COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
17e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 02 NOVEMBRE 2017
N°2017/633
GB/FP-D
Rôle N° 15/12158
[W] [V]
C/
URSSAF PROVENCE ALPES COTE-D'AZUR
Grosse délivrée le :
à :
Me Yadhira STOYANOVITCH, avocat au barreau de PARIS
Me Sylvie MARTIN, avocat au barreau de NICE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de NICE - section E - en date du 27 Mai 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 13/1083.
APPELANT
Monsieur [W] [V], demeurant [Adresse 1]
comparant en personne, assisté de Me Yadhira STOYANOVITCH, avocat au barreau de PARIS ([Adresse 2])
INTIMEE
URSSAF PROVENCE ALPES COTE-D'AZUR, demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Sylvie MARTIN, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 13 Septembre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur Jean-Luc THOMAS, Président
Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller
Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Novembre 2017
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Novembre 2017
Signé par Monsieur Jean-Luc THOMAS, Président et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
PROCÉDURE
Par lettre recommandée postée le 24 juin 2015, M. [V] a interjeté appel du jugement rendu le 27 mai 2015 par le conseil de prud'hommes de Nice, présidé par un juge départiteur, condamnant l'Urssaf Provence, Alpes, Côte d'Azur (PACA) à lui verser les sommes suivantes :
3 110,28 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 17 avril 2014, au titre d'indemnités de repas et de découchers pour éloignement durable pour la période du 10 octobre 2011 au 3 octobre 2012,
1 500 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la perte d'une chance de bénéficier d'une promotion du fait de l'absence d'un entretien d'évaluation,
1 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [V], en cause d'appel, poursuit la condamnation de l'Urssaf PACA à lui verser les sommes ci-après :
19 675,27 euros au titre d'indemnités dites de grands déplacements, avec intérêts au taux légal capitalisés à compter du 15 mars 2013 ou du 16 juillet 2013, avec intérêts au taux légal capitalisés à compter du 15 mars 2013 ou du 16 juillet 2013 ; subsidiairement, 16 970,08 euros au titre d'indemnités d'accompagnement à la mobilité professionnelle ; plus subsidiairement, confirmer le jugement lui allouant la somme de 3 110,28 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2013 ou du 16 juillet 2013,
11 880 euros à titre de dommages-intérêts en raison d'une inégalité de traitement, avec intérêts au taux légal capitalisés à compter du 15 mars 2013 ou du 16 juillet 2013,
4 112,43 euros au titre d'un manque à gagner sur salaire consécutif à l'absence d'un entretien d'évaluation en 2012, avec intérêts au taux légal capitalisés à compter du 15 mars 2013 ou du 16 juillet 2013,
5 367,05 euros au titre de l'incidence de ce manque à gagner sur sa retraite avec intérêts au taux légal capitalisés à compter du 15 mars 2013 ou du 16 juillet 2013,
23 760 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect des principes d'égalité de traitement et non-discrimination, ainsi qu'en réparation d'un préjudice moral, avec intérêts au taux légal capitalisés à compter du 27 mai 2015,
6 000 euros pour ses frais irrépétibles.
L'Urssaf PACA, venant aux droits de l'Urssaf des Alpes-Maritimes, relève appel incident de la décision déférée à la censure de la cour pour conclure au rejet de toutes ces demandes, sans préjudice de l'allocation de 3 000 euros pour ses frais non répétibles.
La cour renvoie pour le surplus des prétentions et des moyens aux écritures soutenues oralement par les conseils des parties à l'audience du 13 septembre 2017.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Après avoir exercé des fonctions au sein de l'Urssaf des Alpes-Maritimes, M. [V] a été mis à la disposition de l'Urssaf des Bouches-du-Rhône - [Localité 1] étant désignée comme lieu de sa résidence administrative à partir de laquelle se calculaient les remboursements de ses frais de mission - ce, du 10 octobre 2011 au 3 octobre 2012, en exécution d'une convention tripartite en date du 30 septembre 2011, laquelle, dans son article premier, se référait expressément aux mesures d'accompagnement de la mobilité du personnel prévues par un protocole d'accord du 26 janvier 2010 relatif à l'emploi des seniors et la gestion des secondes parties de carrières, ce dont il sera retenu que ce protocole entrait dans le champ contractuel de la convention.
M. [V] occupait au sein de l'Urssaf des Alpes-Maritimes un emploi d'inspecteur du recouvrement, spécialement dans le domaine de la lutte contre le travail dissimulé ; il a occupé, pendant une année, des fonctions similaires, sauf à étendre son terrain d'investigation du département des Alpes-Maritimes à la région PACA.
Le protocole signé entre les partenaires sociaux, le 26 janvier 2010, prévoyait en cas de mobilité imposant un changement de lieu de travail significatif au regard de la topographie des lieux trois cas de figure :
- une mobilité entraînant un changement de domicile,
- une mobilité entraînant une double résidence,
- une mobilité n'entraînant ni changement de domicile, ni double résidence.
M. [V], comme le relève à bon droit le juge départiteur, ne justifie pas que ses fonctions étendues à l'échelle de la région PACA justifiaient qu'il quittât son domicile situé dans les Alpes-Maritimes pour habiter [Localité 1], ou ses environs, durant l'année de son exercice.
L'intéressé, en effet, ne justifie pas avoir été dans l'obligation de résider dans les Bouches-du-Rhône durant sa mise à disposition auprès de l'Urssaf dont le siège est à [Localité 1] ; à cet égard, sa déclaration sur l'honneur par laquelle il certifie avoir loué un studio à [Localité 2], propriété d'un logeur désireux de ne pas se faire connaître, est dépourvue de toute force probante ; le salarié ne justifie pas non plus de la fréquence de ses déplacements au siège marseillais de l'Urssaf des Bouches-du-Rhône ; il ne justifie pas davantage avoir exposé des frais de repas ou de nuitées impayés à ce jour.
D'où il suit que la mise à disposition a entraîné pour M. [V] une mobilité réputée, au regard du droit conventionnel, sans changement de domicile ou nécessité d'une double résidence car le changement de son lieu de travail n'a pas été significatif d'une mobilité géographique effective démontrée en l'état de ses explications et des pièces du dossier.
M. [V], à titre subsidiaire, invoque tout à la fois l'article 28 de la convention collective nationale de travail du 8 février 1957 du personnel des organismes de sécurité sociale, en ce qu'il dispose que les cadres perçoivent des indemnités forfaitaires pour frais de découcher, de repas et de transport, ainsi que l'article 22 d'un protocole d'accord en date du 27 février 2009, relatif aux personnels chargés d'une activité de contrôle au sein de la branche recouvrement, en ce qu'il prévoit que ceux d'entre eux qui se trouvent durablement ou fréquemment éloignés de leur domicile bénéficient des mêmes indemnités forfaitaires.
Ces indemnités forfaitaires sont dues lorsque le salarié justifie de l'accomplissement de missions justifiant son éloignement de son domicile, cet éloignement s'appréciant au regard de la nécessité d'un ou plusieurs découchers pour la réalisation de la mission.
M. [V], comme il a été dit précédemment, ne justifie pas avoir été dans la nécessité d'engager des frais d'hôtel pour la réalisation de ses missions régionales dont il n'aurait pas été défrayé par l'Urssaf des Bouches-du-Rhône.
Pour lui allouer la somme de 3 110,28 euros, à raison d'une indemnité forfaitaire de 15 euros par jour, sur la base de cinq jours de mission hebdomadaires, les premiers juges se sont basés sur l'hypothèse que le salarié rayonnait depuis [Localité 1] pour remplir ses fonctions régionales, ceci l'éloignant de son domicile situé au [Localité 3] (06110), fait qui n'est pas démontré puisque les durées et les lieux d'exécution de ses missions ne sont jamais précisés.
En conséquence de quoi, la cour accueillera les fins de l'appel incident.
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Toutefois, M. [V], fut-ce en grande partie sur un plan théorique, a été le sujet d'une mobilité dans le prolongement du Protocole d'accord du 5 septembre 2006 relatif aux garanties conventionnelles apportées dans le cadre de l'évolution des réseaux, auquel fait référence le protocole d'accord du 26 janvier 2010, auquel fait référence la convention tripartite du 30 septembre 2011 ; que le titre II du protocole du 26 janvier 2010, intitulé Mesures d'accompagnement individuel des salariés, contient un article 7.3, intitulé Aides à la mobilité, au nombre desquelles était le versement d'une prime d'un montant égal à deux mois de la rémunération brute normale de son ancien emploi versée par l'organisme preneur dès la prise de fonctions.
M. [V] avait vocation à percevoir cette prime pour s'être porté volontaire dans le cadre d'une mobilité fonctionnelle.
Ce salarié percevait un salaire brut de 3 912,26 euros par mois, montant non contesté, de sorte qu'il recevra la somme de 7 824,52 euros, assortie de l'intérêt au taux légal à compter du 24 juillet 2013, date à laquelle l'Urssaf des Alpes-Maritimes, à laquelle succède l'Urssaf de la région PACA, englobant l'Urssaf des Bouches-du-Rhône, a accusé réception du pli recommandé la convoquant devant le bureau de conciliation, valant première mise en demeure.
Le bénéfice de l'anatocisme est acquis depuis le 24 juillet 2014.
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Du chef d'une violation du principe ' à travail égal, salaire égal 'ou d'une discrimination basée sur l'exemple d'un cadre dont il tait l'identité, la cour confirmera le jugement en ce qu'il relève que cet anonymat interdit toute comparaison utile.
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Durant sa mise à disposition auprès de l'Urssaf des Bouches-du-Rhône, M. [V] déplore n'avoir pas été convoqué à un entretien d'évaluation dont, selon lui, la tenue lui aurait permis d'améliorer sa rémunération, puis, par répercussion, le montant de sa retraite.
Pour réclamer à cet égard le paiement d'une somme de 9 479,48 euros au total, son conseil soutient que le salarié a perdu une chance d'obtenir une promotion, précisant que sa dernière promotion remontait à 2011.
Mais sachant que M. [V] a été mis au service de l'Urssaf des Bouches-du-Rhône à compter du 10 octobre 2011, année de sa dernière promotion, et sachant que l'intéressé indique en page 30 de ses conclusions qu'il était promu au choix environ tous les deux ans, un entretien d'évaluation au mois d'octobre 2012 - supposant que le rythme des entretiens fut annuel - n'aurait été d'aucune conséquence puisque l'intéressé a fait valoir ses droits à la retraite à compter du 3 octobre 2012, soit moins de deux ans après sa dernière promotion.
M. [V] ne démontrant pas le préjudice qu'il allègue, la cour infirmera le jugement lui allouant 1 500 euros à titre de dommages-intérêts au titre d'une perte de chance.
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L'intimée supportera les entiers dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties présentes ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile :
Confirme le jugement en ce qu'il déboute M. [V] de ses demandes fondées sur la violation du principe ' à travail égal, salaire égal,' et sur une discrimination, ainsi que du chef du bénéfice d'indemnités de grands déplacements.
Infirme le jugement pour le surplus.
Statuant à nouveau :
Condamne l'Urssaf Provence, Alpes, Côte d'Azur (PACA) à verser à M. [V] la somme de 7 824,52 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2013 capitalisés à compter du 20 juillet 2014.
Déboute M. [V] du surplus de ses demandes.
Condamne l'intimée aux entiers dépens.
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'Urssaf Provence, Alpes, Côte d'Azur à verser 3 000 euros à M. [V] pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel confondus.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT