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20/06/2017 | FRANCE | N°15/18067

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1ère chambre a, 20 juin 2017, 15/18067


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1ère Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 20 JUIN 2017

A.V

N°2017/













Rôle N° 15/18067







SCP [Adresse 1]





C/



SARL JB TASSONE





































Grosse délivrée

le :

à :Me Rousseau

Me Leca









Décision déférée à la C

our :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 05 Août 2015 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 14/00069.





APPELANTE



SCP [Adresse 1], agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, [Adresse 2]



représentée par Me Ludovic ROUSSEAU de la SCP ROUSSEAU & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1ère Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 20 JUIN 2017

A.V

N°2017/

Rôle N° 15/18067

SCP [Adresse 1]

C/

SARL JB TASSONE

Grosse délivrée

le :

à :Me Rousseau

Me Leca

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 05 Août 2015 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 14/00069.

APPELANTE

SCP [Adresse 1], agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, [Adresse 2]

représentée par Me Ludovic ROUSSEAU de la SCP ROUSSEAU & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée par Me Arnaud LUCIEN, avocat au barreau de TOULON, plaidant

INTIMEE

SARL JB TASSONE, dont le siège social est [Adresse 3] (ALLEMAGNE)

représentée par Me Jean-François LECA de la SCP LECA / SORENSEN / GALMARD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Mai 2017 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne VIDAL, Présidente, et Monsieur Olivier BRUE, Conseiller, chargés du rapport.

Madame Anne VIDAL, Présidente, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anne VIDAL, Présidente

Monsieur Olivier BRUE, Conseiller

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Juin 2017.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Juin 2017.

Signé par Madame Anne VIDAL, Présidente et Madame Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Suivant acte d'huissier du 12 décembre 2013, la société JB TASSONE a fait assigner la SCP [Adresse 1] devant le tribunal de grande instance de Toulon pour obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 31.929,84 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2013, correspondant au prix de divers produits de traitement biologique livrés entre le 27 mars et 13 juin 2013, outre une somme en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ce à quoi elle a rajouté en cours d'instance une demande de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice.

La SCP [Adresse 1] s'est opposée à la demande en paiement et a présenté une demande reconventionnelle en paiement d'une somme de 345.573 euros en réparation du préjudice économique résultant de l'attaque de la vigne par le mildiou, malgré l'utilisation des produits vendus par la société JB TASSONE.

Par jugement du 5 août 2015, le tribunal de grande instance de Toulon a condamné la SCP [Adresse 1] à payer à la société JB TASSONE la somme de 31.929,84 euros avec intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2013, outre 2.000 euros de dommages et intérêts et 1.300 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, avec le bénéfice de l'exécution provisoire, rejetant par contre la demande d'indemnisation présentée reconventionnellement par la SCP [Adresse 1].

Il a écarté le moyen de défense opposé par la SCP [Adresse 1] et tenant au caractère prétendument défectueux des produits, considérant que le fait que la vigne ait été attaquée par le mildiou ne suffit pas à caractériser l'inefficacité des produits, alors que leur utilisation n'a pas été faite selon les préconisations qui apparaissent sur le devis du 18 octobre 2012 et qu'en outre la SCP [Adresse 1] a fait le choix de changer de traitement, sans suivre les conseils de la société JB TASSONE pour faire face à la flambée de mildiou. Il a également rejeté le défaut de conseil invoqué par la SCP [Adresse 1] en considérant que celle-ci ne démontrait pas en quoi les produits achetés n'étaient pas adaptés à ses besoins et qu'il était par contre établi qu'elle n'avait pas suivi les consignes qui lui avaient été données pour le traitement d'hiver et de printemps.  

La SCP [Adresse 1] a interjeté appel de cette décision suivant déclaration en date du 14 octobre 2015.

Par ordonnance en date du 21 juin 2016, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande d'expertise sollicitée par la SCP [Adresse 1] en faisant application des dispositions de l'article 146 du code de procédure civile, et l'a condamnée au paiement de la somme de 700 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l'incident.  

--------------------

La SCP [Adresse 1], suivant ses conclusions n°3 signifiées le 11 avril 2017, demande à la cour, au visa des articles 1184, 1147 et 1386-1 et suivants du code civil ainsi que des articles L 254-1 et suivants et R 254-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, de réformer le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, de :

A titre principal,

Constater le caractère phytopharmaceutique des produits GRUNOR et HORTIMAS dont l'objet est de lutter contre les champignons pathogènes et de limiter les insectes,

Constater l'absence d'autorisation de mise sur le marché des produits GRUNO et HORTIMAS,

Constater l'absence de certification de la société JB TASSONE au sens des articles L 254-1 et suivants et R 254-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime et de l'arrêté du 21 octobre 2011 portant création et fixant les modalités d'obtention du certificat individuel pour l'activité professionnelle « mise en vente, vente des produits phytopharmaceutiques »,

Dire et juger que les produits GRUNOR et HORTIMAS sont défectueux dans la protection des vignes contre le Mildiou,

Dire et juger qu'elle a ainsi engagé sa responsabilité contractuelle et devra à cette fin réparer les préjudices causés à la SCP [Adresse 1],

Débouter la société JB TASSONE de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

La condamner à titre reconventionnel au paiement de la somme de 345.573 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice économique,

Condamner la société JB TASSONE à payer à la SCP [Adresse 1] une somme de 4.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

A titre subsidiaire,

Constater l'existence de présomptions graves et concordantes établissant le rapport de causalité entre le dommage et l'inefficacité des produits GRUNOR et HORTIMAS dans la protection des vignes contre le mildiou,

Dire et juger que la société JB TASSONE a manqué à son devoir de conseil tant au stade de la préconisation du traitement initial que de la gestion de l'épidémie de mildiou,

Dire et juger que la SCP [Adresse 1] est bien fondée à opposer à la société JB TASSONE l'exception d'inexécution du contrat pour résister au paiement de ses 13 factures impayées,

Dire et juger qu'elle a ainsi engagé sa responsabilité contractuelle et devra à cette fin réparer les préjudices causés à la SCP [Adresse 1],

Débouter la société JB TASSONE de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

La condamner à titre reconventionnel au paiement de la somme de 345.573 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice économique,

Condamner la société JB TASSONE à payer à la SCP [Adresse 1] une somme de 4.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

A titre subsidiaire et avant dire droit,

Désigner tel expert qu'il plaira avec pour mission :

Entendre les parties,

Se faire remettre tous documents nécessaires à l'accomplissement de sa mission,

Entendre et recueillir l'avis de tout sachant,

Recueillir tout élément relatif aux traitements utilisés sur les parcelles voisines et leurs effets,

Procéder à l'analyse des produits utilisés,

Dire si les produits sont efficaces et conformes aux besoins de la SCP [Adresse 1],

Dire si une cause étrangère au mildiou, au produit utilisé et à ses conditions d'utilisation aurait pu être la cause du dommage,

Décrire les conditions d'utilisation des produits TASSONE par la SCP [Adresse 1], au regard des préconisations de la société JB TASSONE,

Donner son avis sur l'opportunité et les conséquences de reprise des traitements traditionnels par la SCP [Adresse 1],

Donner son avis sur les préconisations de la société JB TASSONE,

Fournir tout élément utile à la solution du litige,

Estimer le préjudice subi par la SCP [Adresse 1].

Elle développe les moyens et arguments suivants au soutien de son appel :

La Cour de cassation admet la preuve du lien causal entre le dommage et le caractère défectueux d'un produit par présomptions graves, précises et concordantes, de sorte qu'il appartient ensuite à la société JB TASSONE de rapporter la preuve de l'efficacité du produit qu'elle vend : or, malgré l'utilisation des produits GRUNOR et HORTIMAS destinés à rendre les vignes invulnérables aux attaques de champignons, celles-ci ont subi une flambée de mildiou sans précédent qui a contraint l'appelante à revenir aux traitements traditionnels pour enrayer les attaques sur certaines parcelles ; par ailleurs, les domaines voisins qui ont utilisé des produits traditionnels n'ont subi aucune perte d'exploitation ; la société JB TASSONE a été condamnée sur la base des produits défectueux par le tribunal d'instance d'Avignon et des attestations d'autres agriculteurs rapportent le caractère inefficace des produits ;

Le ministère de l'agriculture n'a pas donné d'autorisation de mise sur le marché des produits GRUNOR et HORTIMAS alors qu'ils entrent dans la catégorie des produits phytopharmaceutiques (définis comme les produits destinés à protéger les végétaux contre tous les organismes nuisibles ou à prévenir l'action de ceux-ci) pour lesquels le règlement CE 1107/2009 prévoit qu'ils doivent mentionner l'AMM ; aucun agrément du ministère de l'agriculture n'a été donné à la société JB TASSONE, en violation des articles L 254-1 et L 254-5 du code rural et de la pêche maritime ;

la société JB TASSONE a manqué à son obligation de conseil en lui proposant des produits à tout le moins inadaptés à ses vignes, puis, lorsque l'attaque de mildiou a été détectée, en lui prescrivant d'augmenter les doses, ce qu'elle avait proscrit quelques jours plus tôt, ce qui a fait perdre toute confiance en elle à la SCP [Adresse 1] qui a eu recours à une solution de traitement classique ;

son préjudice a fait l'objet d'une évaluation par expertise, le 6 novembre 2013, par M. [W], ingénieur agronome, qui a constaté la très importante perte de récolte 2013 à hauteur de 871 hectolitres, soit une perte d'exploitation valorisée à la somme de 345.573 euros.

La société JB TASSONE, en l'état de ses écritures récapitulatives n°2 signifiées le 24 avril 2017, conclut, au visa des articles 784, 9, 515 et suivants, 695 et suivants du code de procédure civile, et des articles 1134 et suivants, 1147 et suivants du code civil, à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, sauf concernant le quantum des dommages et intérêts alloués et demande en conséquence à la cour de :

condamner la SCP [Adresse 1] à payer à la société JB TASSONE la somme de 31.929,84 euros avec intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2013,

débouter la SCP [Adresse 1] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

condamner la SCP [Adresse 1] à lui payer la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice,

condamner la SCP [Adresse 1] à payer à la société JB TASSONE la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Elle répond ainsi à l'argumentation de l'appelante :

l'année 2013 a été une année de forte attaque de mildiou sur toute la région, quels que soient les produits utilisés ;

contrairement à ce que soutient la SCP [Adresse 1], les produits en cause sont des engrais organiques qui répondent à une norme d'application permettant leur mise sur le marché sans homologation et sans autorisation de mise sur le marché ; la société JB TASSONE est autorisée à les vendre sous le label AB (agriculture biologique) car ils répondent au règlement européen 834/2007 ;

si la jurisprudence admet, en matière médicale, que la preuve du caractère défectueux des produits peut résulter de présomptions graves, précises et concordantes, l'article 1386-9 du code civil prévoit que le demandeur doit prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage ; or, les dégâts ne se sont localisés que dans une zone particulièrement sensible du domaine, preuve que les produits ont été efficaces pour le reste du vignoble ; en tout état de cause, aucun produit ne peut rendre les vignes invulnérables aux attaques de champignons ;

le constat d'huissier ne fait pas état de la carence de la SCP [Adresse 1] dans le respect des préconisations de la société JB TASSONE alors que la note technique et le programme de traitement des vignes prévoyaient des règles très strictes d'utilisation ; M. [V], expert agricole, a établi une note, le 21 août 2013, dont il ressort que la SCP [Adresse 1] a procédé à des applications non conformes diminuant l'efficacité attendue des produits ; le technicien de la société JB TASSONE, M. [R], s'est également déplacé et a constaté les manquements dans le dosage des produits, sans que cette question soulève la moindre contestation ;

le rapport d'expertise qu'elle produit, comparant les dégâts entre les différentes parcelles, permet de retenir que si les produits litigieux n'avaient eu, comme il est prétendu, qu'une incidence limitée sur le développement du mildiou, toutes les vignes en auraient souffert ; par ailleurs, aucun dommage ne s'est produit au Château [Établissement 1] appartenant à la même famille pour les années 2012 et 2013 ;

il n'y a pas de manquement au devoir de conseil : le programme d'utilisation adapté aux terrains, climat et culture est précis, les fiches descriptives des produits sont complètes et un technicien est venu deux fois sur place ; en outre la société JB TASSONE a donné des conseils afin d'enrayer la maladie, mais la SCP [Adresse 1] n'a pas suivi les préconisations tant au niveau du dosage que de la période et des modalités de traitement ;

le rapport unilatéral de M. [W] s'est limité à constater les pertes de récolte, sans traiter de la qualité des produits ni de leurs conditions d'utilisation ; au demeurant, le chiffrage de cet expert est aléatoire ;

enfin, la demande d'expertise doit être rejetée, la mesure étant inutile, comme l'a retenu le conseiller de la mise en état, puisqu'il est avéré qu'il n'existe pas de lien de causalité entre les pertes survenues et les traitements de la société JB TASSONE et que les applications n'ont pas été faites dans le respect des préconisations données par la venderesse ;

la SCP [Adresse 1] doit en conséquence régler les factures d'achat des produits et être condamnée au regard de sa résistance abusive et de la campagne de dénigrement qu'elle orchestre à son encontre.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 25 avril 2017.

MOTIFS DE LA DECISION :

Attendu qu'il est constant qu'entre mars et juin 2013, la SCP [Adresse 1] a acheté auprès de la société JB TASSONE des produits HORTIMAS et GRUNOR pour traiter ses vignes en agriculture biologique et que la venderesse lui a adressé 13 factures successives pour un montant total de 31.929,84 euros qui n'a pas été réglé, malgré la mise en demeure recommandée envoyée le 17 septembre 2013 ;

Que la SCP [Adresse 1] conteste être redevable de cette somme en opposant l'exception d'inexécution à raison du caractère défectueux des produits et du manquement de la venderesse à son obligation de conseil, réclamant reconventionnellement la réparation du préjudice résultant de l'attaque d'une grande partie de son vignoble par le mildiou ;

Attendu que la SCP [Adresse 1] fait reproche de manière liminaire à la société JB TASSONE d'avoir vendu des produits phytopharmaceutiques sans avoir l'AMM et sans être elle-même certifiée, en violation des dispositions de l'article L 254-1 du code rural et de la pêche maritime qui subordonnent la mise en vente de ces produits à un agrément ;

Mais que la société JB TASSONE dénie à ses produits le caractère de produits phytopharmaceutiques et soutient qu'ils entrent dans la catégorie des matières fertilisantes soumises aux articles L 255-1 et suivants du code rural qui prévoient l'absence d'autorisation préalable à la mise sur le marché dès lors que les produits répondent à une dénomination de norme française NFU 42001 ou 44001 ou conforme aux directives européennes ; que par ailleurs, l'article L 255-2 4° du code rural prévoit que sont dispensés d'autorisation les produits obtenus à partir de matières naturelles sans traitement chimique ;

Qu'il est établi que les produits GRUNOR et HORTIMAS répondent à la norme NFU 42-001 et que la société JB TASSONE justifie de la composition générale de ses produits à base d'extraits naturels de végétaux ;

Que le grief ainsi formulé par la SCP [Adresse 1] à l'égard des produits vendus par la société JB TASSONE sera rejeté ;

Attendu que la SCP [Adresse 1] invoque les dispositions des articles 1386-1 et suivants du code civil dans leur rédaction applicable

au litige relatives aux produits défectueux et sollicite en conséquence la réparation du dommage qu'elle prétend être en lien avec le défaut du produit ;

Mais que, pour invoquer les dispositions des articles 1386-1 et suivants et engager la responsabilité du producteur à raison du dommage causé par un défaut de son produit, encore faut-il que la défectuosité alléguée consiste en un défaut de sécurité du produit ; que l'article 1386-4 définit le produit défectueux comme celui qui n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre ; qu'en l'espèce, les produits GRUNOR et HORTIMAS vendus par la société JB TASSONE ne présentent aucun problème de sécurité et que c'est uniquement leur efficacité par rapport aux qualités attendues de protection des vignes contre les parasites qui est mise en cause, et notamment de protection contre le mildiou dont il n'est pas discuté que ses attaques ont été particulièrement virulentes en 2013 ; que dès lors, il convient de rejeter l'ensemble de l'argumentation de la SCP [Adresse 1] fondée sur la responsabilité du fait des produits défectueux ;

Attendu que la SCP [Adresse 1] invoque également un manquement de la société JB TASSONE à son devoir de conseil, tant au stade pré-contractuel qu'après la vente, lors de la gestion de l'épidémie de mildiou ; qu'elle prétend en effet n'avoir pas été conseillée dans le choix de produits adaptés aux conditions culturales de sa propriété, ne pas avoir été suffisamment été informée des méthodes d'utilisation des produits et avoir reçu des conseils inappropriés, tant lors des préconisations de traitement qu'en phase d'épidémie de mildiou ;

Mais que ces reproches peuvent être écartés en l'état des constatations suivantes :

il n'est pas discuté que la SCP [Adresse 1] avait utilisé les produits GRUNOR et HORTIMAS au cours de la saison 2012 à titre de test sur ses vignobles et que c'est au regard des résultats obtenus qu'elle a décidé de les acheter et de les utiliser sur l'ensemble de sa propriété ; il ressort par ailleurs du constat et des rapports d'expertise produits aux débats que seule une partie des vignes a été atteinte par le mildiou ; il ne peut dès lors être considéré que les produits étaient inadaptés aux caractéristiques culturales de la propriété de la SCP [Adresse 1] ;

la société JB TASSONE produit aux débats le devis de traitement des vignes 2013 adressé à la SCP [Adresse 1] le 18 octobre 2012 auquel était annexé le programme annuel d'utilisation et les conseils de dosage et de traitement à respecter ;

M. [R], technicien de la société JB TASSONE, s'est déplacé sur la propriété le 14 juin 2013 en raison de l'apparition des premiers dégâts du mildiou sur certaines plantations et a adressé à M. [M] un mail le 15 juin lui faisant part de ses observations et de ses conseils pour traiter de manière efficace les plantations touchées (dont il observait qu'elles concernaient les parcelles ayant été toujours traitées en premier) en préconisant de nouveaux dosages de GRUNOR et en déconseillant le traitement cuivre + souffre ; mais la SCP [Adresse 1] reconnaît elle-même ne pas avoir suivi ces conseils, arguant de la perte de confiance à l'égard des produits ;

M. [M] [V], ingénieur agricole, a été dépêché sur la propriété par la société JB TASSONE le 24 juillet 2013 et a pu relever que les préconisations d'utilisation n'avaient pas été totalement respectées, M. [M] lui ayant ainsi précisé qu'il avait fait les applications par des appareils à pulvérisation pneumatique 1 rang sur 2, alors que l'optimisation d'un traitement de grande précision dans une période de grande sensibilité au mildiou aurait exigé un passage à chaque rang ; il a également constaté que M. [M] avait traité plusieurs fois ses vignes avec du cuivre à partir du 10 juin (alors que le cuivre ne peut avoir qu'un effet préventif et non un effet curatif) ; la SCP [Adresse 1] n'apporte aucun élément pour contredire ces observations ;

Que c'est donc à juste titre que le tribunal a rejeté le manquement au devoir de conseil allégué ;

Attendu qu'il convient en conséquence de rejeter l'exception d'inexécution invoquée par la SCP [Adresse 1] et sa demande d'indemnisation des pertes de récolte dues au développement du mildiou sur certaines parcelles et de confirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à régler à la société JB TASSONE la somme de 31.929,84 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2013, date de réception de la mise en demeure de payer ;

Attendu qu'il n'est pas établi qu'en opposant les moyens de défense qu'elle a développés devant le tribunal puis devant la cour, la SCP [Adresse 1] a commis une faute justifiant sa condamnation au paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive ; que le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a accordé à la société JB TASSONE une somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts et que l'intimée sera déboutée de son appel incident ;

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS,

la cour statuant publiquement, contradictoirement,

et en dernier ressort,

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Toulon déféré en ce qu'il a condamné la SCP [Adresse 1] à payer à la société JB TASSONE une somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Le confirme pour le surplus de ses dispositions et y ajoutant,

Condamne la SCP [Adresse 1] à payer à la société JB TASSONE une somme de 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

La condamne aux dépens d'appel lesquels seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1ère chambre a
Numéro d'arrêt : 15/18067
Date de la décision : 20/06/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°15/18067 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-06-20;15.18067 ?
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