COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
1re chambre C
ARRÊT
DU 23 MARS 2017
N° 2017/240
Rôle N° 16/07206
[G] [O]
[M] [F]
C/
[F] [U]
[I] [H] épouse [U]
[P] [J] épouse [P]
[L] [P]
[H] [A]
[X] [A] épouse [Y]
[R] [A] épouse [C]
Grosse délivrée
le :
à :
Me SIMONI
Me QUIOC
Me TEISSIER
Me PORTOLANO
Décision déférée à la cour :
Ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 5 avril 2016 enregistrée au répertoire général sous le n° 16/00076.
APPELANTS
Madame [G] [O]
née le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1]
demeurant [Adresse 1]
Monsieur [M] [F]
né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 2]
demeurant [Adresse 1]
représentés par Me Corine SIMONI, avocat au barreau d'Aix-en-Provence
assistés par Me Pascal ALIAS substitué par Me Annie PROSPERI, avocats au barreau d'Aix-en-Provence
INTIMÉS
Monsieur [F] [U]
né le [Date naissance 3] 1983 à [Localité 3]
demeurant [Adresse 1]
Madame [I] [H] épouse [U]
née le [Date naissance 4] 1986 à [Localité 4]
demeurant [Adresse 1]
représentés et assistés par Me Audrey QUIOC, avocat au barreau d'Aix-en-Provence
Madame [P] [J] épouse [P]
née le [Date naissance 5] 1987 à [Localité 3]
demeurant [Adresse 2]
Monsieur [L] [P]
né le [Date naissance 6] 1988 à [Localité 1]
demeurant [Adresse 2]
représentés et assistés par Me Frédéric TEISSIER, avocat au barreau d'Aix-en-Provence
Monsieur [H] [A]
né le [Date naissance 7] 1937 à [Localité 5]
demeurant [Adresse 3]
Madame [X] [A] épouse [Y]
née le [Date naissance 8] 1938 à [Localité 5]
demeurant [Adresse 4]
Madame [R] [A] épouse [C]
née le [Date naissance 9] 1941 à [Localité 5]
demeurant [Adresse 5]
représentés et assistés par Me Gisèle PORTOLANO, avocat au barreau d'd'Aix-en-Provence
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 13 février 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Danielle Demont, conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La cour était composée de :
Monsieur Serge KERRAUDREN, président
Mme Danielle DEMONT, conseiller
Madame Lise LEROY-GISSINGER, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 mars 2017
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 mars 2017,
Signé par Monsieur Serge KERRAUDREN, président et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par ordonnance de référé en date du 5 avril 2016 le président du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a prononcé la mise hors de cause des consorts [A], débouté Mme [G] [O] et M. [M] [F] de toutes leurs demandes, les a condamnés solidairement aux dépens et dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le premier juge relève en ses motifs que par acte du 4 août 2011 les consorts [A] ont cédé à M. [F] et à Mme [O] une maison à usage d'habitation ; que l'acte mentionne l'existence au profit des acquéreurs d'un droit de passage en surface et en tréfonds avec tous véhicules sur une bande d'une largeur de 5 m environ s'exerçant sur le fonds des vendeurs demeurés propriétaires d'autres parcelles ; que ce passage en nature de chemin part de l'[Adresse 6] pour aboutir à l'extrémité nord-est de la parcelle des requérants et doit être libre à toute heure, aucun véhicule ne devant y stationner et aucun portail d'accès ne pouvant l'obstruer ; que l'acte ne fait cependant pas expressément état d'une servitude autorisant les requérants à emprunter librement ce chemin pour s'approvisionner en eau d'arrosage à partir du canal principal ; qu'un permis d'aménagement a été accordé aux consorts [A] et que trois parcelles ont été cédées, le permis d'aménager prévoyant la création d'un canal d'arrosage reliant le canal principal busé existant à la propriété de requérants en passant par les parcelles appartenant aux deux défendeurs ; que l'existence d'une servitude permettant aux requérants d'accéder à l'entrée et à la canalisation elle-même en empruntant les fonds des défendeurs n'est pas établie avec certitude, et que d'autre part les clôtures et les murs édifiés par leurs voisins n'empêchent pas les demandeurs d'être approvisionnés en eau d'arrosage ; qu'en l'absence de trouble manifestement illicite imputable aux défendeurs, il convient de les débouter de leur demande de suppression sous astreinte de ces ouvrages et de celle en paiement de dommages intérêts qu'il en va de même de la demande d'enlèvement de la palissade en bois ; qu'enfin les requérants ne démontrent en rien qu'il y aurait des inondations sur leur fonds et l'atteinte à leur droit de passage justifiant une mesure d'expertise.
Le 19 avril 2016 Mme [G] [O] et M. [M] [F] ont relevé appel de cette décision.
Par conclusions du 20 juillet 2016 ils demandent à la cour :
' de réformer l'ordonnance entreprise ;
' de débouter tous les intimés de leurs demandes ;
' de condamner les époux [U] et les époux [P] à supprimer tous obstacles matériels empêchant leur accès à l'entrée du canal et à la canalisation elle-même sous astreinte ;
' de les condamner in solidum à leur payer la somme de 1000 € à titre de dommages-intérêts du fait de l'entrave injustifiée de la servitude de passage de canalisation d'eau du canal ;
' de condamner les époux [U] à réduire à hauteur d'un mètre 60 la palissade en bois qu'ils ont posée en violation des règles d'urbanisme le long du mur de clôture séparant leur fonds du leur sous astreinte ;
' de les condamner in solidum à leur payer la somme de 1000 € à titre de dommages-intérêts du fait de l'édification de cet ouvrage ;
' de désigner un expert avec pour mission : de constater l'origine des inondations subies par leur fonds et de déterminer les travaux de reprise adéquate et en chiffrer le coût, de constater chiffrer les divers préjudices qu'ils subissent, et de fournir tous les éléments techniques et de fait permettant de déterminer les responsabilités encourues et d'évaluer les préjudices subis,
' et de condamner in solidum tous les intimés à leur payer la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
Par conclusions du 7 septembre 2016 M. [F] [U] et Mme née [I] [H] demandent à la cour à titre principal de débouter les appelants de leurs demandes, de confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions et de les condamner à leur verser la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, et à titre subsidiaire, si la cour devait faire droit à la demande d'expertise, de dire qu'ils déclarent faire toutes protestations et réserves.
Par conclusions du 19 septembre 2016 M. [L] [P] et Mme née [P] [J] demandent à la cour de confirmer l'ordonnance entreprise sauf l'article 700, statuant à nouveau de ce chef, de condamner les appelants à leur payer la somme de 2400 €, à titre subsidiaire, de leur donner acte de leurs protestations s'il y avait l'instauration d'une mesure d'expertise, et dans tous les cas, de condamner les appelants à leur payer la somme de 1200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
Par conclusions du 19 septembre 2016 M. [H] [A], Mme [X] [A] épouse [Y] et Mme [R] [A] épouse [C] demandent à la cour, de débouter les appelants de leurs demandes, de les condamner à leur payer la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à titre subsidiaire d'entendre leurs protestations et réserves sur la demande d'expertise.
La cour renvoie aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS :
Attendu que les appelants font valoir que depuis leur prise possession des lieux, ils bénéficient sur les parcelles AT [Cadastre 1] et [Cadastre 2] appartenant aux intimés conformément aux statuts de l'ASA du Corps des Arrosant de [Localité 5] et [Localité 3], d'une servitude de passage des eaux provenant du canal que leur vendeur n'avait pas jugé utile d'insérer dans l'acte de vente puisque cette servitude est rattachée à tous les fonds se trouvant dans ce périmètre d'irrigation ; que depuis que les époux [U] et [P] ont effectué des travaux sur leurs parcelles respectives, les appelants n'ont plus accès à la martelière et ne peuvent plus contrôler l'arrivée d'eau d'arrosage qui parfois n'atteint pas leur fonds, parfois l'inonde ; qu'en dépit d'une lettre adressée par l'ASA rappelant aux intimés qu'indépendamment de l'établissement de toute servitude, en se rendant acquéreurs d'une parcelle inscrite dans le périmètre d'irrigation ils avaient contracté un certain nombre de charges qu'ils devaient assumer, les époux [U] n'ont pas déféré ; qu'ils ont même remblayé leur terrain jusqu'à la limite séparative de sorte que leur terrain est surélevé d'au moins 50 cm, entraînant régulièrement des inondations ; et qu'ils ne peuvent pas accéder au canal par l'[Adresse 6], laquelle est un espace privé que seuls les riverains de l'impasse ont le droit d'emprunter ;
Mais attendu que le premier juge leur a déjà répondu qu'il n'existe pas de servitude conventionnelle à leur profit ni d'enclave, le passage pour accéder à la martelière s'étant toujours effectué par l'[Adresse 6] ;
Attendu que Mme [J] [I] épouse [D] le confirme, puisqu'elle atteste :
« Avoir vu à plusieurs reprises M. [M] [F] accéder au canal d'arrosage par l'[Adresse 6]. Je déclare ne pas l'avoir revu passer par l'ancien accès à la martelière depuis que l'accès a été bouché depuis près de 20 ans. Je déclare aussi que mon ruisseau d'arrosage était au bord du débordement.
Je peux également affirmer avoir vu les terrains de M. [G] [K], M. [P] et M. [U] avant leur construction, inondés par les eaux du canal » ;
Attendu que le contenu de ce témoignage n'est pas discuté par les appelants ; qu'il en ressort qu'il n'existe aucune nécessité pour les consorts [F]-[O] de passer par le fonds des intimés ; et qu'aucun trouble manifestement illicite imputable aux intimés ou blocage subit par ces derniers d'un passage ancien ne peuvent dès lors être retenus ;
Attendu que l'ordonnance qui a rejeté la demande des appelants de supprimer sous astreinte les obstacles à l'entrée du canal et à la canalisation et tendant au versement de dommages-intérêts doit donc être approuvée ;
Attendu ensuite que les consorts [F]-[O] soutiennent qu'en construisant une palissade en bois, puis en ses lieu et place, un mur en parpaings de plus de 2 m de haut au lieu de la hauteur de1,60 m déclarée aux services de l'urbanisme, leurs voisins auraient sensiblement réduit l'ensoleillement de leur jardin, leur causant à l'évidence un trouble de jouissance excédant les inconvénients normaux de voisinage ;
Mais attendu que les époux [U] produisent d'une part une attestation du Service de l'urbanisme datée du 24 mars 2016 qui a validé leur déclaration de travaux prévoyant en clôture, des murs en limite séparative en parpaings d'une hauteur de 2 m ; que d'autre part les époux [U] font valoir qu'ils craignent que leurs enfants en bas âge ne tombent dans la piscine des appelants lesquels admettent que leur piscine est d'une hauteur de 1,20 m hors-sol et située immédiatement derrière le mur litigieux ;
Attendu que les époux [U] ajoutent exactement que le dispositif des écritures des appelants, qui lie la cour en application de l'article 954 du code de procédure civile, ne vise qu'une demande de démolition d'une palissade, désormais inexistante, et non du mur en parpaings édifié ;
Attendu que la demande de démolition présentée par les appelants se heurte donc à des contestations sérieuses ;
Attendu enfin, sur la demande des consorts [F]-[O] d'expertise judiciaire, que si l'huissier a constaté que le fonds [U] est surélevé par rapport à la parcelle des requérants d'environ 50 cm, remblai qui figure dans la déclaration de travaux, cet huissier ne décrit aucun désordre en résultant ; que les clichés photographiques épars versés aux débats montrant une retenue d'eau ne sont pas datés ; qu'elle semble plutôt ancienne et être concomitante aux travaux d'aménagement de la parcelle des consorts appelants, comme soutenu ;
Attendu que les allégations d'inondations en provenance du fonds voisin ne ressortent ainsi d'aucun élément, même a minima, comme déjà déploré par le premier juge ; que si l'article 146 du code de procédure civile ne s'applique pas quand il est fait application de l'article 145 du même code, les consorts [F]-[O] appelants ne justifient pas de l'existence d'un motif légitime à voir ordonner une expertise relative à des inondations hypothétiques qui ne ressortent que de leurs propres affirmations, aucune pièce nouvelle n'étant produite en cause d'appel sur ce point ;
Attendu qu'il s'ensuit la confirmation entière de l'ordonnance déférée ;
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne in solidum Mme [G] [O] et M. [M] [F] à payer à M. [F] [U] et à Mme née [I] [H] la somme de 2500 €, à M. [L] [P] et à Mme née [P] [J] la somme de 1500 €, à M. [H] [A] et à Mme [X] [A] épouse [Y] et à Mme [R] [A] épouse [C] la somme de 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, et dit que ceux-ci seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier,Le président,