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27/01/2017 | FRANCE | N°15/06833

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 27 janvier 2017, 15/06833


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 27 JANVIER 2017



N°2017/57

CB













Rôle N° 15/06833







[R] [L]





C/



SARL COMETRA









































Grosse délivrée le :

à :



Me Elodie GOZZO, avocat au barreau de TOULON



Me Olivier SI

NELLE, avocat au barreau de TOULON



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section I - en date du 10 Mars 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 13/2482.





APPELANT



Monsieur [R] [L], demeurant [Adresse 1]



repré...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 27 JANVIER 2017

N°2017/57

CB

Rôle N° 15/06833

[R] [L]

C/

SARL COMETRA

Grosse délivrée le :

à :

Me Elodie GOZZO, avocat au barreau de TOULON

Me Olivier SINELLE, avocat au barreau de TOULON

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section I - en date du 10 Mars 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 13/2482.

APPELANT

Monsieur [R] [L], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Elodie GOZZO, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

SARL COMETRA, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Olivier SINELLE, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 13 Décembre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Chantal BARON, Président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Chantal BARON, Présidente de chambre

Monsieur Thierry CABALE, Conseiller

Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Janvier 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Janvier 2017

Signé par Madame Chantal BARON, Présidente de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par jugement du conseil des prud'hommes de Toulon du 10 mars 2015, notifié aux parties le 13 mars 2015, la juridiction a jugé qu'était fondé sur une cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé par lettre du 17 février 2014 par son employeur, la SARL Cometra, à l'encontre de [R] [L], qui exerçait dans l'entreprise, par contrat à durée indéterminée conclu le 16 janvier 2013, les fonctions de maçon.

La décision a rejeté toutes les demandes en paiement présentées par [R] [L].

Par acte du 9 avril 2015, dans le délai légal et par déclaration régulière en la forme, le salarié a régulièrement relevé appel général de la décision.

[R] [L] soutient,

par conclusions déposées le jour de l'audience, visées par le greffe, développées oralement et auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions :

' qu'il s'est trouvé en arrêt de travail pour maladie du 28 juin au 13 septembre 2013, puis de nouveau le 25 septembre 2013, jusqu'au 16 décembre 2013,

' qu'ayant été déclaré apte à la reprise par le médecin du travail, le 17 décembre 2013, il s'est présenté sur son poste de travail les 18 et 19 décembre pour reprendre son emploi,

' que l'employeur lui a indiqué qu'il devait partir, procédant ainsi à un licenciement verbal, et nul puisque fondé sur l'état de santé du salarié, ou à tout le moins dépourvu de cause réelle et sérieuse

' que c'est seulement par lettre du 17 février 2014 qu'il a été licencié pour cause réelle et sérieuse, après l'engagement d'une procédure de licenciement par lettre du 21 janvier 2014 le convoquant à un entretien préalable au licenciement fixé au 6 février 2014,

' qu'il a effectué des heures supplémentaires qui ne lui ont jamais été réglées,

' qu'en s'abstenant de faire procéder à une visite de reprise, après le premier arrêt de travail se terminant le 13 septembre 2013, l'employeur a manqué à son obligation de résultat, lui occasionnant ainsi un préjudice par la reprise prématurée de son emploi, qui a causé un nouvel arrêt de travail à compter du 25 septembre 2013,

' que l'attestation Pôle emploi mentionnait un licenciement pour faute grave et fixait la fin du contrat au 18 avril 2013, alors que le licenciement avait été prononcé pour cause réelle et sérieuse, avec une fin de contrat au 18 mars 2013 ; que ces attestations erronées, et la rectification tardive, le 7 novembre 2014, de ce document, lui ont causé un préjudice justifiant l'allocation de dommages-intérêts.

Le salarié demande à la Cour d'infirmer la décision des premiers juges dans toutes ses dispositions et de lui allouer en définitive paiement des sommes de :

-8581,50 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

-1430,25 euros à titre d'indemnité de préavis,

-143,02 euros à titre de rappel de congés payés sur préavis,

-2142,42 euros à titre d'heures supplémentaires,

-214,24 euros au titre des congés payés sur heures supplémentaires,

-500 € à titre de dommages-intérêts pour défaut de visite médicale de reprise,

- 500 € à titre de dommages-intérêts pour remise d'une attestation Pôle emploi non conforme,

outre 1200 euros représentant ses frais irrépétibles sur la base de l'article 700 du code de procédure civile.

[R] [L] sollicite encore la remise d'une attestation Pôle emploi, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

La SARL Cometra réplique,

par conclusions déposées le jour de l'audience, visées par le greffe, développées oralement et auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions :

' que [R] [L] avait abandonné son poste depuis le 17 décembre 2013 ; qu'il a été mis en demeure par lettre du 20 décembre 2013 de justifier de son absence, puis licencié, le 17 février 2014, après une procédure régulière, pour absence injustifiée et abandon de poste, aucun licenciement verbal n'ayant été prononcé à son encontre,

' qu'il n'établit nullement avoir réalisé les heures supplémentaires qu'il allègue, les témoignages produits ayant été établis antérieurement à son embauche,

' qu'il n'établit pas non plus la preuve du préjudice résultant de l'absence de visite de reprise après le 16 septembre 2013,

' que l'attestation Pôle emploi, qui comportait effectivement une erreur, a été rectifiée spontanément par l'employeur, qui a tenu le document à la disposition du salarié à compter du 29 avril 2014, date de la lettre l'avisant de cette rectification, aucun préjudice n'étant là encore établi.

L'employeur demande donc à la Cour de confirmer la décision des premiers juges dans toutes ses dispositions, de débouter [R] [L] de toutes ses demandes en paiement et de lui allouer en définitive le paiement des sommes de 5000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et de 3000 euros représentant ses frais irrépétibles sur la base de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'existence d'un licenciement verbal

En droit, est nécessairement sans cause réelle et sérieuse, puisque non motivé, le licenciement verbal.

En l'espèce, [R] [L] produit deux lettres recommandées adressées à l'employeur, les 18 et 19 décembre 2013, indiquant, pour la première : « Je me suis présenté ce matin au dépôt pour reprendre le travail. Vous m'avez demandé de signer un papier comme quoi je sortais de l'entreprise à la fin du mois, j'ai refusé. Vous m'avez dit de dégager du dépôt et de rentrer chez moi car vous n'aviez plus besoin de moi. Je vous rappelle que vous devez me donner du travail, vous n'avez pas le droit de me dire de rentrer chez moi sinon vous devez me licencier. Je suis allé à l'inspection du travail ce matin en partant du dépôt, ils m'ont dit que vous n'aviez pas le droit de faire ça. ». La seconde lettre du 19 décembre est rédigée de façon presque identique.

[R] [L] produit également une main courante déposée le 19 décembre 2013 au commissariat de police de [Localité 1], par laquelle il a indiqué s'être présenté sur son lieu de travail les 18 et 19 décembre, et s'être vu signifier l'ordre de rentrer chez lui, en présence, le 19 décembre, d'un témoin, dont il indique le nom. Il produit en outre l'attestation régulière de ce témoin, M. [Y] [I], datée du 19 décembre 2013, indiquant : « Le matin je me suis présenté avec Monsieur [R] [L] sur son lieu de travail. Nous avons rencontré patron qui lui a dit : "qu'est-ce que tu fais là, dégage, je ne te veux plus". »

En l'état de ces pièces, et surtout de l'attestation parfaitement régulière, qui ne fait l'objet d'aucune procédure de faux, l'existence d'un licenciement verbal, nécessairement infondé, est établie, peu important la procédure de licenciement engagée postérieurement.

En droit, il résulte de la combinaison des articles L1235-2 et 1235-5 alinéa 2 du code du travail que, lorsque le licenciement est intervenu sans que ne soit respectée la procédure relative à l'assistance du salarié par un conseiller, la sanction prévue par l'article L1235-2, instituant une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire, est applicable aux salariés ayant moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise, qu'il s'agisse ou non d'un licenciement pour une cause réelle et sérieuse. Outre cette indemnité, le salarié a droit à la réparation du préjudice résultant de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application de l'article L1235-5 alinéa 1du même code.

En l'espèce, [R] [L] ne réclame qu'une seule somme réparant les deux préjudices. Le montant alloué indemnisera donc à la fois le préjudice subi du fait du licenciement infondé et celui résultant de l'irrégularité de la procédure de licenciement.

[R] [L] étant âgé de 33 ans au jour du licenciement, ayant une année d'ancienneté et percevant un salaire mensuel brut de 1456,03 euros, ne justifiant pas avoir subi une période de chômage, il convient d'allouer au salarié, sur le fondement précité, la somme de 3000 euros à titre d'indemnité pour le licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse.

Sur la demande en paiement d'indemnité de préavis

Le licenciement étant infondé, il convient de condamner à ce titre La SARL Cometra à verser à [R] [L] la somme sollicitée et non autrement contestée de 1430,25 euros à titre d'indemnité de préavis, outre la somme de 143,02 euros à titre de congés payés sur indemnité de préavis

Sur la demande en paiement d'heures supplémentaires

En droit, l'article L3171-4 du Code du travail dispose qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, le juge formant sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge tous éléments de nature à étayer sa demande, ces éléments devant être suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en apportant, le cas échéant, la preuve contraire.

En l'espèce, [R] [L] produit plusieurs attestations qui se contentent d'indiquer les horaires pratiqués dans l'entreprise, sans viser en aucune façon ceux effectués par le salarié. Au surplus, toutes les attestations sont établies à une date antérieure à l'embauche du salarié, et ne sauraient donc rien établir sur les horaires effectivement réalisés par celui-ci.

Il convient donc de débouter [R] [L] de sa demande en paiement d'heures supplémentaires.

Sur la demande en remise de documents

Il convient de condamner l'employeur à délivrer à [R] [L] l'attestation Pôle emploi, rectifiée conformément aux énonciations du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur la demande en paiement de sommes à titre de dommages-intérêts pour remise d'une attestation Pôle emploi non conforme

S'il est exact que l'attestation Pôle emploi délivrée au salarié comportait une erreur en ce sens qu'elle mentionnait un licenciement pour faute grave, [R] [L] reconnaît lui-même dans ses écritures qu'une nouvelle attestation rectifiée lui a été délivrée le 7 novembre 2014, l'employeur justifiant que cette attestation a été mise à sa disposition par lettre du 29 avril 2014. [R] [L] ne justifie d'aucun préjudice, ni résultant de la délivrance prétendument tardive de l'attestation, ni de l'erreur relevée et corrigée par la suite. En l'absence de tout préjudice, il ne saurait prétendre à dommages-intérêts.

Sur la demande en paiement de sommes à titre de dommages-intérêts pour défaut de visite médicale de reprise

[R] [L] sollicite à ce titre paiement de la somme de 500 €, du fait du défaut de visite médicale de reprise après arrêt de travail ayant pris fin le 13 septembre, en soutenant que, s'étant de nouveau trouvé en maladie à compter du 25 septembre 2013, il a, du fait de l'absence de visite médicale, perdu une chance de recouvrer la santé par une reprise prématurée du travail.

Toutefois, il ne produit aucun élément permettant d'établir un quelconque lien entre l'absence de visite médicale de reprise et le nouvel arrêt de travail, dont la cause n'est pas précisée. En l'absence de cette preuve fondant sa demande en paiement de dommages-intérêts, il doit être débouté de sa demande.

Sur les autres demandes

Chacune des parties échouant partiellement en ses prétentions, la SARL Cometra sera déboutée de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive. Il n'apparaît pas inéquitable par ailleurs de laisser à la charge de chacune d'entre elles la totalité des frais irrépétibles engagés pour la présente instance. Pour le même motif, les dépens seront partagés par moitié entre les parties.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale,

Réforme le jugement déféré et, statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension,

Dit irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement verbal prononcé le 18 décembre 2013,

Condamne La SARL Cometra à verser à [R] [L] les sommes de :

-3000 euros représentant les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-1430,25 euros à titre d'indemnité de préavis,

-143,02 euros à titre de rappel de congés payés sur préavis,

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes,

Partage par moitié entre les parties les dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 15/06833
Date de la décision : 27/01/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°15/06833 : Statue à nouveau en faisant droit à la demande en tout ou partie


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-27;15.06833 ?
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