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01/07/2016 | FRANCE | N°14/18365

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 01 juillet 2016, 14/18365


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 1er JUILLET 2016



N°2016/

CB













Rôle N° 14/18365







Association ADAPEI DU VAR MEDITERRANEE





C/



[D] [P]







































Grosse délivrée le : 01/07/2016

à :



Me Hélène BAU, avocat au barreau de TOULON<

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Me Danielle DEOUS, avocat au barreau de TOULON





Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :01/07/2016



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section E - en date du 01 Septembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 13/1296.





APPELANTE


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COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 1er JUILLET 2016

N°2016/

CB

Rôle N° 14/18365

Association ADAPEI DU VAR MEDITERRANEE

C/

[D] [P]

Grosse délivrée le : 01/07/2016

à :

Me Hélène BAU, avocat au barreau de TOULON

Me Danielle DEOUS, avocat au barreau de TOULON

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :01/07/2016

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section E - en date du 01 Septembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 13/1296.

APPELANTE

Association ADAPEI DU VAR MEDITERRANEE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Hélène BAU, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

Madame [D] [P], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Danielle DEOUS, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 02 Juin 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Chantal BARON, Président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Chantal BARON, Présidente de chambre

Monsieur Jean-Bruno MASSARD, Conseiller

Monsieur Thierry CABALE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 1er Juillet 2016

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 1er Juillet 2016

Signé par Madame Chantal BARON, Présidente de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par jugement du conseil des prud'hommes de Toulon du 1er septembre 2014, notifié aux parties le 3 septembre 2014, la juridiction a jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé pour faute grave par lettre du 7 juin 2013 par son employeur, l'association ADAPEI du Var Méditerranée, à l'encontre de [D] [P], qui exerçait dans l'entreprise, par contrat à durée indéterminée conclu le 12 décembre 2005, et pour une rémunération mensuelle brute de 4249,24 euros, les fonctions de chef de service.

La juridiction a accueilli la demande en paiement formée par [D] [P] en lui accordant les sommes de 35'000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement infondé ; 25'602 € au titre de l'indemnité de préavis a et 2560,20 euros au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis ; 34'136 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ; enfin, 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et l'a déboutée du surplus de sa demande.

Par acte du 12 septembre 2014, dans le délai légal et par déclaration régulière en la forme, l'association ADAPEI du Var Méditerranée a régulièrement relevé appel général de la décision.

Soutenant,

par conclusions déposées le jour de l'audience, visées par le greffe, développées oralement et auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions :

' qu'un premier avertissement a été décerné à [D] [P], le 8 avril 2013, parfaitement fondé, les faits étant avérés et non prescrits,

' que, le 6 mai 2013, [D] [P] a été convoquée à un entretien, prévu le 23 mai 2013, préalable à un licenciement pour faute grave qui devait être ensuite prononcé le 7 juin 2013, licenciement qui repose sur des faits avérés et présentant un caractère de gravité,

' que, le 22 mai 2013, soit la veille de cet entretien, [D] [P] a saisi le conseil de prud'hommes en résiliation judiciaire du contrat de travail, en reprochant à l'employeur d'avoir modifié le planning des astreintes, ce qui entraînait une modification de sa rémunération,

' que l'article 6 du contrat de travail prévoyait une période de 26 semaines d'astreinte sur l'année, l'employeur ayant le choix de la répartition des semaines ; qu'une telle stipulation du contrat de travail constitue une sujétion liée à la fonction, à laquelle le titulaire n'était pas forcément soumis ; que sa suppression par l'employeur ne pouvait donc constituer une modification du contrat de travail mais bien un changement dans le cadre du pouvoir de direction de l'employeur ; qu'en outre ces astreintes étaient appliquées sur l'année, alors que la salariée a quitté l'entreprise en mai, et aurait, par conséquent, très bien pu effectuer ces 26 semaines d'astreinte avant la fin de l'année, la demande en prononcé de la résiliation judiciaire étant ainsi non fondée,

' que les calculs des sommes réclamées au titre de l'indemnité de préavis et de l'indemnité de licenciement étant erronés, doivent, subsidiairement, être rectifiés,

' que [D] [P] est en invalidité et perçoit son salaire à taux plein jusqu'à la retraite, aucun préjudice n'existant par conséquent du fait du licenciement,

' que [D] [P] se plaint également d'un non-paiement d'heures supplémentaires, qu'elle n'a d'ailleurs jamais réclamées, sans apporter d'autres éléments qu'un état informatique approximatif et manifestement établi après coup ; qu'elle avait en outre du retard dans son travail ; et que les attestations qu'elle produit à l'appui de cette dernière demande sont contradictoire avec ses propres déclarations, concernant ses heures d'arrivée et de départ,

l'employeur demande à la Cour d'infirmer la décision des premiers juges dans toutes ses dispositions, de débouter [D] [P] de toutes ses demandes en paiement et de lui allouer en définitive le paiement de la somme de 2500 euros représentant ses frais irrépétibles sur la base de l'article 700 du code de procédure civile.

Répliquant,

par conclusions déposées le jour de l'audience, visées par le greffe, développées oralement et auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions :

' que l'employeur a modifié, à la fin de l'année 2012, le rythme des astreintes prévues au contrat de travail ; et que la prime d'astreinte, qui s'élevait jusque-là à un montant uniforme de 778,85 euros mensuels, y compris pendant les congés, a par suite été réduite à 519,30 euros,

- qu'à supposer même que la salariée ait été admise à accomplir ses 26 semaines d'astreinte dans la seconde moitié de l'année, si elle n'avait pas été licenciée, la prime d'astreinte constituait, en toute hypothèse, un élément contractuel qui ne pouvait être modifié sans son consentement,

' que les heures supplémentaires qu'elle a faites n'ont jamais été réglées, alors que la réalité de ces heures est démontrée par les attestations produites aux débats,

' que l'avertissement du 8 avril 2013 est infondé, les faits visés étant prescrits comme s'étant produit le 31 janvier 2013,

' que le licenciement n'est pas davantage fondé, les faits reprochés ne constituant pas faute,

' que d'ailleurs, à supposer que les faits relevés constituent une faute, licenciement n'en serait pas moins infondé, la convention collective exigeant le prononcé de deux sanctions successives avant de recourir au licenciement,

la salariée demande à la Cour de confirmer la décision des premiers juges dans toutes ses dispositions et de lui allouer en définitive paiement des sommes de :

-68'000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-25'602 euros à titre d'indemnité de préavis,

-2560,20 euros à titre de rappel de congés payés sur préavis,

-34'136 euros à titre d'indemnité de licenciement,

-12'702,49 euros à titre d'heures supplémentaires,

-1270,24 euros au titre des congés payés sur heures supplémentaires,

-779,16 euros au titre des astreintes non payées,

outre 4000 euros représentant ses frais irrépétibles sur la base de l'article 700 du code de procédure civile.

[D] [P] sollicite encore l'annulation de l'avertissement décerné le 8 avril 2013, sans former cependant de demande en dommages-intérêts de ce chef, et la remise des bulletins de paie et de l'attestation Pôle emploi rectifiés, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail

En droit, la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail, mode de rupture commun à tous les contrats, ne peut être formée que par le salarié. Si la demande du salarié est jugée fondée et qu'il existe des manquements de l'employeur d'une gravité suffisante, la résiliation judiciaire peut être prononcée par le juge. Si la demande du salarié est jugée non fondée, le contrat se poursuit quand bien même il ne serait plus exécuté.

Le bien-fondé de la résiliation est apprécié au jour où le juge se prononce. La résiliation prend effet à la date de la décision judiciaire qui la prononce, sauf quant un licenciement est intervenu en cours d'instance. Dans ce cas, le juge fixe la date de la rupture à la date d'envoi de la lettre de licenciement et elle produit des effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En l'espèce, la demande en résiliation judiciaire du contrat est fondée d'une part sur le non paiement des heures supplémentaires effectuées par la salariée ; d'autre part sur la modification de la rémunération des astreintes. Concernant ce dernier point, celle-ci soutient en effet qu'elle a toujours perçu, depuis son embauche en 2006, une prime mensuelle de 778,85 euros, indemnisant la période de 26 semaines d'astreinte qu'elle était tenue d'effectuer aux termes de son contrat de travail ; et que cette prime, calculée sur une base de 223,17 euros, a subitement été réduite, à compter de janvier 2013, à une base de 148,75 euros, la rémunération s'établissant à 519,13 euros, au lieu de 778,85 euros.

L'association ADAPEI du Var Méditerranée reconnaît que le planning des astreintes a effectivement été modifié, en raison d'une réorganisation générale de l'entreprise, cette modification entraînant une diminution de la rémunération correspondante. Elle soutient cependant que, cette astreinte ne constituant qu'une sujétion liée à la fonction de la salariée, sujétion à laquelle celle-ci n'était pas systématiquement soumise, sa suppression par l'employeur ne constitue pas une modification du contrat de travail.

En droit, il n'existe pas de droit acquis à l'exécution d'astreintes, sauf engagement de l'employeur vis-à-vis du salarié de lui en faire exécuter un certain nombre. À défaut, seul un abus de l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction peut ouvrir droit à indemnisation en cas de diminution ou de suppression des astreintes. Cependant, la rémunération ou son mode de calcul ne peuvent être modifiés sans l'accord du salarié. Cet accord est également nécessaire en cas de modification par l'employeur d'un aspect de la relation de travail qui relève en principe de son pouvoir de direction, mais qui entraîne un impact sur le montant de la rémunération.

En l'espèce, le contrat de travail conclu entre les parties stipule : « [D] [P] est assujettie à une période de 26 semaines d'astreinte sur l'année, période pendant laquelle elle est à la disposition de l'association ADAPEI du Var Méditerranée. Elle doit être joignable par téléphone et doit être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'établissement. Cette période d'astreinte se répartit selon le calendrier établi par la direction ».

Il n'est pas contesté, et il est établi par les bulletins de salaire des mois de juin 2012 à juin 2013 produits aux débats, que la prime d'astreinte, qui s'établissait, chaque mois jusqu'en décembre 2012, à 778,85 euros, a été réglée à compter de janvier 2013 pour un montant mensuel de 519,13 euros. La modification de la rémunération, sans accord de la salariée, est ainsi établie.

En vain l'employeur soutient-il que la relation de travail a pris fin le 7 juin 2013, et que [D] [P] aurait pu accomplir les astreintes pendant le reste de l'année 2013. Il n'est pas contesté en effet que la prime d'astreinte de 778,85 euros était versée de façon fixe et mensuelle, même pendant les périodes de congés et de maladies, ainsi qu'il ressort notamment des bulletins de salaire de décembre 2012 et d'avril 2013. Il s'ensuit à l'évidence que cet élément fixe de la rémunération ne pouvait être modifié par l'association ADAPEI du Var Méditerranée sans l'accord de la salariée, même dans le cadre d'une modification du planning des astreintes relevant du pouvoir de direction de l'employeur.

En l'espèce, la diminution, à hauteur de 259,72 euros mensuels, soit 3116,64 € annuels, de la rémunération résultant de la modification du contrat de travail imposée à la salariée par l'employeur était suffisamment importante pour empêcher la poursuite du contrat de travail, et justifie par conséquent le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat, au jour du licenciement prononcé le 7 juin 2013, sans qu'il ne soit besoin d'examiner le grief surabondant fondé sur le non paiement des heures supplémentaires.

Le licenciement prononcé le 7 juin 2013 est donc nécessairement infondé.

En application de l'article L1235-3 du code du travail, [D] [P] étant âgée de 56 ans au jour du licenciement, ayant sept ans et six mois d'ancienneté et percevant un salaire brut mensuel de 4249,24 euros, ne justifiant pas avoir subi une période de chômage, mais seulement s'être trouvée en invalidité à compter du 1er février 2016, l'entreprise comptant plus de dix salariés, il convient d'allouer à la salariée la somme de 38'000 euros à titre d'indemnité pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il sera encore alloué la somme de 779,16 euros, somme réclamée au titre de l'indemnisation des astreintes.

Sur la demande en paiement d'indemnité de préavis

Le licenciement étant infondé, et le contrat de travail prévoyant, en son article 4, après deux ans de présence ininterrompue dans l'entreprise, une indemnité de préavis fixée à six mois en cas de licenciement, conformément aux dispositions de la convention collective, il convient de condamner à ce titre l'association ADAPEI du Var Méditerranée à verser à [D] [P] la somme de 25'602 euros à titre d'indemnité de préavis, outre la somme de 2560,20 euros à titre de congés payés sur indemnité de préavis.

Sur la demande en paiement d'indemnité de licenciement

De même, le licenciement étant infondé, il convient d'accueillir la demande en paiement de l'indemnité de licenciement. Cette indemnité de licenciement doit être calculée, conformément à la convention collective applicable, à raison d'un mois de salaire par année de service, sur la base des trois derniers mois de salaire de pleine activité. La salariée s'étant trouvée en arrêt de maladie à compter du 7 avril 2013, la moyenne des trois derniers mois de salaire précédents s'établit, ainsi que le soutient à juste titre l'employeur, à 3989,85 euros. Il convient donc de condamner à ce titre l'association ADAPEI du Var Méditerranée à verser à [D] [P] la somme de 27'928,95 euros à titre d'indemnité de licenciement.

Sur la demande en annulation de l'avertissement du 8 avril 2013

La lettre d'avertissement adressée à la salariée le 8 avril 2013 indique :

« En date du 18 mars 2013 j'ai été malheureusement contrainte de constater le comportement fautif exposé ci-dessous :

vous n'avez pas informé votre hiérarchie en amont d'une réorientation d'un résident, Monsieur [Y] [S], avalisée par vous en équipe éducative lors d'une réunion le 31 janvier 2013. Vous avez fait part de votre décision à la famille par l'intermédiaire de Madame [M], éducatrice et de Madame [Q], assistante sociale, sans aucune consultation préalable de la direction le 15 mars 2013. J'ai par ailleurs, le 18 mars 2013, reçu spontanément et à sa demande dans mon bureau la mère de ce résident, Madame [R], qui m'a alors elle-même informée et qui remet en cause depuis cette réorientation. Vous avez reconnu une difficulté de positionnement vis-à-vis de l'équipe concernant cette initiative. Je vous ai proposé mon soutien et celui de votre directrice adjointe pour vous aider à assumer les éventuelles décisions face à vos équipes. Vous avez proposé à l'avenir de me tenir précisément informée en faisant un inventaire des changements importants envisagés concernant les familles et les résidents. Ceci est une obligation, vous ne pouvez pas décider, sans l'accord de votre directrice, des réorientations. Ces dernières relèvent en effet de la prérogative de la direction.

Je suis par conséquent conduite à vous signifier une sanction disciplinaire, à savoir un avertissement. »

[D] [P] soutient que ces faits sont prescrits, puisque l'avertissement a été décerné le 8 avril 2013, alors que la décision litigieuse a été prise le 31 janvier 2013, soit antérieurement au délai de deux mois prévu par l'article L 13 32 ' 4 du code du travail, et que le compte rendu de cette réunion, qui a eu lieu en réalité le 15 janvier (et non le 31) a été adressé à l'employeur par courrier électronique du 23 janvier 2013.

Cependant, le courriel du 23 janvier 2013 se contente d'annoncer la transmission des comptes-rendus de réunion, le compte-rendu lui-même indiquant, concernant [S] [C], « Compte tenu de l'évolution de [S], il semble intéressant de demander l'orientation en FAM », sans qu'aucune décision ne soit manifestement prise le concernant, et sans qu'il soit possible par conséquent d'annoncer cette décision à la famille du résident.

Les faits n'apparaissent donc pas prescrits, l'employeur en ayant été informé le 18 mars 2013.

Sur le fond de l'avertissement, il ne ressort pas de la fiche de fonction communiquée par la salariée elle-même qu'elle avait pouvoir de décider de la réorientation, et d'en informer la famille, ce qu'elle a manifestement fait en outrepassant ses fonctions.

L'avertissement apparaît par conséquent justifié, et [D] [P] sera déboutée de sa demande en prononcé d'annulation de la sanction.

Sur la demande en paiement d'heures supplémentaires

En droit, l'article L3171-4 du Code du travail dispose qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, le juge formant sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge tous éléments de nature à étayer sa demande, ces éléments devant être suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en apportant, le cas échéant, la preuve contraire.

En l'espèce, [D] [P] produit à l'appui de sa demande plusieurs attestations établissant qu'elle était présente le matin à compter de 8h30 et de quitter l'établissement entre 19 heures et 20 heures. Les décomptes produits par la salariée tiennent compte des jours de réduction du temps de travail, et d'un horaire habituel de 39 heures.

Les attestations produites par la salariée indiquent ainsi : « j'ai pu constater que [D] [P] était présente sur l'établissement de 8h30 jusqu'à 19 heures, parfois même après 20 heures. Elle a toujours été disponible pour nous et les résidents et cela quelle que soit l'heure » (attestation [U])' « [D] [P] était toujours présente de 8h30 le matin et restait sur site jusqu'à son départ. Départ que l'on pouvait constater au moment du repas du soir entre 19 heures et 20 heures » (attestation Castelle)' « [D] [P] était très présente au sein de l'établissement. Dès 8h30 nous pouvions la rencontrer et ce jusqu'à son départ qui avait lieu régulièrement moment du repas du soir, à savoir après 19 heures » (attestation [E])' « [D] [P] était présente tous les matins entre 8h20 - 8h30. Elle est également présente très souvent au-delà de 19 heures et il m'est arrivé, en quittant mon service à 19h30, de la voir dans l'établissement (attestation [H])' « J'atteste par la présent avoir régulièrement vu [D] [P] sur l'établissement, plus tard que ses horaires planifiés, notamment les soirs aux horaires des repas, entre 19h30 et 20h30, et les matins vers 8 heures » (attestation [N]).

En l'état de ces attestations régulières, parfaitement claires et précises, l'employeur n'est pas fondé à soutenir comme il le fait que la salariée n'apporte pas des éléments de nature à étayer sa demande, peu important qu'un décompte précis n'ait pas été établi par la salariée jour après jour, puisque ses horaires étaient manifestement identiques, tout au long de sa période de travail.

Il convient seulement de déduire la somme de 1000 € déjà versée par l'employeur en novembre 2012, qui n'apparaît pas, en dépit de ce qu'indique la salariée, comme ayant été déduite des sommes réclamées .

Au regard des dispositions sur la durée du temps de travail et les heures supplémentaires, compte tenu du taux horaire de la rémunération de [D] [P], des bulletins de salaire produits aux débats et du nombre d 'heures effectuées par [D] [P], la cour dispose d'éléments suffisants pour condamner à ce titre l'association ADAPEI du Var Méditerranée à verser à [D] [P] la somme de 11'702,49 euros au titre du paiement des heures supplémentaires., outre la somme de 1170,24 euros à titre de congés payés sur heures supplémentaires.

Sur la demande en remise de documents

Il convient de condamner l'employeur à délivrer à [D] [P] les bulletins de paie et une attestation Pôle emploi , rectifiés conformément aux énonciations du présent arrêt, sous astreinte de 70 euros par jour de retard à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les autres demandes

L'équité en la cause commande de condamner l'employeur à payer à la salariée la somme de 1500 euros sur la base de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale,

Réforme le jugement déféré et, statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension,

Prononce la résiliation judiciaire, au 7 juin 2013, du contrat de travail conclu entre l'association ADAPEI du Var Méditerranée, employeur, et [D] [P], salariée,

Condamne l'association ADAPEI du Var Méditerranée à verser à [D] [P] les sommes de :

-38'000 euros représentant les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-25'602 euros à titre d'indemnité de préavis,

-2560,20 euros à titre de rappel de congés payés sur préavis,

- 27'928,95 euros à titre d'indemnité de licenciement,

-11'702,49 euros à titre d'heures supplémentaires,

-1170,24 euros au titre des congés payés sur heures supplémentaires,

-779,16 euros au titre des astreintes non payées,

Condamne l'employeur à délivrer à [D] [P] les bulletins de paie et l'attestation Pôle emploi, rectifiés conformément aux énonciations du présent arrêt, sous astreinte de 70 euros par jour de retard à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt,

Condamne l'employeur à payer à la salariée la somme de 1500 euros sur la base de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes,

Condamne l'association ADAPEI du Var Méditerranée aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 14/18365
Date de la décision : 01/07/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°14/18365 : Constate ou prononce le désistement d'instance et/ou d'action


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-07-01;14.18365 ?
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