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12/01/2017 | FRANCE | N°16/00703

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1ère chambre c, 12 janvier 2017, 16/00703


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE



1re chambre C



ARRÊT

DU 12 JANVIER 2017



N° 2017/20













Rôle N° 16/00703







SNCF RÉSEAU





C/



LE COMITÉ D'HYGIÈNE DE SÉCURITÉ ET DES CONDITIONS DE TRAVAIL (CHSCT)





















Grosse délivrée

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à :

Me SIDER

Me HENNION
















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Ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance de [Localité 1] en date du 14 décembre 2015 enregistrée au répertoire général sous le n° 15/03560.





APPELANTE



LA SNCF RÉSEAU

dont le siège est [Adresse 1]

et encore en sa direction juridique territoriale méditerranée

d...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1re chambre C

ARRÊT

DU 12 JANVIER 2017

N° 2017/20

Rôle N° 16/00703

SNCF RÉSEAU

C/

LE COMITÉ D'HYGIÈNE DE SÉCURITÉ ET DES CONDITIONS DE TRAVAIL (CHSCT)

Grosse délivrée

le :

à :

Me SIDER

Me HENNION

Décision déférée à la cour :

Ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance de [Localité 1] en date du 14 décembre 2015 enregistrée au répertoire général sous le n° 15/03560.

APPELANTE

LA SNCF RÉSEAU

dont le siège est [Adresse 1]

et encore en sa direction juridique territoriale méditerranée

dont le siège est [Adresse 2]

prise en son établissement INFRALOG PACA

dont le siège est [Adresse 3]

représentée par Me Philippe-Laurent SIDER, avocat au barreau d'Aix-en-Provence

assistée par Me Nicolas FRANÇOIS, avocat au barreau de [Localité 1]

INTIMÉ

LE COMITÉ D'HYGIÈNE DE SÉCURITÉ ET DES CONDITIONS DE TRAVAIL (CHSCT) DE [Localité 1] et SIÈGE DE L'INFRALOG PACA

dont le siège est [Adresse 4]

représenté et assisté par Me Véronique HENNION substituée par Me Nabila CHDAILI, avocats au barreau de [Localité 1]

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 22 novembre 2016 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Danielle Demont, conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La cour était composée de :

Monsieur Serge KERRAUDREN, président

Mme Danielle DEMONT, conseiller

Madame Lise LEROY-GISSINGER, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 janvier 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 janvier 2017,

Signé par Monsieur Serge KERRAUDREN, président et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé du litige

Le 22 mai 2015 le CHSCT de l'établissement l'Infralog PACA a voté le recours à une expertise pour risque grave lié à des facteurs psychosociaux en application de l'article L 4614-12 al. 1 du code du travail et désigné le cabinet CATEIS aux fins d'y procéder.

Le cabinet CATEIS a préparé un projet de convention d'expertise d'un coût prévisionnel de 62 640€.

Par exploit en date du 31 juillet 2015 la SNCF Réseau a fait assigner en la forme des référés le CHSCT de l'établissement Infralog PACA de [Localité 1] aux fins d'obtenir l'annulation de cette délibération.

Par ordonnance de référé en date du 14 décembre 2015 le président du tribunal de grande instance de [Localité 1] statuant en la forme des référés a déclaré recevable la demande d'annulation de la délibération du 22 mai 2015 du CHSCT de l'Infralog PACA, dit que la décision d'expertise est fondée, débouté la SNCF Réseau de toutes ses demandes, l'a condamnée à régler au CHSCT la somme de 6000 € au titre des frais judiciaires nécessaires à sa défense, rejeté le surplus de la demande reconventionnelle et condamné la SNCF réseau aux dépens.

Le premier juge relève en ses motifs qu'il ressort de l'examen général des productions que plusieurs agents de l'établissement Infralog PACA se plaignent de réorganisations incessantes, d'absence de perspectives d'avenir au sein de l'établissement, de la non- reconnaissance de leur métier, de désorganisation du travail donnant lieu à des inégalités de traitement, de manque de personnel pour assurer les chantiers, de perte de savoir-faire, d'accroissement de la mobilité, de la rupture du dialogue social, d'une pression permanente de la hiérarchie pour atteindre ses objectifs ; que lors de la réunion du CHSCT du 26 mai 2015 les représentants du personnel ont constaté l'augmentation d'arrêts du travail suite au mal-être et au stress dans l'entreprise ; qu'il y a des conditions de travail dégradées pour le service CREQ ; que dans un tel contexte d'émergence de risques psychosociaux, la décision de recourir à expertise indépendante pour aider le CHSCT à remplir sa mission est bien fondée, étant observé que des risques psychosociaux accumulés peuvent être considérés comme constituant par cette accumulation même un risque grave au sens du texte susvisé ; que le fait que la SNCF réseau ait engagé une démarche d'évaluation des risques psychosociaux n'est pas de nature à empêcher ce recours à une mesure d'expertise.

L'établissement public industriel et commercial SNCF Réseau a relevé appel de cette décision le 15 janvier 2016.

Par conclusions du 23 mars 2016 il demande à la cour :

à titre principal

' de constater le caractère abusif de la délibération entreprise et l'irrégularité de la délibération, la mission confiée à l'expert n'étant pas limitée au périmètre du CHSCT de [Localité 1] et au siège d' Infralog PACA au sens de l'article L 4614-12 du code du travail ;

' d'annuler en conséquence la décision entreprise et de dire que les frais et dépens inhérents à la présente procédure resteront à la charge du CHSCT succombant ;

à titre subsidiaire

' de minimiser le montant des frais de la procédure ;

' et de condamner le CHSCT aux dépens.

Par conclusions du 3 mai 2016 le CHSCT de [Localité 1] et Siège de l'Infralog PACA demande à la cour la confirmation de l'ordonnance déférée et à titre reconventionnel, de condamner la SNCF sous astreinte de 1 000€ par jour de retard à compter de la décision à intervenir d'avoir à laisser les opérations d'expertise se dérouler et de condamner la SNCF à lui verser la somme de 1 800€ au titre des frais judiciaires nécessaires à sa défense dans le cadre de la procédure d'appel.

La cour renvoie aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties.

Motifs

Attendu que le CHSCT de [Localité 1] et Siège de l'Infralog PACA expose au soutien de la délibération querellée que l'Infralog PACA est en charge de la logistique des infrastructures de la SNCF ; que lors de la réunion extraordinaire du 22 mai 2015, le CHSCT a voté la résolution suivante :

« Dans un contexte de changements organisationnels menés plusieurs années sur le périmètre de la région PACA, il apparaît des difficultés de mise en 'uvre pas toujours conformes au projet qui n'avait été présenté ou des inquiétudes fortes quant à des projets récents (ex. modification des Unités d'affectation) ou même futurs ( exemple rattachement de l'Infralog PACA à [Localité 2]).

Dans un même temps le contexte national est susceptible d'attiser les inquiétudes dont les membres élus du CHSCT ont déjà fait part. En effet la réforme ferroviaire va avoir des impacts qui ne sont pas encore évalués.

Par ailleurs l'organisation de la gestion du personnel fait apparaître l'arrivée d'agents d'autres établissements alors que 'des agents de notre propre établissement n'ont pas de travail'.

Enfin les dégradations des relations qui apparaissent sont autant de signaux d'alerte que les membres du CHSCT tentent de faire entendre, leurs origines ont pour beaucoup des situations non régulées (non-application des accords, flou organisationnel, déni des difficultés'). Après de multiples échanges sur toutes ces difficultés, le CHSCT décide le 6 février 2015 de mener une enquête sur les risques psychosociaux. (...)

Le CHSCT décide de recourir un expert agréé afin de l'aider à appréhender, identifier, et évaluer la situation et les risques actuels, ceci sur le périmètre de leur CHSCT » ; que le CHSCT ajoute dans ses écritures que la situation de souffrance au travail en raison de difficultés concrètes d'organisation, à l'origine de tensions et de répercussions négatives sur les conditions de travail de certains salariés dans un contexte de réorganisation des services, elle-même génératrice de stress pour les professionnels concernés, constitue un risque grave au sens de l'article L 4614-12 du code du travail ; que le CHSCT de [Localité 1] et Siège a été contraint de voter cette expertise pour risques psychosociaux ayant identifié les facteurs de risques suivants : les inquiétudes et l'instabilité professionnelle inhérente aux restructurations, la désorganisation du service CREQ, la surcharge et la sous-charge de travail des agents, le manque d'effectifs, les discriminations ou inégalités de notation et d'accès aux qualifications et les arrêts de travail ; que le 3 août 2015 le directeur de l'Infralog PACA pour calmer les esprits s'est dit lui-même 'conscient de l'instabilité créée depuis juin 2013 au sein de l'encadrement Infralog' et décidé 'd'acter pour deux ans des 5 structures d'établissement Infralog' ;

Mais attendu que la SNCF Réseau répond exactement que les éléments invoqués, tels les inquiétudes fortes ou le contexte national de la réforme ferroviaire, ne sont pas propres à l'Infralog [Localité 1] et Siège, et qu'ils pourraient être éventuellement débattus dans le cadre de la notion de « projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail » au sens du 2° de l'article 4614-12 du code du travail, alors que le CHSCT s'est lui-même placé dans le cadre du 1° de cet article visant la notion de «risque grave constaté dans l'établissement » ;

Attendu que le CHSCT produit par ailleurs les attestations de membres du personnel de l'entreprise 'stressés' ou placés en arrêts-maladie en imputant sans preuve leur pathologie à un manque de concertation ou aux réorganisations en cours, et a fortiori sans rapporter la preuve d'un lien de causalité avec un risque grave précis constaté dans l'établissement;

Attendu que le CHSCT de [Localité 1] et Siège de l'Infralog PACA ne décrit aucun risque grave précis et actuel au sens de l'article 4614-12 du code du travail ;

Attendu que le contenu de la mission confiée par le CHSCT à l'expert est révélateur à cet égard, puisque celle-ci consiste à:

« * évaluer l'exposition aux risques psychosociaux du personnel et les principaux facteurs de risques,

* apprécier l'impact de l'exposition sur la santé des salariés,

* aider le CHSCT à avancer des propositions de prévention de ces risques professionnels et des pistes d'amélioration des conditions de travail. » ;

Attendu que l'expertise vise donc en réalité à identifier un risque grave, alors qu'une expertise ne peut pas avoir pour finalité d'établir ce qui pourrait la justifier ;

Attendu que le CHSCT de [Localité 1] et Siège de l'Infralog PACA échoue ainsi à rapporter la preuve qui lui incombe de l'existence d'un péril actuel, objectivement et concrètement constaté par un ensemble de facteurs pouvant nuire à la santé physique et/ou morale des salariés dans le périmètre de l'établissement considéré;

Attendu que l'ordonnance déférée qui a confirmé la décision d'expertise doit être réformée ; qu'il s'ensuit le rejet de la demande reconventionnelle subséquente du CHSCT ;

Et attendu que le CHSCT de [Localité 1] et Siège de l'Infralog PACA ne disposant que d'une personnalité processuelle et d'aucun budget, l'employeur doit supporter les frais d'une défense à sa procédure de contestation, notamment les frais et honoraires de l'avocat du CHSCT, soit 7 800€ au total (6 000€ en première instance et 1 800€ en cause d'appel) sauf abus, lequel ne peut pas être retenu, le CHSCT ayant obtenu gain de cause devant le premier juge ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et ajoutant

Annule la délibération du 22 mai 2015 du CHSCT de l'Infralog PACA ayant décidé de recourir à une expertise et ayant désigné le cabinet CATEIS,

Condamne la société SNCF Réseau à prendre en charge les frais et honoraires engagés par le CHSCT pour assurer sa défense à concurrence de la somme totale de 7 800€ , ainsi qu'aux dépens.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1ère chambre c
Numéro d'arrêt : 16/00703
Date de la décision : 12/01/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1C, arrêt n°16/00703 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-12;16.00703 ?
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