COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
1re chambre C
ARRÊT
DU 28 SEPTEMBRE 2017
N° 2017/677
Rôle N° 17/01799
[B] [R]
C/
[L] [E] [B]
Grosse délivrée
le :
à :
Me VAN DE GHINSTE
Me BOULVERT
Décision déférée à la cour :
Ordonnance de référé rendue par le président du tribunal d'instance de Nice en date du 12 décembre 2016 enregistrée au répertoire général sous le n° 1216000788.
APPELANT
Monsieur [B] [R]
né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 1]
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Elise VAN DE GHINSTE, avocat au barreau de Nice
INTIMÉE
Madame [L] [E] [B]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2017/2334 du 06/03/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'Aix-en-Provence )
née le [Date naissance 2] 1960 à [Localité 2]
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Rémi BOULVERT, avocat au barreau de Nice
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 4 juillet 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Lise Leroy-Gissinger, conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La cour était composée de :
Mme Danielle DEMONT, conseiller doyen faisant fonction de président
Madame Lise LEROY-GISSINGER, conseiller
Madame Pascale POCHIC, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2017
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2017,
Signé par Mme Danielle DEMONT, président et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Exposé du litige
Par acte du 30 mars 2014, M. [R] a donné à bail à Madame [E] [B] un local d'habitation meublé situé [Adresse 3], pour un loyer de 600 € par mois, charges incluses.
Le 6 mai 2016, M. [R] a assigné la locataire devant le juge des référés du tribunal d'instance de Nice aux fins de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire incluse au bail et ordonner son expulsion ainsi que sa condamnation à provision. Madame [E] [B] s'est opposée à ces demandes, en soutenant qu'elle n'avait pu prendre possession de l'appartement qui était encombré des effets personnels du bailleur.
Par ordonnance du 16 décembre 2016, le juge des référés a dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes tant principales que reconventionnelles, a débouté les deux parties de leurs demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné M. [R] aux dépens.
Le juge des référés a retenu qu'il existait une contestation sérieuse qui portait à la fois sur la date de délivrance du bien loué et sur la jouissance du garage, ce qui entraînait une incertitude quant à la dette locative réclamée par le bailleur et à l'acquisition de la clause résolutoire.
Par déclaration du 26 janvier 2017, M. [R] a formé un appel général contre cette décision.
Par ses dernières conclusions du 7 avril 2017, M. [R] demande à la cour de :
' réformer l'ordonnance en toutes ses dispositions,
' constater l'acquisition, le 16 décembre 2015, de la clause résolutoire insérée au bail,
' ordonner la libération des lieux par la locataire ainsi que la remise des clés,
' ordonner son expulsion et celle de tout occupant de son chef au besoin avec l'assistance de la force publique,
' ordonner l'enlèvement et le dépôt des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux,
' condamner la locataire à lui payer une indemnité provisionnelle de 4377,65 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation dus du mois de juin 2014 au mois de novembre 2016, avec intérêts à compter du prononcé du jugement,
' condamner la locataire à lui payer une indemnité d'occupation de 600 € par mois à compter de la résiliation du bail jusqu'au jour de la libération des locaux et la restitution des clés, indemnités à indexer à compter du prononcé du jugement,
' condamner Madame [E] [B] à lui verser la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, y inclus le coût du commandement de payer.
M. [R] soutient que les effets personnels qu'il a laissés dans l'appartement n'étaient que des éléments de décoration liés au caractère meublé du bien et que s'il s'était introduit dans le logement loué c'était à la suite du cambriolage de sa propre résidence par le fils de sa locataire, laquelle procédait à une sous location non autorisée de l'appartement.
Par ses dernières conclusions du 31 mai 2017, Madame [E] [B] demande à la cour de dire n'y avoir lieu à référé sur les demandes de M. [R] et de condamner celui-ci à lui payer la somme de 3000 €, ainsi que les dépens au visa des articles 696 et 700 du code de procédure civile.
Madame [E] [B] indique qu'elle a saisi le tribunal courant janvier 2015 du litige l'opposant à son bailleur, de sorte que celui-ci ne pouvait utilement saisir le juge des référés du même litige. Elle soutient qu'elle ne peut prendre possession du local et que le bailleur le reconnaît puisqu'il ne sollicite de paiement qu'à compter de juin 2014 et non à compter de la signature du bail en avril, que l'appartement était encombré des effets personnels du bailleur jusqu'au 10 juillet 2014. Elle invoque par ailleurs n'avoir pas pu prendre possession du garage.
Motifs de la décision
La demande d'expulsion formée par M. [R] repose sur la délivrance à la locataire d'un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au bail le 16 octobre 2015, pour la somme de 3614,10 euros. En application de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, applicable aux locations de logements meublés, le commandement de payer visant la clause résolutoire emporte résiliation automatique du bail en cas de non paiement de ses causes dans les deux mois de sa délivrance.
Les deux premiers mois de loyer (avril et mai 2014) ont été intégralement pris en charge par le Conseil général et la caisse d'allocations familiales a versé directement une partie du loyer à M. [R] à compter du mois de juin 2014. Mme [E] [B] ne verse aucune preuve de paiement du complément de loyer restant à sa charge entre le mois de juin 2014 et le mois d'avril 2015 et pour les mois de juin, septembre et décembre 2015. Elle ne justifie donc pas avoir réglé au 16 décembre 2015, les causes du commandement de payer.
Pour s'opposer à l'acquisition de la clause résolutoire, elle invoque n'avoir pu prendre possession des lieux que le 10 juillet 2014 en raison de leur encombrement et ne devoir qu'un loyer diminué à 500 euros, faute d'avoir pu jouir du garage. Cependant, elle ne produit aucun constat ou même photographie de l'appartement avant le 10 juillet 2014 et l'état des lieux effectué en son nom par un ami à cette date ne mentionne pas que l'appartement meublé serait ou aurait été inoccupable en raison de son encombrement.
L' expertise effectuée avant dire droit, dans l'instance dont Mme [E] [B] a saisi le tribunal d'instance de Nice pour faire juger qu'elle n'a pu entrer dans les lieux qu'en juillet 2014 et que son loyer devait être réduit à 500 euros jusqu'à la libération du garage, a conclu que la preuve de l'impossibilité d'occuper l'appartement n'était pas rapportée.
Par ailleurs, l'impossibilité d'utiliser le garage, qui a été constatée par l'expert, n'entraînait pas une impossibilité d'habiter le logement et ne justifie pas l'absence de paiement du complément de loyer pendant plusieurs mois. En outre, il n'appartient pas au juge des référés de modifier les termes du contrat conclu entre les parties, notamment en ce qu'il a fixé le montant du loyer. Mme [E] [B] ne justifie donc pas de circonstance permettant de considérer que la dette visée au commandement de payer serait éteinte et aucune contestation sérieuse ne s'oppose donc à ce qu'il soit donné effet à celui-ci.
Cependant, compte tenu notamment de l'instance engagée au fond et du fait qu'en 2016 et 2017, Mme [E] [B] a régulièrement payé sa part de loyer, il y a lieu de faire d'office application des dispositions de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 permettant d'accorder au locataire en situation de résorber sa dette des délais de paiement durant lesquels les effets de la clause résolutoire seront suspendus. Mme [E] [B] sera donc condamnée à payer à M. [R] sa dette locative par mensualités sur une période de 24 mois. Cette dette s'élève à la somme provisionnelle de 3327,65 euros, arrêtée au mois de novembre 2016, compte tenu de ce que la taxe d'habitation pour l'année 2014 n'est pas à la charge de la locataire puisque le bail est postérieur au 1er janvier 2014 et qu'il n'est pas justifié par les pièces produites (notamment pièce n°19) du montant de celle due pour l'année 2015. Il sera enfin précisé que, contrairement à ce que soutient Mme [E] [B], il n'est pas établi qu'elle serait créancière de son bailleur, dès lors qu'ainsi qu'il a déjà été indiqué, le juge des référés ne peut procéder à une réduction du montant contractuel du loyer.
PAR CES MOTIFS
La cour,
- Infirme l'ordonnance,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
- Constate l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail,
- Condamne Mme [E] [B] à verser à M. [R] une provision de 3327,65 euros correspondant aux loyers et charges arrêtés au mois de novembre 2016,
- Dit que Mme [E] [B] pourra s'acquitter de cette provision en 24 mois, par 23 mensualités de 139 euros chacune et la dernière du solde en sus du loyer courant,
- Dit que durant cette période les effets de la clause résolutoire seront suspendus mais qu'à défaut de paiement de l'une des mensualités à son échéance, la totalité de la dette deviendra immédiatement exigible, le bail sera résilié de plein droit et l'expulsion de Mme [E] [B] et de tous occupants de son chef pourra être poursuivie, avec l'assistance, le cas échéant, de la force publique, une indemnité d'occupation provisionnelle étant alors due, égale au montant du loyer et charges antérieurs,
- Condamne Mme [E] [B] à verser à M. [R] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne Mme [E] [B] aux dépens de première instance, qui comprennent le coût du commandement de payer du 16 octobre 2015, et d'appel.
Le greffier, La présidente,