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04/05/2017 | FRANCE | N°15/02376

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 04 mai 2017, 15/02376


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre C



ARRÊT AU FOND

DU 04 MAI 2017



N° 2017/ 234













Rôle N° 15/02376







SA SOCIETE GENERALE





C/



[N] [P]

[T] [L] épouse [P]

[C] [P]

[K] [P]





















Grosse délivrée

le :

à :DAVAL-GUEDJ

BARGAIN

















Décision

déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 24 Novembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 13/03598.





APPELANTE



SA SOCIETE GENERALE, poursuites et dil igences de son représentant légal, dont le siège est sis [Adresse 1]

représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MON...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 04 MAI 2017

N° 2017/ 234

Rôle N° 15/02376

SA SOCIETE GENERALE

C/

[N] [P]

[T] [L] épouse [P]

[C] [P]

[K] [P]

Grosse délivrée

le :

à :DAVAL-GUEDJ

BARGAIN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 24 Novembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 13/03598.

APPELANTE

SA SOCIETE GENERALE, poursuites et dil igences de son représentant légal, dont le siège est sis [Adresse 1]

représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me MANENT, avocat au barreau D'AIX EN PROVENCE substituant Me Michel DRAILLARD, avocat au barreau de GRASSE

INTIMES

Monsieur [N] [P]

né le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 1], demeurant [Adresse 2]

Madame [T] [L] épouse [P]

née le [Date naissance 2] 1947 à [Localité 2] (68), demeurant [Adresse 2]

Monsieur [C] [P]

né le [Date naissance 3] 1971 à [Localité 3] (74), demeurant [Adresse 3]

Monsieur [K] [P]

né le [Date naissance 4] 1975 à [Localité 3] (74), demeurant [Adresse 4]

représentés par Me Pénélope BARGAIN, avocat au barreau de GRASSE et assistés de Me DALY, avocat au barreau d'ANNECY

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 07 Mars 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Dominique PONSOT, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Dominique PONSOT, Président

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Conseiller

Madame Claudine PHILIPPE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Mai 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Mai 2017,

Signé par Monsieur Dominique PONSOT, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 24 novembre 2014 ayant, notamment :

- déclaré l'action de la Société générale non prescrite,

- débouté, au fond, la Société générale de ses demandes,

- débouté M. [N] [P], Mme [T] [L] épouse [P], M. [C] [P] et M. [K] [P] de leurs demandes reconventionnelles,

- condamné la Société générale à payer à M. [N] [P], Mme [T] [L] épouse [P], M. [C] [P] et M. [K] [P] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Société générale aux dépens de l'instance dont distraction,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

Vu la déclaration du 17 février 2014, par laquelle la SA Société générale a relevé appel de cette décision ;

Vu les uniques conclusions notifiées le 6 mars 2015, aux termes desquelles la SA Société générale demande à la cour de :

- condamner M. [N] [P] à lui payer la somme de 95.779,92 euros, outre intérêt au taux conventionnel majoré de 10,60 % l'an depuis le 6 juin 2013,

- condamner Mme [L] épouse [P] à lui payer la somme de 95.779,92 euros, outre intérêt au taux conventionnel majoré de 10,60 % l'an depuis le 6 juin 2013,

- condamner M. [C] [P] à lui payer la somme de 88.412,23 euros, outre intérêt au taux conventionnel majoré de 10,60 % l'an depuis le 6 juin 2013,

- condamner M. [K] [P] à lui payer la somme de 88.412,23 euros, outre intérêt au taux conventionnel majoré de 10,60 % l'an depuis le 6 juin 2013,

- ordonner la capitalisation des intérêts échus pour une année entière, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

- condamner solidairement les consorts [P] au paiement d'une somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens dont distraction ;

Vu les uniques conclusions notifiées le 7 mai 2015, aux termes desquelles M. [N] [P], Mme [T] [L] épouse [P], M. [C] [P] et M. [K] [P] demandent à la cour de :

A titre principal,

- constatant que les décisions prises à l'encontre de la SCI MCP n'ont pas autorité de chose jugée,

- constatant que la loi du 18 juin 2008 a instauré une prescription biennale pour les actions en recouvrement de crédit des établissements bancaires,

- constatant que cet article est applicable au crédit immobilier,

- constatant que la loi est d'application immédiate au jour de son entrée en vigueur, soit le 18 juin 2008,

- constatant qu'entre la 18 juin 2008 et le 18 juin 2010 aucune diligence ayant pour effet d'interrompre la prescription n'a été réalisée par la Société Générale,

- constatant que dès lors l'action de la Société Générale à l'encontre de la SCI MCP est prescrite depuis le 18 juin 2010,

- constatant que les associés d'une SCI sont fondés à se prévaloir de la prescription de l'action en recouvrement contre le débiteur principal,

- constatant que le procès verbal de règlement amiable établi le 1 er décembre 2005 ne constitue pas un titre exécutoire,

En conséquence,

- réformer le jugement entrepris,

- dire et juger l'action de la Société Générale prescrite,

- débouter la Société Générale de l'ensemble de ses demandes à l'encontre des associés de la SCI MCP,

A titre subsidiaire

- constatant que la Société Générale ne peut justifier de l'existence de vaines poursuites à l'encontre de la SCI MCP,

- constatant que dès lors la Société Générale ne pouvait légitimement poursuivre les associés de la SCI sans avoir préalablement obtenu un jugement à l'encontre de la SCI MCP,

En conséquence,

- confirmer sur ce point le jugement entrepris,

- dire et juger l'assignation signifiée le 13 juin 2013 comme nulle et de nul effet,

- débouter la Société Générale de l'intégralité de ses demandes,

Sur le fond

A titre principal

- constatant que le crédit octroyé à la SCI MCP par la Société Général est parfaitement abusif,

- constatant la faute de la Société Générale dans l'octroi dudit crédit,

- constatant le préjudice subi par la société MCP et ses associés du fait de la faute de la banque,

En conséquence,

- réformer le jugement entrepris,

- condamner la Société Générale au versement de la somme de 368.384,3 euros à titre de dommages et intérêts aux associés de la SCI MCP,

- prononcer la compensation judiciaire entre les créances réciproques des parties à la présente instance,

A titre subsidiaire

- constatant que les règles imposées par le code de la consommation s'agissant des offres de prêts n'ont pas été respectées par la Société Générale,

En conséquence,

- réformer le jugement entrepris,

- déchoir la Société Générale de son droit aux intérêts au titre du prêt consenti à la société MCP,

En tout état de cause

- rejeter les demandes de la société générale au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Société Générale à payer aux associés de la SCI MCP la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction ;

SUR CE, LA COUR,

Attendu que par acte sous seing privé du 10 juin 1994, les époux [P] ont constitué avec leurs deux enfants une SCI, la SCP MCP, dans laquelle ils détenaient chacun 26 parts, et leurs enfants chacun 24 parts, à laquelle ils ont cédé un bien immobilier leur appartenant, sis à [Adresse 5] (74) au prix de 1.800.000 francs ;

Que pour financer cette acquisition, la Société générale a, par acte authentique du 20 juin 1994, consenti à la SCI un prêt de 1.400.000 francs (213.428,62 euros) remboursable en 84 mensualités de 21.542,75 francs (3.284,06 euros) au taux d'intérêt conventionnel de 7,60 % ;

Que des échéances demeurant impayées, la Société générale a adressé diverses mises en demeure à la SCI MCP les 1er octobre, 11 octobre, 3 décembre et 20 décembre 1996, la déchéance du terme étant prononcée lors de cette dernière mise en demeure ; 

Que des saisies attribution ont été pratiquées à l'encontre de la SCI le 20 juillet 1998, et, du 19 novembre 1998 au 5 mars 2001, la Société générale a appréhendé des loyers perçus par la SCI ;

Que le 28 avril 2000, la Société générale a fait signifier à la SCI un commandement de saisie immobilière ; que le 11 janvier 2001, le bien financé a été vendu par adjudication pour un montant de 79.273,49 euros ;

Que les sommes ont été séquestrées, et la Société générale s'est vu attribuer la somme de 83.015,31 euros le 17 novembre 2006 ;

Que la Société générale a fait signifier à la SCI MCP le 27 février 2007 un commandement de saisie-vente, puis l'a renouvelé le 11 juin 2013 pour un montant de 179.200,64 euros en principal et 189.183,66 euros au titre des intérêts, soit 368.384,30 euros au total ;

Que ce commandement étant demeuré sans effet, la Société générale a, par acte du 13 juin 2013, fait assigner les associés de la SCI, les consorts [P] devant le tribunal de grande instance de Grasse, qui a rendu le jugement entrepris ;

Que le tribunal, après avoir écarté différents moyens de défense, a débouté la Société générale en considérant qu'elle ne justifiait pas de poursuites préalables à l'encontre de la SCI MCP, au sens de l'article 1858 du code civil, lui permettant d'engager la responsabilité des associés ;

Sur la prescription

Attendu que les consorts [P] opposent à l'action engagée par la Société générale l'article L 137-2 du code de la consommation suivant lequel l'action des professionnels, pour les biens ou services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ; qu'ils soulignent que les dispositions protectrices du code de la consommation en matière de prêt immobilier s'appliquent, aux termes de l'article L 312-2 dudit code, au prêts, quelle que soit leur qualification ou leur technique, qui sont consentis de manière habituelle par toute personne physique ou morale en vue de financer, notamment l'acquisition d'immeubles à usage d'habitation ou à usage profession et d'habitation ;

Que tel était le cas en l'espèce où l'immeuble avait un usage mixte, professionnel et d'habitation, étant affecté pour les trois-quarts à un usage d'habitation ;

Qu'ils font par ailleurs valoir que c'est à tort que les premiers juges ont refusé d'examiner ce moyen au motif de l'autorité de la chose jugée attachée à une arrêt rendu le 1er mars 2005 par la cour d'appel de Chambéry ; qu'ils estiment en outre que le procès-verbal d'ordre amiable du 1er septembre 2005 ne constitue pas un titre exécutoire ;

Mais attendu, en premier lieu et abstraction faite de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt rendu le 1er mars 2005 par la cour d'appel de Chambéry dans une instance distincte, que c'est de manière inopérante que les consorts [P] invoquent le bénéfice de la prescription biennale prévue par l'article L 137-2 du code de la consommation, ce texte ne s'appliquant qu'à des consommateurs, et les appelants n'invoquant ni ne démontrant que les parties auraient entendu soumettre le contrat de prêt aux règles relatives à la protection des consommateurs ; qu'il en résulte que l'action était soumise au délai trentenaire de la prescription de droit commun en matière civile, ce délai courant à compter de l'acte notarié du 20 juin 1994 ;

Qu'en second lieu, il résulte d'un procès-verbal d'ordre amiable, signé par les parties et le juge aux ordres près le tribunal de grande instance d'Annecy le 1er décembre 2005 à la suite de la vente du bien immobilier, que la créance de la Société générale a été fixée à la somme de 321.397,97 euros, somme sur laquelle la Société générale a été colloquée à hauteur de 82.337,54 euros en ce compris les frais de 223,19 euros ; qu'en application de l'article 3, 3°, de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution devenu L 111-3 du code des procédures civiles d'exécution, ce procès-verbal d'ordre amiable emportait les effets d'une décision juridictionnelle assortie de l'autorité de la chose jugée, ;

Que par suite et en application du nouvel article 3-1 de la loi du 9 juillet 1991 susvisé résultant l'article 23 de la loi n° 2008-651 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, devenu L 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, ce procès-verbal de règlement amiable a eu pour effet d'intervertir la prescription et de soumettre son exécution à la prescription décennale applicable aux titres exécutoires ; que la prescription décennale ayant commencé à courir le 1er décembre 2005, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que l'action engagée le 13 juin 2013 à l'encontre des consorts [P] sur le fondement de ce titre exécutoire n'était pas prescrite ;

Que le moyen tiré de la prescription sera rejeté et le jugement confirmé de ce chef ;

Sur les vaines poursuites

Attendu que la société générale fait grief au jugement d'avoir considéré qu'elle ne démontrait pas avoir exercé, à l'encontre de la SCI MCP, de vaines poursuites, et de lui avoir ainsi refusé d'agir à l'encontre des associés en application des article 1857 et 1858 du code civil ;

Qu'elle souligne qu'il résulte des statuts que la SCI, constituée entre les époux [P] et leurs enfants, était destinée à l'acquisition du bien immobilier cédé le 20 juin 1994 ; que cette SCI n'avait aucun autre but et n'a plus d'actif aujourd'hui à la suite de la vente du bien ayant donné lieu au procès-verbal d'ordre amiable du 1er décembre 2005 ;

Que la SCI ne disposant plus d'aucun autre actif, toutes les poursuites exercées à son encontre sont vaines ;

Attendu qu'il est constant que, la SCI MCP ayant été défaillante dans le remboursement du prêt, la Société générale, après l'avoir vainement mise en demeure de lui régler les sommes dues et avoir prononcé la déchéance du terme le 20 décembre 1996, a pratiqué des saisies attribution à son encontre le 20 juillet 1998, et, du 19 novembre 1998 au 5 mars 2001, lui permettant d'appréhender des loyers dont la SCI se trouvait créancière ;

Que, dans l'intervalle, la Société générale a délivré un commandement aux fins de saisie immobilière, puis fait dénoncer à la SCI MCP ce commandement aux fins de saisie immobilière par acte du 28 avril 2000 de la SCP Coulon Laurent Augustin, huissiers de justice à [Localité 3], transformé en procès-verbal de recherches infructueuses ; que la SCI MCP a, par acte du 9 août 2000, formé opposition au commandement aux fins de saisie immobilière, et a assigné la Société générale devant le tribunal de grande instance d'Annecy en responsabilité pour défaut de conseil et octroi abusif de crédit, ce dont elle a été déboutée par arrêt de la cour d'appel de Chambéry du 1er mars 2005 devenu définitif ;

Qu'entre-temps, l'unique actif détenu par la SCI MCP a été vendu par adjudication le 11 janvier 2001, pour un montant de 79.273,49 euros qui a été séquestré et qui a été permis à la Société générale de se voir attribuer le 17 novembre 2006 la somme de 83.015,31 euros en exécution du procès-verbal d'ordre amiable du 1er décembre 2005 précédemment mentionné ;

Qu'en cet état, la Société générale, qui n'a été que très partiellement désintéressée, justifie avoir exercé à l'encontre de la SCI MCP des poursuites vaines, préalablement à l'action qu'elle entend à présent entreprendre à l'encontre des associés de la SCI ;

Que le jugement sera infirmé de ce chef ;

Sur le montant des sommes dues

Attendu que les consorts [P] demandent à titre subsidiaire à la cour de constater que l'offre de crédit établie par la Société générale et acceptée par la SCI MCP le 1er juin 1994 ne respecte pas la plupart des obligations visées par le code de la consommation, et de prononcer, en conséquence, la déchéance des intérêts en application de l'article L 312-33 dudit code ;

Mais attendu que l'examen de l'offre litigieuse, expressément intitulée offre de prêt professionnel, vise à soumettre à la SCI MCP emprunteuse une offre de prêt aux conditions qu'elle énumère, et de lui laisser le temps de la réflexion, précisant que cette offre est valable un mois ;

Qu'une telle offre, adressée à une personne morale en vue de l'acquisition d'un bien à usage mixte commercial, qui ne se réfère aucunement aux dispositions du code de la consommation et dont il n'est pas établi que les parties aient entendu l'y soumettre, n'avait pas à comporter les mentions requises par l'article L 312-8 dudit code, la SCI MCP se gardant, au demeurant, de préciser lesquelles feraient défaut ;

Qu'il s'ensuit que la demande de déchéance des intérêts sera rejetée ;

Et attendu que les sommes réclamées sont établies par les justificatifs produits par la Société générale et non contestés ;

Qu'il convient, en conséquence de faire droit aux demandes et de condamner :

- M. [N] [P] à la somme de 95.779,92 euros,

- Mme [L] épouse [P] à la somme de 95.779,92 euros,

- M. [C] [P] à lui payer la somme de 88.412,23 euros,

- M. [K] [P] à la somme de 88.412,23 euros,

Que ces sommes seront assorties des intérêts au taux conventionnel majoré de 10,60 % l'an depuis le 6 juin 2013, avec capitalisation dans les conditions de l'article 1154 devenu 1343-2 du code civil ;

Sur l'octroi abusif de crédit

Attendu que les consorts [P] demandent subsidiairement à la cour de condamner la Société générale à leur verser une somme totale de 368.384,30 euros pour octroi de crédit abusif et d'en ordonner la compensation avec les sommes qui viendraient à être mises à leur charge ;

Qu'ils fond valoir que la Société générale a accordé un crédit de 1.400.000 francs à la SCI MCP sur une durée de 7 ans, et soutiennent que la Société générale n'a pas vérifié les capacités financières de la SCI ; que si tel avait été le cas, la banque se serait immédiatement rendu compte qu'il était impossible de rembourser une somme aussi importante dans un délai si court ;

Qu'ils rappellent que la SCI a été créée dans l'unique but d'acquérir le bien objet du présent crédit, qu'elle ne justifiait d'aucune liquidité, si ce n'est d'un capital social d'un montant de 1.524,49 euros ; qu'ils notent qu'au jour de la conclusion du prêt, deux des associés de la SCI, qui se trouvent être les enfants des époux [P], ne disposaient d'aucun revenu, puisqu'ils étaient étudiants à la charge de leurs parents ; que ces derniers ne déclaraient qu'un revenu annuel net de 132.890 francs, soit un revenu mensuel commun de 11.074 francs chacun, ce dont il résulte que les échéances mensuelles du prêt étaient supérieures de 10.468,75 francs par rapport à leurs revenus ; qu'ainsi, la SCI MCP n'a jamais pu faire face aux échéances du prêt, d'où il résulte qu'elle a octroyé un crédit parfaitement excessif ;

Qu'ils estiment qu'aucune autorité de la chose jugée ne peut leur être opposée à raison de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Chambéry le 1er mars 2005 ;

Qu'en réponse, la Société générale fait valoir que leur demande est tardive par rapport à la date d'octroi du crédit, qui date de près de 30 ans, et qu'elle est au surplus irrecevable pour atteinte à l'autorité de la chose jugée ; qu'en effet, le titre sur le fondement duquel la banque agit n'est plus l'acte notarié, mais le procès-verbal de règlement d'ordre amiable qui a constaté définitivement sa créance ; qu'elle note au demeurant que les consorts [P] ont eu largement le loisir de contester les conditions d'octroi du crédit dans le cadre des procédures qu'ils ont diligentées, notamment sur l'opposition au commandement aux fins de saisie immobilière, qui a donné lieu à l'arrêt de la cour d'appel de Chambéry du 1er mars 2005 ;

Mais attendu qu'à supposer que les consorts [P] aient qualité pour contester les conditions d'octroi du prêt consenti à la SCI MCP, n'étant pas partie au contrat de prêt et ne représentant pas la SCI, cette action se heurte nécessairement à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt rendu par la cour d'appel de Chambéry le 1er mars 2005, qui a constaté que la SCI MCP ne rapportait pas la preuve d'une faute de la Société générale dans l'octroi du prêt litigieux ;

Qu'il s'ensuit que les consorts [P] ne peuvent qu'être déboutés de leurs demandes indemnitaires ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Attendu que les consorts [P], qui succombent dans leurs prétentions, doivent supporter les dépens de la procédure d'appel ;

Attendu qu'aucune considération d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement rendu le 24 novembre 2014 par le tribunal de grande instance de Grasse, sauf en ce qui concerne la prescription de l'action ;

STATUANT à nouveau pour le surplus,

-CONDAMNE M. [N] [P] à payer à la SA Société générale la somme de 95.779,92 euros ;

- CONDAMNE Mme [L] épouse [P] à payer à la SA Société générale la somme de 95.779,92 euros ;

-CONDAMNE M. [C] [P] à payer à la SA Société générale la somme de 88.412,23 euros ;

-CONDAMNE M. [K] [P] à payer à la SA Société générale la somme de 88.412,23 euros ;

-DIT que ces sommes produiront intérêt au taux conventionnel majoré de 10,60 % à compter de l'acte introductif d'instance du 6 juin 2013, avec capitalisation dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;

REJETTE toute autre demande des parties, et notamment celles fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE solidairement M. [N] [P], Mme [L] épouse [P], M. [C] [P] et M. [K] [P] aux dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre c
Numéro d'arrêt : 15/02376
Date de la décision : 04/05/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°15/02376 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-04;15.02376 ?
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