COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
8e Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 08 JUIN 2017
N° 2017/ 293
Rôle N° 15/08770
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL PROVENCE COTE D'AZUR
C/
[R], [Y] [F]
Grosse délivrée
le :
à :STRATIGEAS
COURT [I]
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 14 Avril 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13/00986.
APPELANTE
La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Provence Côte d'Azur agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux
dont le siège est sis [Adresse 1]
représentée par Me Jean-christophe STRATIGEAS de la SELARL CADJI & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE
INTIMEE
Madame [R], [Y] [F]
née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 1] (06), demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Rachel COURT-MENIGOZ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 25 Avril 2017 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Dominique PONSOT, Président
Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Conseiller
Madame Claudine PHILIPPE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2017
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2017,
Signé par Monsieur Dominique PONSOT, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Vu le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 14 avril 2015 ayant, notamment :
- dit et jugé que la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence - Côte d'Azur n'a effectué aucune recherche, notamment sur la propriété du bien immobilier, objet actuellement de l'inscription hypothécaire, avant de solliciter la souscription de l'engagement de caution de Mme [R] [F], d'un montant de 227.500 euros, lequel se trouve manifestement disproportionné par rapport à ses biens et revenus ;
- dit et jugé que la conséquence du caractère manifestement disproportionné de l'engagement est la décharge totale de la caution ;
- débouté, en conséquence, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence - Côte d'Azur de l'ensemble de ses demandes dirigées à l'encontre de Mme [R] [F],
- débouté Mme [R] [F] de sa demande en paiement de dommages-intérêts dirigée contre la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence - Côte d'Azur ;
- condamné la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur à payer à Mme [R] [F] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure
civile ;
- condamné la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence - Côte d'Azur aux entiers dépens,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;
Vu la déclaration du 20 mai 2015, par laquelle la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur a relevé appel de cette décision ;
Vu les dernières conclusions notifiées le 19 janvier 2016, aux termes desquelles la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence - Côte d'Azur demande à la cour de :
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que le Crédit agricole n'a manifestement effectué aucune recherche, notamment sur la propriété du bien immobilier de Mme [R] [F], avant de solliciter la souscription de son engagement de caution,
- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que l'engagement de caution de Mme [R] [F] se trouve manifestement disproportionné par rapport à ses biens et revenus,
- réformer le jugement en ce qu'il a déchargé Mme [R] [F] de son engagement de caution et a débouté le Crédit agricole de l'ensemble de ses demande dirigées contre Mme [R] [F],
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [R] [F] de sa demande de paiement en dommages et intérêts,
- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné le Crédit agricole au paiement d'une indemnité de procédure ainsi qu'aux dépens,
En conséquence,
- condamner Mme [R] [F] en sa qualité de caution personnelle et solidaire de l'E.U.R.L N°18 By Micka, à lui payer la somme de 164.201,82 euros outre intérêts au taux conventionnel de 3,80 % l'an du 6 août 2015 jusqu'à parfait règlement ,
- débouter Mme [R] [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- la condamner au paiement d'une indemnité de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance dont distraction ;
Vu les uniques conclusions notifiées le 6 octobre 2016, aux termes desquelles Mme [R] [F] demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que son engagement de caution, d'un montant de 227.500 euros, se trouve manifestement disproportionné par rapport à ses biens et revenus, prononcé la décharge totale de la caution et débouté la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence-Côte d'Azur de ses demandes dirigées à son encontre,
Subsidiairement, et appelant incidemment,
- réformer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement de dommages-intérêts
dirigée contre la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence-Côte d'Azur,
Statuant à nouveau,
- constater que la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence-Côte d'Azur a manqué de manière caractérisée à ses obligations de prudence, de vigilance, de conseil et de mise en garde tant à l'égard de l'emprunteur que des cautions,
- constater que la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence-Côte d'Azur a en outre manqué, en qualité de souscripteur, à son obligation renforcée d'information en n'attirant pas l'attention de l'adhérent sur les limites de son contrat d'assurance et l'insuffisance du risque assuré,
En conséquence,
- dire et juger que la responsabilité du Crédit agricole mutuel Provence-Côte d'Azur est engagée,
- condamner le Crédit agricole mutuel Provence-Côte à réparer le préjudice subi et donc à lui payer, à titre de dommages-intérêts, une somme qui ne saurait être inférieure à celle qui lui est réclamée en qualité de caution, en principal, intérêts et frais, soit la somme, sauf à parfaire, de 164.201,82 euros,
- ordonner le cas échéant la compensation entre les deux créances réciproques,
- débouter le Crédit agricole mutuel Provence-Côte d'Azur de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
A titre infiniment subsidiaire,
- dire et juger que le Crédit agricole mutuel Provence-Côte d'Azur ne justifie pas du quantum de sa créance en l'état de la cession du fonds de commerce sur lequel il bénéficie d'un nantissement,
- le débouter de ses demandes,
- dire et juger que les demandes du Crédit agricole ne sauraient excéder le montant déclaré et admis au passif de la liquidation judiciaire de la débitrice principale pour 147.123,16 euros à titre privilégié et 468,48 euros à titre chirographaire, soit 147.591,64 euros au total,
- constater en outre que le cautionnement qu'elle a donné est dépourvu de date et qu'i1 se trouve donc indéterminé,
- constater que le Crédit agricole n'a pas satisfait à l'égard de la caution aux obligations de l'article L 341-6 du Code de la consommation,
En conséquence,
- prononcer la déchéance du prêteur de tout droit aux pénalités et intérêts de retard,
En tout état de cause,
- condamner le Crédit agricole mutuel Provence-Côte d'Azur à lui payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts outre 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le Crédit agricole mutuel Provence-Côte d'Azur aux entiers dépens de l'instance dont distraction ;
SUR CE, LA COUR,
Attendu que par acte notarié du 20 mai 2010, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence-Côte d'Azur (le crédit agricole) a consenti à l'E.U.R.L N°18 By Micka, un prêt professionnel d'un montant de 175.000 euros remboursable en 84 mensualités, au taux d'intérêts annuel fixe de 3,80 %, destiné à financer l'acquisition d'un fonds de commerce de restauration-bar-brasserie ;
Que Mme [R] [F] s'est portée le même jour caution personnelle et solidaire à concurrence de la somme de 227.500 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts, des pénalités ou intérêts de retard pour une durée de 108 mois ;
Que M. [C] [O], son fils, gérant de la société, s'est également porté caution dans les mêmes conditions ;
Que par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 janvier 2012, le Crédit agricole a fait connaître aux cautions que le compte de l'E.U.R.L N°18 By Micka présentait un arriéré de 4.772,06 euros, leur indiquant qu'à défaut de régularisation, il leur serait demandé le règlement de cette somme ; qu'il a renouvelé, sans succès, ce courrier le 4 juin 2012 ;
Que le 24 juillet 2012, le tribunal de commerce de Cannes a prononcé l'ouverture de la liquidation judicaire simplifiée de la société N°18 By Micka ;
Que le Crédit agricole a déclaré sa créance le 6 septembre 2012 entre les mains du mandataire judiciaire pour un montant de 147.123,16 euros outre intérêts ;
Que la créance du Crédit agricole, qui avait fait l'objet d'une contestation dans le cadre des opérations de vérification du passif de la procédure collective de la société cautionnée, a été admise au passif conformément à sa déclaration, par ordonnance du juge- commissaire du 20 mai 2014, devenue définitive ;
Qu'eu égard à la liquidation judiciaire prononcée, le Crédit agricole a mis en demeure le 6 septembre 2012 les cautions, de lui régler, sous huitaine, la somme de 14.075,60 euros au titre du retard accumulé sur le prêt, outre les intérêts à courir jusqu'au jour du règlement définitif ;
Qu'il les a également informés qu'à défaut de règlement de cette somme, sous huitaine, l'intégralité du prêt deviendrait intégralement exigible en principal, intérêts, frais et accessoires ;
Qu'aucun règlement n'étant intervenu dans le délai imparti, le prêt est devenu intégralement exigible à leur encontre, par l'effet de la déchéance du terme ;
Que par courrier du 3 janvier 2013, le Crédit agricole a vainement mis en demeure les cautions à lui payer l'intégralité des sommes restant dues par l'E.U.R.L N°18 By Mikca, soit la somme principale de 139.872,67 euros, outre les intérêts à courir jusqu'au jour du règlement définitif, les frais et accessoires ;
Que par acte du 6 février 2013, le Crédit agricole a fait assigner Mme [F] devant le tribunal de grande instance de Grasse pour la voir condamner à lui payer la somme de 149.663,76 euros outre intérêts au taux conventionnel de 3,80 % l'an du 3 janvier 2013 jusqu'à parfait règlement ;
Qu'il en a été débouté par le jugement entrepris, qui a considéré que l'engagement souscrit était manifestement disproportionné au biens et revenus de l'intéressée ;
Sur le caractère manifestement disproportionné de l'engagement de caution
Attendu que pour retenir le caractère manifestement disproportionné de l'engagement de caution souscrit par Mme [F], les premiers juges ont considéré que le Crédit agricole aurait dû effectuer des recherches la situation du bien immobilier mentionné dans la déclaration de patrimoine de l'intéressée, ce dont il serait résulté le constat que le bien était indivis, et qu'il était grevé d'un usufruit au profit de ses parents ;
Attendu qu'en cause d'appel, le Crédit agricole considère que la déclaration de patrimoine mentionnant 'PP' pour 'pleine propriété' ne comportait aucune anomalie apparente, et qu'il n'était donc pas tenu de procéder à de plus amples vérifications ; qu'il importe, par ailleurs, peu que Mme [F] n'ait pas rempli, comme elle le prétend, la déclaration de patrimoine, dès lors qu'elle l'a signée ;
Que Mme [F], qui sollicite la confirmation du jugement sur ce point, fait valoir que contrairement à ce qu'affirme le Crédit agricole, ce n'est pas elle qui a rédigé la déclaration de patrimoine, et les informations qui y sont contenues n'ont pas été transcrites par elle, mais par un préposé du prêteur ; qu'elle considère que le Crédit agricole ne démontre aucunement qu'elle l'aurait volontairement induit en erreur en mentionnant posséder la pleine propriété du bien, au lieu de sa simple nue propriété ; qu'elle estime que le Crédit agricole est pleinement responsable de la situation pour ne pas avoir effectué les vérifications nécessaires avant de transmettre ce document ;
Attendu qu'aux termes des dispositions de l'article L 341-4, devenu L 332-1 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 applicable à la présente procédure, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ;
Que c'est à la caution qu'il incombe de rapporter la preuve de la disproportion qu'elle allègue et au créancier qui entend se prévaloir d'un contrat de cautionnement manifestement disproportionné, d'établir qu'au moment où il appelle la caution, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation ;
Attendu que le document intitulé 'Dossier renseignements caution' établi le 21 avril 2010 et que Mme [F] ne conteste pas avoir signé, mentionne que l'intéressée est employée à la mairie de [Localité 1], où elle perçoit un revenu mensuel de 1.200 euros ; qu'il mentionne également que Mme [F] est propriétaire d'un appartement situé à [Localité 2], estimé à 300.000 euros, avec l'indication 'PP', dans la colonne 'nature propriété' ;
Qu'il est constant que ce bien était en réalité grevé d'un usufruit au profit des parents de Mme [F], ce dont la Société générale indique n'avoir eu connaissance qu'à l'occasion de l'inscription, en 2013, d'une hypothèque provisoire ;
Attendu que la déclaration de patrimoine souscrite par Mme [F] ne comportait aucune anomalie apparente, justifiant que le Crédit agricole en vérifie l'exactitude ; que la mention des lettres 'PP' pour pleine propriété révèle que la question du statut de ce bien a été abordée lors de la collecte des informations fournies par Mme [F] ; que Mme [F] n'allègue ni ne démontre avoir fourni au Crédit agricole des indications qui auraient pu faire naître un doute sur la situation réelle de ce bien, notamment son occupation à titre gratuit par sa mère ;
Qu'en toute hypothèse, Mme [F] ne fournissant aucune indication sur la valeur qui était celle de la nue-propriété lors de la souscription de son engagement eu égard à l'âge des usufruitiers, que la cour ignore, elle ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, qu'au regard de la valeur de cette nue-propriété, l'engagement souscrit à hauteur de 227.500 euros aurait été manifestement disproportionné ;
Attendu, en conséquence, que le jugement sera infirmé en ce qu'il a déchu le Crédit agricole du droit de se prévaloir du cautionnement souscrit par Mme [F] ;
Sur le devoir de mise en garde
Attendu que Mme [F] soutient que le Crédit agricole aurait manqué à son devoir de mise en garde en faisant souscrire par la SARL N° 18 By Micka un prêt représentant plus de 140 % du prix d'achat du fonds ; qui plus est, ce fonds n'avait été créé que deux ans auparavant, privant ainsi du recul nécessaire pour apprécier la viabilité de l'entreprise ; que le montant du loyer était d'un montant non négligeable, de 20.000 euros par an ;
Qu'elle estime qu'en prenant deux garanties, la sienne et celle de son fils, outre une inscription de nantissement, le Crédit agricole apporte la démonstration de ce qu'il était conscient des risques importants que présentait l'opération à laquelle il prêtait son concours ;
Qu'en réponse, le Crédit agricole oppose tout d'abord le caractère d'emprunteur averti de la SARL By Micka au travers de son dirigeant, M. [C] [O], en tant qu'ayant une longue expérience de responsable de salle et titulaire d'un BEP restauration et d'un bac pro hôtellerie acquis en 2005 ;
Que, par ailleurs, il considère qu'il n'était débiteur d'aucun devoir de mise en garde à l'égard de Mme [F], qu'elle soit ou non une caution avertie, en l'absence de risque d'endettement excessif ; qu'il fait valoir que le fonds de commerce acquis l'a été au moyen d'un apport personnel provenant de fonds propres (8.000 euros) de M. [O] et d'une donation de sa mère (60.000 euros), outre l'emprunt souscrit ; que le dossier de financement montrait que le fonds n'était pas en difficulté ; que le document prévisionnel établi par un expert comptable prévoyait un taux de rentabilité de 34 % du chiffre d'affaires, ce qui couvrait largement le service de la dette à venir ;
Attendu que l'établissement bancaire qui consent un crédit garanti par un cautionnement est tenu envers la caution non avertie d'une obligation de mise en garde au regard des capacités financières de la caution et du risque d'endettement né de l'opération financière ;
Qu'il n'est pas sérieusement contestable que Mme [F], employée municipale dans une cantine scolaire, ne disposait d'aucune compétence lui permettant d'apprécier la viabilité de l'entreprise à laquelle elle donnait sa garantie ;
Que s'agissant de son fils [C], gérant de la société, il n'avait que 24 ans lors de la souscription du prêt et ne disposait d'aucune formation comptable et de gestion ni d'expérience dans ce domaine ;
Que pour autant, c'est à juste titre que le Crédit agricole fait valoir que le projet financé ne faisait pas naître un risque d'endettement, bénéficiant d'un apport personnel en capital social et en compte courant, et ayant donné lieu à l'établissement d'un document prévisionnel établi par un expert-comptable faisant apparaître une marge globale et, après imputation, notamment, de la charge des loyers, un excédent brut d'exploitation de 34.967 euros la première année et en progression les années suivantes, permettant largement de couvrir la charge de la dette ; que le fait que le montant emprunté ait excédé le prix du fonds de commerce ne constitue pas une anomalie dès lors que, selon le document prévisionnel, des travaux et des aménagements étaient à réaliser ;
Que la cour ne peut manquer de constater que les difficultés qu'a rencontrées la SARL N° 18 By Micka trouvent leur origine dans la maladie grave que M. [O] a déclarée en 2011 et dont sa mère fait à juste titre état, mais n'apparaissent pas avoir été la conséquence d'un défaut de conception du projet à son origine, contre lequel la banque aurait dû mettre en garde l'emprunteur et la caution ;
Que la demande sera rejetée ;
Sur le défaut d'information relatif à la souscription d'un contrat d'assurance
Attendu que Mme [F] reproche au Crédit agricole de ne pas avoir conseillé à l'emprunteur de souscrire un contrat d'assurance garantissant le risque d'ITT du dirigeant, M. [C] [O], lequel a été placé en arrêt de travail de mai 2011 à avril 2012 consécutivement à la révélation d'un cancer ;
Mais attendu qu'ainsi que le Crédit agricole le relève, en l'absence de signalement d'une situation de précarité qui aurait justifié de se prémunir contre la réalisation du risque incriminé, il n'avait pas à conseiller à son client de souscrire une garantie plus protectrice que celles résultant de l'assurance décès et PTIA souscrite par M. [O] ;
Que le moyen sera rejeté ;
Sur le quantum de la créance
Attendu que Mme [F] fait valoir que le Crédit agricole était titulaire d'un nantissement sur le fonds de commerce, et qu'il a été particulièrement taisant sur les sommes qu'il a pu récupérer lors de la cession du fonds par le liquidateur, prétendant désormais qu'il n'a rien perçu ;
Qu'elle sollicite, par ailleurs, la déchéance des intérêts en faisant valoir que le cautionnement, faute d'être daté, serait indéterminé, ce qui entraînerait, non sa nullité, mais la déchéance du droit aux pénalités et intérêts de retard ; que, selon elle, un cautionnement indéterminé étant révocable à tout moment, cette possibilité aurait dû être rappelée dans les lettres d'information annuelle qui lui ont été adressées par la banque ; que tel n'ayant pas été le cas, les lettres d'information ne satisferaient pas aux exigences légales, ce qu'il conviendrait de sanctionner par la déchéance des intérêts, en application de l'article L 341-6 du code de la consommation ;
Que le Crédit agricole rétorque que sa créance a été définitivement admise et qu'en matière de liquidation judiciaire, la procédure collective ne suspend pas le cours des intérêts ; qu'il souligne qu'il ne peut rapporter la preuve négative de ce qu'il n'a pas été désintéressé par le produit de la cession du fonds de commerce dans le cadre des opérations de liquidation ;
Qu'il note, pour le reste, que le cautionnement est bien daté, puisqu'il est inséré à l'acte authentique de cession du fonds de commerce contenant l'acte de prêt, reçu le 20 mai 2010 ; qu'il s'agit donc d'un engagement déterminé, d'une durée de 108 mois, laquelle a commencé à courir le 20 mai 2010 ;
Mais attendu, en premier lieu, que le Crédit agricole justifie de sa créance en principal et intérêts ; que c'est en vain que Mme [F] soutient que le cautionnement serait à durée indéterminée, le cautionnement étant daté du fait de son incorporation dans l'acte authentique et étant par ailleurs donné pour une durée de 108 mois ; qu'il n'est pas contesté que les sommes demandées par le Crédit agricole n'excèdent pas la limite de l'engagement ; que, pour le reste, il n'est pas contesté que les lettres d'information annuelle de la caution comportaient les informations requises par l'article L 341-6 du code de la consommation ;
Qu'il sera, en conséquence, fait droit aux demandes présentées par le Crédit agricole ;
Sur la demande reconventionnelle pour procédure abusive
Attendu que Mme [F] demande la condamnation du Crédit agricole à 15.000 euros pour procédure abusive ;
Mais attendu que les demandes présentées par le Crédit agricole étant accueillies par le présent arrêt infirmatif, il en résulte que l'exercice de son droit d'action et des voies de recours ouvertes par la loi ne révèle, de la part du Crédit agricole, aucun abus ;
Que la demande présentée par Mme [F] sera rejetée ;
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Attendu que Mme [F], succombant dans ses prétentions, doit supporter les dépens de première instance et d'appel ;
Attendu qu'aucune considération d'équité ne justifie de faire application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
INFIRME le jugement rendu le 14 avril 2015 par le tribunal de grande instance de Grasse en ce qu'il a déclaré le cautionnement souscrit par Mme [F] manifestement disproportionné à ses biens et revenus ;
STATUANT Ã nouveau de ce chef,
-CONDAMNE Mme [R] [F] en sa qualité de caution personnelle et solidaire de l'E.U.R.L N°18 By Micka, à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur la somme de 164.201,82 euros outre intérêts au taux conventionnel de 3,80 % l'an du 6 août 2015 jusqu'à parfait règlement ,
REJETTE toute autre demande des parties, et notamment celles fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme [R] [F] aux dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;
LE GREFFIERLE PRESIDENT