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17/02/2017 | FRANCE | N°15/09386

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 17 février 2017, 15/09386


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 17 FEVRIER 2017



N° 2017/ 95

tc











Rôle N° 15/09386





[C] [L]





C/



SA CLINIQUE [Établissement 1]

































Grosse délivrée

le :

à :



Me Jean GADET, avocat au barreau de TOULON



Me Laurent DEBROAS, avocat au barr

eau d'AVIGNON



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section AD - en date du 28 Avril 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 14/00453.







APPELANTE



Madame [C] [L]

(bénéficie d'un...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 17 FEVRIER 2017

N° 2017/ 95

tc

Rôle N° 15/09386

[C] [L]

C/

SA CLINIQUE [Établissement 1]

Grosse délivrée

le :

à :

Me Jean GADET, avocat au barreau de TOULON

Me Laurent DEBROAS, avocat au barreau d'AVIGNON

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section AD - en date du 28 Avril 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 14/00453.

APPELANTE

Madame [C] [L]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/5756 du 29/06/2015 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE), demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Jean GADET, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Anthony DIONISI, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

SA CLINIQUE [Établissement 1], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Laurent DEBROAS, avocat au barreau d'AVIGNON (SELARL FIDAL [Adresse 3]) substitué par Me Skander DARRAGI, avocat au barreau D'AVIGNON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Janvier 2017 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Chantal BARON, Présidente de chambre

Monsieur Thierry CABALE, Conseiller qui en a rapporté

Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Février 2017.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Février 2017.

Signé par Madame Chantal BARON, Présidente de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Aux termes d'un avenant du 1er avril 2003 à un contrat à durée indéterminée, Madame [C] [L], dont l'ancienneté remonte au 1er juillet 2001, a été employée par la Sa Clinique [Établissement 1] en tant qu'agent des services généraux puis d'agent des services hospitaliers.

Convoquée par lettre du 7 mars 2014 à un entretien préalable qui s'est tenu le 21 mars 2014, la salariée a été licenciée pour faute grave par lettre du 14 avril 2014 avec la motivation qui suit': «'Le 07 février 2014 à 7h55, constatant que les plateaux repas du soir de la maternité n'avaient pas été descendus en cuisine, la Responsable Restauration s'est rendue dans le service pour en connaître la raison. Elle vous a alors trouvée avec la seconde ASH, installée dans la tisanerie en plein petit-déjeuner, avec tartines beurre et confiture. Vous aviez pris votre poste à 6h00 et l'autre salariée à 7h15...Votre collègue a quitté immédiatement la tisanerie pour reprendre son travail, alors que vous, vous avez continué à déjeuner en narguant la responsable Restauration'!

Votre responsable vous a rappelé les règles qui régissent un service de soins, et notamment le fait que les plateaux repas doivent être évacués en priorité des services, afin de respecter les procédures d'hygiène, et de permettre au personnel de cuisine d'effectuer leur lavage avant la préparation des repas. Elle vous a aussi rappelé que vous ne disposiez pas de pause petit-déjeuner, car vous veniez juste de prendre votre service, et de plus que vous ne deviez pas consommer la nourriture destinée aux collations des patients'!

Le même jour à 11h25, votre Responsable vous a de nouveau interpellée, car elle vous a trouvée en grande conversation sur votre téléphone portable personnel....Elle vous a de nouveau rappelé que le règlement intérieur interdit l'utilisation du téléphone portable pendant les heures de travail. Il est à noter qu'elle vous avait déjà surprise dans la même situation le 03 octobre 2013 à 15h45 et le 04 octobre 2013 à 14h55 et que le même rappel vous avait déjà été fait sur le respect du règlement intérieur....

Le 16 février 2014 au matin, vous avez débarrassé un plateau repas du soir, qui avait été oublié. Vous avez alors dit à la patiente': «'Soyez mieux organisée, ne donnez pas la tétée pendant les repas'!'». La même patiente vous a entendue tenir des propos déplacés à son encontre ainsi que sur l'état de propreté de la chambre de sa voisine.....

Le 20 février 2014, deux patientes vous ont demandé de conserver leurs plateaux repas un peu plus longtemps car elles n'avaient pas eu le temps de manger. Vous leur avez fait rédiger sur des morceaux de papier, des attestations pour vous couvrir. Vous avez ainsi délibérément impliqué des patientes dans votre différend avec votre hiérarchie, et terni l'image de la Clinique.

Votre attitude démontre une intention délibérée de ne pas respecter de façon répétitive les règles de notre établissement, ainsi qu'un refus caractérisé de l'autorité et de votre hiérarchie. Ce manque de professionnalisme et d'implication caractérisés pénalisent la Clinique, mais surtout les patientes.

Pour l'ensemble de ces raisons et compte tenu de la gravité et de la répétition des faits qui vous sont reprochés, nous vous licencions pour faute grave. Vous cesserez de faire partie de notre effectif dès la date d'expédition de la présente lettre.'»

Aux termes d'un jugement du 28 avril 2015, le conseil de prud'hommes de Toulon a'requalifié le licenciement en licenciement pour cause réelle et sérieuse et a condamné l'employeur à payer à la salariée les sommes de 2890,84 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 289,08 euros bruts à titre d'indemnité de congés payés sur préavis et 4335 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, a débouté les parties pour le surplus et a condamné l'employeur aux dépens.

Le 18 mai 2015, dans le délai légal, la salariée a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Aux termes de conclusions écrites déposées le jour de l'audience, visées par le greffe, développées oralement et auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, la salariée, bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, sollicite de la cour qu'elle condamne l'employeur à lui payer la somme de 2500 euros à titre de dommages et intérêts en ce que pour le calcul de l'intéressement, la réserve de participation aurait dû être calculée pour les années 2005 à 2011 à partir du bénéfice net consolidé des sept sociétés composant l'UES dès lors que, durant cette période, seulement quatre d'entre elles avaient des accords de participation, peu important l'accord conclu par l'employeur en 2006, qu'elle dise le licenciement sans cause réelle et sérieuse et qu'elle condamne en conséquence l'employeur à lui payer les sommes de':

- 2890,84 euros à titre d'indemnité de préavis,

- 289,08 euros à titre d'indemnité de congés payés sur préavis,

- 4335 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 8670 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

A titre subsidiaire, elle sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'employeur à lui payer les sommes de 2890,84 euros à titre d'indemnité de préavis, 289,08 euros à titre d'indemnité de congés payés sur préavis et 4335 euros à titre d'indemnité légale de licenciement.

Elle réclame en outre la condamnation de l'employeur à lui payer la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile de sorte que l'aide juridictionnelle totale devienne caduque.

Elle indique verser aux débats une lettre qu'elle a rédigée le 16 avril 2014 mais qu'elle n'a pas postée à destination de l'employeur, insérée aux conclusions dont elle constitue les pages numérotées de 5 à 8 sur 12 et auxquelles il est également expressément référé pour un exposé complet des moyens et prétentions. Elle soutient n'avoir jamais nargué la responsable de restauration le 7 janvier 2014, que le fait que les plateaux repas de la veille n'aient pas été évacués ne lui est de toute évidence pas imputable, savoir que si le travail n'a pas été fait par l''équipe de nuit, il lui faudra le faire en sus, sauf que de 6 heures à 7h55 elle a accompli d'autres tâches, les «'normales'» dont celle de servir les plateaux petit déjeuner, ce qu'elle a fait, que de tout temps, les ASH prennent leur petit déjeuner juste après avoir servi le dernier des patients en cinq minutes puis descendent les plateaux de ceux qui ont été servis en premier, que s'il est exact qu'elle ne dispose pas de pause petit déjeuner et qu'il lui est strictement interdit de consommer les plateaux destinés aux patients, elle s'est bornée à prendre un café entre le moment où elle avait fini de remettre aux patients les plateaux petit déjeuner et celui où elle allait commencer à les débarrasser, qu'alors que la lettre de licenciement mentionne le 7 février 2014 à 7 h55, le chef de service, représentant de l'employeur, témoignant pour les besoins de la cause de son employeur, indique pour sa part «' le 7 février 2014 voyant qu'à 8h35 les petits déjeuners....je suis descendue...et j'ai trouvé Mme [L]....'», qu'elle n'a pas utilisé son portable pour une longue conversation mais pour répondre à un appel de détresse de l'une des deux personnes handicapées dont elle a la charge, malade et alitée, que le 16 février 2014, elle n'a pas tenu les propos qui lui ont reprochés, ayant dû pallier la faute de l'équipe de nuit, que le 20 février 2014, elle n'a pas terni l'image de la clinique, s'étant bornée à demander à deux patientes, agacées par l'obligation de consommer rapidement les plateaux repas et voulant en être débarrassées après les avoir finis, de lui faire un petit mot pour éviter de subir une nouvelle fois les foudres de sa supérieure hiérarchique directe, le service restauration exigeant de manière récurrente que les plateaux soient consommés sur le champ et retournés en cuisine immédiatement, lui ayant été précédemment reproché verbalement de ne pas avoir respecté cet ordre verbal.

Mettant en évidence ses états de service et l'absence d'avertissement pour une ancienneté de treize années, et évoquant une concentration des griefs, suspecte et révélatrice d'un certain acharnement, sur une période très brève du 7 au 20 février 2014, elle soutient que, pris ensemble, ces griefs ne constituent pas une faute grave et qu'ils ne sont pas assez sérieux pour justifier un licenciement.

A titre subsidiaire, elle fait valoir que lorsque l'employeur considère qu'une faute est grave, l'usage est de pratiquer une mise à pied conservatoire.

A l'audience, l'employeur a fait remarquer que la lettre de la salariée du 16 avril 2014, intégrée aux conclusions de son avocat, n'a jamais été communiquée et ne figure pas au bordereau des pièces. Il précise que si cette lettre doit être considérée comme une pièce, il faut l'écarter des débats et que si elle est considérée comme faisant partie des conclusions, il en conteste les termes qui n'apportent rien au litige. Aux termes de conclusions écrites déposées le jour de l'audience, visées par le greffe, développées oralement et auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, l'employeur sollicite de la cour qu'elle réforme le jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse sans faute grave et l'a condamné au paiement d'indemnités de préavis, de congés payés subséquents et de licenciement, qu'elle le confirme pour le surplus, en tout état de cause, qu'elle déboute la salariée de ses demandes et la condamne à lui payer la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Sur les faits du 7 février 2014, il fait valoir que la salariée, d'une part, n'a pas respecté ses consignes, a délibérément contrevenu aux règles élémentaires d'hygiène en vigueur dans la clinique, notamment aux procédures générales restauration, en s'étant abstenue, tel que constaté par sa responsable hiérarchique qui en témoigne, de ramener en cuisine, à sa prise de service, les plateaux repas servis la veille aux patients, tâche prioritaire relevant de ses fonctions, d'autre part, a été surprise par ce même supérieur, qui se rendait dans la tisanerie à propos du non-enlèvement des plateaux, en train de prendre, hors temps de pause, un petit déjeuner, en consommant de manière prohibée et en violation des règles d'hygiène qui veulent que toute consommation de nourriture se fasse dans des locaux spécifiques, de la nourriture destinée aux patients. Il fait valoir l'attitude désinvolte et narquoise de la salariée qui a refusé son pouvoir de direction.

Sur l'usage du téléphone, il soutient que la salariée n'a pas respecté les consignes portées à sa connaissance et la législation applicable en matière de santé et au règlement intérieur qui prohibent toute utilisation du téléphone portable pendant les heures de travail.

S'agissant des faits du 16 février 2014, il reproche à la salariée d'avoir donné, en dehors de ses attributions, des directives organisationnelles à une patiente, qui s'en est plainte dans un courrier adressé à la direction et verbalement auprès de la responsable hôtelière qui a alerté la direction des ressources humaines par mail du 17 février 2014, en ayant tenu des propos déplacés et ne pouvant être justifiés par le fait de devoir débarrasser un plateau oublié la veille, ne donnant pas ainsi une image positive de la clinique, peu important des témoignages de patientes sur le comportement de la salariée à leur égard au cours de séjours anciens.

Sur les faits du 20 février 2014, il reproche à la salariée d'avoir délibérément utilisé les patientes pour faire part de son mécontentement en ayant imposé à deux patientes, ternissant ainsi l'image de la clinique, de mentionner par écrit sur des petits bouts de papier leurs doléances sur le temps imparti pour consommer leur plateau repas, alors qu'elle aurait dû ramener le plateau qui n'avait pas été consommé dans les vingt minutes pour le changer ou le laisser 15 à 30 minutes pour vérifier sa consommation.

Il en déduit une intention délibérée de la salariée à ne pas respecter de façon répétitive les règles en vigueur dans l'entreprise, son refus de l'autorité hiérarchique et un comportement visant à le dénigrer.

Il fait valoir que la salariée ne peut arguer d'une quelconque perte de chance de recevoir de la participation sur le bénéfice consolidé des sociétés composant l'unité économique et sociale en ce que toutes les entités de l'unité économique et sociale sont couvertes par des accords de participation distincts couvrant l'ensemble de leurs salariés, ajoutant qu'en tout état de cause, il n'appartient pas à la juridiction prud'homale de trancher un litige relatif à un accord de participation mais aux tribunaux judiciaires ou le cas échéant aux juridictions compétentes en matière d'impôt direct.

Il fait valoir qu'aucune indemnité de préavis, indemnité de congés payés sur préavis et indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ne sont dues en cas de faute grave.

Il ajoute ne pas être contraint de recourir à une mise à pied à titre conservatoire pour se prévaloir d'une faute grave au soutien d'un licenciement.

MOTIFS :

La lettre de la salariée faisant corps avec ses conclusions, il n'y a pas lieu de l'écarter des débats dès lors que l'employeur, mis en mesure d'y répliquer au cours de ceux-ci, a indiqué en contester les termes qui n'apporteraient rien au litige.

Il y a lieu en outre de constater que la salariée abandonne toute demande au titre de la clause de mobilité en indiquant': «'il est évident que la clause de mobilité est nulle mais en cause d'appel la salariée renonce à demander des dommages et intérêts il n'y a donc plus rien à juger'».

Sur la demande de dommages et intérêts au titre de la participation:

En application des dispositions de l'article L 1411-1 du code du travail, la juridiction prud'homale est compétente pour statuer sur le litige individuel opposant la salariée à son employeur portant sur le montant de droits de participation étroitement liés au contrat de travail. En tout état de cause, au regard de sa plénitude de juridiction, la présente cour demeurerait compétente dans le cas d'une compétence relevant d'une juridiction civile.

Aux termes de l'article L 3322-2 du code du travail, une unité économique et sociale de 50 salariés et plus, conventionnellement ou judiciairement reconnue, a l'obligation de mettre en 'uvre la participation au profit des salariés compris dans le périmètre de celle-ci, et l'article R 3322-2 du même code précise que «'les entreprises constituant une unité économique et sociale mettent en place la participation soit par un accord unique couvrant l'unité économique et sociale, soit par des accords distincts couvrant l'ensemble des salariés de ces entreprises'».

En l'espèce, une unité économique et sociale a été judiciairement reconnue le 10 mars 2011 entre, à la date du 17 mai 2005, le groupement d'intérêt économique [Établissement 2], la société Clinique [Établissement 1], la société Clinique [Localité 1], la société Clinique [Établissement 2], la société de gestion [Établissement 2], la société Financière [Établissement 2], la société Logemed et la société Clinique [Établissement 3].

L'employeur se prévaut d'une redéfinition, à compter de mai 2011, du périmètre de l'unité économique et sociale intégrant désormais la société Clinique [Établissement 4] et excluant la société Logemed et la société de gestion [Établissement 2].

Au vu des éléments fournis, sont dotées d'un accord de participation distinct couvrant l'ensemble des salariés des entreprises, les sociétés, comprises dans le périmètre de l'unité économique et sociale, Clinique [Établissement 4] depuis le 28 mars 2001, Clinique [Établissement 1] depuis le 5 septembre 2006, Clinique [Localité 1] depuis le 6 septembre 2006, Clinique [Établissement 2] depuis le 7 septembre 2006 et Clinique [Établissement 3] depuis le 13 septembre 2006.

Il en résulte l'absence de démonstration de ce que toutes les sociétés incluses dans l'unité économique et sociale du 17 mai 2005 au mois de mai 2011 disposaient d'accords de participations distincts couvrant l'ensemble des salariés des entreprises, ce qui justifie l'allocation au bénéfice de la salariée d'une somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice né de la perte de chance de tirer profit d'un calcul de la réserve de participation au niveau de l'unité économique et sociale.

Sur la rupture du contrat de travail :

Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties.

La lettre de licenciement fixe les limites des débats et doivent être examinés tous les griefs qui y sont énoncés, lesquels doivent être suffisamment précis, objectifs et matériellement vérifiables.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise y compris pendant la durée du préavis.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

L'employeur, qui n'avait pas l'obligation de mettre à pied sa salariée à titre conservatoire, a engagé la procédure de licenciement dans des délais compatibles avec un licenciement pour faute grave.

Sur les faits du 7 février 2014, il ressort de l'attestation du chef d'équipe du service «'cuisine'», supérieur hiérarchique direct, dont la probité ne peut être mise en doute au regard du seul lien de subordination à l'égard de l'employeur, qu'à 8h35, l'employeur mentionnant 7h55 dans la lettre de licenciement, elle a découvert que les plateaux consommés la veille n'avaient pas été redescendus en violation de la procédure suivant laquelle ils doivent l'être avant 8 heures, l'employeur indiquant que les plateaux devaient être débarrassés de manière prioritaire à la prise de fonction. Outre l'existence de contradictions manifestes quant aux modalités de desserte des plateaux laissés en chambre depuis la veille, l'employeur ne justifie pas de la procédure qu'il oppose à la salariée ni de ce qu'elle aurait été en charge de la gestion des plateaux concernés en exécution de roulements établis dans le service de restauration. Ce grief n'est pas fondé.

Il résulte du témoignage du chef de service et des écritures de la salariée que celle-ci a bien consommé, hors temps de pause et à tort, une boisson et de la nourriture destinés aux patients dans un local non-dédié à la prise de repas. Si aucune incidence n'est mise en évidence sur le bon accomplissement de ses tâches, le chef de service, sans être sérieusement contredit, met en évidence l' attitude particulièrement désinvolte de la salariée qui, contrairement à sa collègue qui l'accompagnait, n'a pas tenu compte des remarques qui lui étaient faites par sa responsable dont elle a délibérément ignoré le rappel des règles en vigueur, défiant son autorité en poursuivant la collation.

Alors que l'usage du téléphone portable est interdit dans l'enceinte des établissements de soins en raison des risques de perturbation des dispositifs médicaux, ce que la salariée n'ignorait pas, celle-ci a utilisé son téléphone portable. Cet usage prohibé, qu'aucune situation avérée ne permet de justifier, constitue un manquement d'une certaine importance au regard des risques encourus par les patients.

Il ressort effectivement du mail de la responsable hôtelière et d'une lettre de la patiente concernée du 17 février 2014 que le matin du 16 février 2014, en débarrassant un plateau repas du soir qui avait été oublié, la salariée a dit à cette patiente': «'Soyez mieux organisée, ne donnez pas la tétée pendant les repas'», excédant ainsi ses attributions, non-médicales, en tenant des propos culpabilisants de nature à affecter le bien-être d'une patiente et à créer un risque pour l'employeur quant à la qualité des soins.

En revanche, par manque de précisions, ne peut être retenu le reproche relatif à d'autres propos, qualifiés de déplacés, qu'aurait tenus la salariée.

Enfin, s'agissant des faits du 20 février 2014, la salariée ne nie pas être à l'origine des doléances écrites par deux patientes sur de simples bouts de papier, ce qui révèle en soi un comportement particulièrement inadapté pour une employée expérimentée dès lors qu'il lui appartenait, si elle entendait se couvrir comme elle-même l'indique, d'en référer à sa responsable sans laisser penser aux patientes qu'un tel procédé aurait été l'usage dans la clinique, ternissant ainsi son image. En revanche, il n'est pas établi que la salariée aurait entendu régler des comptes personnels par ce moyen.

Si, en tenant compte de l'ancienneté de la salariée et de ses états de service, il ne résulte pas de l'ensemble de ces éléments l'existence d'une faute grave par violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise, il s'en déduit en revanche l'existence d'une cause réelle suffisamment sérieuse justifiant le licenciement.

Il y aura donc lieu de dire, confirmant le jugement entrepris, que le licenciement est bien fondé sur une cause réelle et sérieuse sans faute grave.

En vertu des dispositions de l'article L.1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à un préavis dont la durée est calculée en fonction de l'ancienneté de services continus dont il justifie chez le même employeur.

Selon l'article L.1234-5 du code du travail, lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.

L'indemnité compensatrice de préavis due au salarié en application de l'article L 1234-5 du code du travail est égale au salaire brut, assujetti au paiement des cotisations sociales, que le salarié aurait perçu s'il avait travaillé pendant la duré du délai-congé. Ce salaire englobe tous les éléments de rémunération auxquels le salarié aurait pu prétendre s'il avait exécuté normalement son préavis, à l'exclusion des sommes représentant des remboursements de frais.

La salariée n'ayant été privée de la possibilité d'effectuer son préavis qu'en raison de la volonté de l'employeur ayant rompu son contrat en invoquant à tort une faute grave, elle a droit à une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 2890,84 euros bruts, outre à une indemnité de congés payés subséquents d'un montant de 289,08 euros bruts.

En application de l'article L 1234-9 du code du travail, il sera alloué à la salariée une indemnité de licenciement d'un montant de 4335 euros, calculée conformément aux dispositions de l'article R 1234-2 du même code.

Sur les frais irrépétibles:

En considération de l'équité, l'employeur sera condamné au paiement d'une somme de 1200 euros en application de l'article 37 modifié de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle.

Sur les dépens:

L'employeur, qui succombe, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et par mise à disposition au greffe:

Infirme partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension et y ajoutant':

Dit qu'il n'y a pas lieu d'écarter la lettre de Madame [C] [L] faisant corps avec ses conclusions écrites reprises oralement à l'audience.

Constate que Madame [C] [L] abandonne toute demande au titre de la clause de mobilité.

Condamne la Sa Clinique [Établissement 1] à payer à Madame [C] [L] la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts.

Dit que le licenciement de Madame [C] [L] par la Sa Clinique [Établissement 1] repose sur une cause réelle et sérieuse sans faute grave.

Condamne en conséquence la Sa Clinique [Établissement 1] à payer à Madame [C] [L] les sommes de':

- 2890,84 euros bruts à titre d'indemnité de préavis,

- 289,08 euros bruts à titre d'indemnité de congés payés sur préavis

- 4335 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

Condamne la Sa Clinique [Établissement 1] au paiement de la somme de 1200 euros en application de l'article 37 modifié de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Condamne la Sa Clinique [Établissement 1] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 15/09386
Date de la décision : 17/02/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°15/09386 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-02-17;15.09386 ?
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