COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
9e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 03 JUIN 2016
N° 2016/349
Rôle N° 14/11664
[I] [S]
C/
Sas VERDUN AIX RENAULT
Grosse délivrée
le :
à :
Me Antoine DONSIMONI, avocat au barreau de MARSEILLE
Me Nicolas DRUJON D'ASTROS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section E - en date du 13 Mai 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 11/1252.
APPELANT
Monsieur [I] [S], demeurant [Adresse 1]
comparant en personne, assisté de Me Antoine DONSIMONI, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
Sas VERDUN AIX RENAULT, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Nicolas DRUJON D'ASTROS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 27 Avril 2016 en audience publique devant la Cour composée de :
Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre
Madame Sylvie ARMANDET, Conseiller
Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2016, prorogé au 03 Juin 2016.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Juin 2016.
Signé par Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 11 mai 1992, M. [I] [S] a été engagé par la société S.E.P.A.L qui exploitait une concession Renault à [Localité 1], en qualité de vendeur automobile. En février 1999, à la suite d'une reprise d'activités, le contrat de travail a été repris par la SAS VERDUN AIX, laquelle exploite également une concession Renault et une concession Dacia à [Localité 2]. À compter de septembre 2001, le salarié a été promu chef des ventes véhicules neufs. En 2010, il a été affecté à la concession Renault d'[Localité 2]. Dans le dernier état de la relation contractuelle, il percevait un salaire mensuel de 6.155 €, composé d'un salaire fixe de 1.560 €, d'une prime d'activité de 4.540 € et d'un avantage véhicule de 54,99 €, pour 168,28 heures de travail. Les relations des parties étaient régies par la convention collective du commerce et de la réparation automobile.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 21 février 2011, le salarié a réclamé le paiement de la somme de 1.379,75 € au titre des frais professionnels non remboursés. Par lettre du 15 juin 2011, il a informé son employeur que M. [W], son responsable hiérarchique direct, interférait dans son travail et n'avait de cesse de l'inviter à chercher un autre employeur. L'employeur a répondu à ces courriers les 9 mars et 20 juillet 2011.
Le 7 juillet 2011, le salarié a été placé en arrêt de travail pour maladie. À sa reprise, le 28 août 2011, le salarié a été affecté sur l'établissement de [Localité 1] pour remplacer un vendeur. Le 19 octobre 2011, son contrat de travail a été suspendu pour maladie jusqu'au 15 décembre 2011.
Le 31 octobre 2011, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes d'[Localité 2], section encadrement, afin d'obtenir la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur.
Par courrier du 2 décembre 2011, le salarié a demandé à la CPAM de reconnaître le caractère professionnel de son arrêt maladie et a informé l'employeur de cette démarche par lettre du 5 décembre. Cette demande de prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels a fait l'objet d'un refus notifié le 7 juin 2012.
À l'issue des deux visites médicales de reprise en date des 16 décembre 2011 et 3 janvier 2012, le médecin du travail a déclaré le salarié inapte à tout poste dans l'entreprise Verdun Aix, tout en précisant qu'il serait apte à un poste de chef des ventes dans un autre organisation de travail.
Par courrier du 26 janvier 2012, l'employeur a proposé un poste de vendeur de véhicules d'occasion au salarié à [Localité 1], lequel l'a refusé le 1er février 2012.
Après convocation le 13 février 2012 à un entretien préalable fixé au 22 février, l'employeur a licencié le salarié par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er mars 2012, rédigée en ces termes : « Par un avis en date du 3 janvier 2012, vous avez été déclaré inapte à tout poste dans notre entreprise en vertu de l'article R.4624-31 du code du travail par le médecin du travail.
Cet avis d`inaptitude fait suite à une première visite de reprise en date du 16 décenibre 2011 par laquelle le médecin du travail avait également constaté votre inaptitude.
En l`état de ces avis, nous avons procédé à différentes recherches de reclassement au sein de notre entreprise, tous établissements confondus, ainsi qu'à l'extéríeur.
Nous avons mené ces recherches en échangeant avec le médecin du travail de sorte que nous avons pu vous proposer un poste de vendeur de véhicules d`occasion sur notre site de [Localité 1] après avis favorable du médecin du travail.
Vous avez refusé ce poste, estimant que celui-ci n'était pas conforme aux prescriptions de la médecine du travail par lettre en date du 1er février 2012.Nous vous avons alors confirmé que celui-ci avait reçu un avis favorable du médecin et avons réitéré notre proposition de poste à laquelle vous n'avez finalement pas répondu.
Les recherches que nous avons menées à l'extérieur de l'entreprise ne nous ont pas permis d'identifier un poste susceptible de vous être proposé.
Lors de l'entreticn que nous avions eu le 18 janvier 2012 en presence de M. [I], délégué du personnel, en vue de votre reclassement, vous n'aviez pas souhaité nous faire part de vos désirs. Nous avions notamment évoqué la possibilité de vous assister dans vos démarches pour devenir Agent Renault, si une telle opportunité se présentait. Vous nous aviez indiqué revenir vers nous. ll n'en a rien été.
Nous nous trouvons donc contraints de procéder à votre licenciement pour impossibilité de reclassement consécutivement à votre inaptitude constatée par le médecin du travail...».
Par jugement du 13 mai 2014, le conseil de prud'hommes d'[Localité 2] a :
-dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse ;
-constaté que l'employeur a respecté la procédure de licenciement ;
-dit que le harcèlement moral envers le salarié n'est pas caractérisé ;
-débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes ;
-condamné le salarié à verser à l'employeur la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
-condamné le salarié aux entiers dépens.
Le 4 juin 2014, le salarié a interjeté régulièrement appel de ce jugement.
Vu les écritures déposées par M. [I] [S], le 27 avril 2016, aux termes desquelles il demande à la cour de :
-infirmer en sa totalité le jugement déféré ;
-juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ou nul ;
en conséquence,
-condamner l'employeur à lui payer les sommes suivantes :
*150.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul;
*82.190,55 € à titre de rappel d'indemnité spéciale de licenciement ;
*121.338,76 € à titre de rappel d'heures supplémentaires ;
*12.133,87 € au titre des congés payés y afférents ;
*50.455 € à titre de rappel de repos compensateur ;
*5.045,50 € au titre des congés payés y afférents ;
*20.000 € à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;
*953,55 € à titre de rappel de frais professionnels ;
*2.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
-condamner l'employeur aux entiers dépens de l'instance.
Vu les écritures de la SAS VERDUN AIX déposées le 27 avril 2016, par lesquelles elle demande à la cour de :
-confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
-jugé que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
-jugé que les demandes de rappel d'heures supplémentaires n'étaient pas fondées ;
-jugé que le harcèlement moral n'est pas caractérisé ;
-jugé que les notes de frais dont le salarié demande paiement ne se rapportent pas à l'exécution de ses fonctions ;
en conséquence,
-débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
-réformer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné le salarié au paiement de la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
statuant à nouveau sur ce point,
-condamner le salarié au paiement de la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés par l'employeur en première instance et en appel.
Pour un plus ample exposé, la cour renvoie aux écritures ci-dessus visées et réitérées oralement à l'audience du 27 avril 2016.
SUR CE
Sur le rappel de remboursement de frais professionnels :
Par lettre du 21 février 2011, le salarié a réclamé à l'employeur la somme de 1.379,75 € au titre des frais exposés en septembre, octobre, novembre, décembre 2010 et janvier 2011.
Selon courrier du 9 mars 2011, l'employeur lui a rappelé que les frais pris en charge par la concession devaient correspondre à des dépenses nécessaires et indispensables au métier de chef de vente dans le cadre de l'accompagnement des vendeurs et des agents et que la concession prendra à sa charge les frais professionnels nécessaires à l'animation du secteur et ce, sous la responsabilité et la signature de M. [Q] [W], dans le cadre d'un plafond annuel de 2.500 € hors dépenses exceptionnelles.
Suivant courrier du 20 juillet 2011, l'employeur a fait savoir au conseil du salarié que M. [W] n'avait été destinataire d'aucune note de frais pour les mois et montants évoqués et qu'il procéderait au remboursement des frais exposés par le salarié dès présentation d'une note de frais et des justificatifs correspondants à M. [W] et lorsque celui-ci les aura validés.
Le salarié a fini par se conformer à la procédure applicable au sein de l'entreprise, puisque le 20 septembre 2011, l'employeur lui a adressé un chèque de 869,25 € correspondant aux frais exposés en septembre, octobre et novembre 2010, en lui indiquant qu'il n'était pas en possession de la demande de remboursement de frais pour décembre 2010 et janvier 2011.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 mars 2012, le salarié a réclamé à l'employeur la somme de 443,35 € au titre des frais exposés en décembre 2010 et janvier 2011.
Il demande aujourd'hui la somme de 953,55 € sans produire aucun décompte, ni aucun justificatif établissant que cette somme correspond à des frais se rapportant à l'exercice de ses fonctions, de sorte qu'il ne justifie pas du bien fondé de sa demande.
La décision déférée qui l'a débouté de ce chef de demande doit être confirmée.
Sur le rappel de salaire au titre des heures supplémentaires :
En droit, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, la preuve des heures de travail n'incombe spécialement à aucune des parties. Il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.
En l'espèce, le salarié soutient qu'il effectuait 10 heures supplémentaires par semaine, de sorte qu'il sollicite le paiement de la somme de 121.338,76 € correspondant à ce rappel d'heures supplémentaires sur 5 ans.
Pour étayer sa demande, le salairé verse au débat les éléments suivants :
-une trentaine de courriels qu'il a adressés ou reçus à des horaires inhabituels, soit entre midi et deux, soit après 19 heures, le plus tard étant à 19h31 ;
-7 bons de commande qu'il a traitée en dehors des horaires habituels (13h22, 19h11, 12h06, 18h25, 7h59, 18h45, 18h44) ;
-une vingtaine d'attestation de clients desquelles il ressort que le salarié a accepté de les recevoir entre midi et 14 heures ou s'est rendu à leur domicile après 19 heures ou 20 heures ;
-8 attestations de collègues, dont la plupart ont travaillé avec lui au sein de l'établissement de [Localité 1], vantant les qualités professionnelles du salarié et sa disponibilité et précisant qu'il restait souvent dans l'entreprise entre midi et deux ou après la fermeture.
Cependant, en l'absence d'un décompte détaillé des heures effectuées, ces éléments ne permettent pas de constater que les jours où de telles démarches ont été accomplies, en dehors des horaires habituels, les heures éffectivement réalisées ont amené le salarié à dépasser sur la semaine la durée légale du travail.
Et ce, dautant plus que le salarié ne conteste pas qu'il était libre de ses horaires et qu'il réalisait lui-même son planning, en adéquation avec les horaires d'ouverture de la concession, à savoir de 8 heures à 12 heures et de 14 heures à 19 heures.
En outre, il était rémunéré sur la base de 168,28 heures, de sorte que sa rémunération forfaitaire incluait le paiement de 16,61 heures supplémentaires par mois.
De surcroît, l'employeur établit par les attestations qu'il produit que l'implication du salarié au sein de l'agence d'[Localité 2], n'était pas celle qu'il a pu avoir lorsqu'il était à [Localité 1]. Cest ainsi que :
-M. [G], vendeur automobile, indique qu'il n'est jamais sorti sur le secteur avec le salarié, qu'ils n'ont jamais prospecté les entreprises ensemble et qu'à chaque fois qu'il avait besoin d'aide sur son travail, il devait appeler M. [W].
-M. [Y], vendeur automobile, déplore également un manque de présence du salarié trop récurrent et un accompagnement terrain pratiquement inexistant, la seule vérification journalière qu'il faisait était de regarder la moyenne des contacts par jour, sans se préocuper de son contenu.
-M. [H], conseiller des ventes secteur, relate : «M. [I] [S] ne m'a accompagné que quelquefois sur le terrain (2 ou 3 fois), sûrement parce que je n'avais pas besoin de ses prestations. J'avais, par contre, la nécessité (étant sur le secteur) d'une personne présente et surtout responsable dans certaines situations et c'est toujours (et uniquement) M. [W] que je retrouvais'»
-M. [M], gérant de la société SNA Renault, atteste que le salarié ne lui a donné aucune satisfaction concernant les ventes de véhicules neufs, ce qui a pénalisé son objectif ; qu'il ne venait pratiquement pas et que souvent, il fallait s'adresser à ses collaborateurs pour avoir des renseignements sur les stocks ou les tarifs en vigueur.
-Mme [K], agent Renault à [Localité 3], expose avoir eu l'occasion de rencontrer le salarié en 2010/2011 à deux reprises pour une visite de courtoisie, puis une autre fois lors d'un transfert de véhicules entre garage avec le vendeur de secteur et lors d'une exposition de véhicules utilitaires, mais qu'elle n'a jamais bénéficié d'aucune présentation de nouveaux véhicules, financement ou autre animation à son grand regret.
-Mme [J] gérante du garage Renault Eguilles indique que depuis 2010, elle a eu la visite du salarié dans ses locaux 4 ou 5 fois.
Enfin, l'examen des bons de commande et factures qu'il produit revèle que la plupart des ventes a été assurée non pas par le salarié, mais par d'autres vendeurs.
Force est de constater que le salarié n'apporte pas pour chacune des semaines au cours desquelles il prétend avoir effectué des heures supplémentaires, des éléments précis étayant le fait qu'il aurait dépassé la durée contractuelle du travail, de sorte que l'employeur n'est pas en mesure d'apporter des éléments contraires. Par conséquent, il y a lieu de confirmer la décision déférée qui a débouté le salarié de ce chef de demandes et de le débouter de ses demandes subséquentes au titre du repos compensateur.
Sur la nullité du licenciement :
Faisant valoir que son inaptitude résulte du harcèlement moral qu'il a subi au sein de l'entreprise, le salarié considère que son licenciement est nul. Il estime également que le licenciement est nul parce que l'employeur n'a pasrespecté la procédure applicable lorsque l'arrêt du travail a pour origine une maladie ou un accident professionnel.
Sur le harcèlement moral :
Selon l'article L. 1152-1 du code du travail «aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.»
La reconnaissance du harcèlement moral suppose trois conditions cumulatives : des agissements répétés ; une dégradation des conditions de travail ; une atteinte aux droits, à la dignité, à la santé physique ou mentale ou à l'avenir professionnel du salarié.
En application de l'article L.1154-1 du code du travail, il appartient au salarié qui prétend avoir été victime de harcèlement moral, d'établir des faits précis et concordants permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral et il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
En l'espèce, le salarié verse au dossier les éléments médicaux suivants :
-Le certificat d'arrêt de travail du 15 décembre 2011, rédigé par le Docteur [C], psychiatre, mentionnant un «état dépressif réactionnel à une situation de harcèlement professionnel allégué par le patient.» ;
-la copie d'une lettre en date du 8 décembre 2011 que le Docteur [C], a adressé au Docteur [O], médecin du travail, rédigée en ces termes : «Je suis M. [I] [S] depuis le 16/10/2011 pour un état dépressif réactionnel à un affrontement avec sa hiérarchie et un excès de travail évoluant depuis plus de 2 ans.
Il reçoit un traitement par CITALOPRAM x 2, SERESTA x 2 et IMOVANE.
Son état clinique est intimement lié à sa situation professionnelle. Toute reprise dans son poste est susceptible de provoquer une aggravation.
Je pense que ce patient relève d'une mise en inaptitude pour raison de santé urgente et majeure (article R 4624-31 du code du travail) si vous en êtes d'accord.'»
-la réponse du médecin du travail en date du 16 décembre 2011 au terme de laquelle il lui a indiqué avoir dressé une conclusion professionnelle d'inaptitude, mais qu'elle serait réalisée en deux étapes, car il devait effectuer une étude de poste sur le poste de chef des ventes pour valider l'inaptitude ;
-la fiche d'aptitude établie par le médecin du travail le 16 décembre 2011 déclarant le salarié «inapte à tout postes de travail dans l'entreprise SARL Verdun Aix en vertu de l'article R 4624-31 du code du travail ['] apte à un poste de chef des ventes dans une autre organisation de travail.»
-la fiche médicale rédigée à l'issue de la deuxième visite de reprise le 3 janvier 2012 déclarant le salarié apte à un poste de chef des ventes dans une autre organisation de travail.
Il indique ensuite que les faits de harcèlement moral se manifestaient de la manière suivante:
-La mise à sa disposition d'un véhicule de fonction indigne de son statut de chef des ventes : Par courrier du 12 mars 2012, le salarié s'est plaint auprès de son employeur du fait que depuis le 30 juin 2011, il utilisait un véhicule Renault Scénic d'occasion comme véhicule de service, que celui-ci nécessitait une révision dans 600 km et que les 2 pneus avant déjà très usagés étaient maintenant à la limite de la sécurité. Aucune réponse n'a été apportée à ce courrier.
-le non remboursement des frais professionnels : il a été vu ci-dessus que l'employeur à remboursé au salarié ses frais professionnels, lorsque celui-ci a remis une note de frais et les justificatifs correspondants à son supérieur hiérarchique, lequel l'a validé. En outre, le salarié a été débouté de sa demande tendant à obtenir un rappel de remboursement de frais. Enfin, il ne démontre pas que l'employeur a abusé de son pouvoir de direction en imposant que la procédure relative au remboursement des frais professionnels, applicable au sein de l'entreprise, soit respectée.
-La rétrogradation à son retour maladie au poste de simple vendeur : l'employeur ne conteste pas qu'il a demandé au salarié de remplacer un vendeur sur le site d'[Localité 2] à son retour maladie. Cependant, les bulletins de salaire révèlent que cette affectation temporaire n'a eu aucune incidence sur la rémunération du salarié et son emploi.
-l'immixtion de son supérieur hiérarchique dans sa relation avec les vendeurs qui étaient sous sa direction : Le salarié s'est plaint auprès de son employeur, par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 juin 2011, que son supérieur hiérarchique M. [W] interférait dans le service dont il a la charge, ce qui déstabilisait son équipe de ventes et que depuis plusieurs semaines, il lui répètait sans cesse qu'il devait saisir toutes les opportunités qui se présentaient afin de trouver un emploi dans une autre entreprise. Cependant, il ne produit aucun élément au soutien de ses allégations.
L'employeur les conteste et verse au débat les attestations de 3 vendeurs automobiles, M. [H], M.[Y] et M. [G] desquelles il ressort qu'ils ne trouvaient pas de soutien auprès du salarié, de sorte qu'ils devaient s'adresser à M. [W] lorsqu'ils avaient besoin d'aide et qu'en aucun cas, ce dernier n'interférait dans leurs relations avec le salarié.
Le fait que M. [W] ait été licencié le 28 décembre 2012 au motif qu'il avait ruiné la confiance de son employeur est sans incidence sur le présent litige, dès lors qu'il ressort de l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 30 janvier 2014, que le motif du licenciement n'avait rien à voir avec des faits de harcèlement moral.
Force est de constater que le salarié n'établit pas l'existence de faits précis et concordants permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral.
Sur la consultation irrégulière des délégués du personnel :
Le salarié ne démontre pas que son inaptitude avait une origine professionnelle. Dès lors, l'employeur n'avait pas à mettre en 'uvre la procédure spécifique prévue pour les salariés déclarés inapte à la suite d'une maladie d'origine professionnelle ou d'un accident professionnel.
Si l'employeur a pris le soin de consulter les délégués du personnel le 12 janvier 2012, c'est parce que le salarié l'avait informé, le 5 décembre 2011, qu'il avait saisi la CPAM aux fins de voir reconnaître le caractère professionnel de son arrêt maladie du 5 juillet 2011. Or, cette demande de prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels a fait l'objet d'un refus notifié le 7 juin 2012.
Par conséquent, le salarié ne saurait se prévaloir d'irrégularités affectant la consultation pour obtenir l'annulation de son licenciement.
La décision déférée qui a débouté le salarié de sa demande tendant à obtenir la nullité du licenciement doit être confirmée.
Sur les recherches de reclassement :
Lorsque le salarié est déclaré inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise ou le groupe dont il fait partie, un autre emploi approprié à ses capacités, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail.
S'agissant d'une obligation de moyen renforcée, l'employeur doit apporter la preuve qu'il s'est trouvé réellement dans l'impossibilité de reclasser le salarié à un poste conforme aux préconisations de la médecine du travail, et ce même après avoir pris toutes les dispositions pertinentes pour tenter de remplir son obligation.
En l'espèce, à l'issue de la deuxième visite médicale de reprise en date du 3 janvier 2012, le médecin du travail a déclaré le salarié inapte à tout poste dans l'entreprise Verdun Aix, tout en précisant qu'il serait apte à un poste de chef des ventes dans un autre organisation de travail.
Par lettre du 11 janvier 2012, l'employeur a informé le médecin du travail qu'il disposait de deux établissements secondaires, une concession Renault à [Localité 1] et une concession Dacia à [Localité 2] et lui a demandé de lui préciser les éventuelles modifications pouvant être mises en 'uvre pour maintenir l'emploi du salarié dans l'entreprise.
Le médecin de travail lui a répondu le 20 janvier 2012 que le poste de chef des ventes dans les deux établissements secondaires pouvait être compatible avec l'état de santé du salarié.
Le 26 janvier 2012, l'employeur a proposé au salarié un poste de vendeur de véhicules d'occasion sur le site de [Localité 1]. Le lendemain, il a indiqué au médecin du travail qu'aucun poste de chef des ventes n'était disponible sur les sites de [Localité 1] ou d'[Localité 2] et lui a demandé si le salarié serait apte au poste de vendeur de véhicules d'occasion sur le site de [Localité 1], ce à quoi le médecin du travail a répondu que ce poste pouvait être compatible avec l'état de santé du salarié.
Le 1er février 2012, le salarié a refusé cette proposition au motif qu'elle n'était pas conforme aux prescriptions de la médecine du travail. Par lettres des 2 et 3 février 2012, l'employeur l'a informé que la proposition de poste de vendeur de véhicules d'occasion sur le site de [Localité 1] avait reçu un avis favorable du médecin du travail. Le salarié a maintenu son refus.
Pour autant, l'employeur ne démontre pas avoir satisfait à son obligation de recherche de reclassement.
En effet, le poste proposé au salarié à savoir un poste de vendeur de véhicules d'occasion à [Localité 1], représentait une rétrogradation pour lui, dans la mesure où il occupait un poste de chef des ventes.
Or, faute de produire les registres du personnel de la concession Dacia située à [Localité 2] et de la concession Renault implantée à [Localité 1], l'employeur ne rapporte pas la preuve qu'aucun poste de chef des ventes n'était vacant au sein de ces établissements et qu'il a donc satisfait à son obligation de recherche loyale et sérieuse de reclassement du salarié inapte.
Le licenciement doit être en conséquence déclaré sans cause réelle et sérieuse et le jugement déféré réformé.
Conformément à l'analyse des premiers juges, l'ancienneté du salarié à prendre en considération doit être calculée à partir du 11 mai 1992, date de conclusion du contrat à durée indéterminé avec la société SEPAL. Certes, le salarié avait été engagé par cette dernière société le 25 février 1980. Cependant, les relations contractuelles ont pris fin, puisqu'un nouveau contrat a été conclu entre les parties le 11 mai 1992, le contrat de travail et les bulletins de salaire mentionnant une date d'entrée au 11 mai 1992.
Tenant l'âge du salarié au moment de la rupture du contrat (55 ans), de son ancienneté (20 ans) de son salaire moyen mensuel brut (6.155 €) et compte tenu du fait que la société de mécanique générale qu'il a créé après son licenciement a périclité, il y a lieu de lui allouer la somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur les autres demandes :
La décision déférée qui a condamné le salarié à payer à l'employeur la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance doit être réformée.
Il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer au salarié à ce titre la somme de 2.000 €.
L'employeur qui succombe doit être tenu aux dépens de première instance et d'appel.
S'agissant d'un salarié de plus de deux ans d'ancienneté et d'une entreprise de plus de onze salariés, il y a lieu de faire application de l'article L 1235-4 du code du travail dans les conditions fixées au dispositif.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a jugé que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et condamné le salarié à régler à l'employeur la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance.
Statuant à nouveau sur les points réformés et y ajoutant,
Dit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Condamne la SAS VERDUN AIX à payer à M. [I] [S] les sommes suivantes :
-100.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
-2.000 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Rejette toute demande contaire ou plus ample des parties.
Ordonne le remboursement par la SAS VERDUN AIX aux organismes sociaux concernés des indemnités de chômage éventuellement payées à M. [I] [S] dans la limite de six mois.
Dit que conformément aux dispositions des articles L 1235-4 et R 1235-2 du code du travail, une copie du présent arrêt sera adressée par le greffe au Pôle Emploi du lieu où demeure le salarié.
Condamne la SAS VERDUN AIX aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT