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20/01/2017 | FRANCE | N°14/24872

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 20 janvier 2017, 14/24872


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 20 JANVIER 2017



N°2017/31

SL













Rôle N° 14/24872







[B] [O]





C/



SARL FIDELIA FORMATION





















Grosse délivrée le :

à :



Me Olivier ROMANI,

avocat au barreau

de NICE



Me Véronique MENASCE-

CHICHE,

avocat au barreau >
de PARIS





Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FREJUS - section AD - en date du 12 Décembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 13/562.





APPELANT



Monsieur [B] [O], demeur...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 20 JANVIER 2017

N°2017/31

SL

Rôle N° 14/24872

[B] [O]

C/

SARL FIDELIA FORMATION

Grosse délivrée le :

à :

Me Olivier ROMANI,

avocat au barreau

de NICE

Me Véronique MENASCE-

CHICHE,

avocat au barreau

de PARIS

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FREJUS - section AD - en date du 12 Décembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 13/562.

APPELANT

Monsieur [B] [O], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Olivier ROMANI, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

SARL FIDELIA FORMATION, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Véronique MENASCE-CHICHE, avocat au barreau de PARIS ([Adresse 3])

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 08 Décembre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Chantal BARON, Présidente de chambre

Monsieur Thierry CABALE, Conseiller

Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Janvier 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Janvier 2017

Signé par Madame Chantal BARON, Présidente de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La S.A.R.L. FIDELIA FORMATION exerce une activité de formation continue pour adultes.

[B] [O], gérant de la société FCP FORMATION CONSEIL PATRIMOINE, a exercé une activité de consultant en formation professionnelle au travers de sa société pour le compte de la SARL FIDELIA FORMATION.

Soutenant avoir exercé son activité au profit de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION dans le cadre d'une relation salariée, [B] [O] a saisi le conseil des prud'hommes de Fréjus, qui par jugement du 12/12/2014, a débouté les parties de l'ensemble de leurs demandes ; il a condamné [B] [O] aux entiers dépens.

Aux termes d'un acte du 30/12/2014, dans le délai légal et par déclaration régulière en la forme, [B] [O] a régulièrement interjeté appel général du jugement notifié le 18/12/2014.

Par conclusions déposées le jour de l'audience, visées par le greffe, développées oralement et auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, [B] [O] demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré et de:

-constater l'existence d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION à compter du 01/01/2010,

-ordonner la régularisation par la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION des cotisations sociales dues au titre des honoraires versés au cours de la période du 01/01/2010 au 18/10/2013 à hauteur de 246 681 € et la remise de ses bulletins de salaire correspondant,

-dire et juger que la rupture du contrat de travail était dénuée de cause réelle et sérieuse,

- condamner la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION au paiement des sommes suivantes:

-7500 € nets au titre de l'indemnité de préavis,

-750 € nets au titre des congés payés sur le préavis,

-2875 € nets au titre de l'indemnité de licenciement,

-90 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,

-22 500 € nets pour l'indemnité de travail dissimulé,

-3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner sous astreinte de 100 € par jour de retard avec faculté de liquidation au conseil des prud'hommes la délivrance des documents suivants: le certificat de travail, l'attestation pour l'ASSEDIC (sic), les bulletins de paye,

-dire que les créances salariales porteront intérêts au taux légal capitalisé à compter de la demande en justice,

- ordonner l'exécution provisoire nonobstant appel.

A l'appui de ses prétentions, [B] [O] expose que dans le cadre de son activité de formateur en gestion de patrimoine , il a débuté en 2004 une collaboration avec la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION au travers de sociétés, notamment la société FCP FORMATION CONSEIL PATRIMOINE à compter du 01/01/2010 dont il était le gérant salarié.

[B] [O] soutient avoir exécuté ses prestations pour le compte de la SARL FIDELIA FORMATION dans le cadre d'un contrat de travail dans la mesure où:

-il a exclusivement travaillé pour le compte de l'intimée à compter du 01/01/2010, ses interventions représentant plus de 80% de son chiffre d'affaire et le nombre de journées de formation dispensées ne lui permettant pas de travailler pour le compte d'une autre structure,

-il n'a disposé d'aucune clientèle propre, ses seuls clients étant ceux de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION,

-il a travaillé dans le cadre d'un lien de subordination : la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION lui a transmis les plannings en fixant ses dates, ses lieux, ses heures d'intervention et la catégorie des personnes devant recevoir la formation qu'elle modifiait à sa seule initiative,

- elle a déterminé le contenu des formations qu'il a dispensées, ne disposant en la matière d'aucune autonomie quant aux méthodes,

-elle lui a remis des fiches de remboursement de frais et des feuilles de présence qu'il avait l'obligation d'utiliser,

-la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION a déterminé unilatéralement les modalités de sa rémunération et de remboursement de ses frais.

Suite à son refus de signer un contrat de sous-traitance proposé par la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION, cette dernière lui a notifié par lettre du 14/10/2013 la rupture de leur relation contractuelle qui doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il sollicite également la condamnation de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION au paiement d'une somme de 90 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, soulignant à l'appui de sa demande l'absence de respect d'une procédure de licenciement et son absence d'indemnisation par Pôle Emploi.

La S.A.R.L. FIDELIA FORMATION s'étant volontairement soustraite à ses obligations de déclaration unique d'embauche, de paiement des cotisations sociales et de remise des bulletins de salaire, [B] [O] sollicite sa condamnation au paiement d'une indemnité pour travail dissimulé.

S'agissant de la demande reconventionnelle de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION, [B] [O] conteste être l'auteur du message adressé le 20/01/2014 à monsieur [H]. Il ajoute que seule l'intimée a procédé à la rupture brutale de leurs relations de travail.

Par conclusions déposées le jour de l'audience, visées par le greffe, développées oralement et auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, S.A.R.L. FIDELIA FORMATION demande à la Cour de confirmer le jugement déféré et elle sollicite à titre reconventionnel la condamnation de [B] [O] au paiement des sommes suivantes:

-33 815 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice résultant de la rupture brutale de la relation de travail,

-5000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

-5000 € au titre de l'amende civile,

-5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

A titre subsidiaire, elle demande de dire que [B] [O] ne rapporte pas la preuve d'un salaire mensuel net reconstitué, de le débouter par conséquent de toutes ses demandes et de le condamner au paiement d'une somme de 7500 € au titre du préjudice résultant de la rupture brutale de la relation de travail.

A titre très subsidiaire, elle demande de dire que la demande de travail dissimulé n'est pas fondée et de débouter par conséquent [B] [O] de l'ensemble de ses demandes.

A l'appui de ses prétentions, la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION soutient que [B] [O] est un consultant externe indépendant soumis à la chartre consultant; il a exercé son activité dans le cadre d'une structure juridique indépendante.

Elle rappelle qu'il existe une présomption d'absence de contrat de travail entre les dirigeants des personnes morales et les donneurs d'ouvrage en vertu de l'article L 8221-6 du code du travail .

Elle soutient que les sociétés dont [B] [O] était le dirigeant sont intervenues à sa demande pour exécuter librement et de manière indépendante des prestations sans exclusivité.

Elle souligne l'absence de preuve d'un lien de subordination, soutenant que les pièces produites par [B] [O] établissent au contraire l'absence d'un pouvoir de contrôle sur l'appelant qui était totalement libre et indépendant dans ses actions de formation, n'ayant mis à sa disposition que des supports qu'il pouvait utiliser.

La S.A.R.L. FIDELIA FORMATION affirme avoir demandé à ses consultants de baisser leur honoraires à compter de janvier 2013 en raison d'un déficit important sur l'exercice 2012-2013 résultant de la crise économique et de la concurrence importante affectant son secteur d'activité.

Elle soutient que les consultants n'étaient liés par aucune exclusivité, soulignant que [B] [O] travaillait en moyenne 6 à 8 jours maximum par mois pour ses clients . Elle ajoute que sa part dans le chiffre d'affaire de l'appelant n'est pas de nature à établir la preuve d'une relation de dépendance économique.

A titre subsidiaire, elle s'oppose aux demandes de [B] [O] en l'absence de production de factures d'intervention attestant d'un salaire net mensuel reconstitué de 3750 €.

Elle conclut par ailleurs au rejet de la demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé aux motifs que [B] [O] ne justifie pas d'un élément intentionnel.

A titre reconventionnel , la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION soutient que [B] [O] a rompu brutalement leurs relations commerciales sans respecter de préavis, ce qu'il a admis en ne répondant pas à sa lettre du 04/10/2013.

Elle estime enfin la procédure abusive , cette dernière étant intervenue après 9 ans de collaboration alors que [B] [O] a travaillé au travers de sociétés qu'il a constituées. Elle ajoute que [B] [O] a adressé à un de ses dirigeants un message méprisant.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'existence d'un contrat de travail

[B] [O] a exercé son activité de consultant au travers de la société F.C.P. FORMATION CONSEIL PATRIMOINE à compter du 01/01/2010 auprès de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION.

L'article L.8221-6 du code du travail pose une présomption légale de non salariat pour les personnes immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des URSSAF comme travailleurs non salariés.

Il résulte par ailleurs de l'article L1221-1 du code du travail que l'existence d'une relation salariée ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donné à leurs conventions, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité professionnelle.

Elle repose sur un lien de subordination caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

En l'absence d'apparence d'un contrat de travail, c'est à celui qui invoque son existence d' en établir la preuve.

S'agissant d'une présomption simple, elle peut être renversée par la preuve que l'intéressé était lié par un contrat de travail .

[B] [O] soutient ne pas avoir de clientèle propre et que plus de 80% du chiffre d'affaire de sa société résultent des honoraires versés par la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION.

Aux termes d'un tableau, [B] [O] a récapitulé le nombre de jours de formation qu'il a dispensés pour les clients de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION : 83 jours en 2010, 88,5 jours en 2011, 116,75 jours en 2012 et 81 jours en 2013.

Si ces formations ont ainsi été dispensées sur un nombre limité de jours dans l'année, son expert comptable, monsieur [V], certifie toutefois que la part du chiffre d'affaire hors taxes de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION dans le chiffre d'affaire total de la société F.C.P. FORMATION CONSEIL PATRIMOINE de [B] [O] était respectivement de :

-89,78 % en 2010 soit la somme de 53 120 €,

- 90,55% en 2011 soit la somme de 63 230 €,

- 97,24 % en 2012 soit la somme de 58 205 €,

- 97,01% en 2013 soit la somme de 53 450 €.

La S.A.R.L. FIDELIA FORMATION soulève l'absence de conformité de l'attestation de monsieur [V] aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile.

L'article 202 du code de procédure civile dispose:'L'attestation contient la relation des faits auxquels son auteur a assisté ou qu'il a personnellement constatés.

Elle mentionne les nom, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur ainsi que, s'il y a lieu, son lien de parenté ou d'alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d'intérêts avec elles.

Elle indique en outre qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur a connaissance qu'une fausse attestation de sa part l'expose à des sanctions pénales.

L'attestation est écrite, datée et signée de la main de son auteur. Celui-ci doit lui annexer, en original ou en photocopie, tout document officiel justifiant de son identité et comportant sa signature.'

Il est exact qu'aucune pièce d'identité de monsieur [V] n'est jointe à son attestation.

Les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile ne sont toutefois pas prescrites à

peine de nullité.

L'attestation litigieuse, régulièrement communiquée, ne peut être écartée des débats au seul motif qu'elle ne répond pas en la forme aux prescriptions légales, le juge devant seulement en apprécier la valeur probante.

Son auteur est clairement identifiable et elle ne comporte aucun indice de nature à la mettre en doute.

L'attestation de l'expert comptable est par ailleurs corroborée par les exercices comptables de 2010 à 2013 de la société F.C.P. FORMATION CONSEIL PATRIMOINE attestant des chiffres d'affaire et par toutes les notes d'honoraires de [B] [O] de 2010 à 2013 qui s'élèvent aux sommes de 53 120 € en 2010, de 63 230 € en 2011, de 71 455 € en 2012 et de 41 040 € en 2013.

Il n'y a pas lieu par conséquent de l'écarter des débats.

Ces éléments établissent ainsi que la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION était le principal client de la société de [B] [O] dont il tirait l'essentiel de ses revenus.

S'agissant de la rémunération de [B] [O], la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION a unilatéralement décidé de réduire le montant des honoraires des consultants de 700 à 650 € en raison de ses difficultés financières rencontrées en 2012 résultant notamment d'un arrêt des commandes des clients à l'été 2012 entraînant une perte de formation de 150 à 200 jours, ainsi qu'en atteste le compte rendu de la réunion du 17/12/2012.

La SARL FIDELIA FORMATION n'a admis aucune contestation possible de sa décision de fixer la rémunération de [B] [O] ainsi qu'en témoigne le courrier électronique de son gérant en date du 21/12/2012 qui précise qu'il n'y a pas à accepter ou refuser les décisions de la direction mais simplement de les acter, rappelant que les consultants sont libres de continuer ou de stopper leur partenariat .

[B] [O] justifie qu'il disposait d'une carte de visite mentionnant sa qualité de consultant de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION ainsi qu'une carte lui permettant de stationner son véhicule dans les aéroports afin de se rendre sur les lieux des formations.

Il résulte par ailleurs des pièces versées aux débats que la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION a établi les plannings des interventions de [B] [O] en fixant le lieu de ses interventions et les horaires.

Dans un courrier électronique du 06/04/2012, la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION a d'ailleurs indiqué aux consultants que pour faciliter le pointage de leur plannings, ses services leur enverraient un courrier électronique tous les vendredis entre 14 et 15h00 mentionnant les dates des formations des deux semaines suivantes; elle leur a demandé de pointer leurs interventions à chaque envoi et d'intervenir le lundi après de ses services pour toutes précisions.

La S.A.R.L. FIDELIA FORMATION a également procédé d'office à des changements des plannings de [B] [O] avant même de le consulter et de lui demander si cela lui convenait.

S'il est exact que [B] [O] a indiqué à deux reprises ses indisponibilités pour des formations programmées par la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION, il convient de souligner le ton péremptoire de [H] [E], gérant de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION, dans son courrier électronique du 23/11/2012, qui a programmé pour [B] [O] quatre dates de formation dans le sud ouest en lui écrivant:'je n'ai absolument pas les moyens que tu refuses (j'insiste!)'.

La S.A.R.L. FIDELIA FORMATION a par ailleurs contrôlé l'exécution et la qualité du travail de [B] [O] dans la mesure où elle a remis aux participants aux formations une fiche d'évaluation aux termes laquelle il leur était demandé de noter les méthodes d'animation, si l'animateur leur était apparu compétent techniquement, s'ils avaient apprécié les compétences pédagogiques et d'animation du formateur et s'ils avaient pu lui poser toutes les questions qu'ils souhaitaient .

Il ressort d'un courrier électronique du 01/03/2011 du gérant de la SARL FIDELIA FORMATION qu'il existait des dépouillement complets des évaluations 'loi de finance 2011" par formateurs et par lieu de formation.

Dans un autre courrier électronique du 14/03/2011, [H] [E] demande expressément à chacun des consultants dont [B] [O] de faire un compte rendu sur le niveau des participants à une formation à la demande de leur employeur AXA.

Ces éléments établissent ainsi l'existence d'un contrôle de la SARL FIDELIA FORMATION sur le travail de [B] [O].

Il résulte par ailleurs des pièces versées aux débats que la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION a organisé en septembre 2011 une réunion avec les consultants pour homogénéiser des pratiques d'animation pour des formations pour le compte d'AXA en demandant d'insérer des modules et une réunion pour présenter des modalités pédagogiques pour un parcours en insistant sur la nécessité des consultants d'y participer .

Dans un courrier électronique du 14/04/2010, la S.A.R.L. FIDELIA a transmis à [B] [O] un support animateur ainsi que des cas pratiques pour une formation sur les régimes matrimoniaux et les successions en lui demandant ses éventuels commentaires, afin d'envisager leur reprographie, tout en soulignant que cette documentation sera dans la salle de formation à son arrivée.

[B] [O] verse aux débats un exemplaire de la documentation éditée par la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION sur la fiscalité du particulier comprenant les diapositives à projeter lors du séminaire, les différents points à aborder et notamment ceux qui étaient essentiels.

Ces éléments établissent ainsi que [B] [O] a exécuté des prestations selon les modalités imposées par la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION , conformément à des plannings d'interventions qu'elle adressait régulièrement et dont elle décidait seule des dates et des lieux d'exécution, en utilisant les supports écrits de formation mis à sa disposition par la société et dont cette dernière décidait du contenu ; [B] [O] a participé à la vie de l'entreprise en collaborant également à l'élaboration de supports pédagogiques et aux réunions de présentation des documentations et des méthodes pédagogiques ; les honoraires perçus au titre des prestations qu'il a fournies à la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION ont été fixés unilatéralement en 2013 par cette dernière et représentent la quasi-totalité de ses revenus annuels et ce, dans une proportion constante depuis 2010; enfin [B] [O] a été régulièrement évalué par la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION au travers des fiches d'évaluation des formations et des demandes de compte rendu de ses formations, étant en outre souligné que le refus de [B] [O] de signer le contrat de sous-traitance, dont les obligations ont été déterminées exclusivement par la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION, et sa demande de conclusion d'un contrat de travail ont immédiatement entraîné la cessation des relations contractuelles.

Il apparaît ainsi que [B] [O] a été intégré dans un service organisé de formation professionnelle et a exercé ses fonctions sous le contrôle et la direction de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION. Le lien de subordination étant caractérisé, il convient de constater l'existence d'un contrat de travail entre [B] [O] et la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION depuis le 01/01/2010.

La S.A.R.L. FIDELIA FORMATION soutient toutefois que [B] [O] a rompu brutalement toute collaboration avec elle en octobre 2013.

Courant septembre 2013, la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION a adressé à chacun des consultants dont [B] [O] un contrat de sous-traitance .

Par courrier électronique du 29/09/2013, [B] [O] a refusé de le signer, soulignant qu'il ne correspondait pas à sa situation relevant d'un lien de subordination. Il a ainsi demandé à la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION d'examiner sa demande de conclusion d'un contrat de travail.

N'ayant pas de réponse à sa demande, [B] [O] a informé la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION par lettre du 04/10/2013 qu'il saisissait le tribunal compétent pour reconnaître sa qualité de salarié.

Par lettre du 14/10/2013, la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION lui a répondu qu'elle notait qu'il souhaitait rompre une relation d'affaire basée sur une indépendance réciproque et que cet arrêt de relation prenait fin à compter du 18/10/2013.

Il résulte de ces éléments que la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION a mis fin à la relation de travail qu'elle entretenait avec [B] [O] en raison de sa revendication du statut de salarié.

Eu égard par ailleurs au contrat de travail dont la Cour confirme l'existence, à défaut de lettre énonçant les motifs du licenciement conforme aux dispositions de l'article L.1232-6 du code du travail, le licenciement de [B] [O] est dépourvu de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à son profit au paiement des indemnités de rupture et de dommages-intérêts.

Sur la demande en paiement de l'indemnité compensatrice de préavis

[B] [O] sollicite une somme de 7500 euros net représentant 2 mois de salaires ainsi que les congés payés y afférents de 750 €, ce à quoi s'oppose la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION qui souligne l'absence de justificatif pour fixer le salaire mensuel net à la somme de 3750 €.

[B] [O] n'explicite pas les éléments qu'il a retenus pour estimer son salaire net mensuel à la somme de 3750 €.

Il ressort en revanche du dernier exercice comptable de 2013 que [B] [O] a perçu un salaire de 40 889 euros bruts en sa qualité de gérant salarié de la société F.C.P. FORMATION CONSEIL PATRIMOINE qui percevait l'intégralité de ses honoraires facturés à la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION.

Dans la mesure où la part du chiffre d'affaire hors taxes de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION dans le chiffre d'affaire total de la société F.C.P. FORMATION CONSEIL PATRIMOINE était de 97,01% en 2013, le salaire de [B] [O] provenant de son activité au profit de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION s'élève ainsi à la somme mensuelle brute de 3305,53 € (97,01% de 40 889 €).

Il convient par conséquent de fixer le salaire de [B] [O] à la somme mensuelle mensuelle brute de 3305,53 € .

Il convient par conséquent d'allouer à [B] [O] une indemnité compensatrice de préavis de 6611,06 euros bruts ainsi qu'une somme de 661,11 euros bruts au titre des congés payés y afférents.

Sur l'indemnité de licenciement

[B] [O] sollicite à ce titre une somme de 2875 euros net, indiquant qu'il a une ancienneté de 3 ans et 10 mois dans l'entreprise.

[B] [O] a demandé de constater l'existence d'un contrat de travail avec la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION à compter du 01/01/2013, demande à laquelle la Cour a fait droit.

Au jour de la rupture des relations , soit le 18/10/2013 telle qu'indiquée par la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION dans sa lettre du 14/10/2013, [B] [O] avait ainsi une ancienneté de 2 ans et 9 mois.

En vertu des articles L 1234-9 et R 1234-2 du code du travail , il convient par conséquent de fixer l'indemnité de licenciement à la somme de 1818,04 euros bruts.

Sur les dommages et intérêts pour rupture abusive

[B] [O] sollicite à ce titre la somme de 90 000 €.

Il résulte des pièces versées aux débats que la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION avait moins de 11 salariés.

[B] [O] a par conséquent droit, en application de l'article L. 1235-5 du code du travail, à une indemnité correspondant au préjudice subi .

[B] [O] justifie d'un refus de prise en charge à l'allocation de retour à l'emploi par Pôle Emploi et de sa qualité de demandeur d'emploi longue durée.

Les avis d'impositions de 2015 et 2016 attestent de son absence de revenus en 2014 et 2015, son ménage ne vivant que des salaires de sa concubine.

Compte-tenu de son âge au moment du licenciement, 38 ans, de son ancienneté , du montant du salaire retenu, de son absence de retour à l'emploi, son préjudice sera réparé par l'allocation d'une somme de 20 000 euros .

Sur le travail dissimulé

L'article L 8221-5 du code du travail, dans sa version applicable au litige, prévoit: «est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales."

L'article L 8223-1 du code du travail prévoit qu' « en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.»

Il appartient au salarié d'apporter la preuve d'une omission intentionnelle de l'employeur.

En l'espèce, [B] [O] ne produit aucun élément démontrant l'intention de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION , se contentant de souligner sa soustraction à ses obligations de déclaration unique d'embauche, de paiement des cotisations sociales et de remise des bulletins de salaire

Par conséquent, la demande d'indemnité à ce titre doit être rejetée.

Sur la demande relative aux cotisations sociales

[B] [O] demande d'ordonner la régularisation par la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION des cotisations sociales dues au titre des honoraires versés au cours de la période du 01/01/2010 au 18/10/2013 à hauteur de 246 681 € .

Aux termes de l'article L.311-2 du code de la sécurité sociale « Sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d'une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat

».[B] [O] a toutefois été salarié de la société F.C.P. FORMATION CONSEIL PATRIMOINE . Les exercices comptables de 2010 à 2013 mentionnent le paiement des cotisations maladie, vieillesse et à l'URSAFF de [B] [O] .

[B] [O] ayant été régulièrement affilié aux organismes sociaux, il convient de le débouter de cette demande.

Sur la demande reconventionnelle de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION

La S.A.R.L. FIDELIA FORMATION sollicite une somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et une amende civile de 5000 €.

A l'appui de ses prétentions, elle soutient que [B] [O] a rompu brutalement leurs relations commerciales sans respecter de préavis, ce qu'il a admis en ne répondant pas à sa lettre du 04/10/2013.

Elle estime enfin la procédure abusive , cette dernière étant intervenue après 9 ans de collaboration alors que [B] [O] a travaillé au travers de sociétés qu'il a constituées. [B] [O] a au surplus adressé à un de ses dirigeants un message méprisant.

Aux termes d'un courrier électronique du 27/06/2014, [Q] [H] qui travaille au sein de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION a reçu le message suivant depuis un téléphone portable :'tu fais la gueule mon lapin'' Tu réponds pas à mes voeux!! Profite bien de cette dernière année d'opulence. [B]'

[B] [O] justifie toutefois que son numéro de téléphone portable n'est pas celui mentionné sur le sms.

La S.A.R.L. FIDELIA FORMATION ne peut au surplus solliciter l'indemnisation d'un préjudice dont seul [Q] [H] peut se prévaloir, étant le seul destinataire de ce message.

Le droit fondamental de se défendre en justice et d'exercer une voie de recours n'a pas dégénéré en abus dès lors que ne sont mis en évidence aucune malveillance manifeste, mauvaise foi ou même légèreté blâmable.

La Cour ayant estimé que la rupture des relations résultait du fait de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION et ayant fait droit aux demandes de [B] [O], il convient de rejeter la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi qu'au paiement d'une amende civile.

Sur les autres demandes

Compte tenu des développements qui précèdent, la demande tendant à la remise de documents sociaux , à savoir le certificat de travail , l'attestation Pôle Emploi et les bulletins de salaire conformes à la présente décision est fondée et il y est fait droit dans les termes du dispositif, sans qu'il soit toutefois nécessaire d'assortir l'injonction d'une astreinte.

Les intérêts au taux légal courent à compter de la date de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation pour les créances salariales et à compter du présent arrêt pour les créances à caractère indemnitaire.

Le dossier de procédure transmis à la Cour ne comportant pas la lettre de convocation de la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION devant le bureau de conciliation, il convient de retenir la date de sa comparution, soit le 17/01/2014.

Il y aura lieu, le cas échéant, à capitalisation annuelle des intérêts dans les conditions des dispositions de l'ancien article 1154 du code civil, actuellement l'article 1343-2 dudit code.

Sur les frais irrépétibles

Il convient de condamner la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION qui succombe au paiement d'une somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les dépens

La S.A.R.L. FIDELIA FORMATION qui succombe sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale et par mise à disposition au greffe:

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Et statuant de nouveau,

Constate l'existence d'un contrat de travail entre [B] [O] et la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION à compter du 01/01/2010,

Condamne par conséquent la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION à verser à [B] [O] les sommes suivantes:

- 6611,06 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 661,11 euros bruts au titre des congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis,

-1818,04 euros bruts au titre de l'indemnité de licenciement ,

-20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Dit que les sommes produiront les intérêts au taux légal à compter du 17/01/2014 pour les créances salariales et à compter du présent arrêt pour les créances à caractère indemnitaire, avec leur capitalisation annuelle le cas échéant dans les conditions des dispositions de l'ancien article 1154 du code civil, actuellement l'article 1343-2 dudit code.

Déboute [B] [O] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé,

Déboute [B] [O] de sa demande de régularisation des cotisations sociales,

Enjoint à la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION de remettre à [B] [O] les bulletins de salaire, l'attestation Pôle Emploi et le certificat de travail rectifiés conformément à la présente décision,

Dit n'y avoir lieu d'assortir l'injonction de remise des documents sociaux d'une astreinte,

Déboute la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive et en paiement d'une amende civile,

Condamne la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION à verser à [B] [O] la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la S.A.R.L. FIDELIA FORMATION aux dépens de première instance et d'appel.

Le GREFFIERLa PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 14/24872
Date de la décision : 20/01/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°14/24872 : Statue à nouveau en faisant droit à la demande en tout ou partie


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-20;14.24872 ?
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