décret 83-40 du 26 janvier 1983 modifié, alors en vigueur, les heures supplémentaires accomplies au-delà de 35 heures par semaine ouvrent droit pour les personnels roulants à un repos compensateur trimestriel obligatoire dont la durée est égale à :
- une journée à partir de la quarante et unième heure et jusqu'à la soixante-dix-neuvième heure supplémentaire effectuée par trimestre ;
- une journée et demie à partir de la quatre-vingtième heure et jusqu'à la cent huitième heure supplémentaire effectuée par trimestre ;
- deux journées et demie au-delà de la cent huitième heure supplémentaire effectuée par trimestre.
Le repos compensateur doit être pris dans un délai maximum de trois mois suivant l'ouverture du droit.
Conformément à ces dispositions et au vu des décomptes fournis, le salarié a acquis 26,5 jours de repos compensateur indemnisés par l'employeur uniquement à concurrence des heures supplémentaires mentionnées sur les bulletins de paie. L'employeur sera donc condamné à payer au salarié, à titre d'indemnisation du surplus des repos compensateurs acquis et non-pris, la somme de 1460,37 euros outre celle de 146 euros au titre des congés payés afférents.
Sur le travail dissimulé:
Si des heures supplémentaires n'ont pas été mentionnées sur les bulletins de paie et n'ont pas été payées durant plusieurs années, il ne résulte pas des éléments fournis que l'employeur avait conscience et connaissance des dépassements d'horaires au moyen par exemple de plannings signés ou de réclamations de la part du salarié en cours d'exécution du contrat de travail, l'intention frauduleuse ne pouvant se déduire uniquement de la charge de travail confiée au salarié et des carences de l'employeur en matière de contrôle du temps de travail.
Le salarié n'est donc pas fondé à obtenir une indemnité pour travail dissimulé en application des dispositions alors en vigueur des articles L 8221-5 et L 8223-1 du code du travail.
Sur le non-respect de l'obligation de sécurité de résultat:
Si, en raison du dépassement de la durée légale maximale du travail par semaine et du non-respect du repos quotidien de onze heures consécutives, l'employeur a manqué à l'obligation de sécurité de résultat prévue par les articles L 4121-1 et suivants du code du travail, le salarié ne justifie pas de l'existence ni de l'étendue de son préjudice.
Monsieur [E] sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts formulée à ce titre.
Sur les frais irrépétibles:
En considération de l'équité, il sera alloué au salarié la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur les dépens:
Les entiers dépens de première instance et d'appel seront mis à la charge de la société Trans-Provence, qui succombe pour l'essentiel.
PAR CES MOTIFS:
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et par mise à disposition au greffe:
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la société Trans-Provence à payer à Monsieur [O] [E] les sommes de :
- 28.427,20 euros bruts à titre de rappel de salaire correspondant à des heures supplémentaires,
- 2842,72 euros bruts au titre des congés payés subséquents,
- 1460,37 euros à titre d'indemnisation des repos compensateurs non-pris,
- 146 euros au titre des congés payés afférents.
- 1500 euros en application des dispositions des articles 700 du code de procédure civile.
Déboute les parties de toute autre demande.
Condamne la société Trans-Provence aux entiers dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIERLA PRESIDENTE