COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re chambre C
ARRÊT
DU 2 FÉVRIER 2017
N°2017/94
Rôle N° 16/02809
[K] [W]
C/
[L] [U]
Grosse délivrée
le :
à :
Me LADOUCE
Me SARAGA-BROSSAT
Décision déférée à la cour :
Ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance de Draguignan en date du 10 février 2016 enregistrée au répertoire général sous le n° 15/09659.
APPELANT
Monsieur [K] [W]
agissant en qualité de mandataire liquidateur de la SCI Linexis immobilier demeurant [Adresse 1]
représenté et assisté par Me Florent LADOUCE, avocat au barreau de Draguignan, plaidant
INTIMÉ
Monsieur [L] [U]
né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1]
demeurant '[Adresse 2]
représenté par Me Rachel SARAGA-BROSSAT, avocat au barreau d'Aix-en-Provence
assisté par Me Cécile ABRIAL, avocat au barreau de Saint-Etienne, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 décembre 2016 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Serge KERRAUDREN, président, et Madame Lise LEROY-GISSINGER, conseiller, chargés du rapport.
Madame Lise LEROY-GISSINGER, conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Serge KERRAUDREN, président
Mme Danielle DEMONT, conseiller
Madame Lise LEROY-GISSINGER, conseiller
Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 2 février 2017.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 2 février 2017.
Signé par Monsieur Serge KERRAUDREN, président et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Exposé du litige
Un jugement du Tribunal de grande instance de Draguignan du 21 août 2014 a condamné M. [L] [U] et Mme [I] [U] à payer à Maître [W], liquidateur de la société Linexis Immobilier dont ils étaient gérants, la somme de 1 213 530,17 euros et à une interdiction de gérer d'une durée de 5 ans. M. et Mme [U] ont interjeté appel de cette décision.
Les appelants ayant souhaité consulter le dossier de la liquidation judiciaire chez le liquidateur, celui-ci leur a fixé un rendez-vous pour cette consultation en précisant qu'il se déroulerait en présence de son propre conseil.
M. [U] a alors saisi le président du tribunal de grande instance de Draguignan d'une requête, sur le fondement des articles 812 et 813 du code de procédure civile, afin d'être autorisé à faire procéder par un huissier de justice, lors du rendez-vous, à un constat de tous les documents se trouvant dans le dossier de la liquidation judiciaire de la SCI Linexis Immobilier.
Une ordonnance du 13 novembre 2015 a accueilli cette demande qui a été signifiée à Me [W] le 23 novembre 2015. A cette date, Me [W] a refusé de recevoir M. [U].
Le 29 décembre 2015, Me [W] a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan d'une demande de rétractation de l'ordonnance, en soulignant notamment que M. [U] avait formé devant le conseiller de la mise en état, saisi de l'appel du jugement du 21 août 2014, d'un incident de communication de pièces dont il avait été débouté.
Par ordonnance du 10 février 2016, le juge des référés a rejeté la demande de rétractation, a condamné Me [W], en qualité de mandataire liquidateur de la société Linexis Immobilier, aux dépens et à verser à M. [U] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le juge a retenu que la requête permettait à M. [U] d'exercer un droit non contesté, puisqu'un rendez-vous lui avait été consenti, et que M. [U] était fondé à être accompagné par un conseil, en l'occurrence un huissier, une telle mesure ne pouvant s'apparenter à une perquisition, puisque la mission donnée à l'huissier était limitée : accompagner et assister M. [U], inventorier les pièces soumises à la consultation, sans remise de dossier ou recherche dans l'étude.
Par déclaration du 18 février 2016, Me [W], ès qualités, a formé un appel général contre cette décision.
Par ses dernières conclusions du 24 mai 2016, il demande à la cour d'infirmer l'ordonnance, de rétracter l'ordonnance sur requête et de condamner M. [U] au paiement de la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions du 19 juillet 2016, M. [U] demande à la cour de :
- déclarer irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par Me [W], et en toute hypothèse de la déclarer mal fondée,
- confirmer toutes les dispositions de l'ordonannce,
- rejeter l'intégralité des demandes de Me [W] ès qualité,
- condamner Me [W] ès qualités à payer à M. [U] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Il soutient que Me [W] ne pouvait soulever pour la première fois en cause d'appel une exception de de procédure tenant à l'incompétence au profit du premier président de la cour d'appel. Il fait valoir en outre que la requête n'était pas rattachable à la procédure en cours devant la cour d'appel.
Motifs de la décision
Sur l'exception d'incompétence :
Pour fonder la demande de rétractation de l'ordonnance, Me [W] invoque en premier lieu l'incompétence du président du tribunal de grande instance de Draguignan statuant sur requête pour ordonner la mesure. Il soutient à ce titre que seul le premier président de la cour d'appel pouvait examiner cette demande, en application de l'article 958 du code de procédure civile.
M. [U] soutient que l'exception d'incompétence est irrecevable, en application de l'article 74 du code de procédure civile, pour ne pas avoir été soulevée avant toute défense au fond.
Le juge saisi d'une demande de rétractation est investi des mêmes attributions que le juge qui l'a rendue. Dès lors, la partie qui entend contester la compétence du juge pour statuer sur la requête qui lui est présentée lui soumet une exception d'incompétence qui, conformément aux articles 73 et 74 du code de procédure civile, doit être présentée avant toute défense au fond. En l'espèce, il résulte de la lecture des conclusions à fin de rétractation déposées par Me [W] devant le juge de la rétractation et de l'ordonnance attaquée, qu'il n'avait pas contesté la compétence du président du tribunal de grande instance pour connaître de la requête, mais avait conclu que la demande de désignation d'un huissier de justice aurait dû être rejetée comme injustifiée, inutile, déshonorante et disproportionnée.
L'exception d'incompétence, soulevée pour la première fois devant la cour d'appel, n'est donc pas recevable.
Sur la demande de rétractation :
Selon l'article 493 du code de procédure civile, l'ordonnance sur requête est une décision provisoire non contradictoire dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse. Il appartient au juge, saisi en référé d'une demande de rétractation de l'ordonnance, de vérifier que les circonstances justifiaient qu'il soit dérogé au principe de la contradiction.
En l'espèce, aucune raison ne justifiait que la demande de désignation d'un huissier de justice pour inventorier le dossier de liquidation judiciaire chez le liquidateur, qui avait accepté le principe d'un rendez-vous, soit examinée en l'absence du liquidateur. Ni la requête, qui mentionne uniquement l'urgence de la désignation d'un huissier de justice, ni l'ordonnance, qui renvoie à la requête en ce qui concerne les motifs justifiant l'autorisation donnée, ne contiennent de motivation relativement à la nécessité de porter atteinte au principe de la contradiction. Les conclusions d'appel de M. [U] n'exposent pas davantage de motif qui aurait justifié qu'il soit statué sur la demande de désignation d'un huissier de justice, hors la présence du liquidateur. Notamment, ne constitue pas un tel motif 'l'absence de retour de Me [W] à l'issue du rendez-vous du 23 novembre 2016".
Dans ces conditions l'ordonnance sur requête du 13 novembre 2015 sera rétractée.
PAR CES MOTIFS
La cour,
- Infirme l'ordonnance en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
- Déclare irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par Maître [W],
- Rétracte l'ordonnance rendue sur requête par le président du Tribunal de grande instance de Draguignan le 13 novembre 2015, au profit de M. [U],
- Condamne M. [U] à verser à Maître [W], en qualité de liquidateur de la société Linexis immobilier, la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Rejette la demande présentée sur le même fondement par M. [U],
- Condamne M. [U] aux dépens qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier, Le président,