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20/10/2016 | FRANCE | N°13/23528

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2e chambre, 20 octobre 2016, 13/23528


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

2e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 20 OCTOBRE 2016



N° 2016/ 404













Rôle N° 13/23528







[P] [E]





C/



SARL SCAMILLE





















Grosse délivrée

le :

à :





Me BOULISSET











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de

TOULON en date du 25 Juillet 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2012F00655.





APPELANT





Monsieur [P] [E]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 1] (83)

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Philippe BOULISSET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE









INTIMEE





SARL SCAM...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

2e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 20 OCTOBRE 2016

N° 2016/ 404

Rôle N° 13/23528

[P] [E]

C/

SARL SCAMILLE

Grosse délivrée

le :

à :

Me BOULISSET

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de TOULON en date du 25 Juillet 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2012F00655.

APPELANT

Monsieur [P] [E]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 1] (83)

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Philippe BOULISSET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SARL SCAMILLE

assignée à domicile le 03.03.2014,

demeurant [Adresse 2]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 05 Septembre 2016 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, madame AUBRY CAMOIN, président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Octobre 2016

ARRÊT

Défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Octobre 2016,

Signé par Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Le 1er janvier 2000, monsieur [P] [E] a créé un fonds de commerce de produits alimentaires dans un local commercial situé [Adresse 3]) dont il était locataire suivant bail commercial en date du 6 janvier 1999 cédé le 22 octobre 1999 et ayant fait l'objet d'un avenant du 1° novembre 1999.

Le bail porte sur un local commercial situé en rez de chaussée constitué d'une pièce principale d'une surface d'environ 76 m², d' une pièce attenante d'une surface d'environ 38 m², d'une terrasse avec couverture bâchée d'une surface d'environ 125 m² et d'une pièce à usage d'entrepôt d'une surface d'environ 29 m², soit une surface d'environ 233m².

Le 17 mars 2000, les services d'urbanisme de la ville de [Localité 2] ont dressé procès verbal d'infraction aux règles de l'urbanisme en relevant l'existence de travaux d'extension du local commercial constitués par la mise en place devant les façades sud-est et sud-ouest de l'immeuble d'une structure en aluminium laqué blanc disposant de baies vitrées et coulissantes et en couverture de panneaux isolants en aluminium laqué blanc type termotop, avec création de 112 mètres carrés de surface hors oeuvre nette à usage de commerce, travaux entrepris sans autorisation et ne respectant pas les dispositions de l'article UE 6 du règlement du plan d'occupation des sols approuvé le 25 juin 1999 qui prévoient une implantation par rapport aux voies et emprises publiques avec un recul imposé de 5 mètres et réalisé en alignement.

Par jugement du 17 février 2004, le tribunal correctionnel de Toulon statuant sur poursuite du ministère public, a déclaré monsieur [P] [E] coupable de construction sans permis de construire, l' a condamné au paiement d'une amende de 5 000 euros, et a ordonné la mise en conformité des lieux avec la réglementation dans un délai de 4 mois et passé ce délai sous astreinte de 60 euros par jour de retard.

Sur appel interjeté par monsieur [E], l'affaire est venue devant la 7° chambre correctionnelle de cette cour à l'audience du 7 juin 2005 et le délibéré a été fixé au 4 octobre 2005.

Par acte sous seing privé du 26 août 2005, monsieur [E] a cédé le fonds de commerce à la SARL SCAMILLE pour la somme de 121.959,12 euros.

L'acte de vente contient notamment une clause de garantie de l'acquéreur au profit du vendeur concernant le démontage de la structure illicitement construite.

Par arrêt du 4 octobre 2005, la 7° chambre correctionnelle de cette cour a confirmé le jugement déféré sur la culpabilité, en répression a condamné monsieur [E] au paiement d'une amende de 1 500 euros, et a 'ordonné à sa charge la démolition de la construction irrégulièrement réalisé, laquelle devra être effectuée dans un délai de un an à compter du jour où le présent arrêt sera devenu définitif sous peine d'une astreinte de 30 euros par jour de retard'.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 10 octobre 2005, monsieur [E] a communiqué à la société SCAMILLE la teneur de l'arrêt rendu le 4 octobre 2005.

Le 5 septembre 2008, un agent assermenté du service de l'urbanisme de la ville de [Localité 2] a constaté que l'arrêt du 4 octobre 2005 n'avait pas été exécuté.

Par courrier du 9 mars 2012, la DDFIP du Var a mis monsieur [E] en demeure de régler la somme de 20 880 euros au titre de la liquidation de l'astreinte pour la période du 10 octobre 2006 au 5 septembre 2008, suivant état de recouvrement émis le 2 décembre 2011.

Monsieur [E] a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision puis un recours contentieux à l'encontre de cette décision qui ont été rejetés.

Par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 7 juin 2012 et restée sans réponse, le conseil de monsieur [E] a avisé la société SCAMILLE de cette situation en lui rappelant les dispositions de l'acte de vente du fonds de commerce, et l'a mise en demeure d'une part de procéder aux travaux prescrits par la cour d'appel d'autre part de lui adresser un chèque de

20 880 euros.

Par acte du 16 juillet 2012, monsieur [E] a assigné la SARL SCAMILLE devant le juge des référés du tribunal de commerce de Toulon afin de voir prononcer sa condamnation au paiement de la somme de 20 800 euros à titre provisionnel correspondant au montant de l'astreinte liquidée au 5 septembre 2008 et à la remise en état des lieux dans un délai de 3 mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par ordonnance du 7 novembre 2012, le juge des référés du tribunal de commerce a débouté monsieur [E] de l'intégralité de ses demandes.

Par acte du 22 novembre 2012, monsieur [E] a assigné la SARL SCAMILLE au fond devant le tribunal de commerce de Toulon aux fins de voir :

- prononcer la condamnation de la société SCAMILLE à lui payer :

la somme de 20 800 euros correspondant à la liquidation de l'astreinte

la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive

la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile

- dire que la société SCAMILLE devra dans un délai de trois mois à compter du jugement à intervenir, remettre les lieux en état conformément aux dispositions de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence du 5 octobre 2005, ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de trois mois,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- condamner la société SCAMILLE aux dépens.

Par conclusions récapitulatives du 18 février 2013, monsieur [E] a amplié sa demande à la somme de 63 000 euros au titre de l'astreinte.

Par ordonnance du 5 février 2013, monsieur [E] a été autorisé à prendre un nantissement judiciaire provisoire sur le fonds de commerce de la société SCAMILLE pour une somme de 70 000 euros.

Par jugement contradictoire du 25 juillet 2013, le tribunal de commerce a :

- débouté monsieur [E] de l'intégralité de ses demandes,

- dit qu'il lui appartient de remettre les lieux en l'état conformément aux dispositions de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence du 3 octobre 2005,

- dit que le jugement sera signifié au propriétaire des locaux loués aux frais de monsieur [P] [E]

- ordonné la mainlevée immédiate de la mesure judiciaire conservatoire prise sur le fonds de commerce de la société SCAMILLE, aux frais de monsieur [P] [E]

- débouté les parties de toutes autres demandes, fins et conclusions

- ordonné l'exécution provisoire,

- laissé à la charge de [P] [E] les dépens.

Par déclaration au greffe du 6 décembre 2013, monsieur [P] [E] a régulièrement relevé appel du jugement rendu le 25 juillet 2013, à l'encontre de la SARL SCAMILLE (RG 13/23528).

Par jugement du 7 novembre 2013, le tribunal de commerce saisi d'une requête en omission de statuer par la société SCAMILLE, a condamné monsieur [E] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par deux déclaration au greffe des 10 et 11 décembre 2013, monsieur [P] [E] a régulièrement relevé appel du jugement rectificatif rendu le 7 novembre 2013, à l'encontre de la SARL SCAMILLE (RG 13/23740 et 13/23810 avec jonction sous le numéro RG 13/23740).

Au cours du premier trimestre de l'année 2014, monsieur [P] [E] a tenté de faire procéder aux travaux ordonnés par arrêt du 4 octobre 2005, et s'est heurté au refus de la société SCAMILLE qui lui a notamment opposé l'absence d'autorisation du propriétaire du local commercial pour réaliser les travaux.

Par courrier du 23 avril 2014, la SCI SAVANE propriétaire des murs dans lesquels le fond de commerce est exploité, a informé monsieur [E]qu'il n'avait pas qualité pour autoriser ou s'opposer aux travaux de mise en conformité dès lors que la structure rigide avait été installée à l'insu du propriétaire.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 29 avril 2014 resté sans réponse, monsieur [E] a demandé à la société SCAMILLE l'autorisation de faire procéder aux dits travaux avant le 5 mai 2014.

Par ordonnance du 5 septembre 2014, le juge des référés du tribunal de commerce de Toulon a autorisé monsieur [E] et l'entreprise de son choix à faire procéder aux travaux de démolition dans les termes de l'arrêt de la cour d'appel du 4 octobre 2005 et du jugement du tribunal de commerce de Toulon du 7 novembre 2013, si besoin avec le concours de la force publique, et en cas de refus, ce dans le délai d'un mois et passé ce délai sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Le 24 septembre 2014, monsieur [E] s'est vu opposer un refus constaté par huissier.

Le 15 avril 2015, le Préfet du Var a informé le conseil de monsieur [E] qu'il accordait à ce dernier la force publique pour faire exécuter l'arrêt de la cour du 4 octobre 2005.

Par actes des 6 et 7 mai 2015, monsieur [E] a assigné la société SCAMILLE devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Toulon aux fins de voir liquider l'astreinte prononcée par ordonnance de référé du 5 septembre 2014.

Par jugement du 23 février 2016, le juge de l'exécution a liquidé l'astreinte fixée par l'ordonnance de référé du 5 septembre 2014 à la somme de 12 000 euros arrêtée au 23 février 2016, a condamné la société SCAMILLE au paiement de la somme de 12 000 euros et a fixé une nouvelle astreinte de 100 euros par jour de retard.

Après accord de la société SCAMILLE donné le 14 mars 2016, les travaux ont été réalisés en avril 2016 et leur exécution a été constatée par huissier le 4 mai 2016.

Dans ses dernières conclusions du 10 août 2016, monsieur [P] [E] demande à la cour de :

- réformer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

- dire la clause litigieuse de l'acte de vente du 26 août 2005 comme parfaitement valide,

- condamner la société SCAMILLE à payer à monsieur [P] [E] la somme de 72 226,83 euros à titre de dommages et intérêts pour non exécution de ses engagements contractuels, toutes causes de préjudice confondues, cette somme portant intérêt au taux légal à compter de la demande,

- rejeter l'appel incident de la société SCAMILLE,

- condamner la société SCAMILLE à payer à monsieur [P] [E] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens avec distraction.

Monsieur [P] [E] soutient :

- que la clause de garantie figurant à l'acte de cession du fonds de commerce est parfaitement valide dès lors que selon jurisprudence constante la mise en conformité des lieux ou des ouvrages, la démolition de ces derniers, peuvent faire l'objet d'une garantie contractuelle de la part de l'acquéreur,

- que selon l'article 1628 du code civil 'quoiqu'il soit dit que le vendeur ne sera soumis à aucune garantie, il demeure cependant tenu de celles qui résultent d'un fait qui lui est personnel; toute convention contraire est nulle.'

- que si la garantie du fait personnel est d'ordre public, seule est interdite la clause générale de non garantie des faits personnels, la clause de non garantie d'un fait personnel déterminé étant reconnue valable,

- que sous réserve du dol, la jurisprudence estime que l'article 1628 ne fait pas obstacle à la validité de la clause par laquelle l'acheteur, qui a été pleinement renseigné sur une circonstance particulière antérieure à la vente, susceptible de provoquer éventuellement son éviction, a accepté d'en supporter le risque sans pouvoir former de recours contre le vendeur,

- que l'acquéreur en l'espèce, était parfaitement informé de la situation concernant la terrasse litigieuse, ainsi que de l'obligation acceptée par lui, d'avoir à exécuter aux lieux et place du concluant les travaux de mise en conformité susceptibles d'être prononcés par la cour d'appel,

- que le concluant a vendu le fonds de commerce pour une somme de 121 959 euros largement inférieure à l'évaluation moyenne d'un tel fonds à une somme de 175 000 euros, au regard du chiffre d'affaire réalisé,

- que l'acte de cession du fonds de commerce ayant été conclu entre deux commerçants, l'article L 332-1 du code de la consommation n'est pas applicable,

- qu'il n' a nullement été porté atteinte au principe de la personnalité des peines par la clause litigieuse,

- que si l'impossibilité d'un recours en garantie est patente en matière de liquidation d'astreinte eu égard à son caractère personnel, la clause litigieuse constitue l'acquéreur comme garant du paiement de l'astreinte en cas de retard fautif dans l'exécution des travaux

- que le concluant a respecté les conditions de forme liées à la clause, et que la société SCAMILLE a été parfaitement informée de la situation,

- que la société SCAMILLE a fait preuve d'une résistance particulièrement abusive,

- que par suite de la non exécution de ses engagements contractuels par la société SCAMILLE, le concluant a dû payer une astreinte de 28 505,83 euros à l'Etat, assumer l'ensemble des travaux qui incombaient à la société SCAMILLE en vertu de l'acte de vente du fonds de commerce pour un montant de 23 421 euros, multiplier les procédures pour contraindre la société SCAMILLE à lui permettre d'exécuter l'arrêt du 4 octobre 2005, que la situation financière du concluant a été obérée par cette situation au regard de ses ressources et de ses charges, et qu'il est fondé à demander réparation des troubles dans ses conditions d'existence par la condamnation de la société SCAMILLE à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts, soit un total de 72 226,83 euros.

La SARL SCAMILLE, régulièrement assignée par acte du 3 mars 2014 en l'étude de l'huissier, n'a pas constitué avocat.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'absence de constitution de la société SCAMILLE

Par acte du 3 mars 2014, monsieur [E] a signifié à la société SCAMILLE sa déclaration d'appel et ses pièces, et l'a régulièrement assignée en l'étude de l'huissier.

Monsieur [E] lui a fait signifier ses conclusions et pièces par acte du 12 août 2016.

La société SCAMILLE, régulièrement assignée, n'a pas constitué avocat dans la présente instance d'appel (RG 23528) mais dans dans l'instance d'appel concernant le jugement ayant statué sur l'omission de statuer (RG 23740).

Il n'y a pas lieu de prononcer la jonction des instances qui n'a pas pour effet de créer une procédure unique.

Il sera statué par arrêt de défaut.

Sur la validité de la clause de garantie figurant dans l'acte de cession du fonds de commerce du 26 août 2005

L'acte de cession du fonds de commerce du 26 août 2005 comporte aux pages 17 à 20 sous l'intitulé inscrit en lettres de grande taille et souligné 'très important renseignements d'urbanisme', une relation précise et circonstanciée de la situation du fonds de commerce au regard des règles de l'urbanisme, des poursuites dont monsieur [E] fait l'objet, et de l'état de la procédure pénale en ce compris procédure d'appel et mise en délibéré au 4 octobre 2005.

Cet acte contient en page 19 et 20 l'engagement détaillé et précis de l'acquéreur de garantir le vendeur de l'exécution des travaux susceptibles d'être ordonnés par la cour d'appel.

Cet acte spécifie notamment :

que monsieur [E] prend l'engagement d'exécuter dans sa totalité l'intégralité des condamnations pénales et civiles qui seront prononcées à son encontre par la cour d'appel, à l'exclusion d'une éventuelle condamnation concernant le démontage de la structure mobile en aluminium et des baies vitrées qui seront à la charge exclusive de l'acquéreur

que l'acquéreur donne expressément son accord pour relever et garantir le vendeur de l'exécution de toutes mesures prononcées à son encontre par la cour d'appel relatives à une éventuelles dépose de la structure en aluminium pour rendre les locaux conformes à la réglementation

que l'acquéreur devra exécuter à ses frais dans les délais prescrits par la cour d'appel ces travaux de dépose et de mise en conformité des lieux avec la réglementation

que le vendeur notifiera à l'acquéreur par lettre recommandée avec accusé de réception immédiatement après le délibéré du 4 octobre 2005, la teneur de celui-ci

ainsi qu'une copie de l'arrêt lorsque celui-ci lui sera délivré

que l'acquéreur s'estime totalement informé de la situation d'urbanisme par son vendeur et s'interdit tout recours à l'encontre de celui-ci pour le cas où il estimerait subir un quelconque préjudice découlant de la non conformité des locaux à l'égard des règles de l'urbanisme

Monsieur [E] produit la lettre recommandée avec accusé de réception et la preuve du dépôt de ce courrier le 10 octobre 2005, par laquelle il a notifié à la société SCAMILLE la teneur de l'arrêt de la cour rendu le 4 octobre 2005 qui a ordonné la démolition de la construction litigieuse sous astreinte.

La mise en conformité des lieux ou des ouvrages, la démolition de ces derniers ou la réaffectation du sol prévues par l'article L 480-5 du code de l'urbanisme constituent des mesures à caractère réel destinées à faire cesser une situation illicite et non des sanctions pénales.

Les mesures de restitution prévues par l'article L 480-5 du code de l'urbanisme qui ne constituent pas des sanctions pénales, peuvent faire l'objet de garanties contractuelles de la part de l'acquéreur d'un bien illégalement construit.

Conformément aux dispositions de l'article 1138 alinéa 2 du code civil, l'acte de cession du fonds de commerce du 26 août 2005 a dès sa signature transféré la propriété du fonds et les risques à la société SCAMILLE, laquelle a consenti dans l'acte de cession de manière claire, précise et non équivoque, et en toute connaissance de cause, au risque de voir ordonner judiciairement le démontage de la structure illicitement mies en place, dont elle a été parfaitement informée par le vendeur.

Il s'infère de la production par monsieur [E] d'une attestation de l'expert comptable du fonds de commerce, selon laquelle le prix de cession en 2005 aurait pu être fixé entre 134 000 et 223 000 euro au regard du chiffre d'affaire réalisé par la supérette entre 2002 et 2004, que le prix de cession fixé à une somme inférieure de 121 959 euros tient compte des conséquences financières liées au démontage de la structure litigieuse et à la remise en état des lieux conformément à la règlemention.

La clause de garantie contractuelle relative à l'exécution de la mesure de restitution ordonnée par l'arrêt du 4 octobre 2005 est en conséquence valable, et le jugement déféré sera infirmé en toutes ses dispositions.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par monsieur [E] à l'encontre de la société SCAMILLE

Aux termes de l'article 1142 :

'Toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts , en cas d'inexécution de la part du débiteur.'

Aux termes de l'article 1147 :

'Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au payement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.'

Aux termes de l'article 1149 :

'Les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé...'

La société SCAMILLE a manqué à son obligation contractuelle de ' relever et garantir le vendeur de l'exécution de toutes mesures prononcées à son encontre par la cour d'appel relative à une éventuelle dépose de la structure en aluminium pour rendre les locaux conformes à la réglementation'.

L'acte de vente du fonds de commerce spécifie à cet égard :

'Il est précisé en tant que de besoin, que l'acquéreur n'aura à sa charge que ce démontage à l'exclusion de tous autres travaux rendus éventuellement nécessaires par une mise en conformité, ces autres travaux restant à la charge exclusive du vendeur, lequel s'engage à les effectuer aux termes du présent acte.'

Il s'infère de ces mentions claires et précises que seul le démontage de la structure en aluminium incombe à la société SCAMILLE, les autres travaux incombant à monsieur [E].

C'est en ce sens que par courrier officiel du 14 mars 2016, le conseil de la société SCAMILLE a écrit au conseil de monsieur [E] en ces termes :

'Monsieur [E] est donc autorisé à procéder à la démolition des seuls ouvrages litigieux, mais aussi dans le même temps, à procéder à la remise en état des lieux tels qu'ils sont énoncés par l'ensemble des décisions judiciaires et l'acte de vente, savoir :

Avant la démolition, il convient de procéder à la mise en place de baies coulissantes à l'emplacement d'origine pour assurer une entrée et une sorte sécurisée comme à l'origine, ainsi que la pose des bâches de protection.'

Selon facture de la société Spelem du 31 mai 2016, le démontage, la modification et la remise en état de la structure terrasse (période du 26 au 29 avril 2016) est chiffrée à la somme de 3 960 euros HT soit 4 752 euros TTC qui incombe à la société SCAMILLE.

Les autres travaux consistant dans la remise en place de baies coulissantes à l'emplacement d'origine et la pose des bâches de protection incombent au vendeur monsieur [E].

La société SCAMILLE sera en conséquence condamnée à payer à monsieur [E] la seule somme de 4 752 euros TTC au titre des travaux de démontage de la structure.

Concernant l'astreinte, l'acte de vente spécifie :

'L'acquéreur devra exécuter aux lieux et place du vendeur, les travaux qui sont prescrits par la cour d'appel dans les délais imposés par celle-ci.

L'acquéreur relèvera et garantira monsieur [P] [E] du paiement de l'astreinte totale que celui-ci serait amené à supporter en cas de retard pris dans l'exécution des travaux.'

Il est constant que l'astreinte, mesure à caractère personnel, n'ouvre pas droit à un recours en garantie.

En l'espèce, l'obligation faite à monsieur [E] de démonter la structure illicite dans les termes de l'arrêt du 4 octobre 2005, a été contractuellement transférée à la société SCAMILLE

La société SCAMILLE, en acquérant le fonds de commerce, est devenue bénéficiaire des travaux réalisés sans permis de construire dont elle avait une parfaite connaissance et a consenti contractuellement au risque de devoir démolir la structure illicite dans un certain délai.

En omettant de procéder au démontage de la structure illicitement édifiée conformément à l'arrêt du 4 octobre 2005, la société SCAMILLE a commis une faute contractuelle dont elle doit réparation et monsieur [E] est fondé en sa demande de paiement à titre de dommages et intérêts d'une somme équivalente à l'astreinte qu'il a dû régler à l'Etat qui constitue pour lui une perte, soit la somme de 28 505,83 euros.

Enfin, monsieur [E] est fondé à demander réparation du préjudice résultant des nombreuses démarches et procédures qu'il a dû engager devant diverses juridictions pour obtenir l'exécution de l'arrêt du 4 octobre 2005, en l'état du refus de la société SCAMILLE, d'exécuter les dispositions contractuelles librement consenties et de permettre à monsieur [E] de suppléer à sa carence, qu'il convient d'évaluer à la somme de 7 000 euros.

Il convient en conséquence de faire droit à la demande de dommages et intérêts formée par monsieur [E] à hauteur de la somme de 40 257,83 euros, ( 4 752 + 28 505,83 + 7 000) ce avec intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2012, date de l'assignation valant mise en demeure.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La société SCAMILLE qui succombe sera condamnée aux entiers dépens d epremière instance et d'appel.

Il convient en équité de condamner la société SCAMILLE à payer à monsieur [E] la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en dernier ressort par arrêt de défaut

Infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré, en ce compris les dépens,

Déclare valable la clause de l'acte de cession du fonds de commerce du 26 août 2005 par laquelle la société SCAMILLE s'est engagée à garantir monsieur [E] de l'exécution de la mesure de démontage de la structure illicitement construite ordonnée par arrêt de la cour d'appel du 4 octobre 2005,

Dit que la société SCAMILLE a manqué à son engagement contractuel de procéder au démontage de la structure illicitement construite,

Condamne la société SCAMILLE à payer à monsieur [E] en réparation du préjudice subi, la somme de 40 257,83 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2012, date de l'assignation valant mise en demeure,

Condamne la société SCAMILLE à payer à monsieur [E] la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société SCAMILLE aux entiers dépens de première instance et d'appel, ceux d'appel avec distraction par application de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 13/23528
Date de la décision : 20/10/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-10-20;13.23528 ?
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