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03/02/2017 | FRANCE | N°14/13976

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre b, 03 février 2017, 14/13976


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 03 FEVRIER 2017



N°2017/



Rôle N° 14/13976







[Z] [Q]





C/



[I] [H]



AGS - CGEA DE MARSEILLE DELEGATION REGIONAL DU SUD EST





Grosse délivrée le :



à :



Me Julien BOUCAUD-MAITRE, avocat au barreau de





Me Alexandra MARY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVE

NCE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section C - en date du 27 Mai 2014, enregistré au répertoire général sou...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 03 FEVRIER 2017

N°2017/

Rôle N° 14/13976

[Z] [Q]

C/

[I] [H]

AGS - CGEA DE MARSEILLE DELEGATION REGIONAL DU SUD EST

Grosse délivrée le :

à :

Me Julien BOUCAUD-MAITRE, avocat au barreau de

Me Alexandra MARY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section C - en date du 27 Mai 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 12/529.

APPELANT

Maître [Z] [Q], liquidateur judiciaire de la société NATIONAL MAINE COLOR, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Julien BOUCAUD-MAITRE, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Jean MARTINEZ, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Madame [I] [H], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Alexandra MARY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

AGS - CGEA DE MARSEILLE DELEGATION REGIONAL DU SUD EST, demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 12 Décembre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Marie-Agnès MICHEL, Président

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller

Monsieur David MACOUIN, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Février 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Février 2017

Signé par Madame Marie-Agnès MICHEL, Président et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

La société ÉLITE PHOTO réalisait et commercialisait notamment des photos de classe et d'élèves. Suivant contrat de travail à durée indéterminée, elle a engagé Mme [I] [F], le 11 janvier 1999, en qualité de déléguée commerciale, afin de prospecter les établissements scolaires en vue de faire réaliser les prises de vues photographiques des élèves. La salariée devait accomplir un horaire hebdomadaire de 32 heures réparties comme suit :

lundi 8h30 à 17h30 ;

mardi 8h30 à 17h30 ;

jeudi 8h30 à 17h30 ;

vendredi 8h30 à 17h30 ;

avec une heure pour déjeuner, excepté pendant les périodes de vacances scolaires, non-travaillées mais payées dans la limite de 12 semaines par an.

Le contrat de travail a été transféré à la SA MAINE COLOR suivant nouveau contrat du 29 janvier 2007, avec reprise d'ancienneté, pour un horaire mensuel de 116 heures, soit 26,77 heures par semaine réparties sur la plage horaire 8h00 ' 19h00 du lundi au vendredi dont une heure pour déjeuner, 13 semaines étant non-travaillées et payées durant les vacances scolaires.

Les parties ont conclu un avenant en date du 1er juillet 2010 fixant la rémunération de la salariée à la somme de 1 350 € par mois pour un horaire mensuel moyen de 130 heures outre des primes et un intéressement, les autres clauses du contrat de travail demeurant inchangées.

Les relations contractuelles des parties étaient soumises à la convention collective nationale de la photographie professionnelle.

L'entreprise ayant abandonné la technologie argentique pour des prises de vue numériques, elle a rencontré des difficultés avec ses sous-traitants chargés d'imprimer les clichés.

La salariée a sollicité une rupture conventionnelle du contrat de travail par lettre reçue le 11 mars 2011. Cette rupture a été refusée par l'employeur le 21 avril 2011. La salariée a alors explicité ses motivations et réitéré sa demande par lettre du 8 mai 2011 ainsi rédigée : « J'ai pris acte par votre courrier du 21 avril, du refus à ma demande de rupture conventionnelle du 9 mars 2011. Face à cette situation, merci de trouver ci-après les faits qui m'ont acculée à prendre cette décision. Mon embauche à Studio National et en tant que commerciale date du 11Janvier 1999. J'ai débuté en créant et consolidant un portefeuille qui, partant de zéro atteint 53 000 élèves expédiés, cela va sans dire avec un investissement sans réserve. Une grosse partie de ma rémunération étant liée à mes résultats, je suis arrivée à force de persévérance à percevoir des salaires qui rattrapent enfin ces douze années d'implication'

Rentrée 2009/2010

Nouvelle direction et changement de cap quant à la politique commerciale. Malgré beaucoup de remise en question, adhésion complète de ma part, une fois passée la période de questionnement plutôt compréhensible, compte-tenu du contexte de l'époque.

Rentrée 2010/2011

Passage d'un développement labo à de l'impression pour toute la gamme, sans d'autre alternative pour les écoles, et pour lequel certaines se montrent récalcitrantes' Énormes dysfonctionnements de la part du premier prestataire choisi : Mauvaise qualité, délais de livraison démesurés et non justifiés, erreurs d'envois et fantaisies d'adresses, livraisons partielles, fichiers perdus, doubles voire triples expéditions sans raison alors que d'autre part, des attentes de plusieurs mois, etc. Dès septembre, les problèmes se présentent en ne cessant de s'accumuler au fil des semaines. Très rapidement et dès les premières réclamations des écoles, j'en fais part à ma hiérarchie, faisant écho à mes collègues des autres régions. Après pas mal d'atermoiements et la situation devenant très critique, un autre prestataire est choisi. Le fait de se situer en Pologne se propage rapidement auprès des enseignants au travers de divers forums et ne fait qu'aggraver notre réputation déjà bien entachée. Malgré toute la bonne volonté de ce dernier, le retard accumulé jusqu'alors (auquel viennent se greffer les re-commandes) demande trop de temps à se résorber pour retrouver une certaine crédibilité sur le terrain. De par un manque cruel d'informations, je ne peux que rarement répondre concrètement à mes écoles qui doivent faire face à une impatience croissante et légitime des parents, dont j'hériterai d'ailleurs rapidement. Tout ceci, entraîne inexorablement un retard dans le calendrier des taches jalonnant toute année scolaire. Situation d'autant plus préjudiciable que, pendant que je m'emploie, par la force des évènements, à faire face à une clientèle de plus en plus déconcertée en y consacrant la plupart de mon temps, la concurrence très au fait de tous nos problèmes, privilégie une approche agressive, systématique et donc déloyale. Quand enfin, je peux réellement me consacrer aux renouvellements (avec un trimestre de retard par rapport aux autres années) l'ampleur des dégâts se vérifie.

Pour conclure

J'ai toujours respecté mon engagement vis-à-vis de Studio National. Qu'en est-il de celui de Studio National me concernant ' Je suis donc en droit et compte-tenu de votre refus, de vous poser quelques questions : Quel prestataire avez-vous choisi pour la saison prochaine ' Êtes-vous en mesure de me donner les éléments, de manière à rassurer les écoles, quant à la qualité et les délais, tout en n'ignorant pas qu'elles y seront très attentives ' M'assurez-vous un maintien de ma rémunération actuelle face à une énorme perte de clientèle ' Si cas échéant, vous me répondiez par la négative, comment envisagez-vous mon avenir ' Pour ma part, je pensais et je pense toujours, qu'une rupture conventionnelle était la meilleure solution et la plus digne pour les deux parties. Ne pourriez-vous donc pas la reconsidérer ' »

La salariée ayant ainsi renouvelé sa demande, les parties ont conclu une rupture conventionnelle du contrat de travail le 7 juillet 2011, à effet au 17 août 2011, prévoyant une indemnité spécifique de 9 383,53 €. Selon ce document, la rémunération mensuelle brute moyenne de la salariée était, sur les 12 derniers mois, de 3 273,41 €.

Contestant la rupture conventionnelle, Mme [I] [F] épouse [H] a saisi le 15 mai 2012 le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence, section commerce. La cause a été plaidée le 31 octobre 2013 et mise en délibéré.

La SAS STUDIO NATIONAL ' MAINE COLOR a été placée en redressement judiciaire suivant jugement du 29 janvier 2014 puis en liquidation judiciaire le 30 avril 2014, Maître [Z] [Q] étant désigné en qualité de liquidateur judiciaire.

Le conseil de prud'hommes, par jugement rendu le 27 mai 2014, a :

dit nulle la rupture conventionnelle homologuée en date du 7 juillet 2011 et l'a requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

requalifié le contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps complet ;

condamné l'employeur à payer à la salariée les sommes suivantes :

'12 090,53 € à titre de rappel de salaire sur la base d'un temps complet ;

'  1 209,05 € au titre des congés payés y afférents ;

'  7 293,84 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

'     729,34 € au titre des congés payés y afférents ;

à compter du 15e jour de la notification du jugement sur l'ensemble des bulletins de salaire de la période pour la période du 2 mai 2017 à juillet 2011. Le conseil se réservant le droit de liquider l'astreinte [sic] ;

ordonné sous astreinte de 50 € par jour de retard et ce pendant 30 jours à compter du 15e jour de la notification du jugement, d'avoir à régulariser la situation de la salariée du chef de rappel de rémunération précité auprès des organismes sociaux au bénéfice desquels ont été prélevées les cotisations sociales ;

condamné l'employeur au paiement des intérêts de droit à compter de la demande en justice ;

fixé la moyenne des derniers mois de salaire à la somme de 2 748,90 € ;

ordonné l'exécution provisoire en application de l'article 515 du code de procédure civile ;

condamné l'employeur à payer à la salariée la somme de 1 080 € suivant les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté la salariée du surplus de ses demandes ;

débouté l'employeur de ses demandes ;

condamné l'employeur aux dépens.

Maître [Z] [Q], en qualité de liquidateur judiciaire de la société STUDIO NATIONAL ' MAINE COLOR, a interjeté appel de cette décision suivant déclaration du 2 juillet 2014.

Le conseil de prud'hommes, par décision du 24 mars 2015, a rectifié le jugement entrepris ainsi :

ordonne la rectification du jugement du 27 mai 2014 ;

dit que cette rectification d'omission matérielle doit être rectifiée et vise la somme de 30 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

dit que cette décision de rectification d'omission matérielle sera portée sur la minute du jugement du 27 mai 2014 ;

laisse les dépens à la charge du Trésor Public.

Vu les écritures déposées à l'audience et soutenues par leur conseil aux termes desquelles la SAS STUDIO NATIONAL ' MAINE COLOR et Maître [Z] [Q], en qualité de liquidateur judiciaire de la société STUDIO NATIONAL ' MAINE COLOR, demandent à la cour de :

infirmer le jugement entrepris ;

débouter la salariée de l'ensemble de ses demandes ;

la condamner aux dépens.

Vu les écritures déposées à l'audience et reprises par son conseil selon lesquelles Mme [I] [F] épouse [H] demande à la cour de :

confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il y soit ajouté du chef du quantum des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

dire nulle la rupture conventionnelle homologuée en date du 7 juillet 2011, portant rupture du contrat de travail au 17 août 2011 , le consentement de la salariée ayant été vicié ;

requalifier en un licenciement sans cause réelle et sérieuse la rupture intervenue ;

requalifier en un contrat de travail à temps complet le contrat de travail à temps partiel ;

fixer ses créances aux sommes suivantes :

'12 090,53 € à titre de rappel de salaire sur la base d'un temps complet ;

'  1 209,05 € au titre des congés payés y afférents ;

'  2 405,40 € à titre de rappel de commissions pour l'année 2011/2012 ;

'  7 293,84 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

'     729,38 € au titre des congés payés y afférents ;

enjoindre au liquidateur judiciaire, sous astreinte définitive de 50 € par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt, d'avoir à établir et lui délivrer des bulletins de salaire rectifiés, mentionnant la rémunération effectivement due, sur la base d'un horaire à temps complet et du rappel de commissions ;

l'enjoindre, sous astreinte identique, d'avoir à régulariser sa situation auprès des organismes sociaux au bénéfice desquels ont été prélevées les cotisations sociales ;

fixer en outre sa créance, au titre des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse à la somme de 40 000 € ;

dire l'arrêt opposable à l'AGS ;

statuer ce que de droit du chef des dépens ;

fixer à la somme de 2 000 € l'indemnité due au titre des frais irrépétibles.

Vu les écritures déposées à l'audience et reprises par son conseil selon lesquelles l'AGS, CGEA d'Île-de-France Est, demande à la cour de :

dire que le contrat de travail du 11 janvier 1999 et son avenant du 1er juillet 2007 à temps partiel sont conformes aux dispositions des articles L. 3123-14 et suivants du code du travail, dès lors qu'ils énoncent la durée de l'horaire de travail et la répartition sur les jours de la semaine ;

dire que l'avenant contractuel du 1er juillet 2010, n'étant qu'un accessoire du contrat à temps partiel initial licite, la salariée exerçant une activité commerciale avec liberté d'organisation de son emploi du temps, elle ne peut sérieusement obtenir la requalification du temps partiel en contrat à temps complet ;

dire que la salariée ne rapporte pas la preuve d'un des vices du consentement de nature à entraîner la nullité de la rupture conventionnelle ;

infirmer le jugement entrepris tel que rectifié ;

débouter la salariée de toutes ses demandes ;

subsidiairement,

dire que l'AGS ne doit pas sa garantie pour les demandes au titre des frais irrépétibles, des dépens, de l'astreinte, des cotisations patronales ou résultant d'une action en responsabilité ;

dire que l'obligation de l'AGS est de faire l'avance du montant total des créances garanties aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail, compte tenu du plafond applicable (articles L. 3253-17 et D. 3253-5), et ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé de créances par le mandataire judiciaire et sur justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l'article L. 3253-19 du code du travail ;

dire que le jugement d'ouverture de la procédure collective opère arrêt des intérêts légaux et conventionnels (article L. 622-28 du code de commerce) ;

débouter la salariée de toute demande contraire.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1/ Sur le temps partiel

L'article L. 3123-14 du code du travail disposait au 1er juillet 2010 que :

« Le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit.

Il mentionne :

1° La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif de travail conclu en application de l'article L. 3122-2, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;

2° Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;

3° Les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié ;

4° Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat. »

En application de texte, il n'est pas nécessaire pour l'employeur de fixer de façon précise la répartition de la durée du travail et il suffit que la salariée dispose d'informations suffisantes sur son rythme prévisible de travail lui permettant de savoir quelles sont globalement ses périodes non travaillées au cours desquelles elle n'a pas à se tenir à la disposition de son employeur et peut donc vaquer à d'autres occupations, qu'elles soient personnelles ou professionnelles, dans un autre cadre que celui de son entreprise.

En l'espèce, la salariée reproche à l'employeur de ne pas avoir repris, dans l'avenant du 1er juillet 2010, lequel faisait pourtant passer la durée mensuelle du travail de 116 heures à 130 heures, la répartition prévue antérieurement, soit de 8 heures à 19 heures du lundi au vendredi sauf une heure pour déjeuner. Elle soutient qu'elle se trouvait en permanence à la disposition de son employeur et ainsi travaillait à temps plein.

Mais il convient de relever que la salariée n'incrimine pas le contrat de travail du 29 janvier 2007 qui répartissait son horaire mensuel de 116 heures sur une plage horaire 8h00 ' 19h00 du lundi au vendredi dont une heure pour déjeuner, 13 semaines étant non travaillées et payées durant les vacances scolaires. L'avenant du 1er juillet 2010 prévoyant expressément que les autres clauses du contrat demeuraient inchangées, la plage horaire ne s'est pas trouvée modifiée.

Ainsi, le contrat de travail prévoyait bien, de manière suffisamment précise concernant une salariée qui travaillait en autonomie, la répartition de sa durée du travail. De plus, la salariée, qui réclame le bénéfice d'un plein temps, ne sollicite pas pour autant le paiement d'heures supplémentaires et n'affirme pas avoir effectivement travaillé 35 heures par semaine mais uniquement être resté à la disposition de son employeur durant ce temps. Mais elle n'apporte pas d'éléments susceptibles d'étayer une telle affirmation en dehors de ses propres assertions et des courriels dont les heures d'envoi ou de réception n'impliquent nullement que la salariée, commerciale travaillant en autonomie, était alors à la disposition de l'employeur.

En conséquence, la salariée sera déboutée de ce chef.

2/ Sur les commissions pour l'exercice 2011/2012

S'il appartient à la salariée d'établir que tel élément de rémunération lui est dû, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve du paiement du salaire conformément au droit commun.

La salariée fait valoir que pour l'exercice 2011/2012 elle a conclu 38 contrats concernant 12 027 élèves et elle sollicite la somme de 0,20 € x 12 027 élèves = 2 405,40 € à titre de rappel de commissions par application de l'avenant du 1er juillet 2010.

Le liquidateur judiciaire répond que les commissions ont bien été versées.

La cour relève qu'aucune des parties ne produit les bulletins de salaire pour la période considérée mais que la salariée produit une liste manuscrite des contrats visés précisant le nombre des élèves concernés. En conséquence, il sera fait droit à sa réclamation pour le montant sollicité de 2 405,40 €.

3/ Sur la rupture conventionnelle

La rupture conventionnelle du contrat de travail ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties et leur consentement doit donc être libre. En particulier, il doit être exempt de dol, d'erreur et de violence. Mais la validité de la rupture conventionnelle n'est aucunement affectée par l'existence d'un différend antérieurement à sa conclusion, tant que ce dernier n'a pas donné lieu à des pressions de la part de l'une ou l'autre des parties.

En l'espèce, la salariée soutient que son consentement a été vicié par la déloyauté manifeste de l'employeur, ce que ce dernier conteste, reconnaissant les difficultés alléguées, mais expliquant avoir tenté d'y faire face loyalement.

Il sera tout d'abord relevé que la salariée ne précise pas le vice du consentement qu'elle invoque. Au vu de ses explications, qui sont en substance celles déjà articulées dans le courrier du 8 mai 2011, il sera retenu que la salariée invoque une violence morale tenant à la désorganisation de son travail et une violence économique tenant à la diminution de sa rémunération.

Le liquidateur judiciaire explique que l'employeur s'est bien trouvé confronté aux difficultés d'imprimerie que dénonce la salariée, mais il soutient qu'il a tenté loyalement d'y faire face en mettant en place une ligne téléphonique dédiée aux réclamations, en organisant des réunions d'information à l'attention des commerciaux et des conférences téléphoniques, en envoyant des courriels d'informations ainsi que des courriers d'excuse aux clients et encore en leur accordant des remises et des avantages commerciaux, et enfin, en versant aux commerciaux l'ensemble de la rémunération variable due au titre des commandes enregistrées y compris celles annulées ou refusées par les clients.

La salariée ne conteste pas l'existence de ces réponses, mais elle les estime parfaitement insuffisantes à calmer la colère des clients qu'elle devait affronter et à enrayer leur départ au profit de la concurrence.

La cour retient qu'au temps de la rupture les parties étaient en conflit ouvert sur la gestion de la crise qu'affrontait l'entreprise, mais qu'il ressort de la convention elle-même que la rémunération variable de la salariée n'avait pas encore été affectée substantiellement par le départ des clients et qu'ainsi elle ne se trouvait pas dans un état de contrainte économique l'ayant obligé à solliciter une rupture conventionnelle du contrat de travail.

De plus, si les conditions de travail s'étaient effectivement dégradées en raison des réclamations légitimes des clients, il ne peut être reproché à l'employeur d'avoir ainsi usé de violence morale pour pousser la salariée à consentir à la rupture du contrat de travail dès lors qu'il a mis en place des dispositifs effectifs pour faire face à la difficulté qui lui était étrangère même si ces derniers se sont avérés insuffisants. En effet, des difficultés économiques liées à la défaillance de sous-traitants, dès lors qu'elles sont parfaitement connues et évaluées par la salariée, comme c'est le cas en l'espèce, ne peuvent, à elles seules, constituer une violence morale, même si elles entraînent une dégradation des conditions de travail dès lors que l'employeur les a pris en compte et, en tout état de cause, ne les a pas laissées dégénérer au point de porter atteinte aux droits et à la dignité de la salariée, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En conséquence, la salariée sera déboutée de ce chef et de l'ensemble des demandes qui en découlent, indemnité de préavis, congés payés y afférents et dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

4/ Sur les autres demandes

Sans qu'il soit besoin de prononcer une astreinte, le liquidateur judiciaire établira et délivrera à la salariée un bulletin de salaire rectifié mentionnant la rémunération effectivement due sur la base du rappel de commissions.

L'équité commande d'allouer à la salariée la somme de 1 500 € au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens seront laissés à la charge de la liquidation judiciaire.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

Déboute Mme [I] [F] épouse [H] de ses demandes de requalification du contrat de travail et de nullité de la rupture conventionnelle.

Fixe la créance de Mme [I] [F] épouse [H] dans la liquidation de la SAS STUDIO NATIONAL ' MAINE COLOR aux sommes suivantes :

2 405,40 € à titre de rappel de commission pour l'exercice 2011/2012 ;

1 500,00 € au titre des frais irrépétibles.

Dit que Maître [Z] [Q], en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS STUDIO NATIONAL ' MAINE COLOR établira et délivrera à Mme [I] [F] épouse [H] un bulletin de salaire rectifié mentionnant la rémunération effectivement due sur la base du rappel de commissions.

Dit le présent arrêt opposable à l'AGS dans les limites légales et réglementaires de sa garantie.

Met les dépens de première instance et d'appel à la charge de la liquidation judiciaire de la SAS STUDIO NATIONAL ' MAINE COLOR.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre b
Numéro d'arrêt : 14/13976
Date de la décision : 03/02/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9B, arrêt n°14/13976 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-02-03;14.13976 ?
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