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30/11/2016 | FRANCE | N°15/04706

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 6e chambre d, 30 novembre 2016, 15/04706


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

6e Chambre D



ARRÊT AU FOND

DU 30 NOVEMBRE 2016

F.T.

N° 2016/276













Rôle N° 15/04706







[I] [P] veuve [U]

[Q] [U]





C/



[R] [U]

[Y] [U]





















Grosse délivrée

le :

à :



SCP LATIL PENARROYA-LATIL





SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH







©cision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de TARASCON en date du 04 Décembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 14/326.





APPELANTS



Madame [I] [P] veuve [U]

née le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 1] (Côte d'Ivoire)

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 3]



représen...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

6e Chambre D

ARRÊT AU FOND

DU 30 NOVEMBRE 2016

F.T.

N° 2016/276

Rôle N° 15/04706

[I] [P] veuve [U]

[Q] [U]

C/

[R] [U]

[Y] [U]

Grosse délivrée

le :

à :

SCP LATIL PENARROYA-LATIL

SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TARASCON en date du 04 Décembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 14/326.

APPELANTS

Madame [I] [P] veuve [U]

née le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 1] (Côte d'Ivoire)

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Jérôme LATIL de la SCP LATIL PENARROYA-LATIL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée par Me Sylvie JOSSERAND, avocat plaidant au barreau de NÎMES.

Monsieur [Q] [U]

né le [Date naissance 1] 1990 à [Localité 3]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Jérôme LATIL de la SCP LATIL PENARROYA-LATIL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée par Me Sylvie JOSSERAND, avocat plaidant au barreau de NÎMES.

INTIMES

Monsieur [R] [U]

né le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 3],

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté par Me Véronique VALLS-MACH, avocat plaidant au barreau de PERPIGNAN.

Monsieur [Y] [U]

né le [Date naissance 4] 1967 à [Localité 3],

demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté par Me Véronique VALLS-MACH, avocat plaidant au barreau de PERPIGNAN.

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 09 Novembre 2016 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme Florence TESSIER, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente

Mme Florence TESSIER, Conseiller

Mme Pascale POCHIC, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Novembre 2016

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Novembre 2016,

Signé par Mme Florence TESSIER, Conseiller pour le Président empêché et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

[X] [U] et Madame [I] [P] se sont mariés le [Date mariage 1] 1983 à [Localité 6], sous le régime de la participation aux acquêts, puis ont procédé au changement de leur régime matrimonial en adoptant le régime de la séparation de biens, avec société d'acquêts, accompagné d'une clause d'attribution intégrale des acquêts au conjoint survivant selon acte authentique du 19 juillet 2000, changement homologué suivant jugement du tribunal de grande instance de Tarascon en date du 12 janvier 2001.

[X] [U] est décédé à [Localité 3] le [Date décès 1] 2007, laissant pour recueillir sa succession :

-son épouse : Madame [I] [P], qui a opté pour un quart en pleine propriété et trois quarts en usufruit,

-ses deux enfants issus de sa première union avec Madame [S] [N] : Messieurs [R] et [Y] [U],

-son fils issu de sa seconde union avec le de cujus : Monsieur [Q] [U].

Par acte d'huissier en date du 2 juin 2010, Messieurs [R] [U] et [Y] [U] ont fait assigner leurs cohéritiers devant le tribunal de grande instance de Tarascon aux fins d'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [X] [U], avec instauration préalable d'une mesure d'expertise judiciaire.

Par jugement en date du 30 mai 2013, le tribunal de grande instance de Tarascon a, avant dire droit au fond, principalement, ordonné la réouverture des débats afin que les demandeurs apportent toutes précisions utiles quant à la finalité de leurs prétentions, le champ précis de mission ainsi que la spécialité des experts devant être éventuellement désignés sur les points du projet de la mission visée à leurs écritures.

Par jugement en date du 4 décembre 2014, le même tribunal a, avant dire droit, ordonné une mesure d'expertise et a désigné pour y procéder Madame Pascale NAVARRO, avec pour mission de :

-entendre les parties et tous sachants,

-procéder à la description de l'actif et du passif de la succession de [X] [U],

-se faire communiquer par les parties et par les tiers, y compris les services publics et les officiers ministériels, tous documents nécessaires à l'accomplissement de sa mission et plus particulièrement, se faire communiquer tous documents utiles auprès des établissements financiers auprès desquels [X] [U] détenait des comptes,

-à cet effet, interroger la sous-préfecture d'[Localité 2] et la préfecture d'[Localité 2] afin d'obtenir communication du certification d'immatriculation de la moto de marque BMW type R immatriculée [Immatriculation 1] ainsi que la délivrance de la licence de monitrice auto-école de Madame [I] [P] veuve [U],

-à cet effet, interroger l'office notarial de Maître [F] [D], [M] [B], [H] [K], notaires associés à [Localité 3] ainsi que l'office notarial de Maître [A] [O],

-à cet effet, préalablement, procéder à l'interrogation du fichier central des comptes bancaires,

-procéder à l'étude de tout mouvement de fonds afin de déterminer l'existence éventuelle de dons manuels au profit de certains héritiers sur une période de dix ans précédant le décès du de cujus et rechercher ce qu'il est advenu des soldes bancaires existant au jour du décès,

-procéder à l'interrogation des organismes auprès desquels le défunt aurait souscrit des assurances-vie,

-indiquer pour chacun des contrats souscrits le bénéficiaire du capital,

-indiquer le montant des primes mensuelles, trimestrielles ou annuelles versées sur ces contrats par [X] [U],

-déterminer la proportion du montant de ces primes dans les revenus perçus par [X] [U] contemporains aux versements,

-procéder aux vérifications pour chacun des contrats d'assurances-vie à partir de la date de souscription jusqu'à la date de clôture ou du décès du de cujus,

-donner au tribunal tous éléments lui permettant d'apprécier l'existence d'un éventuel recel successoral sur des appareils photos de marque Leica, sur une moto de marque BMW, sur une collection d'armes et en déterminer la valeur,

-déterminer la valeur réelle et actuelle de l'immeuble sis [Adresse 3],

-déterminer la provenance des fonds ayant permis l'acquisition de ce bien le 29 mai 1985 par les époux [U] au prix de 350.000 francs,

-déterminer l'utilisation des fonds perçus par [X] [U] suite à la vente d'un appartement et d'un garage situés à [Adresse 4],

-déterminer l'utilisation des fonds perçus par le de cujus suite à la vente le 27 février 1985, au prix de 300.000 francs, d'une maison sise [Adresse 2],

-vérifier la valeur vénale réelle de l'immeuble vendu à la SCI UNIJIC en 2001, soit à la date de la cession, ainsi que sa valeur actuelle,

-déterminer l'utilisation des fonds perçus suite à la vente de l'immeuble situé à [Localité 6] à la SCI UNIJIC au prix de 73.175,53 euros,

-se faire communiquer les conditions de prêt souscrit auprès de la CAIXA BANQUE pour financer cette acquisition,

-procéder à l'évaluation des parts de la SCI UNIJIC au jour du décès ainsi qu'au jour le plus proche du partage tant en nue-propriété qu'en usufruit,

-rechercher l'origine des fonds correspondant à l'apport présumé de Monsieur [Q] [U] d'un montant de 2.940 francs,

-rechercher et indiquer si les deux actes ci-après ont eu pour conséquence une atteinte aux droits des enfants du premier lit, à savoir :

*par l'effet de l'avantage matrimonial constitué par la société d'acquêts contenu dans le changement de régime matrimonial du 19 juillet 2000, homologué le 12 janvier 2001, Madame [I] [P] veuve [U] se retrouvant propriétaire de quatre-vingts parts sociales de la SARL MIRABEAU CONDUITE, les enfants de la première union se retrouvant quant à eux, par l'effet de cette clause, privés du droit de reprise des apports en capitaux entrés du chef de leur père dans cette société d'acquêts ainsi que les y autorisait l'article 1525 du code civil,

*par la cession à Madame Paulette TESSIER veuve [P] par Monsieur [W] [U] des quatre-vingts parts de la SARL MIRABEAU CONDUITE au prix de 8.000 euros,

-vérifier l'évaluation des parts lors de la cession faite au bénéfice de Madame Paulette TESSIER veuve [P] et déterminer la consistance d'acquêt tant au jour de la cession de la moitié des parts de la SARL qu'au jour du décès de [X] [U],

-déterminer le montant de la récompense due par la société d'acquêts à la succession, le fonds de commerce d'auto-école ayant la nature de bien propre de [X] [U],

-déterminer la masse de calcul de la quotité disponible et dire si cette dernière est ou non dépassée,

-dans l'affirmative, procéder au calcul des indemnités de rapport et/ou de réduction,

-valoriser les droits en nue-propriété de chacun des ayants-droit du de cujus,

-donner au tribunal tous éléments lui permettant d'apprécier l'existence d'un éventuel recel successoral sur des appareils photos de marque Leica, sur une moto de marque BMW, sur une collection d'armes et en déterminer la valeur.

Le tribunal a réservé les demandes des parties dans l'attente du dépôt d'expertise.

Madame [I] [P] veuve [U] et Monsieur [Q] [U] ont interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 20 mars 2015.

Madame [I] [P] veuve [U] et Monsieur [Q] [U], aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 22 juin 2015, demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que le fonds de commerce d'auto-école a la nature d'un bien propre de l'époux et en ce qu'il a ordonné la mesure d'expertise dans son principe, sans opérer aucune constatation en l'état des pièces de nature à éclairer le tribunal.

Ils sollicitent de la cour de dire que le jugement entrepris ne pouvait :

*ordonner à l'expert d'interroger l'office notarial de Maîtres, [F] [D], [M] [B], [H] [K], notaires associés à [Localité 3],

*ordonner l'expertise sur les conséquences du changement du régime matrimonial et de la cession de parts de la SARL MIRABEAU,

*ordonner l'expertise sur l'assurance-vie, au motif que les consort [U] n'en sont pas bénéficiaires,

*ordonner l'expertise sur le financement de l'immeuble acquis le 29 mai 1985, sis [Adresse 3],

*ordonner l'expertise sur la valeur réelle et actuelle de l'immeuble situé [Adresse 3], comprenant un rez-de-chaussée et un étage,

*ordonner l'expertise sur la détermination des fonds perçus par [X] [U] suite à la vente par ses soins de l'appartement et du garage sis à [Localité 4],

*ordonner l'expertise sur un éventuel recel successoral sur des appareils photos de marque Leica, sur une motocyclette de marque BMW, sur une collection d'armes et déterminer leur valeur.

Ils demandent à la cour de :

-dire que la valeur du rez-de-chaussée de l'immeuble sis [Adresse 3] ne peut être prise en compte dans l'actif successoral, seule la valeur du premier étage , lieu d'habitation des appelants, entrant dans la masse successorale,

-dire que l'expertise devra évaluer le coût des travaux de réhabilitation de l'immeuble, de réparation de la toiture et de la procédure subséquente,

-dire que la mission d'expertise devra porter sur l'évaluation de l'immeuble sis [Adresse 3] au jour du décès et au jour le plus proche du partage,

-dire que la mission d'expertise relative à la SCI UNIJIC devra porter sur l'évaluation de l'immeuble sis [Adresse 3], au jour du décès et au jour le plus proche du partage,

-dire que la mission d'expertise relative aux mouvements de fonds portera en outre sur les mouvements de fonds entre le compte de Madame [I] [P] veuve [U] et celui du de cujus,

-débouter les intimés de leurs prétentions,

-condamner les intimés à payer à chacun des appelants la somme de 2.000 euros outre les dépens.

Les parties appelantes font valoir principalement que la mesure d'instruction sollicitée n'est pas nécessaire, dans la mesure où les pièces produites permettent au juge d'effectuer certaines constatations, le jugement entrepris ayant ainsi violé les dispositions de l'article 263 du code civil,

-subsidiairement, le jugement ne peut déléguer à l'expert la résolution des questions de pur droit, le technicien commis n'ayant pas à se prononcer sur les conséquences pour les héritiers du changement de régime matrimonial opéré par les époux [G], ni sur la cession des parts sociales de la SARL MIRABEAU, les consorts [U] ne disposant pas d'un droit d'agir contre cette cession et étant irrecevables à contester le droit propre et personnel du de cujus à organiser le capital et la gestion de l'activité professionnelle exercée avec son épouse, le prix des parts ne pouvant être discuté,

-le capital ou les rentes découlant d'un contrat d'assurance-vie ne font pas partie de l'actif successoral,

-la présomption concernant les acquêts par moitié ne peut plus être soumise à contestation par les parties intimées, l'acquisition de l'immeuble situé [Adresse 3] ayant été faite par moitié par chacun des époux en régime de participation aux acquêts,

-la détermination de la valeur de l'immeuble sis à [Localité 6] ne peut porter que sur l'étage de ce bien, l'activité professionnelle d'auto-école étant exercée au rez-de-chaussée, la valeur de celui-ci n'entrant pas dans l'actif successoral,

-la valeur des immeubles situés à [Localité 4] n'entre pas dans l'actif successoral, ce patrimoine n'ayant jamais été celui de [X] [U], qui a rempli un contrat moral auprès de son père,

-l'attribution à Monsieur [Q] [U] des quarante-neuf parts sociales en nue-propriété qu'il détient dans la SCI UNIJIC ne constituant pas une donation rapportable à la succession, l'interpellation du notaire à ce sujet étant sans objet,

-sur l'éventuel recel, il est établi que les motos appartenaient à l'auto-école, que chaque nouvelle acquisition d'un appareil photographique s'accompagnait de la reprise d'un plus ancien et que l'existence d'armes résulte d'un témoignage de complaisance non circonstancié.

Monsieur [Y] [U] et Monsieur [R] [U], dans leurs dernières conclusions notifiées le 7 août 2015, demandent à la cour de déclarer irrecevable l'appel interjeté en l'absence d'autorisation du Premier Président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

Subsidiairement, ils sollicitent de la cour de déclarer l'appel irrecevable en ce que les parties appelantes ont manifesté leur volonté d'acquiescer au jugement déféré.

A titre encore plus subsidiaire, ils sollicitent que la décision entreprise soit confirmée en toutes ses dispositions, que les appelants soient déboutés de leurs prétentions et condamnés, in solidum, à leur payer les sommes de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et de 6.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Ils soutiennent pour l'essentiel que :

-l'appel est irrecevable aux visas des articles 544 et 545 du code de procédure civile, la décision entreprise étant avant dire droit et n'ayant pas tranché partie du principal, les appelants ne justifiant pas avoir respecté les dispositions de l'article 272 du code de procédure civile,

-les parties appelantes ont renoncé à l'appel en participant à la réunion d'expertise organisée par l'expert judiciaire le 18 mars 2015, en application de l'article 409 du code de procédure civile,

-subsidiairement, les juges du fond sont souverains pour apprécier l'opportunité d'une mesure d'expertise, même si les faits offerts pour preuve ont pour conséquence, à les supposer établis, de faire droit à la demande,

-sur la mission d'expertise, les époux avaient convenu que les biens composant la société d'acquêts sans exception appartiendraient en pleine propriété au survivant, sans que les héritiers du prédécédé puissent prétendre avoir droit à la reprise des apports et capitaux entrés du chef de celui-ci dans la société d'acquêts, les enfants du premier lit demeurant recevables à agir en retranchement,

-les intimés se trouvent, par l'effet de la cession opérée, privés de leur droit de reprise des apports et capitaux entrés dans la société du chef de leur père, le tribunal devant disposer d'éléments chiffrés pour caractériser l'atteinte éventuelle à leurs droits,

-les investigations de l'expert sont justifiées concernant les contrats d'assurance-vie, les primes versées pouvant être manifestement excessives ou les contrats souscrits pouvant ne présenter aucun caractère aléatoire, ainsi que sur l'acquisition des biens immobiliers sis à [Localité 4], Madame [I] [P] veuve [U] ne justifiant pas de son apport personnel à ce titre,

-l'expert doit évaluer l'entier immeuble situé à [Adresse 6], l'acte modificatif du régime matrimonial des époux [G] ne mentionnant pas que le local d'auto-école serait inclus dans la société d'acquêts,

-sur l'utilisation des fonds par le de cujus issus de la vente des biens sis à [Localité 4], les pièces versées aux débats démontrent que [X] [U] était propriétaire desdits immeubles vendus avant le mariage,

-l'attribution de parts sociales à Monsieur [Q] [U], âgé de dix ans, a été faite sans contrepartie et sans intention libérale,

-l'expertise est nécessaire pour déterminer l'évaluation des parts de la société UNIJIC au jour du décès et au jour le plus proche du partage, pour déterminer l'emploi des fonds issus de la cession intervenue au profit de la société UNIJIC et pour vérifier la valeur vénale réelle de l'immeuble vendu à cette société,

-les intimés ont constaté la disparition de certains objets, ce qui nécessite des investigations, la cession de la moto BMW n'ayant pu intervenir avec l'accord du de cujus, la signature figurant sur l'acte de cession étant celle de Madame [I] [P] veuve [U],

-les documents versés aux débats démontrent l'existence d'appareils photographiques de marque Leica, collection qui n'a pu être cédée à titre gratuit,

-l'inventaire du mobilier et un témoignage établissent l'existence d'armes, dont la valeur doit être déterminée par expertise.

Par ordonnance en date du 12 janvier 2016, le conseiller de la mise en état de la sixième chambre D de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a débouté Messieurs [R] [U] et [Y] [U] de leur incident, déclaré recevable l'appel interjeté par Madame [I] [P] veuve [U] et par Monsieur [Q] [U] et dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, les demandeurs à l'incident étant in solidum condamnés aux dépens de celui-ci.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 12 octobre 2016.

MOTIVATION DE LA DECISION

1/ Sur la fin de non recevoir soulevée par les parties intimées :

Attendu qu' il convient de déclarer irrecevables les demandes présentées devant la cour par les parties intimées, tendant à ce que l'appel interjeté par Madame [I] [P] veuve [U] et Monsieur [Q] [U] à l'encontre du jugement déféré soit déclaré irrecevable, au visa des dispositions des articles 544, 545 et 409 du code civil, la fin de non recevoir soulevée relevant de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état qui, par ordonnance rendue le 12 janvier 2016, a statué sur cette prétention ;

2/ Sur la nature du fonds de commerce d'auto-école :

Attendu qu'il résulte de l'extrait Kbis communiqué aux débats par les parties intimés que le fonds de commerce d'auto-école a été créé par [X] [U] le 3 mai 1982, soit avant son mariage avec Madame [I] [P] ;

Qu'encore les statuts de la SARL MIRABEAU CONDUITE, constituée par acte authentique du 9 août 2002 mentionnent, au chapitre « Origine de Propriété » page 3, que « le fonds a été créé par Monsieur [X] [U] » ;

Attendu qu'il s'agit en conséquence d'un bien propre du de cujus ;

Attendu qu'il importe peu que la vie commune de [X] [U] et de Madame [I] [P] ait débuté antérieurement à la création du fonds et que cette dernière y ait exercé l'activité professionnelle de monitrice d'auto-école, éléments non susceptibles de modifier la nature du fonds ;

Attendu par suite que le jugement déféré sera confirmé sur ce point ;

3/ Sur l'expertise :

Attendu, sur l'expertise instaurée par le jugement, qu'il convient de rappeler qu'en application des dispositions de l'article 232 du code de procédure civile, le juge peut commettre toute personne de son choix pour l'éclairer par des constatations, par une consultation ou par une expertise sur une question de fait qui requiert les lumières d'un technicien ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article 238 alinéa 3 du code de procédure civile, le technicien, s'il doit donner son avis sur les points pour l'examen desquels il a été commis, ne doit jamais porter d'appréciations d'ordre juridique ;

Qu'il en résulte que le juge qui l'a commis ne peut jamais déléguer à un technicien l'exercice de son pouvoir juridictionnel ;

Attendu qu'en l'espèce, c'est à bon droit que le jugement a ordonné la mesure d'expertise contestée, compte tenu des éléments suivants :

-la configuration particulière de la cellule familiale du de cujus, marié deux fois et ayant laissé pour lui succéder des enfants issus de ses deux unions ainsi que sa seconde épouse,

-le particularisme et les conséquences juridiques liés au régime matrimonial de séparation de biens, avec constitution d'une société d'acquêts assortie d'une clause de d'attribution intégrale des acquêts au conjoint survivant, adopté par les époux [G] dans le cadre du changement opéré par acte notarié du 19 juillet 2000, et homologué judiciairement,

-l'existence de plusieurs biens immobiliers, situés à [Localité 6], [Localité 4] et à [Localité 5], qui doivent être évalués conformément à la loi,

-la souscription de contrats d'assurance-vie, qui doivent être répertoriés et analysés,

-la cession de quatre-vingts parts sociales de la SARL MIRABEAU CONDUITE, opérée par [X] [U], selon acte du 16 décembre 2002, au bénéfice de la mère de son épouse, détentrice des quatre-vingts autres parts de cette société, cession qui prive les intimés de leur droit de reprise des apports et capitaux entrés du chef de leur père dans ladite société ;

Attendu qu'il est impératif que le tribunal se trouve en possession d'éléments chiffrés concernant l'ensemble des biens composant l'actif successoral, parts sociales et immeubles, et ait connaissance des modes d'acquisition ou de la vente de ceux-ci, et de l'affectation des fonds subséquente, ainsi que des modalités de souscription des contrats d'assurance-vie contractés, le juge étant souverain dans l'adoption de sa décision de mandater un technicien, malgré l'existence de pièces justificatives produites de part et d'autres aux débats, qui seront communiquées et discutées dans le cadre de l'expertise ;

Qu'il appartiendra aux parties, si elles l'estiment nécessaire, d'adresser des dires à expert, notamment dans l'hypothèse d'impenses affectant les immeubles indivis, afin qu'il en soit débattu contradictoirement ;

Attendu qu'il appartiendra au tribunal, en possession de l'ensemble des données chiffrées sollicitées, de répondre aux questions de droit qui lui sont posées, et de dire si les immeubles situés à [Localité 4] entrent, ou non, dans l'actif successoral, si seule une partie de l'immeuble situé [Adresse 3] doit, ou non, être prise en compte, si l'attribution de parts sociales à l'un des héritiers réservataires constitue, ou non, une donation rapportable ainsi que si les primes des assurances vie souscrites sont, ou non, exagérées et doivent être rapportées ;

Attendu cependant que le tribunal ne peut, sans violer les dispositions de l'article 238 du code de procédure civile, déléguer à l'expert qu'il désigne la résolution des questions de pur droit qui lui sont posées ;

Attendu ainsi qu'il convient d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a demandé au technicien mandaté de :

-donner au tribunal tous éléments lui permettant d'apprécier l'existence d'un éventuel recel successoral sur des appareils photos de marque Leica, sur une moto de marque BMW, sur une collection d'armes et en déterminer la valeur,

-rechercher et indiquer si les deux actes ci-après ont eu pour conséquence une atteinte aux droits des enfants du premier lit, à savoir :

*par l'effet de l'avantage matrimonial constitué par la société d'acquêts contenu dans le changement de régime matrimonial du 19 juillet 2000, homologué le 12 janvier 2001, Madame [I] [P] veuve [U] se retrouvant propriétaire de quatre-vingts parts sociales de la SARL MIRABEAU CONDUITE, les enfants de la première union se retrouvant quant à eux, par l'effet de cette clause, privés du droit de reprise des apports en capitaux entrés du chef de leur père dans cette société d'acquêts ainsi que les y autorisait l'article 1525 du code civil,

*par la cession à Madame Paulette TESSIER veuve [P] par Monsieur [W] [U] des quatre-vingts parts de la SARL MIRABEAU CONDUITE au prix de 8.000 euros,

-déterminer le montant de la récompense due par la société d'acquêts à la succession, le fonds de commerce d'auto-école ayant la nature de bien propre de [X] [U],

-déterminer la masse de calcul de la quotité disponible et dire si cette dernière est ou non dépassée,

-dans l'affirmative, procéder au calcul des indemnités de rapport et/ou de réduction ;

Attendu que ces chefs de mission doivent être annulés, l'expert judiciaire ne pouvant légalement recevoir pour mission d'apprécier l'existence d'un éventuel recel successoral, les conséquences successorales du changement de régime matrimonial adopté par les époux [G], de calculer les éventuelles récompenses ou créances dues, ni de dire s'il y a lieu ou non à rapport ou réduction, ces questions constituant des points de droit relevant du pouvoir d'appréciation exclusif du juge, qu'il devra trancher ;

Attendu qu'il sera en revanche demandé à l'expert, dans l'hypothèse où des pièces justificatives lui sont produites, de chiffrer la valeur des appareils photos de marque Leica, de ou des motos de marque BMW ainsi que d'armes dépendant de la succession du de cujus ;

Attendu que Monsieur [R] et Monsieur [Y] [U] n'établissent pas qu'en se défendant en justice et en interjetant appel de la décision de première instance, exerçant ainsi une voie de recours ordinaire, Madame [I] [P] veuve [U] et Monsieur [Q] [U] auraient commis une faute justifiant leur condamnation à leur verser des dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Attendu qu'ils doivent être déboutés de leur demande formulée à ce titre ;

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'article 696 du code de procédure civile ;

P A R C E S M O T I F S

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Déclare irrecevables les demandes présentées devant la cour par les parties intimées, tendant à ce que l'appel interjeté par Madame [I] [P] veuve [U] et Monsieur [Q] [U] à l'encontre du jugement déféré soit déclaré irrecevable ;

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit que le fonds de commerce d'auto-école est un bien propre de [X] [U] ;

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit qu'une mesure d'expertise est nécessaire et a désigné à cet effet Madame Pascale NAVARRO ;

Infirme la décision entreprise en ce qu'elle a demandé au technicien mandaté de :

-donner au tribunal tous éléments lui permettant d'apprécier l'existence d'un éventuel recel successoral sur des appareils photos de marque Leica, sur une moto de marque BMW, sur une collection d'armes et en déterminer la valeur,

-rechercher et indiquer si les deux actes ci-après ont eu pour conséquence une atteinte aux droits des enfants du premier lit, à savoir :

*par l'effet de l'avantage matrimonial constitué par la société d'acquêts contenu dans le changement de régime matrimonial du 19 juillet 2000, homologué le 12 janvier 2001, Madame [I] [P] veuve [U] se retrouvant propriétaire de quatre-vingts parts sociales de la SARL MIRABEAU CONDUITE, les enfants de la première union se retrouvant quant à eux, par l'effet de cette clause, privés du droit de reprise des apports en capitaux entrés du chef de leur père dans cette société d'acquêts ainsi que les y autorisait l'article 1525 du code civil,

*par la cession à Madame Paulette TESSIER veuve [P] par Monsieur [W] [U] des quatre-vingts parts de la SARL MIRABEAU CONDUITE au prix de 8.000 euros,

-déterminer le montant de la récompense due par la société d'acquêts à la succession, le fonds de commerce d'auto-école ayant la nature de bien propre de [X] [U],

-déterminer la masse de calcul de la quotité disponible et dire si cette dernière est ou non dépassée,

-dans l'affirmative, procéder au calcul des indemnités de rapport et/ou de réduction ;

Statuant à nouveau,

Annule lesdits chefs de mission ;

Confirme le jugement sur les autre chefs de mission confiés au technicien mandaté ;

Y ajoutant,

Dit que l'expert judiciaire mandaté aura pour mission, dans l'hypothèse où des pièces justificatives lui sont produites, de chiffrer la valeur des appareils photos de marque Leica, de ou des motos de marque BMW ainsi que d'armes dépendant de la succession de [X] [U] ;

Déboute Monsieur [R] [U] et Monsieur [Y] [U] de leur demande tendant à l'obtention de dommages et intérêts pour procédure abusive en cause d'appel ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Réserve les dépens d'appel.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ

Florence TESSIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 6e chambre d
Numéro d'arrêt : 15/04706
Date de la décision : 30/11/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6D, arrêt n°15/04706 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-11-30;15.04706 ?
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